B. LES BUDGETS PRÉVISIONNELS DES ORGANISMES

1. France Télévision

a) Panorama budgétaire de 1998

Le projet de budget de France 2 s'établit à 5 milliards 187 millions, montant en augmentation de 3,4 % par rapport à la loi de finances initiale de 1997. La part de redevance versée à la chaîne diminue de 17 millions de francs, les crédits budgétaires augmentent de 81,5 millions et les objectifs publicitaires de 96 millions. Les économies demandées s'établissent à 33 millions de francs et les mesures nouvelles à 96 millions dont 41 millions pour les programmes et 55 millions en dépenses d'investissements (liées à la construction du siège de France Télévision).

BUDGET D'EXPLOITATION PRÉVISIONNEL DE FRANCE 2 (RECETTES)

1998

%

LIF 1997

%

Ressources publiques 2 467,5 47,6 2 403 47,9
· redevance 2 364,5 2 381,5
· crédits budgétaires 103 21,5
Publicité 2 513,8 48,4 2 417,2 52,1
Autres ressources propres 206 4 195
(dont parrainage) (136) (125)
TOTAL 5 187 5 015

Le projet de budget de France 3 s'établit à 5 milliards 643 millions de francs, montant en augmentation de 2,5 % par rapport à la loi de finances initiale de 1997. La part de redevance versée à France 3 diminuera de 24 millions de francs, les crédits budgétaires augmentant de 81,2 millions et les objectifs publicitaires de 68 millions. Les économies demandées s'élèvent à 51,7 millions de francs et les mesures nouvelles à 59,6 millions destinés aux programmes (les dépenses d'investissement liées au nouveau siège sont imputées sur le budget de France 2).

BUDGET D'EXPLOITATION PRÉVISIONNEL DE FRANCE 3 (RECETTES)

PLF 1998

%

LFI 1997

%

Ressources publiques 3 398

60,2

3 341;5

60,7

· redevance 3 295 3 319,7
· crédits budgétaires 103 21,8
Publicité 1 744

30,9

1 676,9

39,3

Autres ressources propres

(dont parrainage)
501

101

8,9

487,4

87
TOTAL 5 643 5 505,8
b) Quelques remarques

La part relative des ressources publicitaires et des ressources publiques

Pour France 2, le rapport est de 48,4 % de publicité pour 47,6 % de ressources publiques, il est pour France 3 de 30,9 % de publicité pour 60,2 % de ressources publiques.

Ces rapports, qui évoluent très peu, mais en défaveur des ressources publiques, par rapport à 1997, sont très insatisfaisants, spécialement en ce qui concerne France 2 dont la programmation restera excessivement dépendante des objectifs publicitaires et dont la ligne éditoriale continuera d'infliger de navrants démentis à la notion de service public.

Il est étrange qu'un gouvernement qui s'est targué par la voix de son ministre de la communication de " sortir d'une spirale infernale qui menait progressivement mais inexorablement à la mort du service public ", qu'un gouvernement qui a expliqué qu' " en étranglant financièrement les chaînes publiques, le précédent gouvernement les contraignait à se lancer dans une course à l'audience, à chercher à rivaliser avec les chaînes commerciales pour conquérir les ressources publicitaires devenues indispensables à leur survie ", il est étrange que ce gouvernement, ce ministre, présentent pour les deux principales chaînes du service public un budget qui perpétue une telle situation, qui l'accentue même légèrement.

Ce budget qui voue France Télévision à la dérive commerciale, si l'on extrapole les dires du ministre de la communication, est-il au moins crédible ? Les objectifs publicitaires peuvent-ils être atteints ? Cela semble être le cas pour France 2 dont les prévisions de réalisation sont satisfaisantes en 1997. En revanche, les perspectives sont plus incertaines pour France 3 en raison de l'effritement d'audience enregistré au premier semestre de 1997 et du retard des rentrées publicitaires qui en est découlé. Les rentrées publicitaires de France 3 tendent actuellement à s'accélérer, il n'en reste pas moins que l'objectif de 1998 constitue pour France 3 un défi qui pourrait amener la chaîne à infléchir dans le sens " commercial " une programmation qui a fait l'objet de louanges ces dernières années. Votre rapporteur ne peut alors que renvoyer le ministre à l'analyse qu'elle faisait récemment de l'action de ses prédécesseurs : " il devenait facile de montrer que les chaînes publiques n'étaient plus différentes des chaînes privées, et on en justifiait ainsi aisément la disparition programmée ". Souhaitons pour la télévision publique que les successeurs de Mme Catherine Trautmann n'aient pas lieu de lui retourner le compliment ! Votre rapporteur s'en gardera cette année pour sa part.

