- L'ESSENTIEL
- PREMIÈRE PARTIE
UN RECUL DES CRÉDITS DE LA MISSION « CULTURE »
- DEUXIÈME PARTIE
ANALYSE PAR PROGRAMME
- I. LE PROGRAMME 131
« CRÉATION » : UNE RELATIVE STABILITÉ
DES CRÉDITS DÉDIÉS AU SPECTACLE VIVANT
- A. UNE STABILISATION DU BUDGET EN FAVEUR DE LA
CRÉATION ARTISTIQUE
- 1. Les moyens accordés à la
création artistique continuent de dépasser le milliard d'euros
dans un contexte de dynamisme de la fréquentation du spectacle
vivant
- 2. Les labels du spectacle vivant, des subventions
globalement stables dans un contexte de fragilisation du fait du retrait des
financements de certaines collectivités territoriales
- 3. Une augmentation des moyens au plan
« Mieux produire, mieux diffuser »
- 1. Les moyens accordés à la
création artistique continuent de dépasser le milliard d'euros
dans un contexte de dynamisme de la fréquentation du spectacle
vivant
- B. UNE STABILITÉ DES CRÉDITS
DÉDIÉS À L'EMPLOI CULTUREL MAIS DONT LA
SINCÉRITÉ BUDGÉTAIRE INTERROGE
- A. UNE STABILISATION DU BUDGET EN FAVEUR DE LA
CRÉATION ARTISTIQUE
- II. LE
PROGRAMME 175 « PATRIMOINES » : UNE
BAISSE DES CRÉDITS QUI RÉDUIT LE LANCEMENT DE NOUVELLES
OPÉRATIONS
- A. UNE FORTE DIMINUTION DES CRÉDITS QUI
IMPLIQUERA DE REVOIR LES AMBITIONS DU PROGRAMME
- B. LA RÉDUCTION DU NOMBRE DE GRANDS PROJETS
PATRIMONIAUX
- C. FACE À UNE FRÉQUENTATION
TRÈS DYNAMIQUE, UNE POLITIQUE DE HAUSSE TARIFAIRE DANS LES MONUMENTS LES
PLUS VISITÉS
- A. UNE FORTE DIMINUTION DES CRÉDITS QUI
IMPLIQUERA DE REVOIR LES AMBITIONS DU PROGRAMME
- III. LE
PROGRAMME 361 « TRANSMISSION DES SAVOIRS ET
DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE » : UNE DIMINUTION DES
CRÉDITS EN GRANDE PARTIE LIÉE À LA RÉFORME DU PASS
CULTURE
- IV. LE PROGRAMME 224 : UNE STABILITÉ
DES DÉPENSES DE SOUTIEN DU MINISTÈRE
- I. LE PROGRAMME 131
« CRÉATION » : UNE RELATIVE STABILITÉ
DES CRÉDITS DÉDIÉS AU SPECTACLE VIVANT
- EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
- EXAMEN EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
- LA LOI EN CONSTRUCTION
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N° 139 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026 |
|
Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025 |
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RAPPORT GÉNÉRAL FAIT au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale, pour 2026, |
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Par M. Jean-François HUSSON, Rapporteur général, Sénateur LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES (seconde partie de la loi de
finances) |
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Rapporteurs spéciaux : MM. Vincent ÉBLÉ et Didier RAMBAUD |
|
(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Claire Carrère-Gée, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, M. Georges Patient, Mme Sophie Primas, M. Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel. |
|
Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180 Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026) |
L'ESSENTIEL
Le montant global des crédits demandés dans le cadre du projet de loi de finances s'élève à 3,736 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 3,747 milliards d'euros en crédits de paiement (CP).
I. APRÈS PLUSIEURS ANNÉES DE HAUSSE, UNE BAISSE SENSIBLE DES CRÉDITS EN 2026
Les crédits devraient diminuer de 292 millions d'euros (- 7,25 %) en AE et de 170 millions d'euros (- 4,34 %) en CP par rapport à 2025. Malgré la baisse annoncée en PLF 2025, les crédits de la mission ont été finalement été relativement stables entre 2024 et 2025 grâce à l'adoption d'amendements adoptés au Sénat, aboutissant à une diminution de 2,15 % en AE mais une augmentation d'1,4 % en CP. En conséquence, 2026 devrait être la première année de réelle baisse des crédits.
Depuis 2022, les crédits de la mission enregistreraient ainsi une progression de 105 millions d'euros en AE et 136 millions d'euros en CP. Cette hausse reste cependant modeste au regard du volume global de la mission.
Évolution des crédits de paiement de la mission « Culture » par programme
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
Le montant total de la dépense fiscale directement ou subsidiairement rattachée à la mission devrait être supérieur à 1,3 milliard d'euros en 2026, soit près d'un quart des crédits budgétaires accordés à la mission « Culture ».
Les taux réduits de TVA représentent à eux seuls un total de 751 millions d'euros, dont 355 millions d'euros pour le taux réduit à 5,5 % pour les droits d'entrées dans des spectacles.
II. UNE MISSION QUI CONCENTRE UN TRÈS GRAND NOMBRE D'OPÉRATEURS
La mission « Culture » a la particularité de subventionner un nombre important d'opérateurs : 72 opérateurs sont concernés, dont le total des budgets s'élève à 2,5 milliards d'euros. Sont concernés aussi bien des grands établissements parisiens (Opéra de Paris, Comédie Française, musée du Louvre...) que des plus petits opérateurs implantés en région (écoles nationales supérieures d'art en région, monuments du Centre des monuments nationaux...).
Les opérateurs du programme ont la particularité de bénéficier d'un taux élevé de ressources propres, dans la mesure où il s'agit bien souvent d'établissements ouverts au public. Le montant cumulé des ressources propres des opérateurs du programme atteint en 2025 1,2 milliard d'euros, contre 1,3 milliard d'euros versés par l'État.
Subvention pour charges de service public des
principaux opérateurs
de la mission en 2026
(en millions d'euros)
|
Établissement |
Montant |
|
Universcience |
113,4 |
|
Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou |
113,0 |
|
Opéra national de Paris |
111,5 |
|
Institut national de recherches archéologiques préventives |
97,6 |
|
Musée du Louvre |
90,4 |
|
Centre des monuments nationaux |
71,2 |
|
Écoles d'architecture |
56,9 |
|
Établissement public du musée du quai Branly - Jacques Chirac |
47,8 |
|
Établissement public de la Cité de la musique - Philharmonie de Paris |
46,2 |
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
III. UNE RELATIVE STABILITÉ DES CRÉDITS DÉDIÉS AU SPECTACLE VIVANT DANS UN CONTEXTE DE HAUSSE DE LA FRÉQUENTATION
Les moyens accordés à la création artistique continuent de dépasser le milliard d'euros dans un contexte de dynamisme de la fréquentation du spectacle vivant. Si de nombreux travaux avaient été engagés par les principaux opérateurs du spectacle vivant au cours des dernières années, le lancement de nouvelles opérations n'est pas prévu en 2026, à l'exception des 46 millions d'euros en AE pour les travaux de rénovation du Palais de Tokyo, dont le démarrage est prévu début 2027.
L'économie du spectacle vivant est relativement dynamique : en 2024, le nombre de représentations déclarées est à ce stade stable par rapport à 2023 (près de 230 000 représentations). Le ministère dénombre, tous genres confondus, 65 millions de spectateurs et une recette de 2,4 milliards d'euros en 20241(*).
IV. UNE BAISSE DES CRÉDITS POUR LE PATRIMOINE QUI RÉDUIT LE LANCEMENT DE NOUVELLES OPÉRATIONS
Le programme 175 devrait être doté en 2026 de 1,279 milliard d'euros en AE et 1,047 milliard d'euros en CP, soit une diminution de 232 millions d'euros (- 18 %) en AE et de 106 millions d'euros en CP (- 8,5 %). La chute des crédits aura un impact sur l'ensemble des investissements prévus. En particulier, l'importante diminution des AE devrait se répercuter non seulement sur les grands chantiers, mais aussi sur les dépenses d'investissement et d'intervention dans les DRAC.
Décomposition des principales mesures d'économies en AE
(en millions d'euros)
Source : commission des finances
La trajectoire de fréquentation des monuments patrimoniaux est en hausse constante au cours des dernières années, un record ayant été constaté en 2023 : cette année-là, par rapport à l'avant crise sanitaire, la fréquentation annuelle avait enregistré une progression de plus de 6 %. En 2023 et 2024, le nombre de visiteurs cumulés sur l'ensemble des opérateurs du programme 175 a atteint 44 millions.
Évolution de la fréquentation des opérateurs du programme 175
(en nombre de visiteurs et en %)
|
2022 |
2023 |
2024 |
Évolution 2024/2022 (%) |
|
|
Musées |
27 711 549 |
31 539 148 |
31 777 686 |
15 % |
|
Monuments nationaux |
11 123 363 |
12 735 947 |
12 279 653 |
10 % |
|
TOTAL |
38 834 912 |
44 275 095 |
44 057 339 |
13 % |
Source : ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire
Comme l'ensemble des opérateurs de l'État, les opérateurs du ministère de la culture sont soumis à un impératif de développement de leurs ressources propres, d'autant plus que la forte fréquentation des sites et leur caractère patrimonial impliquent des investissements lourds et fréquents. Le ministère a donc autorisé la mise en place d'une tarification différenciée applicable aux visiteurs non-résidents de l'Espace économique européen (EEE) de plus de 18 ans dans quelques établissements à partir de janvier 2026. Ces hausses tarifaires devraient permettre de dégager plus de 23 millions d'euros de recettes supplémentaires dès 2026.
V. LA RÉFORME DU PASS CULTURE A POUR CORROLAIRE UNE FORTE RÉDUCTION DES MOYENS PRÉVUS
Le présent projet de loi de finances prévoit une dotation de 127,5 millions d'euros de crédits. Le montant prévu en 2025 était de 210,5 millions d'euros, mais la commission mixte paritaire avait adopté une réduction de 35 millions d'euros des crédits du Pass culture. L'économie supplémentaire prévue en 2026 s'élève donc à 43 millions d'euros.
Cette diminution découle de la réforme du Pass culture mise en place par décret en février 2025, qui recentre le dispositif sur les jeunes adultes, tandis que les jeunes scolarisés bénéficient de la part collective du Pass culture.
Évolution des crédits affectés au financement du Pass culture depuis 2019
(en millions d'euros)
Source : commission des finances
Désormais, les jeunes de 15 à 16 ans sont exclus du dispositif, alors que les jeunes de 18 ans bénéficient toujours de 150 euros, toujours sans condition de ressources. Une bonification, portant le montant à 250 euros, peut toutefois être accordée pour certains jeunes bénéficiaires d'allocation aux adultes handicapés ou dont les parents ont un revenu inférieur à un niveau fixé par arrêté.
Impact de la réforme du Pass culture par tranches d'âge
|
Âge |
Avant la réforme |
Après la réforme |
|
15 ans |
20 euros |
0 |
|
16 ans |
30 euros |
0 |
|
17 ans |
30 euros |
50 euros |
|
18 ans |
300 euros |
150 euros + une bonification de 50 euros sous conditions |
Source : commission des finances du Sénat
Les crédits consommés au titre du Pass culture sont chaque année supérieurs à ceux prévus en loi de finances. Ainsi, les montants prévus au PLF ne devraient de nouveau pas être suffisants pour 2025 et le ministère indique que, sous toutes réserves, la situation devrait également se reproduire en 2026.
Hors Pass culture, les crédits dédiés à l'éducation artistique et culturelle proprement dite sont stables par rapport à 2025. La LFI pour 2025 avait cependant diminué d'environ 20 % les crédits dédiés par rapport à l'exécution 2024.
Réunie le 13 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission.
Réunie à nouveau le mercredi 26 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Culture » tels que modifiés par son amendement réduisant de 87 millions d'euros les crédits consacrés à la part individuelle du Pass culture afin de prévoir l'extinction du dispositif.
À la date du 10 octobre, date limite prévue par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) pour l'envoi des réponses au questionnaire budgétaire, les rapporteurs spéciaux avaient reçu 30 % des réponses.
A la date d'examen en commission du rapport le 13 novembre, ils ont obtenu 90 % des réponses.
PREMIÈRE
PARTIE
UN RECUL DES CRÉDITS DE LA MISSION
« CULTURE »
La mission « Culture » recense une partie des moyens budgétaires mis en oeuvre en faveur de la culture. Les crédits dédiés au soutien aux industries culturelles sont par ailleurs présentés au sein de la mission « Médias, livre et industries culturelles », également pilotée par le ministère de la culture.
La mission est composée de quatre programmes :
- le programme 131 « Création », orienté vers le soutien de la diversité et du renouvellement de l'offre artistique ;
- le programme 175 « Patrimoines » appelé à financer la politique de préservation et d'enrichissement du patrimoine culturel français ;
- le programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisations de la culture », dont le responsable est la direction générale de la démocratie culturelle, des enseignements et de la recherche nouvellement créée. Le programme agrège les crédits dédiés aux politiques transversales du ministère (éducation artistique et culturelle, enseignement supérieur de la culture, recherche culturelle et diffusion de la culture scientifique) ;
- le programme 224 « Soutien aux politiques du ministère de la culture », qui couvre ainsi essentiellement les dépenses de personnel.
La répartition des crédits de la mission entre ces quatre programmes est relativement équilibrée. Le programme 361 représentait 21 % des crédits de la mission en 2025, il ne devrait plus représenter que 19 % en 2026 du fait de la diminution des crédits liés au Pass culture.
Répartition des crédits de paiement
de la mission « Culture »
par programme prévue
en 2026
(en %)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
A. APRÈS PLUSIEURS ANNÉES DE HAUSSE, UNE BAISSE SENSIBLE DES CRÉDITS EN 2026
Le montant global des crédits demandés dans le cadre du présent projet de loi de finances s'élève à 3,736 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 3,747 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Cela correspond à une diminution de 292 millions d'euros (-7,25 %) en AE et de 170 millions d'euros (-4,34 %) en CP par rapport à 2025.
Évolution des crédits de la mission « Culture»
(en millions d'euros)
|
LFI 2025 |
PLF 2026 |
Variation 2025/2026 (en euros) |
Variation 2025/2026 (en %) |
||||||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
||
|
Programme 131 - Création |
Action 1 : Soutien à la création, à la production, à la diffusion du spectacle vivant |
849 |
819 |
821 |
789 |
28 |
30 |
- 3,32 % |
- 3,67 % |
|
Action 2 : Soutien à la création, à la production, à la diffusion des arts plastiques |
152 |
153 |
193 |
154 |
41 |
1 |
26,87 % |
0,78 % |
|
|
Action 6 : Soutien à l'emploi et structuration des professions |
72 |
72 |
67 |
67 |
- 5 |
- 5 |
- 6,97 % |
- 6,97 % |
|
|
Total |
1 073 |
1 044 |
1 080 |
1 010 |
8 |
- 34 |
0,72 % |
- 3,25 % |
|
|
Programme 175 - Patrimoines |
Action 1 : Monuments historiques |
610 |
552 |
400 |
437 |
- 209 |
- 114 |
- 34,34 % |
- 20,75 % |
|
Action 2 : Architecture et espaces protégés |
38 |
38 |
39 |
39 |
0 |
0 |
0,52 % |
0,72 % |
|
|
Action 3 : Patrimoine des musées de France |
429 |
440 |
403 |
441 |
- 26 |
1 |
- 6,00 % |
0,26 % |
|
|
Action 4 : Patrimoine archivistique et célébrations nationales |
28 |
49 |
31 |
56 |
2 |
7 |
8,92 % |
13,81 % |
|
|
Action 8 : Acquisition et enrichissements des collections publiques |
9 |
9 |
9 |
9 |
0 |
0 |
0,00 % |
0,04 % |
|
|
Action 9 : Patrimoine archéologique |
165 |
163 |
165 |
164 |
0 |
0 |
0,13 % |
0,26 % |
|
|
Total |
1 280 |
1 251 |
1 047 |
1 145 |
- 232 |
- 106 |
- 18,14 % |
- 8,46 % |
|
|
Programme 361 - Transmission des savoirs et démocratisation de la culture |
Action 1 : Soutien aux établissements d'enseignement supérieur et insertion professionnelle |
361 |
319 |
332 |
323 |
- 29 |
3 |
- 8,04 % |
1,03 % |
|
Action 2 : Soutien à l'éducation artistique et culturelle |
323 |
314 |
279 |
273 |
- 44 |
- 41 |
- 13,70 % |
- 12,98 % |
|
|
Action 3 : Langue française et langues de France |
4 |
4 |
4 |
4 |
- |
- |
0,00 % |
0,00 % |
|
|
Action 4 : Recherche culturelle et culture scientifique et technique |
123 |
122 |
123 |
122 |
0 |
0 |
0,10 % |
0,15 % |
|
|
Total |
811 |
760 |
738 |
723 |
- 73 |
- 37 |
- 9,02 % |
- 4,91 % |
|
|
Programme 224 - Soutien aux politiques du ministère de la culture |
Action 6 : Action culturelle internationale |
11 |
11 |
11 |
11 |
0 |
0 |
- 3,66 % |
- 3,66 % |
|
Action 7 : Fonctions de soutien du ministère |
101 |
98 |
97 |
96 |
- 4 |
- 2 |
- 3,73 % |
- 2,30 % |
|
|
Total |
866 |
863 |
871 |
870 |
5 |
7 |
0,62 % |
0,80 % |
|
|
Total |
4 029 |
3 918 |
3 736 |
3 748 |
- 292 |
- 170 |
- 7,25 % |
- 4,34 % |
|
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
Malgré la baisse annoncée en PLF 2025, les crédits de la mission ont été finalement été relativement stables entre la LFI pour 2024 et la LFI pour 2025 grâce à l'adoption d'amendements au Sénat conservés par la commission mixte paritaire. Entre 2024 et 2025, les crédits de la mission ont diminué de 2,15 % en AE mais augmenté d'1,4 % en CP.
