DEUXIÈME PARTIE

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier - (article L. 32 du code des postes et télécommunications) - Définitions terminologiques

L'article L. 32 du code des postes et télécommunications définit quatorze notions auxquelles s'applique la réglementation.

L'article premier du projet de loi propose d'actualiser ces définitions :

- deux notions sont supprimées

- trois nouvelles définitions sont introduites

- deux définitions sont modifiées.

1. L'article premier du projet de loi propose de supprimer de l'article L. 32 deux notions :

1.1. Les points de terminaison (actuel 3° de l'article L. 32)

La définition des points de terminaison a été introduite dans le code des postes et télécommunications par la loi du 29 décembre 1990 sur la réglementation des télécommunications. Cette définition s'inspirait des dispositions de deux directives communautaires : la directive 90/387/CE du Conseil du 28 juin 1990 relative à l'établissement du marché intérieur des services de télécommunications par la mise en oeuvre de la fourniture d'un réseau ouvert de télécommunications (article 1er) et la directive 90/388/CE de la Commission du 28 juin 1990 relative à la concurrence dans les marchés des services de télécommunications (voir textes en annexe).

Toutefois cette notion n'a pas reçu d'application. Le projet de loi propose de l'abandonner et de ne pas distinguer les points de terminaison de l'ensemble du réseau.

1.2. Le service support (actuel 9° de l'article L. 32)

La notion de service support a été introduite par la loi du 29 décembre 1990 qui la définit comme « l'exploitation commerciale du simple transport de données » . Cette notion était utile dans le cadre d'une libéralisation partielle du marché des services des télécommunications. Dès lors que l'ouverture à la concurrence est complète, il n'y a plus lieu de distinguer le service support des autres services de télécommunications.

2. L'article 1er du projet de loi introduit à l'article L. 32 trois nouvelles définitions :

2.1. Le réseau ouvert au public (3° de l'article L. 32)

Cette notion devient fondamentale dans la perspective de l'ouverture à la concurrence. Le monopole de France Télécom pour l'établissement et l'exploitation entre points fixes des réseaux de télécommunications offrant des services au public est supprimé. L'article 5 du projet de loi (article L. 33-1 du code des postes et télécommunications) prévoit un régime d'autorisation préalable du ministre chargé des télécommunications pour l'établissement et l'exploitation de tous les réseaux ouverts au public qui n'était prévu, jusqu'à présent, que pour les seuls réseaux de radiocommunications mobiles.

La définition proposée s'appuie sur la définition communautaire du « réseau public de télécommunications ».

Les réseaux ouverts au public se distinguent des réseaux indépendants (définis à l'article L. 32-4), des réseaux internes et d'autres petits réseaux dont l'établissement sera plus libre.

2.2. L'interconnexion (9° de l'article L. 32)

Cette notion nouvelle est la conséquence directe de l'ouverture à la concurrence de l'ensemble du secteur des télécommunications.

Dans la situation actuelle, les réseaux filaires ouverts au public sont la propriété de France Télécom, opérateur historique qui bénéficie d'une situation de monopole.

Les nouveaux entrants sur le marché n'auront, dans un premier temps, pas la possibilité matérielle de constituer un réseau équivalent. L'ouverture à la concurrence passe donc par un accès de ces nouveaux opérateurs aux réseaux de France Télécom moyennant rémunération, puis par des prestations réciproques entre les opérateurs.

L'interconnexion soulève deux problèmes. D'une part, techniquement, les réseaux des différents opérateurs doivent être reliés entre eux et capables de fonctionner ensemble ; d'autre part, sur le plan financier, les coûts d'interconnexion doivent être définis et pris en charge.

L'interconnexion vient d'être définie dans la directive 96/19/CE de la Commission du 13 mars 1996 modifiant la directive 90/388/CEE en ce qui concerne la réalisation de la pleine concurrence sur le marché des télécommunications (voir texte en annexe). Une proposition de directive relative à l'interconnexion a fait l'objet d'un accord de principe au niveau communautaire le 21 mars 1996 (voir texte en annexe).

Dans ces directives comme dans le projet de loi, l'interconnexion est entendue au sens large puisqu'elle inclut :

- « les prestations réciproques offertes par deux exploitants de réseaux ouverts au public qui permettent à l'ensemble des utilisateurs de communiquer librement entre eux » (1er alinéa de l'article 32, 9°). Ce type d'interconnexion vise le branchement de deux réseaux pour mettre en liaison leurs abonnés ;

- « les prestations d'accès au réseau offertes dans le même objet par un exploitant de réseau ouvert au public à un prestataire de service téléphonique au public » . Il ne s'agit plus de liaison physique entre deux réseaux mais du service rendu par un exploitant à un prestataire de service téléphonique qui lui demande un accès à son réseau.