La part relative des crédits budgétaires et de la redevance


Autre problème symptomatique du manque de cohérence de la politique de l'audiovisuel public, les crédits budgétaires de France 2 et de France 3 vont augmenter brutalement, comme on l'a noté ci-dessus, la part de la redevance versée à chacune d'elle diminuant significativement. Il convient pour interpréter ces mouvements contraires de rappeler les conséquences régulières de la régulation budgétaire sur les ressources des chaînes. En 1996, les crédits budgétaires de l'audiovisuel public ont été réduits de 183 millions de francs, France 2 contribuant pour 41 millions de francs et France 3 pour 195 millions de francs. Il faut noter qu'en 1995 le budget de France 2 avait été de la même manière amputé de 47,5 millions de francs et celui de France 3 de 240 millions de francs. En 1997, le couperet de la régulation s'émousse puisque l'arrêté d'annulation du 9 juillet 1997 n'a pas touché les crédits de France Télévision, mais la saison n'est pas terminée ! Il convient, en tout état de cause, de considérer avec la plus grande suspicion le déversement soudain sur France 2 et France 3 d'une manne budgétaire de 206 millions de francs en 1998 contre 23,3 millions de francs en 1997 . S'agit-il de constituer dans les budgets des deux sociétés un réservoir pour les futures régulations ? L'objectif est sans doute de mettre à l'abri de la régulation budgétaire les " références majeures du secteur audiovisuel public " que sont aux yeux du ministre de la communication la Sept-Arte et La Cinquième. Le rapport revient ci-dessous sur la faveur accordée à ces deux chaînes, faveur dont la précarisation potentielle des ressources de France 2 et de France 3 n'est que le contrecoup. Votre rapporteur conteste ce procédé.

Les économies


Un troisième problème est l'exécution des économies que les deux chaînes devront réaliser en 1998. Rappelons qu'un programme d'économies de 205 millions de francs sur les programmes de France 2 avait été prescrit en 1997. Il semble que le retard pris dans l'exécution de ce programme (le montant des économies non réalisées est évalué à 90 millions de francs) rend difficile la réalisation d'économies supplémentaires d'un montant global pour les deux chaînes de 84,7 millions de francs en 1998. Votre rapporteur s'inquiète de cette perspective.

Le développement régional de France 3


Le développement régional de France 3, suspendu en 1996, ne sera pas repris en 1998, ce qui portera atteinte à l'exécution d'une mission essentielle de la chaîne et ancrera un peu plus dans les faits une analyse présentée par M. Jean-Michel Bloch-Lainé dans le rapport final de la mission d'audit du secteur public : " Les programmes dits " de proximité ", si l'on y regarde d'un peu plus près, n'occupent qu'une assez faible part de la grille ; en fait France 3 est une chaîne généraliste qui offre à son public de l'information, des magazines, du cinéma, du sport, du divertissement et de la culture, et qui a su profiter de l'affrontement TF1 - France 2 pour " contre-programmer " notamment le " 19/20 ". Il est vital pour le devenir de France 3 de reprendre le développement du concept de télévision de proximité. Votre rapporteur attire l'attention du Sénat sur cette nécessité.

L'innovation


Enfin, il est paradoxal qu'un budget axé selon le ministre sur la qualité et sur l'innovation ne comporte aucune mesure en faveur de l'entrée de France Télévision dans le numérique. Celle-ci est pourtant une condition incontournable de l'adaptation de la télévision publique au bouleversement de l'audiovisuel, un gage d'avenir, votre rapporteur reviendra sur cette nécessité dans la seconde partie du présent rapport. Là encore, les mesures nouvelles seront réservées aux " références majeures du secteur audiovisuel public ", ce qui traduit de la part du Gouvernement un choix pour le moins étonnant en faveur d'une télévision de niche. La télévision de masse, celle qui devrait susciter les initiatives les plus dynamiques, pour qui croit au rôle social de la télévision publique, est plus ou moins invitée à s'accommoder des contraintes d'une conjoncture difficile. Votre rapporteur regrette ce parti-pris .

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