N° 492

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 3 avril 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur la proposition de loi visant à concilier la continuité du service public de transports avec l'exercice du droit de grève,

Par M. Philippe TABAROT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot, président ; M. Didier Mandelli, premier vice-président ; Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Hervé Gillé, Rémy Pointereau, Mme Nadège Havet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Yves Roux, Cédric Chevalier, Ronan Dantec, vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Audrey Bélim, MM. Pascal Martin, Jean-Claude Anglars, secrétaires ; Mme Jocelyne Antoine, MM. Jean Bacci, Pierre Barros, Jean-Pierre Corbisez, Stéphane Demilly, Gilbert-Luc Devinaz, Franck Dhersin, Alain Duffourg, Sébastien Fagnen, Jacques Fernique, Fabien Genet, Éric Gold, Daniel Gueret, Mme Christine Herzog, MM. Joshua Hochart, Olivier Jacquin, Damien Michallet, Georges Naturel, Louis-Jean de Nicolaÿ, Saïd Omar Oili, Alexandre Ouizille, Clément Pernot, Mme Marie-Laure Phinera-Horth, M. Bernard Pillefer, Mme Kristina Pluchet, MM. Hervé Reynaud, Pierre Jean Rochette, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, MM. Philippe Tabarot, Simon Uzenat, Mme Sylvie Valente Le Hir, M. Michaël Weber.

Voir les numéros :

Sénat :

344 et 493 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, suivant les orientations du rapporteur Philippe Tabarot, a adopté le 3 avril 2024 la proposition de loi d'Hervé Marseille et plusieurs de ses collègues, visant à concilier la continuité du service public de transports avec l'exercice du droit de grève, sous le bénéfice de 10 amendements.

Ce texte propose de définir une période maximale de 60 jours par an au cours desquels l'exercice du droit de grève dans les services publics de transport pourrait être suspendu. Seraient ainsi sanctuarisées certaines périodes correspondant à de grands départs, pendant lesquelles les usagers auraient la garantie qu'une grève ne pourrait pas perturber le bon fonctionnement des services de transports publics.

Considérant que les grèves réalisées les jours d'afflux massifs de voyageurs portent une atteinte disproportionnée à la liberté d'aller et venir et à l'ordre public, la commission a approuvé l'article unique, sous le bénéfice de deux amendements tendant notamment à renforcer sa proportionnalité et, partant, sa constitutionnalité.

Au-delà de la définition d'un cadre applicable aux journées de grands départs, la commission a entendu garantir la continuité des services publics pour les mobilités du quotidien, en complétant le texte par quatre articles. Les usagers empruntant chaque jour les transports collectifs pour se rendre sur leur lieu de travail, et a fortiori ceux qui ne peuvent pas télétravailler, sont en effet ceux qui pâtissent le plus des conséquences des grèves.

Enfin, le droit de grève est un droit constitutionnel précieux. Telle est la raison pour laquelle la commission a estimé essentiel de lutter contre les détournements de son exercice, que sont notamment le recours abusif aux préavis « dormants » et les grèves de 59 minutes. Elle a enrichi le texte par deux articles afin d'encadrer ces pratiques.

I. SANCTUARISER LES JOURS D'AFFLUX MASSIFS DE VOYAGEURS PAR UNE SUSPENSION DU DROIT DE GRÈVE

A. SUSPENDRE L'EXERCICE DU DROIT DE GRÈVE SUR CERTAINES PÉRIODES DE GRANDS DÉPARTS : UN DISPOSITIF DÉJÀ EN PLACE EN ITALIE

L'article unique de la proposition de loi prévoit la possibilité de suspendre l'exercice du droit de grève des personnels et agents concourant directement au fonctionnement et à la gestion des services publics de transports terrestres et aériens réguliers de personnes, pour des périodes continues de 15 jours maximum, dans la limite de 60 jours par an.

Ces périodes seraient déterminées par décret, publié au moins 90 jours avant la première concernée, et après 30 jours de négociation préalable avec les organisations syndicales patronales et salariales représentatives au niveau national.

Le manquement au respect de ces règles serait puni d'une amende de 15 000 euros, d'un an d'emprisonnement et d'une peine complémentaire d'interdiction d'exercer une activité professionnelle en lien avec un service public durant 5 ans.

Le dispositif proposé trouve sa source dans le modèle italien en vigueur depuis plus de 30 ans. Dans des termes analogues à ceux du bloc de constitutionnalité français, l'article 40 de la Constitution italienne prévoit que : « Le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent ». Aussi, la loi italienne du 12 juin 1990 permet, pour certains services publics considérés comme essentiels -- et dont les transports publics font partie -- de prévoir l'abstention de grève des contingents de travailleurs strictement nécessaires à l'exécution des services. Ces périodes d'exemption, au cours desquelles aucune grève ne peut être déclenchée, sont définies par l'accord conclu dans le secteur des transports ferroviaires en 1999 (modifié en 2021) entre l'entreprise ferroviaire publique italienne et les syndicats de cheminots.

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