EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

Habilitation du Gouvernement à prendre une ordonnance pour l'intégration des personnels enseignants de Wallis et Futuna dans la fonction publique ainsi que la définition des modalités d'option entre le régime de retraite de la fonction publique et celui de la caisse des prestations sociales de Wallis et Futuna

Cet article vise à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de déterminer les modalités d'intégration des personnels enseignants de Wallis et Futuna dans la fonction publique ainsi que d'option pour les droits à la retraite entre leur maintien dans le régime actuel de la Caisse des prestations sociales de Wallis et Futuna ou leur intégration à celui de la fonction publique.

Sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté un amendement précisant que l'intégration dans la fonction publique concerne l'ensemble des enseignants de Wallis et Futuna, quel que soit leur niveau de diplôme.

I. - Le droit actuel

L'article 7 de la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 conférant aux îles Wallis et Futuna le statut de territoire d'outre-mer donne compétence exclusive à l'État en matière d'enseignement.

Toutefois, depuis 1969, l'État a concédé l'enseignement primaire à la Mission catholique, disposant historiquement d'un monopole pour le premier degré sur ce territoire. Il s'agit d'un régime spécifique, différent du contrat d'association issu de la loi Debré qui encadre sur le reste du territoire national les relations entre l'État et les établissements privés sous contrat.

La concession de l'enseignement primaire fait l'objet d'une convention régulièrement renouvelée - celle actuellement en vigueur a été signée le 5 juin 2020 pour 5 ans. Si l'article 16 de ce texte précise que « l'État prend en charge et assure la rémunération des maîtres d'école du premier degré », l'article 20 du même texte stipule que les maîtres d'école sont des agents de droit privé employés par la direction de l'enseignement catholique.

L'annexe II de la convention, relative à la gestion administrative et financière des maîtres d'école, fixe les modalités de rémunération ainsi que les droits à congés dont ils bénéficient. Elle prévoit une grille de rémunération ad hoc, inspirée des grilles indiciaires de la fonction publique avec des échelons, une classe normale et une hors classe, mais qui diffère tant par les modalités d'avancement que les indices attribués à chaque échelon. Jusqu'alors inexistante, une classe exceptionnelle a été créée en 2023 à la suite du dernier conflit social.

La grille des maîtres d'école de Wallis et Futuna prévoit - à échelon égal - des indices plus faibles que ceux de la grille nationale de professeur des écoles. Toutefois, le rapport commun d'inspections de mars 20242(*) note que cela est compensé par un avancement plus rapide. La « hors classe » est accessible à partir du 7ème échelon de la classe normale, alors que dans la grille des professeurs des écoles il est nécessaire d'avoir au moins deux années d'ancienneté dans le 9ème échelon de la classe normale pour être promouvable.

Cet avancement plus rapide, conjugué à une pyramide des âges des enseignants différente, conduit à une situation atypique par rapport à la moyenne nationale : alors que 70 % des professeurs des écoles à l'échelle nationale sont actuellement dans la classe normale de leur grille indiciaire et 30 % dans la hors classe ou la classe exceptionnelle, seuls 13 % des maîtres d'école wallisiens et futuniens sont dans la grille de la classe normale (46 % sont dans la grille hors classe et 41 % dans la grille classe exceptionnelle).

L'article 6 de l'annexe II prévoit pour sa part un coefficient de majoration de l'indice de 1,70, quand celui dont bénéficient les magistrats et les fonctionnaires de l'État en service à Wallis et Futuna s'élève à 2,05 en application du décret n° 67-600 du 23 juillet 1967. Ce coefficient ad hoc pour les maîtres d'école de ce territoire n'a été instauré qu'en 1994 à la suite d'un mouvement de grève. Il reste toutefois inférieur de 0,9 point à celui applicable aux fonctionnaires en poste à Wallis et Futuna. Son relèvement fait partie de revendications de la grève de 1999, puis de la grève de 2023.