En conséquence, 2026 devrait être la première année de réelle baisse des crédits.
La stabilité entre 2024 et 2025 s'inscrivait en effet dans une trajectoire de progression des crédits au cours des années précédentes : + 444 millions d'euros en AE et + 182 millions d'euros en CP entre 2023 et 2024 et + 245,7 millions d'euros en AE et + 253,2 millions d'euros en CP entre 2022 et 2023.
Les hausses constatées en 2023 et 2024 étaient en grande partie consacrées à la protection et la valorisation du patrimoine, notamment au travers de grands chantiers.
Le niveau des crédits de paiement de la mission prévu en 2026 est inférieur à celui de 2021, mais supérieur au niveau exécuté en 2023.
Évolution des crédits de paiement de la mission « Culture » par programme
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires
Depuis 2022, les crédits de la mission devraient augmenter de 105 millions d'euros en AE et 136 millions d'euros en CP. Cette hausse reste cependant modeste au regard du volume global de la mission.
Évolution entre 2022 et 2026 des crédits de la mission « Culture » par programme
(en millions d'euros et en %)
|
Programme |
Crédits exécutés 2022 |
PLF 2026 |
Variation 2022/2026 en euros |
Variation 2022/2026 |
|
|
P. 131 Création |
AE |
962,2 |
1 080,3 |
118,1 |
12,28 % |
|
CP |
960,3 |
1 009,9 |
49,6 |
5,17 % |
|
|
P. 175 Patrimoines |
AE |
1 122,1 |
1 047,4 |
- 74,7 |
- 6,66 % |
|
CP |
1 096,8 |
1 145,4 |
48,6 |
4,43 % |
|
|
P. 224 Soutien aux politiques du ministère de la culture |
AE |
786,4 |
871,2 |
84,8 |
10,78 % |
|
CP |
784,2 |
870,0 |
85,8 |
10,94 % |
|
|
P. 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture |
AE |
760,2 |
737,6 |
- 22,6 |
- 2,97 % |
|
CP |
769,7 |
722,6 |
- 47,1 |
- 6,12 % |
|
|
Total |
AE |
3 630,8 |
3 736,5 |
105,7 |
2,91 % |
|
CP |
3 611,0 |
3 747,9 |
136,9 |
3,79 % |
|
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
Une fois tenu compte de l'inflation, entre 2022 et 2025, en euros 2025, les CP ont augmenté de 0,6 % et les AE de 2,5 %.
Exécution des crédits de la mission « Culture » hors inflation - en euros 2025
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)
B. PLUS D'1,3 MILLIARD D'EUROS DE DÉPENSES FISCALES SONT RATTACHÉES À LA MISSION
Les crédits budgétaires de la mission « Culture » sont, par ailleurs, complétés par différentes dépenses fiscales : crédit d'impôts, taux réduit de TVA, abattement sur le bénéfice imposable, aménagement de l'imposition et exonérations. Le montant total de la dépense fiscale directement ou subsidiairement rattachée à la mission devrait être supérieur à 1,3 milliard d'euros en 2026, soit près d'un quart des crédits budgétaires accordés à la mission « Culture ».
Évolution du montant des dépenses
fiscales
rattachées à la mission
« Culture »
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Les taux réduits de TVA représentent à eux seuls un total de 751 millions d'euros, dont 355 millions d'euros pour le taux réduit à 5,5 % pour les droits d'entrées dans des spectacles.
Répartition de la dépense fiscale rattachée à la mission « Culture »
(en %)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Les taux réduits de TVA sont d'ailleurs les dépenses fiscales les plus dynamiques parmi celles rattachées à la mission : ils devraient augmenter de 65 millions d'euros entre 2025 et 2026.
Dès lors que l'application de taux réduit de TVA ne résulte pas d'une obligation communautaire, c'est le caractère incitatif de l'application du taux réduit qui déterminera si la mesure est considérée comme une dépense fiscale au sens des voies et moyens annexés au PLF. Si le fait de considérer le taux réduit de TVA sur les spectacles comme une dépense fiscale est logique, il est toujours surprenant de considérer les différences de traitement applicables aux différents secteurs culturels.
Ainsi, le ministère de la culture indique qu'il ne leur paraît pas pertinent de considérer le taux réduit de TVA sur le livre comme une dépense fiscale, dès lors que celui-ci « n'a pas vocation à soutenir un secteur mais que le livre constitue un produit de première nécessité ». Une telle réponse est d'autant plus étonnante que ces deux affirmations apparaissent extrêmement contestables : le taux réduit de TVA sur le livre est avant tout destiné à encourager les achats de livres. Il est par ailleurs difficile de considérer que le livre constitue un produit de première nécessité, dans la mesure où il n'est pas un poste d'achat incontournable pour les ménages.
Principales dépenses fiscales adossées à la mission « Culture »
(en millions d'euros)
|
Nom de la dépense fiscale |
Montant 2025 |
Montant 2026 |
Variation 2025-2026 |
|
|
Programme 175 |
Suppression du prélèvement de 20 % sur les capitaux décès lorsque le bénéficiaire est exonéré de droit de mutation à titre gratuit |
120 |
120 |
0 |
|
Taux de 5,5 % applicable aux livraisons d'oeuvres d'art ou d'objets de collection ou d'antiquité |
86 |
94 |
+ 8 |
|
|
Imputation sur le revenu global sans limitation de montant des déficits fonciers supportés par les propriétaires d'immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques ou labellisés Fondation du patrimoine |
55 |
55 |
0 |
|
|
Nouveau dispositif Malraux |
44 |
45 |
+ 1 |
|
|
Programme 131 |
Taux de 5,5 % applicable aux droits d'entrée dans les théâtres, les cirques, les concerts, les spectacles de variété, les salles de cinéma, les parcs zoologiques et les compétitions de jeux vidéos |
335 |
355 |
+ 20 |
|
Taux de 10 % applicable aux droits d'admission aux expositions, sites et installations à caractère culturel, ludique, éducatif et professionnel ainsi qu'aux loteries foraines |
215 |
255 |
+ 40 |
|
|
Crédit d'impôt en faveur des métiers d'art |
100 |
100 |
0 |
|
|
Crédit d'impôt pour dépenses de production de spectacles vivants |
47 |
47 |
0 |
|
|
Taux de 2,10 % applicable aux droits d'entrée des 140 premières représentations de certains spectacles |
42 |
47 |
+ 5 |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
C. UNE MISSION QUI FINANCE DE NOMBREUX OPÉRATEURS
La mission « Culture » a la particularité de subventionner un nombre important d'opérateurs : 72 opérateurs sont concernés, dont le total des budgets s'élève à 2,5 milliards d'euros.
Sont concernés aussi bien des grands établissements parisiens (Opéra de Paris, Comédie Française, musée du Louvre...) que des plus petits opérateurs implantés en région (écoles nationales supérieures d'art en région, monuments du Centre des monuments nationaux...)
Les opérateurs du programme bénéficient d'un taux élevé de ressources propres, dans la mesure où il s'agit bien souvent d'établissements ouverts au public. Le montant cumulé des ressources propres des opérateurs du programme atteint en 2024 1,2 milliard d'euros, contre 1,3 milliard d'euros versés par l'État.
Subventions versées aux opérateurs de la mission « Culture » en 2025
(en millions d'euros)
|
Nombre d'opérateurs |
Montant de la subvention de l'État |
Montant des ressources propres des opérateurs |
||
|
AE |
CP |
|||
|
Programme 175 |
18 |
656,8 |
676,2 |
8 483,6 |
|
Programme 131 |
14 |
355,1 |
355,1 |
2 505,7 |
|
Programme 361 |
1 |
287,8 |
287,8 |
1 179,1 |
|
Programme 224 |
39 |
12,5 |
12,5 |
0,7 |
|
Total |
72 |
1 312,3 |
1 331,6 |
12 169,2 |
Source : commission des finances du Sénat d'après le ministère de la culture
Une part importante des crédits de la mission sont fléchés vers les opérateurs. Les neuf principaux opérateurs de la mission représentent à eux seuls 780 millions d'euros de subvention pour charges de service public.
Subvention pour charges de service public des
principaux opérateurs
de la mission en 2026
(en millions d'euros)
|
Universcience |
113,4 |
|
Centre national d'art et de culture Georges-Pompidou |
113,0 |
|
Opéra national de Paris |
111,5 |
|
Institut national de recherches archéologiques préventives |
97,6 |
|
Musée du Louvre |
90,4 |
|
Centre des monuments nationaux |
71,2 |
|
Écoles d'architecture |
56,9 |
|
Établissement public du musée du quai Branly - Jacques Chirac |
47,8 |
|
Établissement public de la Cité de la musique - Philharmonie de Paris |
46,2 |
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
DEUXIÈME
PARTIE
ANALYSE PAR PROGRAMME
I. LE PROGRAMME 131 « CRÉATION » : UNE RELATIVE STABILITÉ DES CRÉDITS DÉDIÉS AU SPECTACLE VIVANT
Les crédits prévus au PLF 2026 s'élèvent au total à 1,080 milliard d'euros en AE et 1,009 milliard d'euros en CP. Ce montant correspond à une légère hausse des AE (+ 0,7 %, soit 7,7 millions d'euros) et une baisse de 3,2 % en CP (- 33,9 millions d'euros).
La délégation de gestion des personnels de Sèvres gérée par le ministère de la Culture à l'établissement public des Manufactures nationales à compter du 1er janvier 2026 engendre un transfert de 13,2 millions d'euros du programme 224 au titre de la masse salariale correspondante.
Le programme 131 « Création » se décline en trois actions :
- l'action 01 dédiée au spectacle vivant ;
- l'action 02, appelée à financer les arts visuels ;
- l'action 06, « soutien à l'emploi et la structuration des professions ».
78 % des crédits du programme sont portés par l'action 01 « Soutien à la création, à la production, à la diffusion du spectacle vivant ».
Répartition par action des crédits de paiement prévus au sein du programme 131
(en %)
Source : commission des finances du Sénat
A. UNE STABILISATION DU BUDGET EN FAVEUR DE LA CRÉATION ARTISTIQUE
1. Les moyens accordés à la création artistique continuent de dépasser le milliard d'euros dans un contexte de dynamisme de la fréquentation du spectacle vivant
Les crédits prévus en loi de finances initiale pour le programme 131 ont dépassé le milliard d'euros en 2023 et avaient continué de croître en 2024 et 2025.
Le soutien au spectacle vivant est l'action la plus en retrait du PLF pour 2026 (- 3,6 % en CP et - 3,3 en AE).
Évolution des crédits de paiement du programme 131
(en millions d'euros et en %)
|
|
LFI 2023 |
LFI 2024 |
LFI 2025 |
PLF 2026 |
Variation 2025/2026 en valeur |
Variation 2025/2026 (en %) |
Variation 2023/2026 (en %) |
|
Action 01 « Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant » |
801,9 |
814,4 |
819 |
789 |
- 30 |
- 3,66 % |
- 1,61 % |
|
Action 02 « Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels » |
141,4 |
150,9 |
153 |
154 |
1 |
0,65 % |
8,91 % |
|
Action 06 « Soutien à l'emploi et structuration des professions » |
62,7 |
71,7 |
72 |
67 |
- 5 |
- 6,94 % |
6,86 % |
|
Total |
1 006 |
1 037 |
1 044 |
1 010 |
- 34 |
- 3,26 % |
0,40 % |
Source : commission des finances
Si de nombreux travaux avaient été engagés au cours des dernières années, le lancement de nouvelles opérations n'est pas prévu en 2026, à l'exception des 46 millions d'euros en AE pour les travaux de rénovation du Palais de Tokyo, dont le démarrage est prévu début 2027.
Concernant les autres chantiers, les crédits de paiement sont décaissés en fonction de l'avancement des opérations (palais de Chaillot, centre national de la danse...), mais la plupart ne sont pas dotés de nouvelles AE en 2026. Alors que l'État s'était engagé dans le COM de l'Opéra de Paris pour 2024-2026 à maintenir une subvention annuelle d'investissement de 5 millions d'euros, et à augmenter de 2 millions d'euros sa SCSP (+ 1 million d'euros en 2025 et autant en 2026), la subvention pour charges de service public de l'Opéra devrait diminuer d'1 million d'euros, sans par ailleurs que l'augmentation prévue dans le COM ne soit assurée. La subvention versée à la Philharmonie de Paris diminue également d'un million d'euros.
Montants prévus pour les grands chantiers du programme 131
(en millions d'euros)
|
2025 |
2026 |
|||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
|
|
Salle Jean Vilar à Chaillot |
2,9 |
12 |
2,9 |
8 |
|
Réfection des façades du Centre national de la danse - CND |
10 |
10 |
||
|
Réhabilitation du hangar de stockage de Sèvres |
13,4 |
2,3 |
6 |
|
|
Centre national des arts plastiques - CNAP |
21 |
9,4 |
||
|
Palais de Tokyo |
45,9 |
|||
Source : commission des finances
L'économie du spectacle vivant est relativement dynamique : en 2024, le nombre de représentations déclarées est stable par rapport à 2023 (près de 230 000 représentations). Le ministère dénombre, tous genres confondus, 65 millions de spectateurs et une recette de 2,4 milliards d'euros en 20242(*).
Billetterie des spectacles par genre en 2024
(en millions, millions d'euros et %)
Source : Note « Culture chiffres » n°1. Billetterie du spectacle vivant en 2024, ministère de la culture
En 2024-2025, les 9 opérateurs d'envergure nationale du programme 131 enregistrent une fréquentation de 2,2 millions de spectateurs. Alors que le nombre de représentations diminue, la fréquentation globale progresse de 7 % par rapport à la saison 2022-2023, et de 1 % par rapport à la saison 2023-2024.
Évolution de la fréquentation des grands opérateurs du programme
(en millions d'euros et en %)
|
Saison 2023-2024 |
Saison 2024-2025 |
Variation 2023-2024 et 2025-2026 (en %) |
||||||||||
|
Nombre de spectateurs par saison |
Nombre moyen de spectateurs par représentation |
Nombre de spectateurs par saison |
Nombre moyen de spectateurs par représentation |
Nombre de spectateurs par saison |
Nombre moyen de spectateurs par représentation |
|||||||
|
Opéra national de Paris |
810 942 |
393 |
807 426 |
378 |
- 0,4 % |
- 3,8 % |
||||||
|
Opéra-Comique |
48 697 |
97 |
56 241 |
113 |
15,5 % |
16,5 % |
||||||
|
Philharmonie de Paris |
483 009 |
413 |
498 104 |
381 |
3,1 % |
- 7,7 % |
||||||
|
Chaillot |
53 588 |
237 |
51 812 |
181 |
- 3,3 % |
- 23,6 % |
||||||
|
Comédie Française |
363 425 |
692 |
366 328 |
713 |
0,8 % |
3,0 % |
||||||
|
Théâtre de l'Odéon |
154 999 |
274 |
142 837 |
244 |
- 7,8 % |
- 10,9 % |
||||||
|
Théâtre de la Colline |
73 061 |
247 |
99 402 |
281 |
36,1 % |
13,8 % |
||||||
|
Théâtre national de Strasbourg |
37 511 |
133 |
48 924 |
133 |
30,4 % |
0,0 % |
||||||
|
Grande Halle de la Villette |
191 385 |
312 |
159 977 |
283 |
- 16,4 % |
- 9,3 % |
||||||
La diminution de la fréquentation du Théâtre national de Chaillot découle de la fermeture de la grande salle pour travaux (salle Vilar).
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
S'agissant plus spécifiquement des festivals, leur fréquentation en 2023 était supérieure de 13 % par rapport à 2022. En 2024, 12 % des représentations ont été données à l'occasion d'un festival. Les crédits du fonds d'urgence pour les festivals n'ont pas été reconduits en 2026, contrairement à 2024 et 2025. Le ministère de la Culture a conduit une concertation avec les professionnels au premier semestre 2025, destinée à identifier des leviers pour améliorer la robustesse des festivals à court et moyen termes, face au constat de leur fragilisation économique et de leur exposition croissante aux aléas climatiques. Le ministère souligne en particulier qu'un « enjeu de sélectivité se pose également, au regard de la forte hausse des demandes d'aides et du contexte d'économies budgétaires qui pèse sur les crédits des DRAC comme sur les budgets culturels des collectivités territoriales ».
Le nombre de représentations par saison a considérablement diminué au cours des dernières années pour la plupart des grands opérateurs du spectacle vivant, ce qui constitue une mesure d'économies mais prive les établissements de la recette correspondante. Ainsi, pour des motifs budgétaires, l'Odéon a dû réduire son volume d'activité en 2024-2025 (- 11 %) ce qui se traduit par une baisse du nombre de spectateurs en dépit d'un taux de fréquentation extrêmement élevé (96 %).
