ARTICLE 14 - Modification des tarifs des taxes intérieures de consommation sur les produits pétroliers et sur le gaz naturel (TIPP et TICGN) et aménagement de la redevance perçue au profit du fonds de soutien aux hydrocarbures

Commentaire : Le présent article prévoit :

- une augmentation spécifique et uniforme du tarif de la TIPP applicable aux carburants routiers, de 13 centimes par litre ;

- une augmentation générale du tarif de la TIPP applicable aux autres produits pétroliers et de la TICGN à hauteur de la hausse prévisible des prix, tabac compris, soit de 1,9 % ;

- un aménagement de la redevance perçue au profit du fonds de soutien aux hydrocarbures en l'étendant notamment au gazole ;

- le dépôt d'un rapport au Parlement sur les conséquences de l'utilisation du gazole sur l'environnement.

I - L'AUGMENTATION DU TARIF DE LA TIPP SUR LES CARBURANTS ROUTIERS

Les carburants routiers -supercarburant plombé, supercarburant sans plomb, essence normale et gazole- sont à l'origine d'environ 95 % des recettes de TIPP, ce qui explique en grande partie le traitement particulier dont ils font l'objet à l'occasion du vote de chaque loi de finances.

Le présent article propose de relever uniformément le tarif qui leur est applicable, à compter du 11 janvier 1996, en l'augmentant de 13 centimes par litre.

Taux de TIPP applicables aux carburants routiers

(En francs par hectolitre)

Cette revalorisation uniforme du tarif de chacun de ces produits conduit à geler l'écart de taxation existant entre eux.

Une telle mesure de gel avait déjà été appliquée entre 1992 et 1994 niais avait été écartée en 1995. En effet, dans la loi de finances pour 1995, le gel ne concernait pas le gazole et l'écart entre celui-ci et le supercarburant plombé s'était accru de près de 17 centimes (passant de 1,53 franc à 1,70 franc).

Cette année, le relèvement uniforme du tarif des carburants routiers, de 13 centimes par litre, conduit à appliquer des taux de progression différenciés selon les produits et, notamment, à majorer fortement la taxation du gazole, qui augmente de 6,1 %, puisque le taux de TIPP applicable à ce produit est actuellement le plus faible.

Cette augmentation s'ajoutant aux cinq relèvements intervenus depuis le début de l'année 1993 (48 ( * )) fait que la fiscalité française pesant sur les carburants routiers est aujourd'hui l'une des plus élevée de l'Union européenne.

Taux d'accises et part de la charge fiscale pour les carburants routiers dans les pays membres de l'Union européenne

La lecture du tableau ci-dessus montre que la charge fiscale dans le prix des carburants est de loin la plus importante en France. Elle montre également que si la France a le taux d'accises le plus élevé pour le supercarburant sans plomb, elle se situe dans la moyenne pour le gazole.

L'avantage fiscal relatif accordé au gazole fait donc de la France une exception au sein de l'Union européenne.

Or, cet avantage explique en grande partie la forte progression de la consommation de ce produit par rapport aux autres carburants routiers.

Evolution de la consommation des carburants routiers

* Prévisions

Votre commission avait déjà souligné l'année dernière cette spécificité française. Ainsi, elle regrettait que l'augmentation continue de la consommation de gazole, en grande partie liée à la très rapide diésélisation du parc des voitures particulières, soit source de moindres recettes pour l'État et ait des conséquences défavorables en termes d'environnement. Elle constatait en outre que l'outil français de raffinage n'était pas adapté à la production de gazole, entraînant une obligation d'importer du gazole et d'exporter de coûteux excédents de supercarburants.

Aussi, afin de remédier à cette situation et d'indiquer au gouvernement qu'il convient de réduire l'écart fiscal actuel -et non simplement de le geler-, votre commission vous propose un amendement qui, à recettes égales pour l'État, augmente de 2 centimes le tarif de la TIPP applicable au gazole et diminue en conséquence les tarifs applicables au supercarburant plombé, au supercarburant sans plomb et à l'essence.

Il s'agit ainsi de donner le signal d'une nécessaire et progressive réduction de l'écart fiscal entre le gazole et les supercarburants.

La situation doit en effet évoluer progressivement pour ne pas déstabiliser brutalement le marché de l'automobile et porter atteinte à la compétitivité des entreprises de transport routier de marchandises.

Grâce à cet amendement, ainsi que le montre le tableau ci-dessous, l'écart pourrait être réduit de 4,58 centimes en 1996, passant de 169,72 à 165,14 centimes.

Propositions comparées du projet de loi de finances et de l'amendement de la commission des finances

II - L'AUGMENTATION GÉNÉRAL DE 1,9 % DU TARIF DE LA TIPP APPLICABLE AUX AUTRES PRODUITS PÉTROLIERS ET DE LA TICGN

Le présent article propose qu'à compter du 11 janvier 1996, le tarif de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers autres que les carburants routiers soient augmentés de 1,9 %. Il prévoit, au 2° du paragraphe I, la même augmentation pour le tarif de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel.

On rappellera, en effet, que, depuis la loi de finances pour 1992 et, conformément à la directive communautaire n° 92/81 dite "directive structures", l'augmentation du tarif de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel livré à l'utilisateur final n'est plus effectuée en même temps que la TIPP, qui concerne les seuls produits pétroliers, mais fait l'objet d'une disposition séparée.