Au-delà de ces revendications statutaires, les demandes des maîtres d'école portent également sur les primes et indemnités dont bénéficient leurs homologues sur le reste du territoire national. Ainsi l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves (ISAE), créée en 2013, n'était pas prévue par la précédente convention. À la suite d'un conflit social en 2019, les maîtres d'école la perçoivent désormais en application de l'article 19 de l'annexe II de l'actuelle convention.

Enfin, l'article 20 de la convention de concession précise que leur sont applicables « les dispositions de droit commun relevant du droit du travail en vigueur dans le Territoire des îles Wallis et Futuna, sous réserve des aménagements prévus à l'annexe II de la présente convention ». Il en résulte une situation moins favorable au regard de certains droits dont disposent les fonctionnaires et les salariés de métropole. À titre d'exemple, l'annexe II.2 relatif au droit à congés prévoit un congé de paternité de 11 jours ouvrables non fractionnable, inférieur aux 21 jours dont peuvent bénéficier les salariés et fonctionnaires depuis 2021. En effet, l'allongement du congé de paternité est postérieur à l'entrée en vigueur de la convention de concession.

Ces revendications d'égalité de traitement liée à la profession d'enseignant et la volonté initiale de passer sous statut d'agent contractuel de l'État sont à l'origine d'une grève qui a duré deux mois et demi en mai 2023 et s'est soldée par un protocole de fin de conflit de juillet 2023 entre l'État, l'enseignement catholique, l'assemblée territoriale et le syndicat FO enseignant3(*). Il prévoit notamment l'instruction par une mission conjointe de l'inspection générale de l'administration et de l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche des modalités d'évolutions possibles d'un passage des enseignants du premier degré vers le statut de contractuel de la fonction publique. Les conclusions de cette mission conjointe d'inspection préconisent une intégration des personnels enseignants dans un corps de fonctionnaires de l'État4(*).

II. - Le projet de loi

Le projet de loi habilite le Gouvernement par ordonnance à définir les modalités d'intégration des personnels enseignants de Wallis et Futuna dans les corps de la fonction publique ainsi que d'option pour les droits à la retraite entre leur maintien dans le régime actuel de la Caisse des prestations sociales de Wallis et Futuna ou leur intégration à celui de la fonction publique.

L'article L. 320-1 du code de la fonction publique pose le principe d'un recrutement des fonctionnaires par concours. L'article L. 326-1 du même code liste trois exceptions à ce principe : pour l'accès à des emplois réservés, lors de la constitution initiale d'un corps, cadre ou emploi, ou pour l'accès à la catégorie C, lorsque le grade de début est doté de l'échelle de rémunération la moins élevée de la fonction publique, le cas échéant, selon des conditions d'aptitude prévues par les statuts particuliers.

Il ressort du projet d'ordonnance et des auditions la volonté du Gouvernement d'intégrer les maîtres d'école de Wallis et Futuna dans le corps des professeurs des écoles. Un décret en Conseil d'État doit préciser les modalités de reclassement dans ce corps ainsi que la prise en compte des services antérieurs à cette intégration. Outre les conditions prévues à l'article L. 321-1 du code de la fonction publique5(*), le projet d'ordonnance pose une condition supplémentaire d'intégration dans la fonction publique : être titulaire du baccalauréat ou de tout autre titre ou diplôme classé au moins au niveau 4 du répertoire national de certifications professionnelles (brevet de technicien ou brevet professionnel notamment).

En ce qui concerne le régime de retraite, le projet d'ordonnance prévoit un délai de six mois à compter de leur intégration dans le corps des professeurs des écoles pour que les enseignants de Wallis et Futuna choisissent de rester affiliés pour la retraite à la caisse des prestations sociales des îles de Wallis et Futuna. En cas de renoncement à ce droit ou à défaut d'option, ils seront affiliés au régime spécial de retraite des fonctionnaires de l'État.

Pour les enseignants qui seront affiliés à la caisse de retraite de la fonction publique, les services effectués antérieurement à cette affiliation seront pris en compte selon les règles applicables dans le régime de la caisse de prestations sociales des îles de Wallis et Futuna au 1er juillet 2025.