Évolution du nombre de levers de rideaux par saison
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire budgétaire
2. Les labels du spectacle vivant, des subventions globalement stables dans un contexte de fragilisation du fait du retrait des financements de certaines collectivités territoriales
La politique de labellisation, dont le cadre est fixé par la loi « LCAP »3(*), constitue le fer de lance de l'action du ministère en matière de soutien à la création dans les territoires, pour un montant total de 250 millions d'euros en 2024. On dénombre 11 labels de création artistique différents, chaque label regroupant un nombre très hétérogène de structures. Ainsi, il existe 95 scènes de musiques actuelles, tandis que d'autres labels ne comptent qu'une poignée d'établissements.
Le montant accordé par label est très variable. Les mieux dotés sont les centres dramatiques nationaux (68,5 millions d'euros) et les scènes nationales (66,5 millions d'euros).
Financements versés par type de label en 2025
(en milliers d'euros)
Source : commission des finances
Rapportés au nombre de structures financées, le montant moyen révèle d'importantes disparités. Ainsi, les opéras reçoivent en moyenne 4 millions d'euros en 2025, contre un financement moyen de 167 000 euros par scène de musiques actuelles (SMAC).
Par ailleurs, le montant moyen est en baisse d'un million environ pour les opéras entre 2024 et 2025, tandis qu'il évolue nettement à la hausse pour les centres nationaux de création musicale ou pour les SMAC.
Montant moyen des financements accordés aux structures labellisées en 2025
(en euros)
|
Nom du label |
Nombre de structures labellisées en 2025 |
Montant moyen accordé par structures en 2024 |
Montant moyen accordé par structures en 2025 |
|
Centre chorégraphique national |
19 |
852 784,5 |
880 007 |
|
Centre de développement chorégraphique national |
15 |
348 953,7 |
365 453 |
|
Centre dramatique national |
38 |
1 786 353,8 |
1 802 813 |
|
Centre national de création musicale |
8 |
367 779,5 |
415 502 |
|
Centre national de la marionnette |
7 |
218 428,6 |
226 286 |
|
Centres nationaux des arts de la rue et de l'espace public |
13 |
409 506,2 |
414 598 |
|
Opéra national en région, théâtre lyrique d'intérêt national ou autre opéra |
6 |
5 207 111,4 |
3 909 524 |
|
Orchestre national en région et autre orchestre |
13 |
1 449 658,7 |
1 362 560 |
|
Pôle national du cirque |
14 |
332 044,6 |
337 436 |
|
Scène de musiques actuelles |
95 |
139 598,4 |
167 635 |
|
Scène nationale |
78 |
854 856,4 |
853 013 |
Source : commission des finances
Face à la faiblesse de ces sommes, on peut s'interroger sur le risque de saupoudrage des financements, ainsi que sur le caractère résiduel, voire marginal, de ces crédits à des établissements qui sont pour la plupart largement dépendants des financements accordés par les collectivités territoriales.
La Cour des comptes évaluait dans un rapport de 2022 à 2,5 milliards d'euros les financements des collectivités territoriales au spectacle vivant en 20194(*), faisant de l'État le « financeur minoritaire d'un secteur qui lui échappe en partie ». Là encore, ce constat est d'autant plus d'actualité que, les subventions des collectivités diminuant, beaucoup de labels ont la tentation de se tourner vers l'État pour pallier ces difficultés. Du fait des tensions budgétaires sur le programme 131, il n'est pas possible de continuer à subventionner, sans sélectionner, des structures fragilisées par un retrait trop important des collectivités.
Plus inquiétant, la Cour indique que l'administration centrale ne dispose pas des outils de collecte et d'exploitation des données permettant d'éclairer utilement l'action publique. Les moyens d'action des DRAC étant encore largement limités, les subventions aux structures labellisées ont le plus souvent un caractère automatique qui ne contribue pas à une lisibilité et un pilotage réellement efficace.
Les labels ne peuvent enfin répondre à toutes les difficultés, en particulier de répartition territoriale de l'accès à la culture. Si un nombre croissant de structures sont situées dans des territoires ruraux et des petites villes, certains labels sont les héritiers d'une implantation historique résultant en une concentration des structures labellisées dans certains départements. À l'inverse, 36 départements restent dépourvus d'une scène nationale. Les opéras, qui sont les plus largement financés, sont évidemment tous situés dans des grandes métropoles.
Dans le rapport de 2022 précité, la Cour des comptes relevait en outre les résultats très limités de la politique de soutien au spectacle vivant en matière de démocratisation et de diffusion.
3. Une augmentation des moyens au plan « Mieux produire, mieux diffuser »
Plusieurs constats ont conduit le ministère de la Culture à mettre en place en 2024 un plan de refondation intitulé « Mieux produire, mieux diffuser », visant à une rationalisation et surtout une diffusion plus importante des productions en augmentant les collaborations et les mutualisations.
Le système pâtit en effet d'un excès de productions, qui sont globalement insuffisamment diffusées. Les collectivités territoriales, de leur côté, ont des difficultés à maintenir leurs financements, voire pour certaines les ont réduits. La Cour des comptes indiquait qu'en 2019, le nombre moyen de représentations pour un spectacle était de 3,7 dans un centre dramatique national et de 2,3 pour une scène nationale. De telles statistiques ne sont plus tolérables.
Les moyens prévus en 2026 au titre du plan « Mieux produire, mieux diffuser » s'élèvent à 15 millions d'euros, en hausse continue depuis 2024.
Le ministère indiquait l'année dernière qu'au vu de la situation budgétaire, il n'y aurait pas de hausse des crédits par rapport à l'année précédente : « la montée en puissance sur de nouveaux financements ne pourra être effectuée que dans le cadre de redéploiements ». Contre toute attente, la ministre de la Culture avait cependant annoncé un renfort des moyens financiers apportés par l'État de 6 millions d'euros (3 millions d'euros en fonctionnement et 3 millions d'euros en investissement), notamment en mobilisant des crédits votés par le Parlement pour créer un fonds de soutien au spectacle vivant. Le montant total mobilisé par l'État au titre du plan « Mieux produire, mieux diffuser » est donc de 14,7 millions d'euros pour 2025, contre 8,7 millions d'euros en 2024.
L'objectif est que ces crédits aient un effet levier sur la contribution des collectivités. En effet, les crédits ont été délégués aux DRAC, pour les structures labellisées ou conventionnées ou par les réseaux qui s'engagent dans la mise en oeuvre du plan, à la condition de bénéficier d'un soutien complémentaire des collectivités territoriales.
Montants accordés au plan « Mieux produire, mieux diffuser »
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les données du ministère
Le nombre de structures labellisées était de 240 en 2024, dont un tiers en zone rurale et de 336 en 2025. En 2025, ces crédits ont été priorisés vers les salles de musiques actuelles. En conséquence, le secteur musical représente 37 % des crédits, tandis que la danse correspond à 12 %, le théâtre et les arts associés à 21 %, les arts visuels à 7 % et le secteur pluridisciplinaire à 23 %.
Sans remettre en cause l'objectif global du plan, qui semble de bonne politique, on peut s'interroger sur le caractère paradoxal de la mise en place d'un tel cadre administratif, doté de moyens spécifiques, alors que l'idée initiale est celle d'une simplification et d'une rationalisation de la production. Certains axes stratégiques, et plus encore certains sous-objectifs, laissent à ce titre songeur.
Le contenu du plan « Mieux produire, mieux diffuser »
Le plan se décline en 6 axes stratégiques, eux-mêmes déclinés en objectifs opérationnels et en actions.
- axe 1 : Soutenir toutes les formes de coopération et de mutualisation et supprimer toutes les entraves à la coopération ;
- axe 2 : Favoriser la production et la diffusion sur des temps longs, dans un souci d'irrigation artistique des territoires et de conquête des publics ;
- axe 3 : Tenir compte de l'évolution des pratiques des habitants à tous les âges de la vie dans la construction de l'offre culturelle ;
- axe 4 : Mettre en oeuvre une démarche volontariste d'accompagnement à la transition écologique du secteur de la création ;
- axe 5 : Travailler à une professionnalisation des acteurs du secteur et veiller à l'attractivité de nos métiers ;
- axe 6 : Renforcer le partenariat avec les collectivités locales.
Tous les objectifs n'ont pas le même caractère opérationnel : si certains semblent de bon sens au vu de l'idée générale du plan - par exemple « permettre un allongement des durées de diffusion des projets » - d'autres semblent nécessiter une mise en place concrète pour le moins nébuleuse : ainsi est-ce le cas de l'objectif « faire évoluer les méthodes de travail et les mentalités » ou encore « adapter les formations aux métiers de demain ».
Source : commission des finances
L'effet levier de ces financements constitue la principale vertu du plan « mieux produire, mieux diffuser ». Dans le contexte actuel de baisse des subventions des collectivités territoriales au secteur de la culture, il faut rappeler que les crédits de la mission « Culture » n'ont pas vocation à se substituer aux financements locaux, mais à les compléter. À cet égard, il faut espérer que le tassement des montants cofinancés en 2025 ne se prolonge pas en 2026.
Une interrogation demeure sur les financements fournis par les établissements eux-mêmes. Alors que le ministère estimait initialement que le plan allait entraîner un effet levier d'investissement des établissements d'environ 10 millions d'euros par an, cet aspect n'est curieusement plus mentionné dans les réponses au questionnaire budgétaire.
B. UNE STABILITÉ DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'EMPLOI CULTUREL MAIS DONT LA SINCÉRITÉ BUDGÉTAIRE INTERROGE
Le présent projet de loi de finances prévoit une stabilité des financements dédiés aux politiques en faveur de l'emploi et des artistes, dont le montant total sur le programme 131 atteint 66,7 millions d'euros (AE = CP), en diminution de 5 millions d'euros (-7 %) par rapport à 2025. Il faut toutefois noter que, d'une part, ces crédits avaient augmenté de 9 millions d'euros (AE = CP) en 2024 et, d'autre part, les crédits de cette action sont chaque année largement surexécutés.
1. Des financements pour l'emploi culturel à hauteur de 72 millions d'euros hors régime des intermittents
L'action 06 répond à trois objectifs :
- le soutien à l'emploi et à l'accompagnement professionnel des artistes ;
- la structuration des professions et de l'économie des secteurs du spectacle vivant et des arts visuels ;
- la compensation de contributions sociales acquittées par les artistes (CSG et contribution diffuseurs).
Répartition par objectif des crédits prévus pour l'action 06
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
La dotation versée par le ministère de la Culture pour le soutien à l'emploi des artistes se structure autour de plusieurs dispositifs :
- le fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (FONPEPS), destiné aux entreprises du spectacle vivant et enregistré et aux artistes et techniciens qu'elles emploient (cf. infra) ;
- le fonds de professionnalisation et de soutien (2,3 millions d'euros AE = CP prévus) ;
- l'aide à la garde d'enfants des artistes et techniciens intermittents (Agedati) qui vise à faciliter le maintien ou le retour à l'emploi des intermittents en leur remboursant des frais de garde d'enfant (0,66 million d'euros prévu, AE = CP) ;
- le GIP Cafés cultures, qui propose une aide sous la forme d'une prise en charge de la masse salariale pour permettre aux cafés, bars et restaurants de salarier des artistes et des techniciens dans de meilleures conditions, grâce au soutien des collectivités territoriales et du ministère de la Culture (0,74 million d'euros, AE = CP).
La structuration des professions et de l'économie des secteurs du spectacle vivant et des arts visuels couvre les aides aux organismes professionnels et syndicaux aux fins de financement de leur participation aux instances de dialogue social (Conseil national des professions du spectacle) et de soutien à leur rôle de conseil juridique, économique, social et culturel (3,02 millions d'euros, AE = CP).
Les crédits de tous ces dispositifs sont stables en 2026 par rapport à 2025.
Il faut cependant noter que le principal dispositif de soutien à l'emploi des artistes ne relève pas de l'État mais de l'Assurance chômage, à savoir le régime de l'intermittence. Toutefois, le ministère de la Culture finance à hauteur de 21 millions d'euros les effets liés à l'augmentation de la CSG pour les artistes-auteurs par le biais d'une prise en charge de leurs cotisations sociales. Cette prise en charge constitue une réponse pérenne du ministère de la Culture face à l'impact de cette augmentation et à l'engagement gouvernemental de neutralité financière que sous-tendait cette réforme.
2. Une gestion du FONPEPS toujours problématique
Les aides du fonds pour l'emploi dans le spectacle (FONPEPS) ont pour objet de contribuer à structurer l'emploi dans le secteur du spectacle vivant et enregistré, ainsi qu'à réduire la précarité des artistes et des techniciens intermittents en favorisant notamment les embauches à durée indéterminée, l'allongement des contrats et le respect des normes sociales légales et des accords collectifs.
Ce volet d'aides se compose de trois aides financières :
- le dispositif de soutien à l'emploi du plateau artistique de spectacles vivants diffusés dans des salles de petite jauge (APAJ) ;
- le dispositif de soutien à l'emploi dans le secteur de l'édition phonographique (ADEP) ;
- l'aide unique à l'embauche.
Le montant du FONPEPS fait l'objet de critiques depuis sa création. Pensé pour atteindre 90 millions d'euros, il n'a été budgétisé qu'à 20 millions d'euros, puis 35 millions d'euros par la suite. S'agissant d'une dépense de guichet, les sommes demandées sont chaque année largement supérieures et le dispositif est sous-budgétisé depuis des années. Ainsi, les montants consommés sont supérieurs de 50 % à 60 % au montant prévu en loi de finances au cours des trois dernières années.
Exécution des crédits dédiés au FONPEPS
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
Le ministère est donc chaque année contraint d'abonder en gestion les crédits du fonds, ce qui pose chaque année davantage de difficulté dès lors que les exercices 2024 et 2025 ont été marqués par les annulations en gestion de la réserve de précaution, qui limitent les marges de manoeuvre du ministère. En 2024, le mois de décembre n'a pu être payé à temps du fait des annulations en gestion. En 2025, une partie du surgel de précaution devrait être dégelé pour solder les aides du FONPEPS.
Cette gestion annuellement court-termiste peut surprendre, au-delà des interrogations quant à la sincérité de la prévision en loi de finances.
Le FONPEPS arrive à échéance le 31 décembre 2025 et le ministère indique que les travaux relatifs à la prolongation du dispositif sont en cours. Le ministère espère pouvoir ajuster au niveau réglementaire les dispositifs pour les ramener au niveau de la prévision en PLF. La dernière réforme des aides en 2023 avait déjà plafonné le montant des aides à 20 000 euros, mais il sera sans doute nécessaire d'aller au-delà.
II. LE PROGRAMME 175 « PATRIMOINES » : UNE BAISSE DES CRÉDITS QUI RÉDUIT LE LANCEMENT DE NOUVELLES OPÉRATIONS
Le programme 175 « Patrimoines » est dédié au financement des politiques publiques destinées à la constitution, à la préservation, à l'enrichissement et à la mise en valeur du patrimoine muséal, monumental, archéologique, archivistique et architectural.
Répartition des crédits au sein du programme 175 « Patrimoines »
(en %)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
18 opérateurs sont rattachés au programme 175, parmi lesquels la Réunion des musées nationaux - Grand Palais (RMN-GP), les grands musées nationaux, le Centre des monuments nationaux (CMN) et l'Institut national de recherches archéologiques et préventives (INRAP). Près de la moitié des crédits dédiés aux opérateurs de la mission sont liés au programme 175.
A. UNE FORTE DIMINUTION DES CRÉDITS QUI IMPLIQUERA DE REVOIR LES AMBITIONS DU PROGRAMME
Le programme 175 devrait être doté en 2026 de 1,279 milliard d'euros en AE et 1,047 milliard d'euros en CP, soit une diminution de 232 millions d'euros (- 18 %) en AE et de 106 millions d'euros en CP (- 8,5 %).
Évolution des crédits de paiement du programme 175
(en millions d'euros)
Source : commission des finances
Le PLF pour 2025 prévoyait également une forte baisse l'année précédente. Cependant, les crédits de la mission avaient évolué au cours des discussions budgétaires et une hausse des crédits du patrimoine avait été adoptée au Sénat et conservée par la commission mixte paritaire (abordé pendant les auditions comme étant « l'amendement patrimoine », bien que la hausse des crédits ait concerné d'autres programmes de la mission). Les crédits du programme avaient en effet été abondés de 189,7 millions d'euros en AE et 100,4 millions d'euros en CP. En conséquence, le programme 175 avait vu son enveloppe budgétaire revenir en deçà de la baisse attendue en 2025.
Le ministère indique que « l'adoption de cet amendement ayant été relativement tardive dans la procédure parlementaire, il a été fait le choix par le responsable du programme 175 de ventiler cette annulation de manière homothétique, répartissant ainsi l'effort sur l'ensemble des acteurs patrimoniaux et des objets financés par le programme ».
Évolution des crédits du programme 175 entre le PLF et la LFI pour 2025
(en millions d'euros)
Source : commission des finances
Le rapporteur spécial Vincent Eblé souligne que la chute des crédits aura un impact sur l'ensemble des investissements prévus. En particulier, l'importante diminution des AE devrait se répercuter non seulement sur les grands chantiers, mais aussi sur les dépenses d'investissement et d'intervention dans les DRAC.
