II. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

A. LES OPÉRATIONS PATRIMONIALES MISES EN oeUVRE PAR L'APE EN 2024 CONFIRME LE DYNAMISME DE L'ÉTAT ACTIONNAIRE DANS LE DOMAINE DES AFFAIRES STRATÉGIQUES

Alors que l'État s'était tendanciellement engagé entre 2017 et le début de la crise économique et sanitaire de 2020 dans une politique de cessions de participations publiques avec un objectif de redimensionnement du portefeuille de l'APE, la décision prise en 2022 de renationalisation intégrale d'EDF a constitué une inflexion notable pour la trajectoire de dépenses du programme 731 : cette opération majeure a représenté un coût total de 9,7 milliards d'euros réparti sur le compte entre 2022 et 2023.

L'exercice 2024 confirme la poursuite par l'État d'une politique actionnariale qui combine l'absence de cession de participations importante et les interventions ponctuelles dans les secteurs jugés comme stratégique et participant à l'indépendance de la France.

Ainsi en est-il de trois opérations menées en 2024 dans les domaines stratégiques :

- la souscription de l'État à hauteur de 81 millions d'euros à l'augmentation de capital du groupe John Cockerill Defense (JCD). Cette opération, menée en coordination avec l'État belge, permet à la France et à la Belgique de détenir chacune 10 % et elle est justifiée par l'acquisition par JCD de la société Arquus qui fournit des véhicules blindés aux forces armées françaises ;

- l'acquisition par l'État de 80 % de la société Alcatel Submarine Networks (ASN) pour un montant de 98 millions d'euros. Cette prise de participation est justifiée par le caractère critique du réseau des câbles sous-marins qui représentent plus de 95 % des télécommunications et des données internet mondiales14(*) ;

- l'acquisition par l'État d'une action de préférence au sein de Bull SA. Si cette opération n'a pas d'incidence financière, elle permet de sécuriser les intérêts de l'État au sein de cette entreprise, indépendamment de l'opération d'acquisition par l'État d'une partie des activités du groupe Atos qui s'est poursuivie en 2025.

B. LA POLITIQUE DE GESTION DES RETOURS FINANCIERS DU PLAN FRANCE 2030 POURRAIT ÊTRE RATIONALISÉE EN PRÉCISANT LES INSTRUMENTS DE PRÉVISION ET EN FORMALISANT UNE DOCTRINE D'USAGE DE CES RETOURS

Lors du lancement du premier volet du programme d'investissement d'avenir (PIA 1) par la loi de finances rectificative du 9 mars 2010, l'un des objectifs du PIA 1 était de financer des projets qui permettait de générer un retour sur investissement, financier ou extrafinancier.

Entre 2011 et 2023, les retours financiers des trois volets du Programme d'investissement d'avenir (PIA 1 à 3) et du plan France 2030 représentent un milliard d'euros selon les estimations du Secrétariat général pour l'investissement (SGPI).

Conformément à la LOLF et à la loi de finances initiale pour 2005, les retours financiers des PIA et de France 2030 sont enregistrés en recettes au sein du CAS « Participations financières de l'État ». Pour autant, la politique de gestion des retours financiers pourrait être améliorée comme l'a notamment souligné le comité de suivi des investissements d'avenir15(*).

En premier lieu, le rapporteur spécial souligne que les prévisions pluriannuelles de retours sur investissements associées aux PIA et à France 2030 peuvent être améliorées. Alors que les retours financiers des PIA et de France 2030 était de 180 millions d'euros pour le CAS « Participations financières de l'État » selon le projet de loi de finances pour 2024, ils ont atteint en exécution 186 millions d'euros soit un écart limité de 3 %. Le rapporteur relève en revanche que la documentation budgétaire ne fait apparaître aucune prévision de retours financiers pluriannuels, et que l'annexe générale (jaune budgétaire) relative aux PIA et à France 2030 ne fournit même pas d'estimation sur les retours financiers de l'exercice à venir.

En second lieu, le rapporteur spécial relève qu'en étant enregistrées comme recettes du CAS « Participations financières de l'État », les retours financiers des PIA et de France 2030 ne font l'objet d'aucune doctrine d'emploi. Au regard de la dynamique à venir du montant de ces recettes et de leur poids relatif dans les recettes du compte, la formalisation d'une doctrine d'emploi serait de nature à clarifier non seulement le circuit de financement du CAS « Participations financières de l'État » mais également les intentions du Gouvernement quant à l'usage de ces retours sur investissements.


* 14 C. Morel, « Les câbles sous-marins : un bien commun mondial ? », revue Études, mars 2017.

* 15 CSIA, juin 2023, France 2030. Lancement maîtrisé d'un plan d'investissements à impacts majeurs.

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