Le montant de l'actualisation, soit + 1,9%, correspond au taux de hausse prévisible des prix pour 1995, tabac inclus.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement rendant à réduire de 250,34 à 74,34 francs par hectolitre le tarif de TIPP applicable au gaz de pétrole liquéfié utilisé comme carburant (GPLC).

En rapprochant ainsi du minimum communautaire la taxation de ce produit, les députés ont décidé d'encourager le développement d'un carburant véritablement "propre", jusque là très taxé (plus que le gazole), et de favoriser la production de véhicules moins polluants.

Plusieurs municipalités se sont d'ailleurs récemment montré intéressées par l'investissement dans une flotte de véhicules "propres" fonctionnant au GPLC. Certains pays de l'Union européenne, comme les Pays-Bas ou l'Italie, sont déjà très avancés dans cette voie.

Votre commission souscrit entièrement à cette mesure et se félicite que le gouvernement lui ait donné son accord.

Encore très peu développé en France, le GPLC pourrait contribuer à améliorer la qualité de l'air dans le centre de nombreuses villes où la hausse des indices de pollution s'avère inquiétante.

Au total, ces augmentations du tarif de la TIPP et de la TICGN à compter du 11 janvier 1996 devraient rapporter 7 milliards de francs à l'État répartis ainsi :

- 6.286 millions de francs au titre de la TIPP ;

- 12 millions de francs au titre de la TICGN ;

- 702 millions de francs au titre du produit de TVA supplémentaire induit par ces augmentations.

On rappellera que les recettes de TIPP attendues pour 1996 s'élèvent à 148,5 milliards de francs, en augmentation de 4,5 milliards, soit de 3,1 % par rapport aux recettes estimées pour 1995. Cela signifie que les hausses effectuées par le présent article seront en partie compensées par une évolution spontanée à la baisse des recettes de TIPP, évaluée à 1,23 milliard de francs.

III - L'AMÉNAGEMENT DE LA REDEVANCE PERÇUE AU PROFIT DU FONDS DE SOUTIEN AUX HYDROCARBURES

Le Fonds de soutien aux hydrocarbures (FSH) est un compte spécial du Trésor créé en 1950 pour promouvoir le développement des technologies pétrolières et gazières.

Il permet d'allouer aux entreprises présentant des programmes de recherche et développement dans le domaine de l'exploration et de la production des hydrocarbures des aides dont le taux est au plus égal à 50 % du budget de programme. Ces aides sont remboursables en cas de succès commerciaux en fonction du chiffre d'affaires spécifique réalisé par l'entreprise : sur la période 1991-1994, le montant des reversements a représenté près de 30 % des disponibilités du fonds.

Alimenté par une taxe sur les supercarburants et sur l'essence, le FSH a permis à l'industrie parapétrolière française de renforcer ses positions sur les marchés étrangers et d'y occuper souvent une place de premier plan.

Or, depuis quelques années, les ressources du FSH sont en diminution. En effet, la redevance qui lui est allouée est assise, conformément à l'article 266 ter du code des douanes, sur les seuls supercarburants (plombé et sans plomb) et l'essence. Son taux est fixé à 0,90 franc par hectolitre.

L'évolution de la structure de consommation des carburants (quasi disparition de l'essence et diminution des supercarburants au profit du gazole) explique la baisse progressive et continue du produit de la redevance.

Or, les travaux de recherches soutenus par le FSH bénéficient à l'ensemble des carburants, y compris au gazole.

Produit de la redevance FSH

(En millions de francs)

C'est pourquoi, afin de remédier à cette situation et de stabiliser les recettes du FSH, le paragraphe II du présent article propose :

- d'étendre au gazole le champ de la redevance ;

- de ramener son taux de 0,90 à 0,39 franc par hectolitre.

IV - LE DÉPÔT D'UN RAPPORT AU PARLEMENT

L'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par M. Gantier (devenu le paragraphe III de cet article) tendant à prévoir le dépôt par le gouvernement d'un rapport sur le bureau de chacune des deux assemblées avant le 30 juin 1996 pour analyser :

- d'une part, "les conséquences de l'utilisation du gazole sur l'environnement" ;

- d'autre part, "les conséquences d'une modification éventuelle du barème de la TIPP afin de favoriser la consommation des carburants les moins polluants".

Votre commission se félicite de cette initiative qui conforte la position qu'elle a adoptée sur le paragraphe I de l'article.

Toutefois, elle estime que d'autres conséquences que le simple impact environnemental de l'évolution de l'utilisation du gazole doit être analysées (1)49 ( * ) . C'est pourquoi, elle propose de substituer à la première partie du dispositif de l'Assemblée nationale : "les conséquences de l'évolution de l'utilisation du gazole sur l'industrie pétrolière, l'industrie de la construction automobile, l'environnement, la distribution des carburants, l'aménagement du territoire et les besoins professionnels particuliers".

Tel est l'objet du deuxième amendement que votre commission vous propose sur le présent article.

Décision de la commission : Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

* 481 + 1,4% le 15 janvier 1993, + 0,7 % le 15 avril 1993, + 8,6 % le 12 juillet 19893, + 2,3 % le 11 janvier 1994, + 1,7% le 11 janvier 1995

* 49 Les rapports Bellec et Souviron ont déjà en partie effectué cette recherche.

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