Les prévisions pour 2026 devraient en particulier porter sur la réduction de dépenses déconcentrées ou d'opérations prévues dans des monuments en région. Si les effets de la hausse consentie en 2025 devraient continuer de se faire sentir grâce à l'engagement des AE prévues en 2025, la diminution des AE prévues en 2026 devrait avoir des conséquences sur les travaux prévus les années suivantes. Pour cette raison, l'enveloppe globale de crédits de restauration allouée aux DRAC pour les travaux réalisés sur les monuments historiques appartenant à l'État est en baisse en AE (-29,1 millions d'euros) mais en hausse en CP (+ 7,7 millions d'euros)
Les opérations prévues dans les territoires (abbaye de Clairvaux, château de Gaillon...) devraient augmenter de 3 millions d'euros en CP mais diminuer de 29,8 millions d'euros en AE.
Le ministère indique que « la maîtrise des finances publiques conduit notamment à revoir le soutien du ministère de la Culture à certains secteurs et opérations dans les territoires ». Il cite en particulier :
- la suppression des crédits en base pour la mission du patrimoine en péril (loto du patrimoine) de 14,6 millions d'euros en AE et 11,5 millions d'euros en CP ;
- la réduction des crédits du fonds incitatif pour le patrimoine (FIP) de 9,3 millions d'euros en AE et 9,2 millions d'euros en CP ;
- la réduction de l'enveloppe globale des crédits d'intervention des DRAC de 45,6 millions d'euros en AE et 33,6 millions d'euros en CP.
Décomposition des principales mesures d'économies en AE
(en millions d'euros)
Source : commission des finances
B. LA RÉDUCTION DU NOMBRE DE GRANDS PROJETS PATRIMONIAUX
Si les financements dédiés aux grands projets continuent de constituer une part importante des crédits du programme 175, les crédits de l'action 01 - Monuments historiques et patrimoine monumental diminuent de 34 % en AE et 21 % en CP par rapport à 2025.
Le montant total prévu au présent PLF pour les grands travaux est estimé par le ministère à 57 millions d'euros en AE et 137 millions d'euros en CP. Au moins 12 opérations n'ont pas d'AE inscrite au PLF.
Grands travaux sur le programme 175 en 2026
(en millions d'euros)
|
Projets |
AE |
CP |
|
GP-RMN - Nouveau Grand-Palais |
0,00 |
6,00 |
|
Schéma directeur Fontainebleau |
0,00 |
3,24 |
|
Schéma directeur Versailles |
13,49 |
8,67 |
|
Schéma directeur CNAC-GP |
2,00 |
28,03 |
|
Extension Pierrefitte-sur-Seine |
0,00 |
23,03 |
|
Schéma directeur Quadrilatère des archives - Rohan Soubise |
3,95 |
6,23 |
|
Malaquais - Restauration du Palais des études |
0,00 |
1,80 |
|
Palais de la cité - APIJ |
0,00 |
2,92 |
|
Palais de la cité - CMN |
0,00 |
2,88 |
|
Abbaye de Clairvaux |
12,50 |
15,60 |
|
Schéma directeur Mobilier national |
0,00 |
1,50 |
|
Compiègne - Sécurisation et restauration façades et terrasse |
0,00 |
1,50 |
|
Schéma directeur EPPPD-Musée de l'histoire de l'immigration |
0,00 |
2,24 |
|
PPI Musée Guimet |
2,89 |
2,88 |
|
Château de Gaillon |
2,39 |
2,60 |
|
Cathédrale de Nantes |
6,40 |
3,41 |
|
Musée de la Tapisserie de Bayeux - Rénovation et extension du musée |
0,00 |
3,50 |
|
Schéma directeur Musée du Louvre |
10,00 |
10,00 |
|
Tours de La Rochelle / CMN |
0,00 |
3,00 |
|
Mise en sécurité et refonte du Musée d'Archéologie Nationale |
0,75 |
3,75 |
|
Schéma directeur Oradour-sur-Glane |
1,45 |
1,00 |
|
ENSA de Versailles |
1,20 |
1,92 |
|
Musée de Sèvres - Restauration du clos et couvert |
0,00 |
1,20 |
Source : ministère de la culture
Le rapporteur spécial Vincent Eblé juge que ces diminutions sont problématiques au regard de l'inscription dans le temps long de la plupart de ces grands travaux, dont certains impliquent la mobilisation de moyens de grande ampleur. C'est par exemple particulièrement le cas du schéma directeur technique du Centre Pompidou, pour lesquels les travaux viennent de débuter et devraient se prolonger jusqu'en 2029.
Variation prévue entre 2025 et 2026 par grand projet
(en millions d'euros)
|
Projet |
Variation en AE |
Variation en CP |
|
Archives nationales de Pierrefitte-sur-Seine |
- |
+ 6,0 |
|
Schéma directeur du Quadrilatère des archives |
+ 2,5 |
+ 0,7 |
|
Schéma directeur technique du Centre Pompidou |
+ 2 |
|
|
Mise en sécurité et refonte du Musée d'Archéologie National |
- 4,5 |
+ 2,8 |
|
Palais de la cité |
- 9,2 |
- 2,3 |
|
Schéma directeur de Versailles |
- |
- 4,9 |
|
Schéma directeur de Fontainebleau |
- 3,8 |
- 2,8 |
|
Tours de la Rochelle (CMN) |
- 14,7 |
- 2,4 |
Source : commission des finances d'après les données du ministère de la culture
Les travaux patrimoniaux se conçoivent généralement sur le temps long. Ainsi, l'extension du site des Archives Nationales à Pierrefitte-sur-Seine devrait s'étendre jusqu'en 2027. Les travaux engagés depuis 2021 sur le site parisien des Archives nationales, installé au sein du Quadrilatère des archives, en sont à la phase 2 alors que le schéma directeur comporte 6 phases.
Les montants en jeu sont par conséquent élevés, dans des sites d'ampleur internationale, alors que deux des chantiers concernent les schémas directeurs des grands châteaux franciliens. Le schéma directeur de Fontainebleau a pour objectif de sécuriser, restaurer et améliorer l'accueil du public. Le montant total de la phase 2, actuellement en cours, s'élève à 59,9 millions d'euros auxquels s'ajoutent un montant de 3,71 millions d'euros versé par le ministère de la transition écologique au titre des travaux sur le grand canal.
La phase 2.2 du schéma directeur de Versailles est plus ambitieuse en termes de crédits budgétaires. Elle vise la mise en sécurité, la mise en sûreté, la rénovation et la modernisation technique des réseaux et le traitement climatique du Corps central Nord. Son coût total est estimé à 198 millions d'euros.
Concernant la reconversion de l'ancienne abbaye de Clairvaux, celle-ci a été cédée par l'administration pénitentiaire. Le chantier en cours concerne la restauration du clos et couvert, pour un montant de 60 millions d'euros pour le seul grand cloître et jusqu'à 200 millions d'euros pour l'ensemble du couvert. 12,5 millions d'euros en AE et 15,6 millions d'euros en CP sont prévus en 2026. Comme chaque année, les rapporteurs soulignent qu'étant donné la taille du site et l'ampleur des enjeux, plusieurs points d'inquiétude peuvent-être soulignés : la rénovation du grand cloître, si elle est une étape nécessaire, ne permet pas pour autant d'envisager dans un futur proche la valorisation économique du site.
En revanche, les rapporteurs spéciaux se félicitent de la réouverture complète (pour la nef dès décembre 2024 et pour les tours depuis septembre 2025) de Notre-Dame de Paris.
Les constats positifs de la Cour des
comptes
sur le chantier de Notre-Dame de Paris
La Cour a rendu en septembre 2025 une évaluation positive du chantier de la cathédrale après l'incendie5(*). Elle salue « une restauration menée à bon terme, dans des délais exigeants et pour un coût maîtrisé ».
Le coût de cette phase de travaux avait été évalué en mai 2022 à 552 millions d'euros, dont 125,4 millions d'euros de provisions réparties entre hausse de prix (66,5 millions d'euros), aléas et imprévus (38,63 millions d'euros) et risques calendaires (20,22 millions d'euros). Cette dernière provision permettait en cas de nécessité de tenir l'échéance de 2024. Elle a donné lieu à une analyse approfondie du comité d'audit du conseil d'administration avec la présentation de trois scenarii permettant, comme l'avait suggéré la Cour dans son rapport de 2022, d'évaluer le rapport entre le coût de la prolongation du chantier et des dépenses qui auraient été engagées dans le seul but de tenir l'échéance de 2024. Cette étude a pu confirmer que « les mesures prises pour assurer le respect du calendrier de 2024 seront en toute hypothèse d'un coût inférieur à celui généré par un glissement du délai ».
Cette mise à niveau des équipements de sécurité mais aussi de sûreté pour faire face au flux considérable de visiteurs, conduit à une augmentation importante des charges de fonctionnement, qui doublent par rapport à leur niveau avant l'incendie. Celles-ci devraient représenter en année pleine une dépense de 5,2 millions d'euros, dont 3,2 millions d'euros à la charge du Diocèse de Paris et 2 millions d'euros pour l'État.
Au 31 mars 2024, le montant des dons au titre de la souscription nationale était évalué par l'établissement public à 843 millions d'euros, chiffre légèrement supérieur à celui anticipé en 2020 au vu des promesses (825 millions d'euros). Le budget de la phase de restauration permettant la réouverture en 2024 a été établi à 552 millions d'euros, faisant suite à un budget de 165 millions d'euros pour la phase de sécurisation et consolidation. Dès le début de la restauration, la question du financement par les dons de la troisième phase de travaux visant à traiter les pathologies antérieures à l'incendie et à assurer une restauration d'ensemble de l'édifice a été posée tant par les fondations que par l'établissement public. Le ministère de la culture, l'établissement public et les trois fondations collectrices ont approuvé le principe selon lequel la collecte auprès des donateurs individuels alimente exclusivement les première et deuxième phases de travaux. Seuls les dons des grands mécènes et entreprises seront, avec leur accord explicite, d'ores et déjà obtenu, réorientés vers la troisième phase de travaux. Ces accords permettent désormais d'affecter le solde de la collecte, soit au moins 140 millions d'euros en fonction de la clôture des derniers marchés de la deuxième phase, au financement de la troisième phase du chantier. Ce montant est supérieur à celui envisagé de 130 millions d'euros dans le rapport de la Cour de 2022 et sera abondé par une nouvelle levée de fonds déjà engagée par l'établissement public.
Le respect du budget de la phase de restauration liée à l'incendie doit être souligné. Il résulte d'un suivi rigoureux par la maîtrise d'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre, avec une forte implication du comité d'audit et une attention soutenue des fondations. Même si le chantier est exceptionnel, également par l'engagement des entreprises, des leçons pourraient être tirées par le ministère de la culture en termes de pilotage et de gestion financière par les maîtres d'ouvrages d'autres grands chantiers de monuments historiques.
Source : Cour des comptes
C. FACE À UNE FRÉQUENTATION TRÈS DYNAMIQUE, UNE POLITIQUE DE HAUSSE TARIFAIRE DANS LES MONUMENTS LES PLUS VISITÉS
1. Une hausse continue de la fréquentation des opérateurs du programme
La trajectoire de fréquentation des monuments patrimoniaux est en hausse constante en cours des dernières années, un record ayant été constaté en 2023 : par rapport à l'avant-crise sanitaire, la fréquentation annuelle en 2023 a enregistré une progression de plus de 6 %. La fréquentation des monuments nationaux du CMN avait même atteint un nouveau record en 2023 en dépassant de 15 % la fréquentation de 2019.
Si l'année 2024 a entraîné un léger retrait, celle-ci a rebondi en fin d'année 2024 après les jeux Olympiques et a continué à augmenter début 2025 (+ 1,4 % sur le premier quadrimestre 2025 par rapport au premier quadrimestre 2024).
En 2023 et 2024, le nombre de visiteurs cumulés sur l'ensemble des opérateurs du programme 175 a atteint 44 millions. Entre 2022 et 2024, il a crû de 13 %, dans une proportion légèrement inférieure pour les monuments nationaux (+ 10 %) que pour les musées (+ 15 %).
Évolution de la fréquentation des opérateurs du programme
(en nombre de visiteurs et en %)
|
2022 |
2023 |
2024 |
Évolution 2024/2022 |
|
|
Établissement public du musée du Louvre et musée Delacroix (EPML) |
7 808 430 |
8 861 479 |
8 738 384 |
12 % |
|
Établissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles (EPV) |
6 903 609 |
8 352 135 |
8 358 074 |
21 % |
|
Établissement public des musées d'Orsay et de l'Orangerie - Valéry Giscard d'Estaing (EPMO) |
4 287 229 |
5 111 037 |
4 950 375 |
15 % |
|
Centre national d'art et de culture - Georges Pompidou (CNAC-GP) |
3 009 512 |
2 621 696 |
3 204 369 |
6 % |
|
Établissement public du palais de la porte Dorée (EPPPD) |
497 903 |
635 714 |
634 946 |
28 % |
|
Établissement public du château de Fontainebleau |
312 693 |
419 166 |
425 982 |
36 % |
|
Établissement public du musée national Picasso-Paris |
361 158 |
558 907 |
482 405 |
34 % |
|
Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée (MUCEM) |
456 681 |
446 614 |
428 194 |
- 6 % |
|
Établissement public du musée du Quai Branly (EPMQB) |
1 005 357 |
1 410 641 |
1 271 151 |
26 % |
|
Musée national des arts asiatiques Guimet (MNAAG) |
171 608 |
251 342 |
307 281 |
79 % |
|
Cité de l'architecture et du patrimoine (CAPA) |
275 657 |
322 898 |
342 326 |
24 % |
|
Établissement public de la Réunion des musées nationaux - Grand Palais |
1 033 942 |
1 191 421 |
1 226 162 |
19 % |
|
Établissement public du musée national Jean-Jacques Henner et du musée national Gustave Moreau |
72 023 |
88 212 |
86 650 |
20 % |
|
Musée des arts décoratifs (Site Rivoli et Musée Nissim de Camondo (MAD) |
953 289 |
655 177 |
788 135 |
- 17 % |
|
Établissement public du musée Rodin (Paris et Meudon) |
562 458 |
612 709 |
533 252 |
- 5 % |
|
Établissement public du domaine national de Chambord |
1 053 946 |
1 148 509 |
1 186 851 |
13 % |
|
Centre des monuments nationaux (CMN) |
10 069 417 |
11 587 438 |
11 092 802 |
10 % |
|
TOTAL |
38 834 912 |
44 275 095 |
44 057 339 |
13 % |
|
dont Musées |
27 711 549 |
31 539 148 |
31 777 686 |
15 % |
|
dont Monuments nationaux |
11 123 363 |
12 735 947 |
12 279 653 |
10 % |
Source : ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire
2. Des recettes propres en hausse du fait d'une politique de hausse tarifaire
Comme l'ensemble des opérateurs de l'État, les opérateurs du ministère de la culture sont soumis à un impératif de développement de leurs ressources propres, d'autant plus que la forte fréquentation des sites et leur caractère patrimonial impliquent des investissements lourds et fréquents.
Depuis 2024, le ministère de la culture a donc engagé une réflexion en ce sens. La politique tarifaire est le principal levier, les grands musées et sites français étant pour la plupart largement en-deçà des tarifs pratiqués dans d'autres pays européens.
Dans leur rapport sur le centre des monuments nationaux de 20246(*), les rapporteurs spéciaux soulignaient que le prix moyen d'un billet du CMN s'élevait à 5 euros en moyenne et à 9 euros pour les seules visites payantes. Ce montant était inférieur de deux euros au tarif moyen mis en place par les autres opérateurs du patrimoine. Le CMN définit différents niveaux tarifaires, en fonction de l'attractivité et de la situation des monuments, mais également de sa situation géographique et de son intégration dans le tissu local. Ainsi, les monuments parisiens font-ils l'objet d'une tarification plus élevée. Le CMN assure également tenir compte dans la fixation d'une tarification adaptée des objectifs des monuments : ainsi a-t-il été fait le choix pour la cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts d'opter pour un tarif relativement peu élevé (où par ailleurs environ 40 % des visiteurs bénéficient d'entrées gratuites), afin d'assurer une attractivité pour le public local.
Cependant, afin de poursuivre le développement du CMN et au vu des besoins constants en entretien et en investissement, les rapporteurs spéciaux considéraient qu'il reste des marges d'augmentation tarifaire sur des monuments très fréquentés et tournés vers le tourisme national et international, en particulier à Paris, alors que la fréquentation des monuments parisiens continue de croître (Panthéon à la suite des différentes panthéonisations, ouverture de l'hôtel de la marine, réouverture prochaine des tours de Notre-Dame, etc...).
La troisième recommandation de leur rapport était de relever les tarifs des billets des grands monuments parisiens dont la fréquentation augmente fortement, afin de l'aligner sur les autres opérateurs culturels de la capitale.
Cette recommandation a été rapidement mise en oeuvre. En mai 2025, le CMN a mis en place une tarification en fonction de la saisonnalité dans 8 monuments parmi les plus fréquentés :
- À Paris : l'Arc de Triomphe, la Sainte Chapelle et le Panthéon ;
- En région : les châteaux d'Azay le Rideau et d'Angers, l'abbaye du Mont-Saint-Michel, le château et les remparts de Carcassonne ainsi qu'Aigues Mortes.
Le prix des billets est relevé dans ces monuments de 2 à 6 euros entre avril et septembre. Les tarifs en pleine saison restent identiques à ceux de la basse saison pour les publics les plus modestes qui ne bénéficient pas de la gratuité. Cette hausse saisonnière devrait selon le ministère permettre de dégager 3 millions d'euros dès 2025 et 5 millions d'euros à partir de 2026.