2.3. L'opérateur (15° nouveau de l'article L. 32, III de l'article 1er du projet de loi).

Bien que n'apparaissant pas dans les directives communautaires, cette notion est utile pour caractériser aussi bien les exploitants de réseau ouverts au public que les fournisseurs de service au public.

Elle est employée dans le projet de loi pour les dispositions relatives à la numérotation (article L. 34-10), au service public des télécommunications (articles L. 35 à L. 35-6), aux compétences de l'Autorité de régulation des télécommunications et à l'interconnexion (articles L. 36-7 à L. 36-9) et aux droits de passage et servitudes (articles L. 45-1 ; L. 47 ; L. 56-1 et L. 62-11).

3. L'article premier du projet de loi modifie deux définitions de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications :

3.1. Le service téléphonique au public (7° de l'article L. 32)

Cette notion remplace celle de « service téléphonique ». En effet, avec l'ouverture à la concurrence, le service téléphonique au public, c'est-à-dire à destination de toute personne souhaitant être reliée à un réseau commuté, fait l'objet d'un régime juridique particulier.

La fourniture du service téléphonique au public nécessite une autorisation préalable du ministre chargé des télécommunications (article L. 34-2) tandis que les autres services de télécommunications fournis au public sont libres (article L. 34-3) à l'exception de certains services radioélectriques de télécommunications qui restent soumis a autorisation (article L. 34-3).

3.2. Les exigences essentielles (12° de l'article L. 32, II de l'article 1 du projet de loi).

La notion d'exigences essentielles a été introduite dans le code des postes et télécommunications par la loi du 29 décembre 1990 précitée.

Le projet de loi tend à compléter la liste des exigences essentielles en y incluant « la protection de l'environnement, prise en compte des contraintes d'urbanisme et d'aménagement du territoire » .

Ces nouvelles dispositions transposent l'article 1er de la directive 96/19/CE du 13 mars 1996 précitée dont la France a fortement favorisé l'adoption.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 1 sans modification.

Article 2 - (article L. 32-1 du code des postes et télécommunications) - Principes généraux

L'article 2 du projet qui nous est soumis pose le cadre général de la nouvelle réglementation des télécommunications. Le I pose trois principes : liberté des activités de télécommunications, maintien et développement du service public, séparation des activités de régulation et d'exploitation.

Le II définit les missions générales du ministre chargé des télécommunications et de l'Autorité de régulation de télécommunications.


Le I de l'article L. 32-1 définit les principes qui sous-tendent la nouvelle réglementation des télécommunications.

Le 1° pose le principe du libre exercice des activités de télécommunications, sous réserve des autorisations ou déclarations prévues le cas échéant par la loi. Il rappelle le principe imposé par les directives européennes selon lequel ces autorisations et déclarations sont délivrées ou vérifiées dans des conditions objectives, transparentes, non discriminatoires et proportionnées aux objectifs poursuivis. Cet alinéa tire, en quelque sorte, les conséquences de l'ouverture du secteur à la concurrence.

Le 2° garantit le maintien et le développement du service public des télécommunications dont le projet de loi donne, par ailleurs, une définition clarifiée en introduisant de nouvelles dispositions (articles L. 35 à L. 35-6) dans le code des postes et télécommunications. L'article L. 32-1 précise, dès l'abord, que le service public comprend notamment le droit de chacun au bénéfice du service universel, dont la fourniture est imposée par les directives européennes.

Le 3° garantit, conformément aux textes communautaires, l'indépendance de la fonction de régulation du secteur des télécommunications par rapport aux fonctions d'exploitant de réseaux ou de fournisseur de services. Cette fonction est confiée au ministre chargé des télécommunications et à un organisme indépendant, l'Autorité de régulation des télécommunications. Elle est exercée au nom de l'État.


Le II de l'article L. 32-1 définit les attributions générales du ministre chargé des télécommunications et de l'Autorité de régulation de télécommunications, sans préciser le partage des compétences entre les deux autorités.

Le 1° dispose que le ministre et l'Autorité de régulation des télécommunications veillent à la fourniture et au financement de l'ensemble des composantes du service public des télécommunications, c'est-à-dire tant du service universel que des services obligatoires et des missions d'intérêt général.

La rédaction initiale du 2° disposait que le ministre chargé des télécommunications et l'Autorité de régulation des télécommunications veillent à l'exercice d'une concurrence effective, loyale et bénéfique aux utilisateurs.