Le régime de retraite de Wallis et Futuna prévoit une durée minimale de cotisation de 15 ans pour pouvoir y liquider ses droits lorsque l'âge de la retraite qu'il fixe est atteint. Pour les enseignants faisant le choix d'être affiliés au régime spécifique de retraite des fonctionnaires de l'État et qui n'auraient pas cette durée minimale de cotisation, le projet d'ordonnance prévoit, à leur choix, soit le remboursement des cotisations versées à la caisse de prestations sociales des îles de Wallis et Futuna, soit la possibilité de racheter les périodes manquantes pour atteindre le seuil des 15 années de cotisation.

III. - La position de la commission

La commission juge la fin de ce régime d'exception et le transfert des personnels enseignants à l'État bienvenus. Elle permettra également de mettre fin à une situation juridique complexe, voire floue, s'agissant tant du droit applicable que du rôle de chacun.

Une situation juridique complexe

La rapporteure souligne la difficulté à identifier l'employeur actuel des enseignants :

- L'État assure le recrutement des élèves maîtres du premier degré, employés par la direction de l'enseignement catholique, par un concours organisé par le vice-rectorat  (art. 4 de l'annexe II de la convention) ;

- Chaque maître du premier degré signe avec l'administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna un contrat d'agrément sur proposition conjointe du vice-recteur et du directeur de l'enseignement catholique (art. 3 de l'annexe II de la convention) ;

- Le maître du premier degré est ensuite mis à disposition de la direction de l'enseignement catholique ;

- La promotion d'échelon est prononcée par l'administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna sur proposition du vice-recteur, après avis du directeur de l'enseignement catholique et de la commission consultative mixte territoriale (art. 5 de l'annexe II de la convention) ;

- L'article 20 de la convention de concession précise que les maîtres d'école sont des agents de droit privé ;

- Dans le cadre d'un conflit juridique opposant un personnel enseignant mis à disposition de la DEC et celle-ci de septembre 2022, la direction de l'enseignement catholique a argumenté dans son mémoire de défense l'absence de relation de travail entre elle et le personnel enseignant en raison de l'absence de contrat de travail liant cette personne à la DEC ainsi que de liens de subordination.

Par ailleurs, le rapport de la mission commune d'inspections souligne les flous juridiques sur le droit applicable aux maîtres des écoles de Wallis et Futuna. Ce manque de clarté a participé aux revendications salariales depuis trois décennies : « En posant le principe que les dispositions du Code du travail s'appliquent sous réserve des aménagements prévus par l'annexe II de la convention, l'article 20 précité semble conférer à la convention la force d'une convention collective, dont les dispositions se substituent à celle du droit du travail local, dès lors qu'elles sont plus favorables aux salariés. Toutefois, n'étant pas signée par les organisations syndicales représentatives, la convention de concession ne peut être assimilée à une telle convention collective. Le statut de son annexe II demeure ainsi ambigu au regard des dispositions du droit du travail local. De fait, les acteurs locaux s'interrogent régulièrement sur la façon dont les droits issus du Code du travail s'articulent avec les dispositions de l'annexe II »6(*).

La rapporteure a constaté lors de ses auditions que ce projet de réforme fait consensus parmi l'ensemble des acteurs locaux.

Tout d'abord, les maîtres d'école souhaitent être rattachés à la fonction publique et bénéficier du même statut que l'ensemble de leurs collègues enseignants.

En ce qui concerne le vice-rectorat, celui-ci souhaite renforcer le pilotage académique et reprendre en main la formation continue aujourd'hui dévolue à la direction de l'enseignement catholique. Les résultats des évaluations des élèves y sont en effet plus faibles que la moyenne nationale. Certes, l'indicateur relatif à la proportion d'élèves arrivant en 6ème avec un an de retard - qui traduit habituellement un redoublement au primaire - est peu pertinent au regard des exigences posées par la direction de l'enseignement catholique conduisant à une entrée en maternelle retardée pour de nombreux élèves7(*). Il n'en reste pas moins que les évaluations d'entrée en 6ème montrent un niveau en français et en mathématiques à Wallis et Futuna inférieur à la moyenne nationale et, plus particulièrement, à celle des élèves de Polynésie française et de Nouvelle-Calédonie.

