D. LE FONDS VERT EST DEVENU UNE VARIABLE D'AJUSTEMENT DES FINANCES PUBLIQUES

L'exécution des crédits du programme 380, « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires », dit le « fonds vert », est de moitié inférieure aux prévisions : alors que 1 124,0 millions d'euros ont été inscrits en LFI pour 2024, seuls 569,9 millions d'euros ont finalement été consommés.

Le fonds vert est en effet l'un des « grands perdants » des annulations de crédits décidées en cours d'année : le décret du 21 février 2024 a annulé 430 millions d'euros en CP, et 65 millions d'euros supplémentaires ont été annulés par la loi du 6 décembre 2024 de finances de fin de gestion pour 2024.

Évolution des crédits de paiement du fonds vert en cours de gestion

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

Les autorisations d'engagement du programme n'ont pas eu un destin plus enviable : 500 millions d'euros en AE ont été annulés par le décret de février 2024, et 400 millions d'euros d'annulations supplémentaires ont été décidées par la LFFG pour 2024. Ces coupes budgétaires successives ont ainsi fait passer les AE du fonds vert de 2,5 milliards d'euros à 1,6 milliard d'euros, ce qui représente une baisse de 36 %.

Évolution des autorisations d'engagement du fonds vert en cours de gestion

(en millions d'euros)

Source : commission des finances

Il est bien entendu souhaitable, dans le contexte budgétaire actuel, de chercher à faire des économies. Cependant, celles-ci doivent impérativement être débattues au Parlement, et il n'est pas acceptable qu'un programme budgétaire se retrouve privé de près de la moitié de ses crédits seulement deux mois après le vote de la loi de finances initiale. Il était possible de mieux prévenir cette situation, comme l'a démontré la mission d'information de la commission des finances sur la dégradation des comptes publics11(*).

Il apparaît que le fonds vert, qui a été initialement présenté comme un outil au service des collectivités territoriales, s'est révélé être une variable d'ajustement de la politique de transition écologique de l'État, ainsi que l'a dénoncé le rapporteur spécial à de nombreuses reprises.

Le rapporteur spécial avait ainsi fait adopter en loi de finances pour 2024 un amendement créant un « Fonds territorial climat » (FTC), qui aurait permis d'éviter une telle situation. Le principe du FTC était d'attribuer 200 millions d'euros du fonds vert directement aux EPCI ayant adopté un PCAET, à raison de 4 euros par habitant12(*). Les normes comptables des collectivités permettent en effet de s'assurer que ces sommes ont bien été fléchées pour la transition écologique13(*). La ressource aurait ainsi été garantie, et le FTC aurait permis aux collectivités territoriales de mettre en oeuvre une véritable planification écologique, contrairement au mouvement de « Stop and Go » qui caractérise le fonds vert aujourd'hui.

Le Gouvernement s'était engagé à mettre en oeuvre le FTC au moment du vote de la loi de finances, et une circulaire du 28 décembre 2024 a prévu qu'une part du fonds vert serait déployée en cours d'année pour accompagner la mise en oeuvre des « plan climat-énergie territoriaux » (PCAET). Toutefois, cet engagement n'a pas été respecté.

Interrogée sur le devenir du fonds territorial climat, l'administration a répondu que « les annulations puis les gels budgétaires n'ont pas permis de créer une part dédiée au sein du fonds vert mais l'identification des projets PCAET parmi les projets du fonds vert permet de souligner que les projets PCAET sont nombreux à solliciter et à bénéficier du fonds vert : 756 projets ont déjà reçu l'engagement d'un financement de l'État en 2024. »14(*) Or, ces projets ont été financés par la procédure classique du fonds vert, alors que tout l'intérêt du fonds territorial était précisément que les crédits soient affectés directement aux intercommunalités.


* 11 Rapport d'information fait au nom de la commission des finances par la mission d'information sur la dégradation des finances publiques depuis 2023, son suivi par l'administration et le Gouvernement et les modalités d'information du Parlement sur la situation économique, budgétaire et financière de la France, Jean-François Husson, 12 juin 2024.

* 12 Le dispositif devait être applicable à la métropole de Lyon, et le périmètre de la métropole du Grand Paris, les fonds étaient prévus pour être versés aux établissements publics territoriaux.

* 13 C'est d'ores et déjà le cas par exemple pour la compétence « Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi), qui est financée par une taxe dédiée.

* 14 Réponses de l'administration au questionnaire budgétaire pour le projet de loi de finances pour 2025.

Les thèmes associés à ce dossier

Partager cette page