II. LES OBSERVATIONS DE LA RAPPORTEURE SPÉCIALE
A. UN SCHÉMA D'EMPLOI POSITIF RÉARMANT PROGRESSIVEMENT L'ÉTAT TERRITORIAL MAIS DE FAÇON INÉGALE
Par rapport à 2023, le plafond d'emplois de la mission augmente de 57 équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2024. Il a été consommé à hauteur de 40 406 ETPT, soit 359 ETPT de moins que le plafond d'autorisation d'emplois et 181 ETPT que le plafond exécuté en 2023.
Évolution du plafond d'emplois de la mission depuis 2022
(en ETPT)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Si le plafond d'emplois prévu en loi de finances initiale est en hausse depuis 2022, il est légèrement sous-exécuté de 0,9 % pour la deuxième année consécutive.
Pour autant, il est une nouvelle fois positif, ce qui contraste largement avec la tendance observée depuis les années passées. La mission AGTE est en effet soumise depuis 2018 à un schéma d'emplois exigeant, même s'il a toutefois été assoupli à partir de 2021, marquant ainsi l'interruption des réductions d'emplois pour le programme 354 et le renforcement des schémas d'emplois sur le programme 216, qui porte les effectifs de l'administration centrale du ministère.
Schémas d'emplois sur la mission AGTE de 2018 à 2024
(en ETP)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
En ce qui concerne le programme 216, le schéma d'emplois a été légèrement sous-exécuté (129 ETP prévus initialement pour une consommation de l'ordre de 120 ETP), traduisant toutefois une exécution améliorée par rapport à 2023. Conformément aux objectifs de la LOPMI, ces emplois ont été orientés vers le numérique, notamment vers la réinternalisation des compétences en vue de réduire le recours à des prestataires extérieurs, et ainsi le coût des fonctions numériques du ministère de l'intérieur. La direction de la transformation du numérique (DTNUM) du ministère de l'intérieur a réalisé des recrutements au cours de l'année 2024 sur les métiers d'ingénieurs, de chefs de projet, d'experts technique et de « data scientists », pour un volume de 21 ETP.
S'agissant du programme 354, alors que le solde initial du schéma d'emplois s'élevait à 232 ETP, il n'a été consommé qu'à hauteur de 157 ETP, à raison principalement des effets du décret d'annulation du 21 février 2024, qui a réduit la masse salariale des préfectures de 21,2 millions d'euros. Un tel schéma d'emploi a toutefois notamment permis la création de 101 postes afin de renforcer les services en charge des étrangers, d'accueil du public, de délivrance des titres d'identité, de la gestion de crise ou encore les secrétariats généraux communs départementaux. Par ailleurs, 23 emplois d'experts de haut niveau en préfecture ont été créés en 2024 ainsi que 21 emplois pour renforcer la plateforme régionale d'appui interministériel à la gestion des ressources humaines.
Si la rapporteure spéciale salue ces créations de postes, même moindres que celles envisagées, au regard de l'année 2024 particulièrement contrainte budgétairement, elle n'en déplore pas moins que seuls certains services sont ciblés alors que d'autres missions sont délaissées, comme les contrôles de légalité et budgétaire, qui étaient pourtant affichées comme prioritaires dans les missions prioritaires des préfectures 2022-2025.
En effet, selon les données transmises par le ministère de l'intérieur, alors que les services étrangers ont été renforcés de 5,5 % entre 2021 et 2024, les services en charge du contrôle de légalité et du contrôle budgétaire ont vu leurs effectifs décroître respectivement de 4,5 % et 3,1 % sur la même période. La rapporteure spéciale rendra d'ailleurs prochainement les conclusions de son contrôle budgétaire sur les effectifs dédiés aux contrôles de légalité et budgétaire en préfecture.
La rapporteure spéciale ne nie pour autant pas les besoins dans les services étrangers, qui ont bénéficié de 570 ETPT supplémentaires dès 2022 dans le cadre du plan de renforts triennal pour la période 2022-2024, au regard des difficultés rencontrées dans le traitement des demandes de titres en faveur des publics étrangers.
Pour autant, la rapporteure spéciale regrette que ce plan ne fasse appel qu'à des vacataires dès lors qu'il aurait été préférable de recourir à des effectifs titulaires, et de les fidéliser eu égard à la complexité du droit des étrangers, qui suppose des délais de formation relativement importants. En effet, le recours aux contrats à durée déterminée s'est encore accru en 2024 dans les préfectures, passant de 4 200 ETPT contractuels au sein du programme 354 en 2023, à 4 467 ETPT en 2024, dont plus d'un quart ont été consacrés à la mission d'instruction et de délivrance des titres au sein des services étrangers.