Le rapport de la mission conjointe d'inspections, lancée à la suite du protocole de fin de conflit à l'automne 2023, souligne d'ailleurs «l'insuffisante actualisation des pratiques pédagogiques », « le manque de qualité apparai[ssant] très fortement lié à un défaut structurel de pilotage de la fonction pédagogique » et constate que « le manque de pilotage pédagogique s'est accru durant la crise sanitaire et est devenu aigu depuis la grève de 2023 ».

La direction de l'enseignement catholique a mis en avant lors de son audition les difficultés de dialogue avec les enseignants, ainsi que les problèmes de pilotage. Alors que la convention de concession prévoit l'élaboration par chaque école d'un projet d'école, huit des dix écoles ne les lui ont toujours pas transmis, malgré des demandes répétées depuis 2022. Si M. Eméni Simete, directeur de l'enseignement catholique, a indiqué se réjouir que les négociations sur ce projet de transfert aient abouti « pour que l'école de demain soit meilleure que l'école d'aujourd'hui », il a toutefois exprimé un point de vigilance afin d'éviter tout passage brutal de 150 années d'école catholique à une école laïque et espère que « cette transition se fera de la manière la plus douce possible ». La rapporteure pour sa part rappelle son attachement aux principes de l'école de la République, ainsi qu'aux droits et devoirs des personnes qui y travaillent.

Enfin, les parents d'élèves sont également favorables à ce projet afin de mettre fin à un conflit social qui dure depuis trois décennies et qui a perturbé à plusieurs reprises le fonctionnement de l'école.

La commission a néanmoins plusieurs remarques :

· L'exclusion par l'ordonnance des maîtres des écoles actuellement en poste et non titulaire du baccalauréat

Le projet d'ordonnance prévoit l'intégration dans la fonction publique des seuls maîtres des écoles disposant du baccalauréat, d'un diplôme ou titre de niveau 4 ou supérieur. Or, il ressort des auditions que dix maîtres des écoles actuellement en poste n'ont pas le baccalauréat - ce qui ne les empêche pas d'être en poste depuis plusieurs années.

La commission estime inacceptable que dix enseignants soient exclus de l'intégration dans la fonction publique, alors même que cette situation est connue depuis longtemps par l'éducation nationale et acceptée par celle-ci. De plus, comme cela a été indiqué dans les auditions par le syndicat Force ouvrière enseignant de Wallis et Futuna, mais aussi par les inspecteurs auteurs du rapport de la mission commune d'inspections, cette exclusion serait perçue comme un déclassement pour les dix enseignants concernés.

Par ailleurs, elle note que le niveau de diplômes requis pour l'intégration des maîtres d'école de Wallis et Futuna dans le corps des professeurs des écoles est déjà dérogatoire à celui actuellement demandé. En effet, jusqu'à la session 2026, il est exigé un niveau master pour pouvoir se présenter au concours de professeur des écoles - et après cette date, un diplôme de licence sera demandé8(*).

Aussi, sur proposition de la rapporteure, la commission a adopté un amendement COM-2 venant préciser l'autorisation donnée au gouvernement de légiférer par voie d'ordonnance, afin que tous les enseignants, quel que soit leur niveau de diplôme, soient intégrés dans un corps de fonctionnaire. Elle souligne que ni le rapport de la mission commune d'inspection dont est issu ce texte, ni l'exposé des motifs, ni l'étude d'impact n'indiquent une volonté de créer une différence de statut entre les maîtres d'école en fonction de leur diplôme.

Il appartiendra, le cas échéant, au gouvernement de fixer dans l'ordonnance des modalités particulières pour les intégrer par exemple au moyen de la validation d'acquis de l'expérience.

· Les conditions de reclassement

Le projet d'ordonnance renvoie à un décret en Conseil d'État les modalités de reclassement des maîtres d'école de Wallis et Futuna dans le corps de professeur des écoles pouvant conduire à une nomination dans un grade d'avancement.