- En général, le droit de la concurrence, sans pour autant employer le terme de « concurrence effective », s'attache à promouvoir une vraie concurrence par l'interdiction des ententes illicites, des abus de position dominante ou de dépendance économique, c'est-à-dire par des règles objectives visant à préserver le bon fonctionnement concurrentiel du marché. Ces règles sont définies au titre III de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et à la concurrence, et au titre V en ce qui concerne les concentrations.

- Les règles visant à préserver une concurrence « loyale » ont pour objet d'empêcher que le libre jeu des rapports entre les acteurs du marché ne soit perverti par des pratiques restrictives (revente à perte, discrimination, refus de vente, délais de paiement).

L'effectivité et la loyauté de la concurrence sont donc deux caractéristiques recherchées avec constance par le législateur.

Votre commission vous propose un amendement visant à préciser la nature de la concurrence et à insister sur le fait qu'elle doit bénéficier aux consommateurs, par une reformulation du 2° qui deviendrait : « 2° A l'exercice au bénéfice des utilisateurs d'une concurrence effective et loyale entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de télécommunications » .

Dans sa rédaction initiale, le 3° attribuait aux autorités de régulation du marché des télécommunications le rôle de veiller au développement de l'innovation et de la compétitivité dans le secteur des télécommunications.

Cet alinéa n'a qu'un faible contenu normatif, il se contente de décrire le quotidien de l'action gouvernementale.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à rajouter le développement de l'emploi à cette liste.

Le 4° met au rang des attributions du ministre et de l'autorité de régulation la définition des conditions de l'accès aux réseaux ouverts au public et de l'interconnexion de ces réseaux entre eux. Cette attribution essentielle découle, elle aussi, de la volonté de libéralisation du secteur. Des règles d'accès et d'interconnexion dépendront en effet la possibilité pour les opérateurs d'entrer sur le marché des télécommunications, et donc la réalité de la concurrence.

Le projet de loi précise que ces règles devront garantir la possibilité, pour tous les utilisateurs, de communiquer librement quel que soit l'opérateur auquel ils sont abonnés, ainsi que l'égalité des conditions de la concurrence.

Les dispositions des et 6° n'appellent pas de commentaire particulier. Elles concernent le respect du secret des correspondances, du principe de neutralité à l'égard des messages transmis, des obligations de défense et de sécurité. L'Assemblée a adopté un amendement de précision visant à remplacer le terme « sécurité » par « sécurité publique » .

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ainsi amendé.

Article 3 - (article L. 32-2 du code des postes et télécommunications) - Commission supérieure du service public des postes et télécommunications (CSSPTT)


• Dans sa rédaction initiale, cet article complète et adapte les missions confiées à la Commission supérieure du service public des postes et télécommunications (CSSPPT) en fonction de l'ouverture complète à la concurrence du secteur, de la création de l'Autorité de régulation des télécommunications et de la refonte du code des postes et télécommunications.

Ainsi, la CSSPPT veillera au respect des principes du service public qui sont définis aux articles L. 35 à L. 35-6. L'Autorité de régulation des télécommunications pourra -ce n'est pas une obligation- la consulter sur les questions relevant de sa compétence.


• Lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale, cet article a été complété par deux alinéas.

Le III nouveau dispose que le Parlement et le Premier ministre recevront un rapport annuel de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications, établi après qu'elle aura pris connaissance du rapport annuel de l'Autorité de régulation des télécommunications.

D'autre part, le 1° a été complété par l'Assemblée nationale et dispose que la CSSPPT peut être consultée par l'Autorité de régulation des télécommunications et par les commissions permanentes de l'Assemblée et du Sénat compétentes en matière de télécommunications. Il précise également qu'elle jouit de la faculté de saisir l'Autorité de régulation des télécommunications sur des questions relevant de sa compétence.

Votre commission a adopté un amendement rédactionnel. Elle vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié.

Article 4 - (article L. 32-4 du code des postes et télécommunications) - Recueil d'informations et enquêtes

L'article 4 du projet étend au président de l'Autorité de régulation des télécommunications le dispositif de l'article L. 32-4 du code des postes et télécommunications qui autorise le ministre chargé des télécommunications, pour l'accomplissement de ses missions, à recueillir les informations et les documents nécessaires et à procéder à des enquêtes. C'est une conséquence des nouveaux pouvoirs de l'Autorité de régulation des télécommunications.

L'Assemblée nationale s'est bornée à adopter un amendement rédactionnel à cet article.

Votre commission vous propose d'adopter cet article dans la forme retenue par l'Assemblée nationale.

Article 5 - (chapitre II du titre premier du livre II du code des P et T) - Régime juridique des télécommunications

L'article 5 du projet de loi procède à une refonte intégrale du chapitre II (relatif au régime juridique) du titre premier (relatif aux dispositions générales) du livre II (relatif aux télécommunications) du code des postes et télécommunications.

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