L'autre piste explorée par le ministère est la mise en place d'une tarification différenciée applicable aux visiteurs non-résidents de l'Espace économique européen (EEE) de plus de 18 ans. Cette mesure sera mise en place dans quelques établissements à partir de janvier 2026.
Concernant le choix des sites concernés, la différenciation tarifaire ne sera appliquée qu'aux sites disposant d'un volume important de visiteurs non-résidents européens, plus précisément dont les visiteurs hors EEE représentent plus de 60 % de visiteurs. Sont donc concernés sur la base de ce critère : le musée du Louvre, le château, musée et domaine national de Versailles et pour le centre des monuments nationaux : la Sainte-Chapelle (la Sainte Chapelle et la Conciergerie pour le billet jumelé). Le domaine national de Chambord s'est également porté volontaire.
Chaque établissement est libre de déterminer sa politique tarifaire. En conséquence, le montant de la hausse n'est pas le même dans tous les monuments et varie de 10 euros au Louvre à 2 euros dans certains monuments du CMN.
Principales hausses tarifaires en 2025-2026
(en euros)
|
Monument |
Public concerné par la hausse tarifaire |
Hausse tarifaire |
|
Musée du Louvre |
Non-résidents UE |
+ 10 |
|
Château de Versailles |
Non-résidents UE |
+ 3 |
|
Sainte-Chapelle |
Non-résidents UE |
+ 6 |
|
Domaine national de Chambord |
Non-résidents UE |
+ 10 |
|
Monuments les plus fréquentés du CMN |
Tous publics plein tarif, mais en haute saison seulement |
+ 2 à + 5 |
Source : commission des finances d'après les réponses du ministère de la culture
Ces hausses tarifaires devraient permettre de dégager plus de 23 millions d'euros de recettes supplémentaires dès 2026. Celles-ci varient selon les opérateurs (en atteignant 15 à 20 millions d'euros pour le Louvre). Le ministère assure que ces estimations prennent en compte l'effet d'éviction du tarif sur les intentions de visite ainsi que les adaptations dans les établissements (logiciels, agents de contrôle, etc.). La direction générale des patrimoines appelle cependant à « la plus grande prudence » quant à l'estimation des gains en 2026. Faute de pouvoir contrôler l'identité de l'ensemble des visiteurs, le musée du Louvre a indiqué lors de son audition tabler sur un risque de fraude d'environ 20 %, en 2026, avec plus de 2 millions de visiteurs impactés. Comme indiqué plus bas, le Louvre estime par exemple devoir s'attendre à 20 % de fraude environ.
Recettes attendues de la hausse différenciée de la tarification
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les réponses du ministère de la culture
Concernant la mise en place d'une tarification à l'entrée à Notre-Dame de Paris, celle-ci n'est toujours pas à l'ordre du jour du fait de l'opposition du clergé.
Le cadre juridique applicable à la
tarification d'entrée dans les lieux de culte
et le cas de
Notre-Dame de Paris
Le cadre général
L'article 17 de la loi du 9 décembre 1905 portant séparation des Églises et de l'État dispose que « la visite des édifices [du culte] et l'exposition des objets mobiliers classés seront publiques : elles ne pourront donner lieu à aucune taxe ni redevance ». Contrairement à ce qui est parfois avancé, cette disposition n'avait pas pour but de garantir le libre accès des édifices aux fidèles. Elle avait pour objet, comme le montrent les travaux parlementaires, de s'assurer que toute personne, quelle que soit sa religion ou son absence de religion, pourrait visiter les édifices et les objets mobiliers classés.
L'article L. 2124-31 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) déroge à l'article 17 de la loi de 1905, en disposant que « lorsque la visite de parties d'édifices affectés au culte, notamment de celles où sont exposés des objets mobiliers classés ou inscrits, justifie des modalités particulières d'organisation (...) cet accès (...) donne lieu, le cas échéant, au versement d'une redevance domaniale dont le produit peut être partagé entre la collectivité propriétaire et l'affectataire ». Le CG3P précise que l'accès payant peut concerner des « parties d'édifices ».
Dans les 87 cathédrales appartenant à l'État, affectées au ministère de la Culture par décret du 4 juillet 1912, les visites payantes sont assurées par le Centre des monuments nationaux (CMN), établissement public auquel l'État (ministère de la Culture et ministère des Finances) a confié la gestion domaniale des édifices, par convention de gestion renouvelée le 18 octobre 2019. À la cathédrale Notre-Dame de Paris, le CMN assure ainsi directement la visite payante du circuit des tours, mais l'association Maurice-de-Sully assure celle du trésor, ces activités non cultuelles faisant l'objet d'une convention établie entre le CMN, le clergé affectataire cultuel, l'association Maurice-de-Sully et l'État, ministère de la Culture.
Le cas de Notre-Dame de Paris : une tarification qui ne suppose pas de modification législative
Pour être conforme aux dispositions combinées de l'article 17 de loi du 9 décembre 1905 et de l'article L.2124-31 du CG3P, l'institution d'un droit d'entrée pour la cathédrale Notre-Dame de Paris - au-delà des tarifications existantes pour le trésor et le circuit de visite des tours - pourrait concerner une partie de la cathédrale, par exemple le déambulatoire,
Les recettes issues de cette nouvelle tarification pourraient être partagées entre l'État et le clergé (cf. art. L.2124-31 du CG3P). Une partie pourrait être utilisée par chacune des parties pour financer les dépenses relatives au fonctionnement de la cathédrale relevant de sa responsabilité (notamment la sûreté pour le clergé et la sécurité pour l'État). Ces recettes pourraient également être dirigées par le ministère de la Culture vers les travaux de restauration d'édifices religieux classés ou inscrits au titre des monuments historiques, notamment en milieu rural - selon des modalités à préciser - ou, par l'administration compétente, vers les travaux de restauration d'édifices religieux non protégés au titre des monuments historiques.
En application des lois de séparation des Églises et de l'État, toute activité ayant lieu dans un édifice du culte requiert l'accord du desservant, affectataire cultuel, qui apprécie sa compatibilité avec l'exercice du culte. Cette subordination de tout usage d'un lieu de culte à son affectation cultuelle est rappelée de manière constante par la jurisprudence, notamment dans le cadre des deux décisions 135842 (4 novembre 1994) et 284307 (25 août 2005) du Conseil d'État.
Le ministère indique que la réflexion pour la mise en place d'une tarification de l'accès à la cathédrale (au-delà des tarifications existantes pour le trésor et le circuit de visite des tours), à laquelle la ministre de la Culture s'est déclarée favorable, n'a pas connu d'avancement récent, dans la mesure où le clergé - dont l'accord est indispensable - a plusieurs fois exprimé son opposition de principe à ce projet.
Source : réponses au questionnaire budgétaire
3. L'établissement public du musée du Louvre, des recettes élevées mais des investissements structurants à anticiper
a) Des financements de l'État stables mais dont le poids dans les recettes du musée diminue
La SCSP versée à l'établissement en 2026 devrait s'élever à 90,4 millions d'euros (soit 88 millions d'euros après application de la réserve de précaution), ce qui en fait le cinquième opérateur du ministère en termes de subvention. La SCSP est relativement stable au cours des dernières années (elle était de 93 millions d'euros en 2018). En parallèle, la subvention pour charges d'investissement du musée a également décru jusqu'en 2025, avant de repartir à la hausse en 2025 et 2026 dans le cadre du financement du projet Louvre - Nouvelle renaissance (cf. infra).
En conséquence, les subventions de l'État représentent un poids continuellement décroissant dans le total des recettes du musée : il était de 42 % en 2018 contre seulement 28 % en 2026.
Le Louvre a pour particularité d'avoir un des taux de recettes propres parmi les plus élevés des opérateurs culturels (68 % de ses recettes proviennent de ressources propres). Celles-ci sont par ailleurs en forte croissance (en hausse de 10 points depuis 2018), tirées par la hausse des recettes de mécénat et celles de billetterie.
Recettes de billetterie du musée du Louvre
(en millions d'euros et en pourcentage)
Source : commission des finances d'après le Louvre
La hausse des recettes de billetterie constatée récemment (+ 8 millions d'euros entre 2024 et 2025) découle en grande partie de la hausse des tarifs d'entrée en 2024. Sur le moyen terme, la fréquentation du musée est stable au cours de la dernière décennie, les 9 millions d'euros de visiteurs annuels ayant été atteints en 2012 et conservés depuis, à l'exception des suites des attentats de 2015 et de la crise sanitaire. En outre, depuis 2022, le nombre annuel de visiteurs ne peut plus croître dans d'importantes proportions du fait de la jauge fixée à 30 000 visiteurs par jour.
b) Le projet de transformation du musée Louvre - Nouvelle renaissance
Le projet « Louvre - Nouvelle Renaissance » a été annoncé par le Président de la République en janvier 2025. Celui-ci, prévu pour s'échelonner jusqu'en 2034, doit constituer une refondation complète du musée, notamment afin de faire face à la croissance de la fréquentation et aux besoins d'investissement et de modernisation du musée.
Le musée indique que le projet comporte deux volets architecturaux :
- l'opération « Grande Colonnade », la plus médiatique, doit permettre la création de nouveaux accès au musée depuis l'esplanade de la Grande Colonnade et de nouveaux espaces muséographiques sous la Cour Carrée, en particulier un parcours dévolu à la Joconde faisant l'objet d'une tarification spécifique ;
- l'opération « Louvre Demain », constitue un plan plus classique de rénovation du patrimoine et des infrastructures de l'établissement, à travers la définition de schémas directeurs pluriannuels en deux phases.
Le projet se veut en grande partie autofinancé. Ce devrait être intégralement le cas pour les travaux de la grande colonnade, dont le projet de financement repose uniquement sur des ressources propres. Les schémas directeurs devraient quant à eux nécessiter une hausse de la subvention pour charges d'investissement de 10 millions d'euros par an. Le musée indique que l'intégralité des marges de manoeuvre financière dégagées par la hausse de la billetterie devrait être réinjectées dans le financement des schémas directeurs.
Plan de financement du projet Louvre Nouvelle Renaissance
Source : musée du Louvre
Le musée indique que la trésorerie fléchée de l'établissement devrait augmenter en conséquence, le « besoin de fléchage dépassant le solde final de trésorerie à compter de 2028 ».
En dehors des grands projets d'investissement, l'essentiel des dépenses du Louvre est consacré à ses dépenses de personnel (43 %), les acquisitions et entretien des collections représentant 9 % du total des dépenses.
Ventilation des dépenses du musée du Louvre en 2025
(en %)
Source : commission des finances d'après le Louvre
III. LE PROGRAMME 361 « TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE » : UNE DIMINUTION DES CRÉDITS EN GRANDE PARTIE LIÉE À LA RÉFORME DU PASS CULTURE
Créé en loi de finances pour 2021 et issu pour partie du programme 224, le programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » est géré par la nouvelle direction générale de la démocratie culturelle, des enseignements et de la recherche.
Le programme porte les crédits de deux politiques principales. D'une part, il soutient les écoles de l'enseignement supérieur culture. D'autre part, il porte les crédits dédiés à l'accès des publics à la culture, et en particulier les dispositifs d'éducation artistique et culturelle portés par le ministère (Pass culture en premier lieu).
Les crédits du programme 361 s'élèveraient en 2026 à 810,8 millions d'euros en AE et 722 millions d'euros en CP. Cela correspond à une baisse en de 9 % en AE et de 5 % en CP par rapport à 2025.
Principales mesures nouvelles sur les
crédits du programme 361
entre 2025 et 2026
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les données du ministère
A. DES MOYENS PRÉVUS À DESTINATION DES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR CULTURE
L'enseignement supérieur Culture (ESC) compte 99 établissements répartis sur l'ensemble du territoire qui accueillent plus de 36 000 étudiants. La très grande majorité d'entre eux étudient dans les écoles d'architectures ou dans les écoles d'art.
Nombre d'étudiants scolarisés dans
les établissements
de l'enseignement supérieur culture en
2023-2024
|
Nombre d'établissements |
Nombre d'étudiants |
|
|
Architecture et paysage |
21 |
18 900 |
|
Patrimoine |
2 |
1 800 |
|
Arts et design |
44 |
11 400 |
|
Spectacle vivant |
33 |
3 800 |
|
Cinéma |
2 |
340 |
Source : commission des finances d'après les données du ministère
Les montants prévus pour l'enseignement supérieur culture en 2026 sont de 331,6 millions d'euros en AE et 322,6 millions d'euros en CP. Cela correspond à une diminution de 8 % en AE (le niveau des AE ayant été relevé en 2025) mais en revanche à une légère croissance des CP (+ 1 %).
Cette diminution des AE du programme découle de la réduction des dépenses d'investissement immobilier dans les établissements de l'enseignement supérieur culture. Les dépenses immobilières (hors CPER) sont réduites de 30,5 millions d'euros en AE et de 4,2 millions d'euros en CP.
Crédits prévus en 2026 au titre de l'enseignement supérieur culture
Source : commission des finances du Sénat
Il convient de rappeler que les dotations avaient été fortement majorées de 8,3 % en AE et 7,4 % en CP en 2024.
Sur le total du programme, 51 millions d'euros sont dédiés au soutien aux étudiants, en grande partie par l'attribution de bourses sur critères sociaux.
Financements du programme 361 en faveur de l'enseignement supérieur culture
(en millions d'euros en CP)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Les enseignants des écoles de l'enseignement supérieur culture sont caractérisés par une part importante d'enseignants contractuels, relevant de plusieurs cas.
Ainsi, au sein des écoles supérieures nationales d'architecture, on distingue les enseignants contractuels associés (77 % des enseignants), relevant du titre 2, des enseignants contractuels portés sur le titre 3 (23 %). À la suite du Protocole d'accord relatif au plan d'accès à l'emploi titulaire dans les écoles nationales supérieures d'architecture de 2017, le nombre d'enseignants contractuels et d'intervenants extérieurs de titre 3 a diminué de 16 % entre 2016 et 2022. Ils restent néanmoins très nombreux et leur rémunération était historiquement très en deçà des équivalents pour des postes d'enseignants contractuels dans le reste de l'enseignement supérieur.
Ils ont donc fait l'objet de mesures salariales spécifiques en 2024 et 2025, dont une partie devrait être poursuivie en 2026 (sur les crédits du programme 224).
En 2024, les personnels de l'enseignement supérieur culture ont bénéficié de deux types de mesures :
- les mesures statutaires (3,59 millions d'euros) ont permis principalement de rapprocher les grilles indiciaires des enseignants-chercheurs (professeurs et maîtres de conférences) des écoles nationales supérieures d'architecture (ENSA) de celle des enseignants-chercheurs de l'enseignement supérieur ;
- les mesures indemnitaires avaient pour objectif de poursuivre les revalorisations des agents de catégorie A et A+ (1,7 million d'euros), de contribuer à la résorption des écarts de rémunération entre les agents du ministère de la Culture constatés avec les autres départements ministériels et de poursuivre la revalorisation du nouveau régime indemnitaire des enseignants-chercheurs des ENSA, avec une première prime liée au grade bénéficiant à l'ensemble des professeurs et maîtres de conférences (1,3 million d'euros).
Le ministère souhaitait notamment construire une première étape de la refonte du cadre de gestion des contractuels, ciblée pour les B et les C (financement prévu de 6,2 millions d'euros), mais qui n'a pas pu être appliquée du fait des annulations en gestion en 2024.
Un nouvel accord, plus large, a été signé le 14 mars 2025 sur la revalorisation des enseignants et personnels pédagogiques contractuels d'une partie des établissements de l'enseignement supérieur culture sous tutelle au-delà des ENSA.
Le protocole d'amélioration des
contractuels
de l'enseignement supérieur culture de 2025
Ce nouvel accord concerne :
- les enseignants contractuels des écoles nationales supérieures d'architecture (ENSA) ;
- certaines écoles nationales supérieures d'art (ENSART) ;
- les accompagnateurs, assistants, professeurs et professeurs associés des conservatoires nationaux supérieurs de musique et de danse (CNSMD) de Paris et de Lyon.
Le nouveau cadre de rémunération repose sur la définition de grilles indiciaires. Fondé sur le principe d'une rémunération qui augmente progressivement avec l'ancienneté, elle offre une véritable perspective de carrière à ces agents. Les grilles indiciaires définies par cet accord ont été construites par référence à celles appliquées aux agents titulaires exerçant des missions similaires ou comparables. Aucune rémunération indemnitaire n'est prévue par l'accord. Juridiquement, le conseil d'administration de chaque établissement a délibéré au cours de l'année 2025 pour adopter les mesures de l'accord, afin de procéder au reclassement des agents concernés (en stock) et de recruter sur les nouvelles grilles (en flux).
Cette mesure aboutit à une revalorisation de 4 millions d'euros répartie entre le titre 2, pour les maitres de conférences associés et les invités des ENSA (et le titre 3 des opérateurs concernés, pour les enseignants contractuels des ENSA et écoles nationales supérieures d'art et le personnel pédagogique des conservatoires de musique et danse.
Dans les écoles, le financement de la mesure sur leurs dépenses de personnel est entièrement compensé par le ministère, via un complément de leur subvention pour charge de service public (sur le titre 3), en fin d'exercice 2025. Un nouveau transfert en gestion sera effectué en 2026, puis les abondements seront consolidés en socle au PLF 2027.
