II. UN ACCORD QUI S'INSCRIT DANS LE CADRE D'UN SYSTÈME JURIDIQUE CORÉEN RÉNOVÉ

A. UN SYSTÈME JUDICIAIRE CONFORME AUX PRINCIPES DE L'ETAT DE DROIT

1. Une organisation judiciaire adaptée

Il existe en Corée du Sud trois degrés de juridiction . Les cours de district (établies à Séoul et dans les onze cités provinciales) constituent le premier degré de juridiction pour les recours non administratifs. Les procès sont en général conduits par un juge unique, ou, pour les affaires les plus importantes, par trois juges.

Les cours d'appel exercent leur compétence en appel pour les décisions des cours de district et connaissent en première instance des recours formés par des particuliers ou des personnes morales contre un acte administratif. Au nombre de quatre, les cours d'appel se composent chacune d'un juge-président et, en général, de trois juges associés.

Enfin, la cour suprême constitue l'instance de renvoi contre les décisions des cours d'appel, mais aussi contre celles des cours martiales (compétentes pour les infractions au droit pénal militaire par les membres des forces armées). Ses décisions définitives et obligatoires forment jurisprudence pour les juridictions de degré inférieur. Le président de la cour suprême est désigné par le Président de la République pour six ans non renouvelables, après consentement de l'Assemblée nationale. Les autres juges sont nommés par le Président de la République sur proposition du président de la cour suprême, pour une période de six ans renouvelable. Les membres de la cour suprême sont choisis parmi les juges, procureurs ou avocats âgés de plus de 40 ans possédant une expérience professionnelle de 20 ans au moins.

A l'exception des membres de la cour suprême, les juges sont recrutés par concours. La Constitution de 1987 garantit l'indépendance du pouvoir judiciaire. Aux termes de l'article 103, les magistrats du siège doivent agir selon leur conscience, en conformité avec la Constitution et la loi. Aucun juge ne peut être l'objet d'une suspension ou de toute autre mesure défavorable si ce n'est pour un motif disciplinaire.

Le parquet , compétent pour diriger des enquêtes en cas de violation de la loi et pour conduire des actions légales contre des suspects au moyen des forces de police, est placé sous l'autorité du ministre de la justice. Celui-ci cependant, sauf mention explicite de la loi, n'exerce pas de contrôle sur les décisions du parquet. La plus haute instance du parquet, l'office du procureur général, assure le contrôle de l'ensemble des officiers subordonnés : procureurs supérieurs, procureurs de district et procureurs-adjoints.

Bien que l'influence de l'exécutif soit traditionnellement forte sur la magistrature, plusieurs affaires récentes ont manifesté le souci d'indépendance de la justice coréenne. Ainsi, en 1995, la cour d'appel de Séoul a acquitté un éditeur accusé par le ministère public de sympathies pour la Corée du Nord en raison de la publication d'un roman nord-coréen. La même cour a également prononcé l'acquittement du président de l'Alliance nationale des organisations non gouvernementales, responsable de l'organisation d'une manifestation jugée par les autorités comme favorable aux thèses nord-coréennes sur la réunification.

2. Un code de procédure pénale réformé

Un nouveau code de procédure pénale a été adopté en 1994 afin de conformer le système coréen aux principes d'un Etat de droit moderne.

S'agissant de l'instruction, les autorités chargées de l'enquête ne peuvent arrêter un suspect pour détention sans un mandat de dépôt délivré par un juge sous certaines conditions (absence de domicile, motifs raisonnables de soupçonner que l'intéressé pourrait s'échapper ou détruire les preuves ...). En cas d'urgence ou de flagrant délit, le mandat peut être délivré après l'arrestation. La personne appréhendée est informée de son droit de se faire assister par un avocat. Un suspect détenu doit être relâché s'il n'est pas déféré devant le parquet dans les dix jours qui suivent son arrestation. A moins d'une inculpation prononcée dans un délai de dix jours à compter de la date à laquelle le suspect a été remis au parquet, celui-ci doit décider de relâcher le détenu.

La détention peut toutefois être reconduite pour une nouvelle période de dix jours si le parquet demande un complément d'information. En vertu de la nouvelle Constitution, le détenu a le droit de demander un contrôle judiciaire de la légalité de la détention avant que l'inculpation ne soit prononcée.

La procédure relative à l'inculpation se signale notamment par le pouvoir exclusif dont dispose le parquet pour engager une action pénale, et par l'appréciation discrétionnaire de ne pas porter l'affaire devant le tribunal si le procureur juge les preuves insuffisantes pour établir les faits ou que ceux-ci ne constituent pas un délit.