Selon les informations transmises à la rapporteure, ce reclassement se fera en prenant comme point de référence le salaire : les maîtres des écoles seront reclassés dans l'échelon correspondant à leur salaire, le cas échéant corrigé de l'échelon supérieur le plus proche. À cela s'ajoutent la mise en place du coefficient de 2,05 ainsi que l'ensemble des primes et indemnités perçues par les fonctionnaires (prime d'attractivité, supplément de traitement familial notamment).

Selon les calculs effectués par la mission complémentaire de l'inspection générale de l'administration de juin 2024, le coût pour l'État de cette intégration oscillera entre 1,1 million d'euros si l'ensemble des personnels opte en faveur du maintien dans le régime de la caisse de prestation sociale de Wallis-et-Futuna et 2,6 millions d'euros si aucun d'entre eux ne font le choix d'opter pour un tel maintien et souhaitent être rattachés au régime spécial de la fonction publique9(*).

La commission est favorable à ce reclassement prenant en compte le salaire plutôt que l'échelon, afin de ne pas créer d'écarts significatifs, qui ne seraient pas justifiés par le coût de la vie locale, avec les autres territoires français de la zone pacifique, susceptibles de susciter des revendications salariales.

· La nécessité de mettre en place une circonscription de l'éducation nationale

Interrogée par la rapporteure, la direction des ressources humaines de l'éducation nationale a indiqué que les arbitrages politiques n'avaient pas encore été rendus sur la nécessité de créer une circonscription de l'éducation nationale à Wallis et Futuna.

Pour la rapporteure, il est essentiel qu'au moins une circonscription d'inspection de l'éducation nationale y soit créée pour plusieurs raisons.

L'un des objectifs de ce projet de loi est de renforcer le pilotage pédagogique qui est aujourd'hui défaillant.

Par ailleurs, le reclassement des maîtres d'école en prenant comme référence leur salaire va conduire à un écrasement des grilles pour les maîtres d'école ayant moins de 14 ans d'ancienneté qui seront reclassés dans les deux premiers échelons de la classe normale (équivalent à l'échelon enseignant stagiaire et première année de titularisation). 28 enseignants sont concernés, dont 15 ayant plus de dix ans d'ancienneté. Il est nécessaire pour ceux-ci de les accompagner en prévoyant des rendez-vous de carrière réguliers.

La rapporteure souligne que cette mesure serait neutre budgétairement : il existe déjà des équipes d'inspection et de conseillers pédagogiques. Il s'agirait de créer une ossature administrative dans laquelle s'insèrerait ce personnel. Cette organisation administrative participerait à la normalisation de l'organisation du système éducatif à Wallis et Futuna.

· La nécessité à moyen terme d'une application du droit commun du code de la fonction publique aux personnels non enseignants du premier et du second degré de Wallis et Futuna

La fin du régime de concession pose également la question du statut des personnels non enseignants. En effet, à la différence de la métropole où le bâti scolaire et les personnels non enseignants relèvent des collectivités territoriales, le statut des îles de Wallis et Futuna prévoit la compétence exclusive de l'État en la matière. 49 agents du premier degré sont concernés, auxquels s'ajoutent les 72 agents non enseignants du second degré déjà gérés par le vice-rectorat.

Le projet de loi se restreint toutefois aux seuls personnels enseignants. La commission regrette ce choix fait par le Gouvernement. Cependant, la commission n'a pas pu élargir la portée de l'habilitation législative cette prérogative appartenant au Gouvernement en application de l'article 38 de la Constitution. Tout amendement à cet effet serait irrecevable.  Par ailleurs, l'article 45 de la Constitution ne lui permet pas non plus d'élargir le périmètre de ce texte, même en rédigeant directement les dispositions législatives.

La commission appelle donc l'État à procéder rapidement à l'intégration de ces personnels dans la fonction publique lorsque leurs fonctions correspondent à celles d'un corps de la fonction publique de l'État et, de manière générale, à assurer l'application du droit commun du code de la fonction publique, sous réserve des adaptations strictement nécessaires à la prise en compte des spécificités à Wallis et Futuna.