Source : commission des finances d'après le ministère
B. DES CRÉDITS POUR L'ÉDUCATION ARTISTIQUE ET CULTURELLE QUI S'ÉLÈVENT À PRÈS DE 380 MILLIONS D'EUROS
1. Une diminution de 43 millions d'euros des moyens consacrés au Pass culture consécutive à sa réforme début 2025
Le présent projet de loi de finances prévoit une dotation de 127,5 millions d'euros de crédits (AE = CP) pour le financement du volet individuel du Pass culture. Le montant prévu en PLF pour 2025 était initialement de 210,5 millions d'euros, mais la commission mixte paritaire avait adopté une réduction des crédits du Pass culture. L'économie supplémentaire prévue en 2026 s'élève donc à 43 millions d'euros.
Le Pass Culture représente 25 % des crédits du programme 361. La société par actions simplifiées (SAS) Pass Culture est également le deuxième opérateur du ministère de la Culture, derrière la Bibliothèque nationale de France.
Selon le décret n° 2021-1453 du 6 novembre 2021, le pass Culture comporte désormais deux parts :
- une part individuelle applicable à chaque jeune de 15 à 17 ans, financée par le ministère de la Culture ;
- une part dite collective, destinée exclusivement à financer des activités rattachées à l'éducation artistique et culturelle effectuées en groupes et encadrées par des professeurs. Cette part s'applique aux élèves de la sixième à la terminale scolarisés dans un collège ou lycée public ou privé sous contrat, ainsi qu'à tout élève inscrit en certificat d'aptitude professionnelle sous statut scolaire. Cette part est financée au prorata de leurs effectifs concernés par les ministères en charge de l'éducation nationale, de la mer, des armées et de l'agriculture.
Le volet collectif du Pass Culture
La loi de finances pour 2022 a permis de faire évoluer le dispositif en l'ouvrant aux élèves à partir de la classe de 4e, qui sous la responsabilité des enseignants, bénéficient d'un crédit (25 euros par élève en quatrième et en troisième, 30 euros en seconde et 20 euros en première et en terminale) à dépenser dans un cadre collectif : sortie culturelle, accueil d'un professionnel... Le dispositif a été étendu aux élèves de sixième et de cinquième à compter de la rentrée scolaire 2023.
Sur l'année scolaire 2023-2024, 72 % des élèves éligibles à la part collective ont bénéficié d'au moins une action financée grâce au Pass Culture durant l'année scolaire 2023-2024 et 96 % des établissements scolaires ont effectué au moins une réservation sur la même période.
Pour l'année scolaire 2023-2024, les fonds de la part collective du Pass Culture apportés par le MEN sont utilisés par les établissements dans les domaines suivants :
- atelier de pratique : 17,7 % ;
- conférence rencontre : 7,0 % ;
- projection audiovisuelle : 20,5 % ;
- représentation : 28,5 % ;
- visite guidée : 13,7 % ;
- visite libre : 4,9 % ;
- autre : 7,7 %.
Source : commission des finances d'après le ministère de l'Éducation nationale
Les crédits accordés au Pass culture ne diminuent cependant globalement que de 22 % par rapport à 2025 en tenant compte du volet collectif du Pass Culture, financé par les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Évolution des crédits
affectés au financement du Pass culture
depuis 2019
(en millions d'euros)
Source : commission des finances
L'exécution 2023 avait révélé une très importante surconsommation des crédits dédiés au pass : les crédits effectivement exécutés sont supérieurs de près de 15 % à ceux prévus en LFI. Ce faisant, les crédits ont augmenté de 40 millions d'euros entre 2022 et 2023. La surconsommation est moindre en 2023 mais les montants exécutés atteignent tout de même près de 10 millions d'euros de plus que ceux prévus en LFI. Le programme 361 a bénéficié d'un dégel de la réserve de précaution à hauteur de 10,7 millions d'euros en AE et 7,03 millions d'euros en loi de finances de fin de gestion7(*) afin de financer le Pass culture, qui constitue une dépense dite « de guichet ».
La SAS Pass culture note que la réforme engagée en mars 2025 engendre à ce stade un ralentissement à la fois du rythme de consommation de leurs crédits par les jeunes et des inscriptions à 18 ans. Néanmoins, les montants prévus au PLF ne devraient de nouveau pas être suffisants pour 2025. Le ministère indique que, sous toutes réserves, la situation devrait également se reproduire en 2026.
Exécution des crédits du programme 361 dédiés au Pass Culture depuis 2019
(en millions d'euros)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Les rapporteurs spéciaux ont consacré un contrôle budgétaire au Pass culture dans un rapport d'information de 20238(*). Ils soulignaient que des interrogations demeuraient sur un plan qualitatif. Ces analyses ont été reprises et développées par d'autres rapports rendus en 2024.
S'agissant du volet individuel, ils relèvent que la logique prescriptive du pass demeure relativement faible. Il est, plus largement, regrettable qu'aucun objectif n'ait été assigné à cette politique publique en matière de médiation culturelle, de diversification culturelle ou d'affirmation des droits culturels. Ce faisant, le ministère de la culture prend le risque de résumer le volet individuel du pass à une simple plateforme d'achat de biens et de services.
Il est indispensable qu'il soit plus « éditorialisé » afin de participer à la mise en place d'un véritable parcours culturel qui permette notamment de mieux orienter les réservations vers deux grands absents : le spectacle vivant et les musées. Au-delà de la question de la médiation culturelle, l'accent doit également être mis sur l'accès des jeunes non-scolarisés au pass.
Les rapporteurs spéciaux relèvent par ailleurs que le volet collectif semble plus enclin à atteindre l'objectif de diversification des pratiques culturelles assigné au pass que le volet individuel et que l'articulation entre les deux parts semble insuffisante.
L'évaluation menée par l'inspection générale des affaires culturelles (IGAC) de mai 20249(*) a aussi livré une vision pour le moins mitigée du dispositif. Elle note que les impacts sur les pratiques culturelles des bénéficiaires du dispositif apparaissent « contrastés » et que la capacité du pass Culture à transformer les pratiques culturelles est « incertaine ». Plus clairement encore, « la capacité du pass Culture à atteindre ses objectifs de service public ne peut être démontrée : l'intensification des pratiques culturelles des bénéficiaires du dispositif semble établie, mais son caractère durable apparaît incertain ; la diversification de ces pratiques est impossible à démontrer. Dans ces conditions, faute de pouvoir établir que l'utilisation du pass Culture favorise la réduction des écarts de pratiques culturelles entre milieux sociaux, l'existence d'effets d'aubaine ne peut être exclue ».
La Cour des comptes a émis des critiques similaires dans son rapport de décembre 202410(*) : « ce réel succès en termes de couverture globale ne saurait toutefois occulter le fait que le pass Culture n'a que partiellement réussi à toucher les jeunes les moins familiers des pratiques culturelles », entretenant ainsi un « effet d'aubaine » pour les jeunes disposant d'un « capital culturel plus élevé ». La Cour alertait notamment sur le coût du Pass culture, dans un contexte financier dégradé. Elle indiquait ainsi que « des arbitrages doivent être pris pour mettre un terme à la croissance non maîtrisée des crédits budgétaires du pass Culture ».
La Cour des comptes proposait plusieurs pistes, dont la réduction du montant du crédit alloué aux jeunes âgés de 18 ans ; la mise sous condition de ressources ; le ciblage des bénéficiaires selon des critères sociaux (boursiers) ou territoriaux (quartiers de la politique de la ville, milieu rural). Avant la parution du rapport de la Cour des comptes, la commission des finances du Sénat avait déjà porté un amendement visant à recentrer le dispositif sur les boursiers. Le recentrage sur les seuls boursiers devait ramener le coût du dispositif (sur la base d'hypothèses de consommation et de taux de recours identiques à ceux des deux années précédentes) à 55 millions d'euros.
De façon regrettable, la réforme mise en place par décret en février 202511(*) prend le contre-pied des propositions de réformes du Sénat et de la Cour. Loin d'axer davantage le dispositif sur les jeunes de 15 à 17 ans, comme le préconisaient l'ensemble des acteurs, la réforme concentre l'essentiel du dispositif sur les jeunes âgés de 18 ans et plus. Désormais, les jeunes de 15 à 16 ans sont exclus du dispositif, alors que les jeunes de 18 ans bénéficient de 150 euros, toujours sans condition de ressources.
Une bonification, portant le montant à 200 euros, peut toutefois être accordée pour certains jeunes bénéficiaires d'allocation aux adultes handicapés ou dont les parents ont un revenu inférieur à un niveau fixé par arrêté. L'arrêté n'est cependant toujours pas publié à l'heure actuelle, le ministère ayant indiqué faire face à des difficultés de collecte et de traitement des données, en particulier pour les jeunes mineurs.
Le ministère indique « qu'à terme, la réforme prévoit que les jeunes éligibles se voient automatiquement crédités du « Coup de pouce Culture », sans avoir besoin d'en faire la demande ». Les seuils seront arbitrés de manière à viser, tous critères confondus, une proportion d'environ 30 % de bénéficiaires du Pass pour l'attribution de ce « Coup de pouce Culture ».
Impact de la réforme du Pass culture par tranches d'âge
|
Âge |
Avant la réforme |
Après la réforme |
|
15 ans |
20 euros |
0 |
|
16 ans |
30 euros |
0 |
|
17 ans |
30 euros |
50 euros |
|
18 ans |
300 euros |
150 euros + une bonification de 50 euros sous conditions |
Source : commission des finances du Sénat
En outre, la réforme de 2025 n'aura atteint son plein effet budgétaire qu'en différé, dès lors que les jeunes acquièrent des droits au Pass culture qu'ils peuvent ensuite mobiliser pendant les trois années suivantes. Les jeunes inscrits avant mars 2025 bénéficient toujours de crédits sur une enveloppe totale de 300 euros. En conséquence, une extinction éventuelle du dispositif devrait s'accompagner du maintien de financements pendant trois ans.
La transformation de la SAS Pass culture en opérateur de l'État
Plusieurs rapports, y compris celui publié au nom de la commission des finances par les rapporteurs spéciaux en 2023 recommandaient l'évolution de la SAS Pass Culture en opérateur de l'État. Elle interviendra le 1er janvier 2026.
L'objectif de cette transformation est de répondre aux demandes de transparence accrue de son action vis-à-vis du Parlement, et de piloter les emplois de la SAS en lui affectant un plafond d'emplois autorisé en loi de finances. En conséquence :
- la SAS Pass Culture est inscrite à l'annexe budgétaire du PLF concernant les opérateurs ;
- l'opérateur est donc désormais sous plafond d'emplois, qui s'élève pour 2026 à 176 ETPT.
Le statut juridique de l'opérateur (établissement public industriel et commercial ou à caractère administratif) n'est quant à lui pas fixé. Le ministère indique attendre le résultat d'une phase de réflexion préalable : « la SAS pass Culture a engagé des économies sur ses dépenses de fonctionnement, une objectivation des coûts analytiques de ses activités, et va ouvrir un chantier de diversification de ses ressources en lien avec sa tutelle ».
Source : commission des finances d'après le ministère
2. Des moyens conservés pour l'éducation artistique et culturelle en dehors du Pass Culture
Si le Pass Culture représente une part importante des crédits dédiés à l'éducation artistique et culturelle, l'État finance d'autres actions sur le programme 361. Au-delà du Pass Culture, le soutien à la démocratisation et à l'éducation artistique et culturelle (EAC) se matérialise par deux lignes de crédits dédiées.
Répartition des crédits de l'action
2
« Soutien à la démocratisation et à
l'éducation artistique et culturelle » en 2026
(en % et en millions d'euros)
Source : commission des finances
Les crédits dédiés à l'éducation artistique et culturelle proprement dite sont stables par rapport à 2025. La LFI pour 2025 avait cependant déjà diminué d'environ 20 % les crédits dédiés par rapport à l'exécuté 2024.
Évolution des crédits prévus
pour l'éducation artistique et culturelle
hors Pass Culture
(en millions d'euros)
|
|
Exécution 2023 |
LFI 2024 |
LFI 2025 |
PLF 2026 |
||||
|
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
|
|
Éveil artistique et culturel |
0,20 |
0,20 |
0,20 |
0,20 |
||||
|
Éducation artistique et culturelle en temps scolaire |
26,95 |
26,96 |
24,04 |
23,94 |
26,64 |
26,64 |
26,64 |
26,64 |
|
Éducation artistique et culturelle hors temps scolaire |
30,5 |
30,51 |
14,01 |
14,12 |
19,29 |
19,29 |
19,29 |
19,29 |
|
Goût du livre et de la lecture |
16,55 |
18,64 |
21,47 |
21,47 |
6,55 |
6,55 |
6,55 |
6,55 |
|
Actions des conservatoires |
14,38 |
14,38 |
14,14 |
14,14 |
13,36 |
13,36 |
13,36 |
13,36 |
|
Partenariats et contractualisation avec les collectivités territoriales |
15,23 |
15,23 |
15,28 |
15,44 |
11,35 |
11,35 |
11,35 |
11,35 |
|
Éducation aux médias et à l'information |
9,38 |
9,37 |
7,4 |
7,4 |
3,14 |
3,14 |
3,14 |
3,14 |
|
Formation des acteurs de l'éducation artistique et culturelle |
9,27 |
9,26 |
7 |
7 |
1,84 |
1,84 |
1,74 |
1,74 |
|
Compensation gratuité enseignants |
3,94 |
3,84 |
4 |
4 |
3,20 |
3,20 |
3,20 |
3,20 |
|
Total |
126,19 |
128,19 |
107,34 |
107,5 |
85,56 |
85,56 |
85,46 |
85,46 |
Source : commission des finances
Les crédits diminuent tendanciellement à l'échelle des dernières années. S'agissant de la différence entre 2023, d'une part, et 2024 et 2025, d'autre part, elle résulte en grande partie de la fin de crédits spécifiquement affectés au financement de l'Été culturel (actions d'EAC pendant les vacances d'été) qui n'a été possible en 2023 et 2024 que par le redéploiement de crédits en gestion.
Le ministère indique que la diminution des crédits constatée entre 2024 et 2025 s'explique en grande partie par des évolutions de périmètre. S'agissant de la formation des acteurs de l'EAC, la baisse (- 4,9 millions d'euros) s'explique par un redéploiement des crédits pour la formation des acteurs concourant à la démocratisation culturelle hors scolaires (participation à la vie culturelle des publics adultes en situation spécifique par exemple), désormais programmés sous d'autres sous-actions.
Les montants portés par le programme 131 doivent cependant être mis en regard du montant global en faveur de l'éducation artistique et culturelle. La Cour des comptes indique dans un récent rapport12(*) que l'effort public consacré à l'éducation artistique et culturelle s'est élevé en 2023 à 3,5 milliards d'euros, dont 3 milliards d'euros de financements de l'État et environ 600 millions d'euros des collectivités territoriales. L'essentiel est porté par l'éducation nationale, qui dépense annuellement plus de 2,6 milliards d'euros pour la rémunération des enseignements artistiques. En conséquence, les 86 millions d'euros prévus sur le présent programme ne sauraient être immédiatement assimilés à une réduction de l'effort de l'État en direction de l'EAC.
Organisation de l'éducation artistique et culturelle
Source : Cour des comptes
La Cour est directement critique sur l'organisation générale de l'écosystème de l'éduction artistique et culturelle ; le constat d'une « mosaïque d'interventions, pas toujours lisible pour les établissements scolaires tant les acteurs sont nombreux, conduit à préconiser la recherche d'une meilleure articulation entre leurs dispositifs et financements respectifs, qu'il s'agisse d'en assurer la complémentarité ou de les fusionner dans des dispositifs communs cofinancés ».
Cette remarque va dans le sens des interrogations régulièrement exprimées par les rapporteurs spéciaux quant à l'efficacité des crédits sur le programme 361, alors que la multiplication d'actions ou de sous-actions pour des montants faibles peuvent faire craindre un risque de saupoudrage.
À titre d'exemple, il n'existe pas dans les documents budgétaires d'indicateurs spécifiques à l'éducation artistique et culturelle hors Pass Culture. L'indicateur n° 2 (Part des enfants et adolescents ayant bénéficié d'une action d'éducation artistique et culturelle) est en effet largement tiré par la part collective du Pass et ne permet pas d'avoir une image claire des publics concernés et de l'impact concret de ces actions.
Le ministère indique mener « une réflexion sur la rationalisation des actions menées dans le cadre de l'EAC pour évaluer la pertinence et la portée de son financement ». Les rapporteurs s'en félicitent et espère que cette réflexion débouchera en effet sur une approche clarifiée.
C. DE NOMBREUSES QUESTIONS EN SUSPENS CONCERNANT UNIVERSCIENCE
L'établissement public du Palais de la découverte et de la Cité des sciences et de l'industrie (EPPDCSI), dit Universcience, est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) créé en 2010.
Sa SCSP s'élève à 113 millions d'euros en 2026, à laquelle s'ajoutent 5,6 millions d'euros de subvention pour charges d'investissement. La SCSP représente 79 % des ressources de l'opérateur en 2025.
Subvention pour charges de service public d'Universcience en LFI
(en millions d'euros)
Source : commission des finances
La situation financière de l'établissement est fragile. Celui-ci devrait être en déficit en 2025 et devrait selon l'annexe « Opérateurs » du PLF prélever 13,3 millions d'euros sur son fonds de roulement en 2025.
