RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS, ALINÉA 3,
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT (« CAVALIERS »)

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie »204(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie205(*).

Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte206(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial207(*).

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vade-mecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des affaires sociales a arrêté, lors de sa réunion du mercredi 5 novembre 2025, le périmètre indicatif du projet de loi n° 24 (2025-2026) relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales.

Elle a considéré que ce périmètre incluait des dispositions relatives :

- aux échanges d'informations dont bénéficient les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés du service de prestations sociales pour lutter contre la fraude ;

- aux obligations incombant aux organismes de protection sociale en matière de lutte contre la fraude ;

- au traitement et à l'échange de données entre organismes obligatoires et d'autres services de l'État, ainsi qu'avec les organismes complémentaires de protection sociale ;

- aux dispositifs de contrôle relatifs au transport sanitaire ;

- à la lutte contre la fraude dans le champ des risques professionnels ;

- aux moyens de lutte contre la fraude dévolus à l'opérateur France Travail ;

- à l'identification, à la taxation et à la prise en compte des revenus illicites dans le versement de prestations ;

- à la lutte contre la fraude dans le domaine de la formation professionnelle ;

- à la lutte contre le travail dissimulé ;

- à la régulation des professionnels de santé, des centres de santé et des plateformes de téléconsultations commettant des manquements ;

- aux sanctions en matière de fraude sociale, et notamment à l'encontre des professionnels de santé ayant des agissements frauduleux ;

- au recouvrement de cotisations et contributions sociales, de prestations sociales ou d'allocations indûment versées en raison d'une fraude ;

- les dispositions relatives aux échanges d'informations entre administrations, autorités administratives indépendantes et autorités judiciaires, en matière de lutte contre la fraude fiscale ;

- aux règles d'assujettissement des professionnels aux obligations en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT) ;

- à la procédure judiciaire et aux sanctions applicables aux infractions se rapportant aux délits de mise à disposition d'instruments facilitant la fraude fiscale, au délit de fraude fiscale, aux délits comptables et au délit d'escroquerie aux finances publiques ;

- aux obligations déclaratives des assujettis vis-à-vis de l'administration fiscale ;

- aux délais de reprise de l'administration fiscale ;

- aux moyens de contrôle et d'enquête des services compétents en matière de lutte contre la fraude fiscale ;

- aux procédures et moyens de contrôle et aux procédures de sanction destinées à lutter contre les faux professionnels et le travail dissimulé dans le secteur des transports publics particuliers de personnes (T3P) et, en conséquence, contre la fraude sociale et fiscale dans ce secteur ;

- aux obligations de vigilance applicables aux plateformes d'emploi dans le secteur des VTC vis-à-vis des exploitants VTC et aux procédures de contrôle et de sanction afférentes à ces obligations.


* 204 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 205 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 206 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 207 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

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