En effet, ces agents non enseignants du premier degré - tout comme le sont déjà leurs homologues du second degré - ne seront pas soumis au régime de droit commun de contractuel de droit public, mais à celui dit de « l'arrêté 76 » - l'arrêté n° 76 du 23 septembre 1976 portant statut des agents permanents de l'administration du territoire de Wallis et Futuna. Il s'agit d'un statut ad hoc qualifié par le rapport d'inspection d'obsolète. Selon les informations transmises à la rapporteure, les droits en matière de congés et d'autorisations d'absence accordés aux agents régis par l'arrêté 76 sont inférieurs à ceux des contractuels de l'État. Toutefois, comme l'indique le vice-rectorat, « des mesures dites de bienveillance sont parfois accordées ».

La majoration du traitement appliquée aux agents de l'arrêté 76 est de 1,5 depuis janvier 2023 contre 2,05 pour les contractuels de l'État. Quant aux grilles indiciaires, elles n'ont pas été revalorisées depuis janvier 2016 et novembre 2017.

Enfin, la commission souligne que les personnels non enseignants seront les derniers agents à être soumis à l'arrêté 76, statut en voie d'extinction. En 2022 a été créé un nouveau statut pour les agents publics territoriaux10(*). Il convient de noter que les contractuels des autres administrations sont bien des agents publics de l'État.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 2

Délai de dépôt du projet de loi de ratification de l'ordonnance

Cet article fixe un délai de six mois à compter de la publication de l'ordonnance prévue par ce projet de loi, pour le dépôt du projet de loi de ratification.

En application de l'article 38 de la Constitution, les ordonnances entrent en vigueur dès leur publication, mais deviennent caduques si leur projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation.

En raison des profonds changements qu'entraîne la fin du régime de concession de l'enseignement primaire à la Mission catholique, la commission sera particulièrement attentive à la mise en place de cette réforme.

La commission a adopté cet article sans modification.

*

* *

La commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a adopté le projet de loi ainsi modifié.


* 2 Statut des enseignants du premier degré à Wallis-et-Futuna, IGÉSR-IGA, rapport 23-24 081A, mars 2024.

* 3 Syndicat unique sur ce territoire.

* 4 Initialement dans un corps spécifiquement créé en raison des écarts de diplômes avec les professeurs des écoles actuellement recrutés avec un diplôme de master 2.

* 5 Être de nationalité française, jouir de ses droits civiques, ne pas avoir de mention au bulletin n° 2 du casier judiciaire incompatible avec l'exercice des fonctions, être en position régulière au regard du code du service national, être apte physiquement.

* 6 Statut des enseignants du premier degré à Wallis-et-Futuna, IGÉSR-IGA, rapport 23-24 081A, mars 2024.

* 7 Les enfants nés pendant le second semestre sont systématiquement scolarisés avec un an de retard sous prétexte du calendrier inversé - la rentrée scolaire a lieu en février. À la rentrée 2023, les enfants scolarisés en petite section étaient ceux nés entre le 1er août 2019 et le 31 juillet 2020. Sur le reste du territoire national, les enfants nés entre le 1er août 2019 et le 31 décembre 2019 ont fait leur entrée à l'école maternelle l'année d'avant et étaient en moyenne section en 2023. Ce retard se répercute tout au long du parcours scolaire des élèves nés dans la deuxième moitié de l'année civile.

* 8 Article 23 du décret n° 2025-352 du 17 avril 2025 modifiant les conditions de recrutement et de formation des corps enseignants, du personnel d'éducation et des maîtres de l'enseignement privé sous contrat du ministère chargé de l'éducation nationale.

* 9 Cet écart d'estimation réside dans le fait que les taux de cotisation salariés et employeurs de ce régime sont très inférieurs à ceux du régime spécial des fonctionnaires de l'État. Complément d'expertise sur l'évolution du statut des enseignants du premier degré de Wallis et Futuna, IGA, note du 11 juin 2024.

* 10 Cf. notamment le décret n° 2022-684 du 26 avril 2022 portant dispositions spécifiques applicables aux agents des circonscriptions territoriales de Wallis et Futuna.

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