Ventilation des recettes d'Universcience en 2025
(en % et en millions d'euros)
Source : commission des finances
Les ressources propres de la Cité sont cependant limitées : elles s'élèvent à 20 millions d'euros en 2024. L'établissement a procédé à des hausses tarifaires à deux reprises, en 2023 et 2025. Ce levier ne peut donc être remobilisé de nouveau en 2026. Les recettes de billetterie représentent 10 millions d'euros en 2025, soit 10 % du total des recettes de l'établissement (mais près de la moitié de ses ressources propres).
Ventilation des recettes propres d'Universcience en 2025
(en millions d'euros)
Source : commission des finances
Par ailleurs, outre les travaux qui se prolongent au Palais de la découverte (cf. encadré ci-dessous), le site de la Villette (Cité des sciences) a pâti de la crise sanitaire puis des jeux Olympiques. La fréquentation du site en 2024 était encore largement inférieure à celle de 2019, contrairement aux autres opérateurs de la mission.
Fréquentation de la Cité des sciences
(en millions)
Source : commission des finances
Par ailleurs, l'établissement fait face à un lourd besoin en investissement. Il ne dispose que de 5,3 millions d'euros pour son investissement courant. En revanche, le besoin en investissement de grande ampleur pour la rénovation de la Cité des sciences devrait s'élever à plusieurs centaines de millions d'euros. Les rapporteurs spéciaux seront attentifs aux conclusions prochaines de la mission menée par plusieurs inspections générales, les scénarios élaborés devant également être regardés au prisme de l'objectif de maîtrise de la dépense publique.
La question toujours en suspens de la réouverture du Palais de la Découverte
19 millions d'euros ont déjà été consacrés à la rénovation du Palais de la découverte, qui devrait rouvrir à l'été 2025 après 4 ans de fermeture. Le budget total, soit 44 millions d'euros, devait également mobiliser un certain nombre d'autres ressources, notamment des crédits PIA ainsi que des recettes de mécénat à hauteur de 6 millions d'euros.
La réouverture n'ayant pas eu lieu à la date prévue, à la fois pour des raisons liées à un retard des travaux et en raison de l'indécision de la tutelle sur l'occupation finale de ces espaces. Les réponses du ministère vont dans le sens d'une réouverture en mars 2027.
Le ministère indique « un travail interministériel est en cours dans l'objectif de réfléchir à la meilleure organisation des espaces possibles pour permettre au Palais de la découverte de mener à bien ses missions au sein des espaces du GP-RMN. La culture scientifique, technique et industrielle ne perdra pas de surface d'exposition par rapport au statu quo ante, mais un équilibre nouveau sera trouvé entre parcours permanent, expositions temporaires et événements ponctuels ».
Les rapporteurs spéciaux appellent la tutelle à prendre une décision rapide concernant l'achèvement du chantier, sous peine de fragiliser encore davantage Universcience.
Source : commission des finances
IV. LE PROGRAMME 224 : UNE STABILITÉ DES DÉPENSES DE SOUTIEN DU MINISTÈRE
A. DES DÉPENSES DE PERSONNEL STABLES DU FAIT DE REVALORISATIONS SALARIALES NON MISES EN oeUVRE EN 2026
Le programme 224 « Soutien aux politiques du ministère » est concentré, depuis la loi de finances pour 2021, sur le financement des fonctions de soutien du ministère (98,7 %) et, dans une moindre mesure, de l'action culturelle internationale (1,3 %). Piloté par le secrétariat général du ministère, il devrait être doté de 871,15 millions d'euros en AE et 870,01 millions d'euros en CP en 2025. Cela représente une très légère hausse de 0,62 % en AE et de 0,80 % en CP par rapport à l'exécution 2025.
a) Une stabilité des dépenses de personnel hors CAS « Pensions »
Le programme regroupe l'ensemble des dépenses de personnel des agents directement rémunérés par le ministère de la culture. Elles s'élèvent à 764 millions d'euros en incluant la contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », et 559 millions d'euros hors CAS. Cela représente une hausse d'1 %, soit 8 millions d'euros supplémentaires par rapport à 2025.
Cette croissance est essentiellement à relier aux deux hausses successives des cotisations employeurs de 4 points au CAS « Pensions » en 2025 et 2026, qui pèse à hauteur de 23 millions d'euros sur les dépenses de la mission. S'y ajoute le financement de la protection sociale complémentaire, soit 9 millions d'euros. En contrepartie, la masse salariale du ministère diminue de 13 millions d'euros du fait de la délégation de gestion des manufactures de Sèvres.
Évolution des dépenses de personnel du programme
(en millions d'euros)
Source : commission des finances d'après les documents budgétaires
En 2025, le ministère de la culture était le neuvième ministère contributeur au CAS « Pensions », derrière les services du premier ministre.
Répartition par ministère des
contributions de l'État employeur
au CAS
« Pensions »
(en millions d'euros exécutés en 2024)
Source : commission des finances, note de présentation du CAS « Pensions » d'après les réponses au questionnaire budgétaire
En LFI 2026, le schéma d'emplois du ministère est neutre. 17 669 emplois du ministère sont localisés chez les opérateurs de la mission, dont 17 198 ETPT sous plafond, correspondant à 83 % des emplois de la mission. Les emplois en administration centrale représentaient 6 % des emplois, ceux en services déconcentrés 11 %.
Plafond d'emplois de la mission « culture »
(en ETPT)
|
2026 |
|
|
ETPT rémunérés par le ministère (y compris opérateurs sous plafond du ministère) |
8 926 |
|
ETPT rémunérés par les opérateurs |
17 669 |
|
Dont ETPT sous plafond |
17 198 |
|
Total |
26 595 |
|
Total sous plafond |
26 124 |
Source : commission des finances
Plafond d'emplois du programme 224 par destination
(en ETPT)
Source : commission des finances
Par ailleurs, le plafond d'emplois de la mission est systématiquement sous-exécuté. C'est également le cas en 2024, où, en dépit de la hausse des emplois, les ETPT exécutés sont inférieurs aux emplois ouverts en LFI (-164 ETPT). Ainsi, cumulés entre 2021 et 2024, 519 emplois ouverts n'ont pas été pourvus. Il conviendrait d'ajuster la prévision d'emplois en LFI afin d'améliorer la sincérité du plafond d'emplois voté par le Parlement.
Évolution du plafond d'emplois de la mission
(en ETPT)
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Le plafond d'emplois de la mission a reculé de 371 emplois entre 2021 et 2024. Cette s'explique en grande partie par les délégations de gestion qui sont intervenues sur la période observée, transférant les emplois et la masse salariale associée vers le titre 3 et les plafonds d'emplois des établissements publics concernés :
- en 2022, l'Institut national du Patrimoine (- 20 ETPT) et le Centre national du Livre (- 16 ETPT) ;
- en 2023, le Mobilier national (- 338 ETPT).
Les emplois du ministère relèvent pour l'essentiel des catégories A et A+ (61 % des emplois).
Répartition des personnels du ministère par catégorie
(en %)
Source : commission des finances
b) Du fait de la situation budgétaire, la revalorisation toujours repoussée des contractuels du ministère
On observe une augmentation rapide de la part des agents contractuels, qui représentaient 14 % des emplois (titre 2) en 2020 mais 20 % en 2024. Le ministère justifie cette croissance par les assouplissements mis en oeuvre par la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique. Les agents contractuels du ministère représentent néanmoins 77 % des emplois sur le titre 3, chez les différents opérateurs du ministère.
Les grilles de rémunération des contractuels du ministère n'avaient pas évolué depuis 2009. Ils n'avaient bénéficié d'aucune des grandes revalorisations salariales intervenues en faveur des agents titulaires depuis 2009, notamment la réforme Parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) et les mesures de revalorisation des régimes indemnitaires des agents titulaires du ministère de la Culture engagées depuis 2018 pour rattraper les écarts constatés avec les moyennes interministérielles.
Un cycle de négociation devant aboutir à un schéma de revalorisation des contractuels a été engagé en 2023. Il a été interrompu une première fois par la publication du décret d'annulation de février 2024 qui a notamment annulé un montant de 3,3 millions d'euros, alors que ces crédits étaient destinés à financer une première tranche de revalorisation en 2024.
La revalorisation devait donc être reportée sur 2025 sous la forme d'une prime exceptionnelle de 325 euros, versée en une fois aux agents contractuels. Une partie des 15 millions d'euros supplémentaires prévus en 2025 devait également permettre de revaloriser le régime indemnitaire des enseignants chercheurs des écoles nationales d'architecture et d'assurer la convergence indemnitaire des attachés d'administration avec les autres ministères.
Le surgel de 6,3 millions d'euros intervenu en septembre 2025 a de nouveau mis un frein à la reprise des négociations et n'a pas permis de débuter le déploiement de la mesure. In fine, sur les 15 millions d'euros prévus en 2025, seuls 8,8 millions d'euros ont été utilisés. Les seules rémunérations ayant été revues à la hausse en 2025 sont celles des enseignants contractuels dans les écoles nationales supérieures d'architecture (cf. supra).
Par ailleurs, la circulaire du 25 avril 202513(*) incite fortement les ministères à limiter les mesures de revalorisation catégorielles. En conséquence, aucun financement supplémentaire n'est prévu dans le PLF pour 2026, conduisant la réforme des contractuels à être perpétuellement repoussée et l'écart par rapport aux rémunérations des autres agents à se creuser.
B. UN MAINTIEN TOUJOURS DIFFICILEMENT COMPRÉHENSIBLE DE L'ACTION « ACTION CULTURELLE INTERNATIONALE »
Les crédits dédiés à l'action culturelle internationale devraient s'élever à 10,5 millions d'euros en 2026, en diminution de 500 000 euros par rapport à 2025. Mis à part un abondement ponctuel en 2024 et 2025, lié aux travaux de la maison des mondes africains, pris en charge sur cette action, ces crédits n'ont pas évolué depuis des années.
Le ministère indique que ces crédits permettent la poursuite de l'action du ministère en faveur de la valorisation des institutions culturelles françaises et l'accompagnement des projets « structurants » dans les pays prioritaires.
Ventilation des financements prévus au titre de l'aide culturelle internationale
(en millions d'euros)
|
Financement de la Maison des mondes africains (MansA) |
0,8 |
|
Fonds franco-allemand pour la recherche de provenance de biens culturels d'Afrique sub-saharienne conservés dans les institutions culturelles françaises et allemandes |
0,3 |
|
Fonds pour la circulation des oeuvres en Afrique |
0,8 |
|
Promotion de la diversité culturelle et linguistique |
0,5 |
|
Apaisement des mémoires et agenda transformationnel avec l'Afrique |
0,7 |
|
Mobilités artistiques et professionnelles |
4,5 |
|
Coopération des acteurs culturels français en Europe et dans le monde |
2,5 |
Source : commission des finances
Les rapporteurs spéciaux s'interrogent une nouvelle fois sur la pertinence de la maquette budgétaire et le maintien des crédits de l'action 06 au sein du programme 224.
Les montants figurant sur cette action sont anecdotiques au regard des sommes mobilisées par le ministère des affaires étrangères et par les directions générales du ministère de la culture sur les crédits des autres programmes. À titre d'exemple, les 500 000 euros prévus sur le programme 224 au titre de la promotion de la diversité culturelle et linguistique doivent être mis en regard des 4,2 millions d'euros de l'action « langue française » du programme 361.
Quant aux crédits de la diplomatie culturelle, ils sont pour l'essentiel portés par le programme 185 de la mission « Action extérieure de l'État », pour un montant prévu en 2026 de 130 millions d'euros (dont la subvention pour charges de service public à l'Institut français de 25 millions d'euros), soit 10 fois plus que l'action 06 du programme 224.
Le ministère indique « qu'en conservant les crédits de l'action internationale sur le programme 224 et son pilotage par les services du Secrétariat général, le ministère peut agir plus efficacement qu'une direction métier et déployer des actions en direction de publics pluridisciplinaires ». Il n'est cependant pas certain que la décorrélation avec les directions métiers soit un signe de l'efficience de la gestion de ces crédits.
EXAMEN PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
En première lecture, l'Assemblée nationale n'ayant pas adopté la première partie du projet de loi, celui-ci est considéré comme rejeté en application du troisième alinéa de l'article 119 du Règlement de l'Assemblée nationale.
En conséquence, sont considérés comme rejetés les crédits de la mission « Culture ».
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le jeudi 13 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a examiné le rapport de MM. Vincent Éblé et Didier Rambaud, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Culture ».
M. Vincent Éblé, rapporteur spécial de la mission « Culture ». - Le montant global des crédits demandés pour la culture s'élève à 3,7 milliards d'euros, ce qui représente une diminution de 292 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 170 millions d'euros en crédits de paiement (CP) par rapport à 2025.
Une baisse à peu près similaire avait été annoncée l'an dernier. Finalement, les crédits de la mission étaient restés relativement stables, grâce à des amendements adoptés par le Sénat, que la commission mixte paritaire (CMP) avait conservés. J'ignore si cela se reproduira cette année.
Par ailleurs, des dépenses fiscales sont rattachées à la mission, qui s'élèvent à plus de 1,3 milliard d'euros pour 2026. Les taux réduits de TVA représentent à eux seuls un total de 751 millions d'euros, dont 355 millions d'euros correspondent au taux réduit à 5,5 % pour les droits d'entrée dans les spectacles.
Je rappelle que 72 opérateurs sont rattachés à la mission « Culture ». Le total de leurs budgets s'élève à 2,5 milliards d'euros. Il s'agit aussi bien de grands établissements parisiens que de petits opérateurs implantés en région.
Les opérateurs du programme ont la particularité de bénéficier d'un taux élevé de ressources propres, puisqu'il s'agit souvent d'établissements accueillant un public payant. Ainsi, le montant cumulé de leurs ressources propres atteignait 1,2 milliard d'euros en 2024, une somme à peu près identique à celle versée par l'État, qui a financé ces établissements à hauteur de 1,3 milliard d'euros.
J'en viens aux crédits du programme 175, dédiés au patrimoine. Chaque année, dans notre rapport, nous choisissons de mettre l'accent sur un opérateur. À la fin du mois de septembre, nous avons décidé de nous concentrer sur le musée du Louvre ; nous avons eu le nez creux ! Lors de nos auditions, nous avons appris que le schéma directeur des équipements de sûreté, qui prévoit notamment la refonte du système de vidéosurveillance, devait être déployé à partir de janvier 2026. Ce calendrier a été malheureux. Au-delà des enjeux de sécurité, le musée doit faire face à de nombreux défis, à court et moyen termes.
Le budget du Louvre se caractérise par un poids assez faible des financements publics, qui ne représentaient que 28 % de ses recettes en 2025. Cette proportion est d'ailleurs en constante diminution. La part des recettes propres de l'établissement, qui doit s'élever à 68 % en 2026, est l'une des plus élevées parmi les opérateurs concernés. En conséquence, le grand projet de refonte du musée, « Louvre - Nouvelle Renaissance », qui doit être mis en oeuvre d'ici à 2034, devrait être en grande partie financé grâce à ces recettes propres. L'État ne devrait abonder qu'à hauteur de 10 millions d'euros par an.
Ce projet doit permettre d'accueillir les visiteurs dans de meilleures conditions et de mieux protéger les oeuvres. Depuis une quinzaine d'années, la fréquentation du musée est stable : il accueille environ 9 millions de visiteurs par an. Ce nombre ne peut plus augmenter, en raison des quotas journaliers mis en place. En conséquence, la récente augmentation de 8 millions d'euros des recettes liées à la billetterie découle en grande partie de la hausse des tarifs d'entrée.
J'en viens aux tarifs différenciés pour les visiteurs venant de pays non membres de l'Union européenne, qui seront expérimentés à partir de janvier prochain dans les établissements patrimoniaux les plus fréquentés.
En 2023 et 2024, le nombre de visiteurs accueillis par l'ensemble des opérateurs du programme « Patrimoine » a atteint 44 millions. Depuis 2022, ce nombre a crû de 13 %. Si ces chiffres témoignent de la vitalité de l'intérêt du public pour notre patrimoine, une fréquentation élevée met également les établissements sous tension.
Les hausses tarifaires pour les quatre monuments les plus fréquentés du pays devraient permettre de dégager plus de 23 millions d'euros de recettes supplémentaires, dès 2026. Pour le Louvre seulement, cette augmentation devrait permettre de dégager plus de 15 millions d'euros. Le mécanisme existe dans de nombreux pays ; face au besoin criant d'investissement, nous ne devons pas nous priver de ce levier.
En effet, le besoin d'investissement est énorme et, de ce point de vue, le budget n'est pas à la hauteur des enjeux. Les crédits de l'action n° 1, Monuments historiques et patrimoine monumental, devraient diminuer de 34 % en AE et de 21 % en CP.
Ces diminutions sont problématiques, car la plupart des travaux s'inscrivent dans le temps. Certains ne prendront fin que dans longtemps et impliquent la mobilisation de moyens de grande ampleur.
De plus, les financements de dépenses déconcentrées et d'opérations prévues dans des monuments en région seront en baisse. Les effets de la hausse consentie en 2025 devraient continuer de se faire sentir, grâce à l'engagement des AE, mais leur diminution en 2026 devrait avoir des conséquences sur les travaux prévus les années suivantes.
