B. LES PROGRAMMES DANS LE PÉRIMÈTRE DES MINISTÈRES ÉCONOMIQUES ET FINANCIERS ONT CONNU UN RALENTISSEMENT DE LEURS DÉPENSES EN 2024 SOUS L'EFFET DES ANNULATIONS ET DE LA SURÉVALUATION DU COÛT DU DISPOSITIF DES « JEUNES ENTREPRISES INNOVANTES »
En premier lieu, le programme 193 « Recherche spatiale », placé depuis 2022 sous la responsabilité du directeur général des entreprises (DGE), sert à financer à la fois la subvention pour charges de service public du Centre national d'études spatiales (Cnes), la contribution française à l'Agence spatiale européenne (Esa) et la contribution française à l'Organisation européenne pour l'exploitation des satellites météorologiques (Eumetsat).
Crédits exécutés sur le programme 193
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission de finances, d'après les données de la DGE
La LPR adopté en 2020 inclut dans son périmètre le programme 193 avec une trajectoire de hausse des moyens consacrés à la politique spatiale dans un contexte marqué à la fois par la diversification des acteurs du secteur spatial et la perte temporaire d'accès européen souverain à l'espace entre le dernier vol de la fusée Ariane 5 en juillet 2023 et le vol inaugural de la fusée Ariane 6 qui s'est déroulé le 9 juillet 2024.
Exécution de la LPR sur le programme 193 pour l'exercice 2024
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances
Le rapporteur spécial relève que la politique spatiale française et européenne se trouve dans une phase déterminante liée à la consolidation du modèle économique du lanceur Ariane 6 et au lancement de plusieurs programmes spatiaux européens d'envergure dont notamment le projet de constellation européenne IRIS2.
Dans ce contexte, la marge de manoeuvre dont disposera la délégation française dans le cadre de la prochaine conférence ministérielle de l'Agence spatiale européenne (Esa) programmée à l'automne 2025 doit impérativement être préservée.
En dépit de ces enjeux structurant pour la politique spatiale française, le rapporteur relève que les annulations intervenues en cours de gestion en 2024 sur le programme 193 (annulation de 293 millions d'euros) ont eu pour effet de sous-exécuter à hauteur de 269 millions d'euros en CP en 2024 la cible fixée par la LPR pour le programme 193 et ce alors même que les crédits ouverts par la loi de finances initiale correspondaient à une sur-exécution à hauteur de 24 millions d'euros en CP. La circonstance que l'annulation ait porté à hauteur de 253 millions d'euros en CP sur la contribution de la France à l'Esa pour tenir compte de la trésorerie positive de la France vis-à-vis de l'Agence ne constitue qu'un « effet d'optique » dans la mesure où la France reste engagée à hauteur des programmes auxquels elle a souscrit bien qu'ils aient été retardés. En conséquence, la réduction de la trésorerie françaises vis-à-vis de l'Esa se traduira mécaniquement par une réduction des marges de manoeuvre françaises dans le cadre de la conférence ministérielle de l'automne 2025.
En second lieu, le programme 192 « Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle » connait un mouvement de réduction de ses dépenses du fait du recul des crédits dédiés au « plan Nano » d'une part et de la surestimation du coût de la dépense sociale du dispositif « jeunes entreprises innovantes » (JEI), d'autre part.
Le plan « Nano 2022 », lancé en 2018 et dont les derniers engagements ont été réalisés en 2022, est un programme de soutien à la filière microélectronique dont le circuit de financement associe plusieurs programmes et plusieurs missions du budget général. Les crédits ouverts sur le programme 192 pour le plan Nano, exécutés à hauteur de 11 millions d'euros en CP en 2024, ont pour objet d'apurer les restes à payer au profit des entreprises bénéficiaires. Les décaissements devraient s'achever en 2026 ou en 2027 selon les estimations de la DGE.
Le dispositif des JEI prévoit quant à lui une exonération de cotisations sociales pour certains employés des PME consacrant plus de 20 % de leurs charges à des dépenses de recherche et développement. La compensation de ces cotisations auprès de l'Acoss est assurée par des crédits du programme 192. Depuis sa création en 2004, le dispositif représente un coût croissant et concerne un nombre d'entreprises en augmentation. Il représente en 2024 un montant de 266 millions d'euros de compensation hors apurement de la dette de l'État vis-à-vis de l'Acoss.
Le rapporteur relève qu'en dépit de la création par la loi de finances initiale pour 2024 d'une nouvelle catégorie de « jeunes entreprises innovantes », les « jeunes entreprises de croissance » (JEC)9(*), le coût du dispositif s'est stabilisé en deçà des estimations construites lors du vote du budget, ce qui a eu pour conséquence que la dette rémanente de l'État auprès de l'Acoss a pu être apurée au cours de l'exercice 2024 et que cette dette était nulle au début de l'exercice 2025.
Nombre d'entreprises bénéficiaires du dispositif JEI
(en nombre de bénéficiaires)
Source : commission des finances, d'après les données de l'Acoss
* 9 Toutefois le coût en année pleine de ce dispositif ne peut être constaté, la mesure étant entré en vigueur le 1er juin 2024.