Une fois inculpé, le prévenu a le droit -qui ne peut lui être refusé que sous certaines conditions précisément énumérées- d'obtenir une mise en liberté sous caution.

En outre le code de procédure pénale de 1994 a renforcé notamment le système d'avocats commis d'office.

Le régime de la preuve se caractérise en particulier par le rejet de la preuve indirecte et par l'exigence de preuves corroborant des aveux.

En l'absence d'un système de jury, le jugement est rendu par un magistrat ou un collège de juges pour toute peine d'emprisonnement supérieure à un an.

B. LA CONVENTION D'ENTRAIDE JUDICIAIRE : UN DISPOSITIF CLASSIQUE

1. Le champ d'application

La convention pose, dans son article premier, le principe d'une aide judiciaire la plus large possible entre les deux parties dans toute enquête, poursuite judiciaire ou procédure en matière pénale visant des infractions dont la répression relève des compétences de la partie requérante.

Cependant l'aide ne s'applique pas :

- à l'exécution des décisions d'arrestation ou des condamnations ;

- au transfert des procédures pénales ;

- aux infractions militaires qui ne relèvent pas des infractions de droit commun.

En outre, l'aide judiciaire peut être refusée par la partie requise dans trois cas : les infractions de caractère politique, les demandes de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l'ordre public ou à d'autres intérêts essentiels, les affaires ne constituant pas une infraction pour la législation de la partie requise (article 4).

2. Les formes de l'entraide

Les demandes d'entraide judiciaire pourront concerner :

. les actes d'enquête et d'instruction

- l'accomplissement des actes d'instruction, la communication des dossiers, des documents, ou des pièces à conviction, la restitution à la victime des objets en valeurs provenant d'une infraction selon les formes prévues par la législation nationale de la partie requise.;

- les dépositions sous serment de témoins ou d'experts, les perquisitions et saisies si la législation nationale l'autorise (art. 5.3)

- la possibilité pour les représentants mandatés par la partie requérante d'assister à l'exécution de la demande d'entraide relève de l'appréciation de la partie requise (art. 6).

Selon la nature de l'aide demandée, la convention prévoit ainsi pour la partie requise différents degrés d'engagement.

. les autres forme d'entraide

- la comparution de témoins experts et personnes détenues

L'entraide prévoit également l'hypothèse où la partie requérante souhaite faire comparaître devant ses propres autorités judiciaires des témoins, experts ou personnes détenues. Cette possibilité est toutefois entourée de plusieurs garanties.

S'agissant des témoins et des experts -dont la comparution doit faire l'objet d'une mention expresse dans la demande adressée à la partie requise- le défaut de comparution ne pourra donner lieu à aucune sanction ou mesure de contrainte même si la citation à comparaître contient des injonctions (art. 11).

Quant aux personnes détenues , leur transfèrement peut être refusé par la partie requise dans quatre hypothèses (art. 12) :

- si la personne détenue n'y consent pas,

- si sa présence est nécessaire dans l'Etat requis dans le cadre d'une procédure pénale en cours,

- si son transfèrement conduit à prolonger sa détention,

- si d'autres considérations impérieuses s'opposent au transfèrement.

En outre, en vertu du principe de la spécialité des poursuites, aucune personne citée ne peut être poursuivie et a fortiori détenue sur le territoire de la partie requérante pour des faits ou condamnations antérieurs à son départ du territoire de la partie requise et non visés par la citation (art. 13).

- La communication des extraits du casier judiciaire est possible sur demande d'une partie pour les besoins d'une affaire pénale, dans la mesure où les autorités judiciaires compétentes de la partie requise pourraient elles-mêmes les obtenir en pareil cas (art. 15).

- La France et la Corée s'engagent à s'échanger au moins une fois par an les avis des sentences pénales et les mesures postérieures qui concernent leurs ressortissants (art. 22).

3. Les procédures

La compétence pour déposer ou recevoir une demande d'entraide judiciaire relève du ministère de la justice pour la France et du ministère de la justice ou de l'un de ses représentants pour la Corée du Sud. Ces « autorités centrales » communiquent en principe par la voie diplomatique ou directement en cas d'urgence.

La convention précise plusieurs autres points de procédure : les indications que doivent contenir les demandes d'entraide (art. 16), les conditions de confidentialité -garantie en principe si le souhait en est exprimé (art. 17)-, la traduction des demandes et des documents dans la langue de la partie requise (art. 18).

A l'exception des frais liés à l'intervention d'experts sur le territoire de la partie requise et au transfèrement de personnes détenues, les demandes d'entraide ne donnent lieu au remboursement d'aucun frais (art. 21).

La convention s'applique à toute demande présentée après son entrée en vigueur, même si les actes qui lui sont liés se sont produits avant cette date.

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