Je propose habituellement d'adopter les crédits de la mission. Cependant, il me semble que les crédits pour 2026 ne sont pas à la hauteur des défis patrimoniaux qui sont les nôtres. En conséquence, je ne les soutiendrai pas.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial de la mission « Culture ». - Je voudrais d'abord revenir sur les moyens globalement accordés à la culture dans ce projet de loi de finances (PLF). L'année 2026 devrait connaître la première baisse de crédits enregistrée depuis de nombreuses années. En effet, la stabilité observée entre 2024 et 2025 s'inscrivait dans une trajectoire de progression des crédits. Ainsi, depuis 2022, les crédits de la mission ont augmenté de 105 millions d'euros en AE et de 136 millions d'euros en CP.
En 2026, plus d'un milliard d'euros seront consacrés au patrimoine et autant au spectacle vivant. L'effort collectif de responsabilité budgétaire ne peut épargner complètement la culture.
Les crédits dédiés au spectacle vivant ne diminuent que de 0,7 % en AE et de 3,25 % en CP. Par ailleurs, de nouveaux crédits sont ouverts pour plusieurs postes. Ainsi, 45 millions d'euros seront alloués à la rénovation du Palais de Tokyo. De la même manière, les moyens du plan « Mieux produire, mieux diffuser », dont l'objectif est d'inciter à davantage diffuser les spectacles, continuent d'augmenter, pour la troisième année consécutive.
Je souhaite revenir sur les moyens alloués à l'éducation artistique et culturelle (EAC) et à l'enseignement supérieur culturel.
L'année dernière, nous avions alerté la commission sur la situation d'Universcience. Cet établissement public, qui rassemble le Palais de la découverte et la Cité des sciences et de l'industrie de la Villette, doit recevoir 120 millions d'euros de subventions de l'État, ce qui en fait le premier opérateur de la mission, largement devant l'Opéra de Paris et le musée du Louvre.
Les ressources propres de la Cité sont limitées puisqu'elles ne s'élevaient qu'à 20 millions d'euros en 2024. La même année, la fréquentation du site était encore largement inférieure à celle de 2019, contrairement à ce que connaissaient les autres opérateurs de la mission.
En parallèle, l'établissement fait face à un lourd besoin d'investissement. Une première estimation faisait état d'un besoin supérieur à 1 milliard d'euros au cours des dix prochaines années. Cependant, une mission menée par trois inspections générales est en cours et devrait permettre de dessiner un horizon plus réaliste.
La question de la réimplantation d'Universcience au Grand Palais se pose également. L'établissement a déjà engagé 20 millions d'euros de travaux. Cependant, la situation est gelée par la tutelle et la réouverture du Palais de la découverte a été reportée, sans qu'une date officielle ne soit donnée. Nous appelons donc la tutelle à prendre une décision rapide concernant l'achèvement du chantier, sous peine de fragiliser davantage Universcience.
J'en viens au pass Culture. Le PLF prévoit une dotation de 127,5 millions d'euros pour le financement du volet individuel. Le montant prévu par le PLF pour 2025 était de 210,5 millions d'euros, mais la commission mixte paritaire avait adopté une réduction des crédits alloués au dispositif. L'économie prévue s'élève à 43 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2025.
En tenant compte du volet collectif du pass Culture financé par les crédits de la mission « Enseignement scolaire », les crédits accordés au dispositif diminuent de 22 %.
Le pass Culture a été complètement réformé en février dernier. Le dispositif s'est recentré sur les jeunes de 17 et 18 ans et le montant de la somme allouée est passé de 300 à 150 euros par personne. Le bénéfice n'est toujours pas accordé sous condition de ressources, même si une bonification est prévue pour les jeunes les plus en difficulté.
Cette réforme n'atteindra son plein effet budgétaire que de manière différée, puisque les jeunes acquièrent des droits qu'ils peuvent ensuite faire valoir pendant trois ans. Ainsi, les jeunes inscrits avant mars 2025 bénéficient toujours d'une enveloppe totale de 300 euros.
Concernant l'éducation artistique et culturelle (EAC), les moyens prévus par le programme 361 sont stables et s'élèvent à 86 millions d'euros. Toutefois, la LFI pour 2025 avait diminué d'environ 20 % les crédits dédiés par rapport à l'exécuté de 2024.
Cependant, la Cour des comptes indique dans un récent rapport que l'effort public consacré à l'EAC s'est élevé à 3,5 milliards d'euros en 2023, dont 3 milliards d'euros provenaient de l'État et environ 600 millions d'euros des collectivités territoriales. Le montant prévu par le programme ne représente donc qu'une petite partie de l'effort fourni par l'État en la matière.
Ce budget n'est pas parfait, mais il protège autant que possible les créateurs et les opérateurs du patrimoine et du spectacle vivant. Je vous propose donc d'adopter les crédits de la mission, sans modification.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - De manière un peu caricaturale, on a parfois le sentiment que la culture serait légitime à bénéficier d'une certaine souplesse quand il s'agit d'obéir aux contraintes et aux enjeux budgétaires. Il faut sortir de la caricature.
À Nancy, j'ai assisté à une table ronde des acteurs de la culture, qui m'a fait penser à ce que nous vivons parfois au Sénat. En effet, chacun avait conscience des contraintes budgétaires et de la nécessité de fournir des efforts, mais, à la fin, tout le monde appelait à dépenser davantage.
Nous devons nous montrer attentifs, afin que le plus grand nombre ait accès à la culture sous toutes ses formes et dans tous les territoires. À cet égard, le volet collectif du pass Culture est important. Cependant, nous faisons face à une surabondance de dispositifs qui ne s'articulent pas parfaitement les uns avec les autres. Il nous faut remettre de l'ordre pour assurer la plus grande efficacité possible, au service des bénéficiaires. C'est la raison pour laquelle je proposerai des évolutions concernant le volet individuel du pass Culture.
M. Jean-Raymond Hugonet. - D'abord, il faut rappeler que l'écrasante majorité de ce qui est fait pour la culture dans notre pays émane des territoires, puisque la part assumée par l'État tourne autour de 25 %.
En ce qui concerne le pass Culture, nous avions dénoncé dès 2018 ce qui a fini par être pointé par la Cour des comptes dans un avis peu amène, qui a conduit à réformer enfin ce dispositif, en février 2025. L'argent a ruisselé de façon scandaleuse et au détriment de dispositifs qui fonctionnaient très bien et en lien avec les territoires, comme l'EAC.
Il a fallu transformer le pass Culture en s'appuyant surtout sur sa part collective, pour qu'enfin le dispositif apporte un plus, en lien avec les territoires et l'éducation. Ce sujet reste sensible et, s'il ne représente qu'une goutte d'eau à l'échelle du budget national, il reste l'archétype de la mesure contre-productive.
Mme Christine Lavarde. - Nous sommes tout à fait favorables à la suppression du volet individuel du pass Culture.
Universcience est un établissement qui favorise l'accès à la culture et à la science, à des tarifs modestes et de manière très didactique. Il serait dommage qu'il disparaisse faute de moyens. Le Palais de la découverte continue de fonctionner malgré les travaux, dans des installations temporaires qui sont pleines tous les week-ends.
M. Grégory Blanc. - Beaucoup a déjà été dit au sujet du pass Culture, mais je voudrais rappeler que les baisses de crédits ne peuvent être déconnectées des enjeux du terrain. Il ne faut pas oublier que nos territoires sont différents et n'ont pas tous les mêmes moyens. Ainsi, dans les territoires ruraux, l'offre culturelle est plus difficile à développer qu'ailleurs et l'accès y est plus compliqué. Il faut mentionner aussi l'éloignement social des territoires défavorisés tels que les quartiers populaires. Le dispositif initial n'intégrait pas ces éléments. Cependant, une éventuelle baisse des crédits accroîtrait encore ces distorsions, ce qui poserait un problème de cohésion sociale.
Mme Frédérique Espagnac. - Comme Grégory Blanc, je pense que la question des territoires, notamment de la ruralité et des quartiers prioritaires, est primordiale pour l'accès des jeunes à la culture. Dans ce cadre, le dispositif du pass Culture joue un rôle majeur.
Par ailleurs, le programme « Patrimoine » subit la coupe budgétaire la plus importante, puisqu'elle s'élève à 20 % en AE. Il s'agit d'une baisse spectaculaire des crédits d'investissement des opérateurs. Quels sont les grands chantiers qui devront être remis en cause ? Comment prendre en compte, dans ce contexte, la problématique de la sécurité de l'ensemble de nos musées ?
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial. - Jusqu'à présent, j'ai été un partisan du pass Culture, qui permettait à chaque jeune Français d'avoir accès à la culture, partout sur le territoire. Je sais ce qu'accomplissent aussi les collectivités territoriales, qui ont chacune leur dispositif, mais toutes n'ont pas les mêmes moyens. C'était l'intérêt du pass Culture. Compte tenu du contexte, aucun secteur ne doit être épargné et la culture doit aussi contribuer. J'entends ce qui a été dit quant à la nécessité de revoir le dispositif et, à cet égard, des efforts ont déjà été fournis. Entre tout garder et tout rejeter, nous pouvons trouver un juste milieu. Le dispositif mérite d'être maintenu et corrigé, peut-être pour toucher les territoires les plus en difficulté ou ne s'adresser, pour la part individuelle, qu'aux jeunes ayant le moins de moyens. J'attire l'attention du rapporteur général sur un point : les jeunes qui ont bénéficié du pass ont acquis des droits pendant trois ans. La parole de l'État est engagée.
J'en viens à Universcience. Il ne faut pas oublier la culture scientifique, qui est importante, notamment pour des enjeux d'innovation et de recherche. La tutelle doit prendre une décision rapide concernant l'achèvement du chantier du Palais des sciences. Je suis d'accord avec Christine Lavarde sur ce sujet, mais cette opération nécessitera d'importants moyens.
M. Vincent Éblé, rapporteur spécial. - Le rapporteur général estime que la culture devrait obéir aux contraintes budgétaires. Certes, mais la création culturelle est rebelle par essence ! Comment imaginer une culture qui se soumettrait à des exigences administratives et budgétaires ?
Jean-Raymond Hugonet connaît parfaitement ce sujet. En effet, le rôle des collectivités territoriales dans l'action culturelle est essentiel. C'est aussi le cas dans nombre d'autres domaines, comme le social. L'action de l'État n'est pas à fonds perdu, car elle a un effet démultiplicateur sur d'autres sources de financement, tels que la billetterie.
Enfin, on voit bien que le manque de ressources propres d'Universcience découle du fait que l'opérateur n'a pas les mêmes marges de manoeuvre en termes de fréquentation qu'un établissement de réputation mondiale tel que le Louvre. C'est quasiment le seul opérateur d'envergure nationale en matière de culture scientifique et technique. Laisser ce segment important de l'action culturelle en jachère me paraît inenvisageable.
M. Blanc nous dit que les décisions de baisse sont trop unilatérales et qu'elles affectent les territoires : je le confirme absolument. L'an dernier, nous avions adopté des amendements qui abondaient des crédits initialement fortement à la baisse. Le ministère nous indique que l'adoption de ces amendements ayant été relativement tardive dans la procédure budgétaire, il a été fait le choix par le responsable du programme 175 de ventiler cette annulation de manière homothétique, répartissant ainsi l'effort sur l'ensemble des acteurs patrimoniaux et des objets financés par le programme. C'est bien tout l'enjeu : le ministère n'a pas véritablement différencié les bénéficiaires parisiens des bénéficiaires provinciaux. De même, la chute des crédits proposée cette année aura des répercussions sur l'ensemble des investissements prévus. Plus particulièrement, l'importante diminution des AE devra se répercuter non seulement sur les grands chantiers, mais aussi sur les dépenses d'investissement et d'intervention des directions régionales des affaires culturelles (Drac). L'impact risque d'être sévère. Des opérations sont prévues dans les territoires, au château de Gaillon ou à l'abbaye de Clervaux par exemple. Elles devraient augmenter de 3 millions d'euros en CP, mais diminuer de près de 30 millions d'euros en AE.
Je déplore la suppression des crédits de base de la mission du patrimoine en péril, avec une baisse de 14 millions d'euros en AE et de 11 millions d'euros en CP.
Je déplore également la réduction des crédits du fonds incitatif et partenarial (FIP) de 9,3 millions d'euros en AE et de 9,2 millions d'euros en CP, tout comme la réduction de l'enveloppe globale des crédits d'intervention des directions régionales des affaires culturelles (Drac) de 45,6 millions d'euros en AE et de 33,6 millions d'euros en CP. Ce n'est pas du tout marginal.
De grands chantiers s'inscrivant dans des schémas pluriannuels seront remis en cause ou interrompus. Bercy évoque des mesures nouvelles : pas du tout ! Il s'agit de la poursuite de programmes. Je pense par exemple aux travaux de sécurité et de sûreté à Fontainebleau, alors que le château a fait l'objet, encore cette année, de tentatives de vol importantes. Ces travaux sont tout à fait indispensables. Je pense aussi au musée d'archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye, qui attire une clientèle largement internationale, tout comme les tours de La Rochelle, entre autres. L'inquiétude est tout à fait réelle quant à la baisse de l'action de l'État dans ce domaine.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Culture ».
*
* *
Réunie à nouveau le mercredi 26 novembre 2025, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a procédé à l'examen définitif de l'équilibre, des missions, des budgets annexes, des comptes spéciaux et des articles rattachés de la seconde partie.
M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Réunie le 13 novembre, la commission des finances a adopté sans modification les crédits de la mission.
Je vous propose l'adoption d'un amendement visant à supprimer les crédits dédiés à la part individuelle du pass Culture.
Nous avions déjà eu un débat l'année dernière, qui avait contribué à diminuer les crédits en 2025. Mais je continue de penser que le versement sans condition de ressources de 150 euros par jeune n'est pas compatible avec la situation de nos finances publiques, surtout alors que les critiques se multiplient sur l'inefficacité de ce dispositif, mal ciblé.
Mon amendement prévoit toutefois de conserver 40 millions d'euros en 2026, de manière à s'assurer que les jeunes ayant des droits acquis au titre des années précédentes puissent toujours en bénéficier.
M. Didier Rambaud, rapporteur spécial de la mission « Culture ». - J'ai eu l'occasion de le dire lors de la présentation de mon rapport, il est nécessaire de revoir un certain nombre de dispositifs, dont le pass Culture, dans la période actuelle de redressement des finances publiques. J'avais toutefois insisté sur le fait qu'il fallait s'assurer que les jeunes ayant acquis des droits puissent continuer à en bénéficier dans la mesure où ils ont trois ans pour les faire valoir. Dont acte.
Néanmoins, permettez-moi d'indiquer que je ne partage pas l'esprit de la seconde partie de la première phrase de l'objet de l'amendement : il est à mon sens excessif de dire, comme vous le faites, que la part individuelle est un dispositif « largement inefficace en termes d'ouverture sociale, voire anti-redistributif. »
L'amendement n° II-3 (FINC.4) est adopté.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Culture », sous réserve de l'adoption de son amendement.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Direction générale des Patrimoines et de l'Architecture (DGPA)
- M. Jean-François HÉBERT, directeur général ;
- Mme Suzy TENDRON, cheffe du département du budget et des finances.
Direction générale de la création artistique (DGCA)
- M. Christopher MILES, directeur général de la création culturelle ;
- Mme Carole ROBIN, adjointe à la sous-directrice des affaires financières et générales.
Direction générale de la démocratie culturelle
- Mme Naomi PERES, directrice générale.
Secrétariat général du ministère de la culture
- M. Stéphane LAGIER, secrétaire général adjoint du ministère ;
- Mme Hélène SZARZYNSKI, cheffe du service des ressources humaines ;
- Mme Audrey LEFRANC-MAUPILÉ, responsable du programme 224.
Musée du Louvre
- M. Kim PHAM, administrateur général du musée du Louvre ;
- Mme Marie LACAMBRE, directrice financière, juridique et des moyens.
LA LOI EN CONSTRUCTION
Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :
https://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2026.html
* 1 Note « Culture chiffres » n°1. Billetterie du spectacle vivant en 2024, ministère de la culture.
* 2 Note « Culture chiffres » n°1. Billetterie du spectacle vivant en 2024, ministère de la culture.
* 3 La loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine.
* 4 Cour des comptes, Le soutien du ministère de la culture au spectacle vivant, Rapport public thématique, mai 2022.
* 5 Le chantier de la cathédrale de Notre-Dame - septembre 2025, Cour des comptes.
* 6 Le centre des monuments nationaux, un succès pour la politique du patrimoine, un modèle économique à préserver, rapport d'information n° 765 (2023-2024), déposé le 18 septembre 2024.
* 7 Loi n° 2024-1167 du 6 décembre 2024 de fin de gestion pour 2024.
* 8 Le Pass culture face au défi de la diversification des pratiques culturelles, rapport d'information n° 866 (2022-2023), déposé le 11 juillet 2023.
* 9 Les impacts de la part individuelle du Pass Culture, IGAC 2024 - N° 2024-15.
* 10 Premier bilan du pass Culture, Cour des comptes, 17 décembre 2024.
* 11 Décret n° 2025-195 du 27 février 2025 relatif au « pass Culture ».
* 12 L'éducation artistique et culturelle au bénéfice des élèves de l'enseignement scolaire, Cour des comptes, février 2025.
* 13 Circulaire du Premier ministre sur la gestion budgétaire du 25 avril 2025.






































