2. Une très légère hausse du revenu agricole

a) Le niveau du revenu agricole en 1996

L'évolution du revenu agricole est retracée dans les comptes de l'agriculture établis par l'INSEE et le Service central des enquêtes et études statistiques (SCEES) qui sont examinés chaque année par la commission des comptes de l'agriculture de la Nation.

L'indicateur de revenu habituellement retenu est le revenu brut agricole (RBA) en optique " livraisons ". Son évolution est mesurée en moyenne par exploitation et en termes réels. Le " déflateur " utilisé pour ce calcul est le prix du produit intérieur brut.

Après deux années de forte hausse en 1989 et 1990 (+ 9,5 %), le revenu agricole a diminué en 1991 (- 1,0 %) et surtout en 1992 (- 6,7 %). Il s'est stabilisé en 1993 (+ 0,6) et a, de nouveau, connu deux années de forte hausse en 1994 (+ 12,6 %) et en 1995 (+ 10,4 %).

Pour 1996, il est quasiment stable avec une augmentation de + 0,9 %.

ÉVOLUTION DU REVENU BRUT AGRICOLE EN OPTIQUE " LIVRAISON " MESURÉE EN MOYENNE PAR EXPLOITATION ET EN TERMES RÉELS



Cette très légère hausse en France contraste avec celle, plus importante, du revenu agricole en Europe qui est évalué à environ 5 %, soit un chiffre comparable à celui de 1995. Si on constate que 1996 est la quatrième année consécutive de hausse, d'importantes différences sont à relever entre les Etats membres.

ÉVOLUTION DE LA VALEUR AJOUTÉE NETTE AGRICOLE AU COÛT DES FACTEURS EN TERMES RÉELS PAR UNITÉ DE TRAVAIL EN 1996
DANS LES PAYS DE L'UNION EUROPÉENNE

Valeur ajoutée nette nominale

Déflateur (Indice prix du PIB)

Valeur ajoutée nette réelle

Main d'oeuvre agricole (en UTA)

Indicateur 1 (VAN réelle/UTA)

1996/95

1996/95

1996/95

1996/95

1996/95

Belgique

5,9

1,7

4,2

-2,6

6,9

Danemark

3,7

1,7

2,0

-1,8

3,8

Allemagne

2,8

1,5

1,3

-4,8

6,4

Grèce

3,6

8,8

-4,8

-2,7

-2,1

Espagne

18,7

3,9

14,2

-5,9

21,4

France

-0,3

1,6

-1,8

-3,4

1,7

Italie

7,1

4,9

2,1

-3,3

5,6

Luxembourg

1,3

2,5

-1,2

-4,4

3,4

Pays-Bas

3,6

1,6

2,0

-0,9

2,9

Autriche

-10,0

1,7

-11,5

-4,9

-6,9

Finlande

6,1

1,7

4,3

-4,3

9,0

Suède

-4,0

1,9

-5,8

0,0

-5,8

Royaume-Uni

-3,4

2,6

-5,9

-1,1

-4,8

EU13*

4?5

1,3

-3,5

5,1

* Données non disponibles pour l'Irlande et le Portugal

Selon Eurostat, la progression intervenue en 1996 par rapport à l'année précédente s'explique, en premier lieu, par une augmentation notable du volume de la production végétale (en particulier céréales, pommes de terre, vin, fruits frais) due à de meilleures conditions climatiques (en Espagne, par exemple, les volumes de production se sont rétablis après quatre années de sécheresse), à des meilleurs rendements dans certains Etats membres et, dans une certaine mesure, à la réduction du taux de gel des terres.

Eurostat relève également, pour expliquer cette tendance, la hausse modérée du volume et du prix des consommations intermédiaires et la confirmation de la tendance à la baisse du volume de la main d'oeuvre agricole.

Par ailleurs, l'augmentation de la valeur de la production végétale finale exprimée en termes réels se chiffre à plus 3,1 %. Parmi les pays fortement orientés vers les productions végétales, d'importantes augmentations des volumes de production ont été enregistrées en France (+ 5,4 %), au Royaume-Uni (+ 7,9 %), en Allemagne (+ 10,2%) et en Espagne (+ 25,1 %). L'évolution, en termes réels, de la valeur de la production animale finale se chiffre à moins 0,4 %.

b) Les composantes de cette évolution

Le revenu de la branche agricole est déterminé à partir de la valeur ajoutée, augmentée des autres ressources perçues mais diminuée des différentes charges supportées.

Or, en 1996, la baisse de la valeur ajoutée a été quasiment compensée par l'octroi de subventions supplémentaires, essentiellement accordées aux éleveurs dans le contexte de la crise de la viande bovine. Par ailleurs, les cotisations sociales des exploitants se sont accrues à un rythme élevé, l'évolution de l'assiette intégrant les fortes augmentations du revenu de 1994 et 1995. De plus simultanément, les prestations sociales se sont réduites, sous l'effet du plan d'économie de l'assurance maladie mis en place à la mi 1995.

(en milliards de francs)

Valeur 1995

(milliards de F)

Valeur 1996

(milliards de F)

Evolution en %

Ressources

Valeur ajoutée brute des livraisons

158,7

155,9

- 1,7

Subventions d'exploitation

50,1

53,2

+ 6,2

Autres ressources dont :

25,3

24,6

- 2,7

indemnités d'assurance

5,1

4,9

- 2,3

prestations sociales

20,2

19,7

- 2,4

Emplois

Salaires et cotisations sociales des salariés dont :

29,5

30,1

+ 2

salaires

22,25

22,7

+ 2

cotisations sociales (salariés)

7,25

7,4

+ 2,1

Impôts liés à la production

2

1,6

- 19,1

Impôts fonciers

2,7

2,7

- 0,7

Charges locatives

10,25

10,3

+ 0,5

Primes d'assurance

8

8,3

+ 3,7

Intérêts

12,1

11,9

- 1,3

Cotisations sociales (exploitants)

17

18,3

+ 7,6

Revenu brut agricole (1)

152,3

150,1

- 1,5

(1) après correction des transferts courants divers et des écarts sur taxes

L'importance des subventions d'exploitation

Au cours de ces trois dernières années, les subventions d'exploitation sont passées de 18 milliards de francs à 50 milliards en 1995.
Cette forte croissance s'inscrit dans le cadre de la réforme de la PAC dont l'un des principaux volets consiste à compenser les baisses des prix d'intervention des grandes cultures et des gros bovins et le " gel " d'une partie des terres par le versement de subventions supplémentaires. En 1996, le montant total des subventions d'exploitations s'est accru de 2,7 milliards de francs par rapport à 1995 .

Les taux unitaires de l'aide compensatrice aux céréales, de l'aide au gel des terres et des aides à l'élevage n'ont pas été revalorisés dans le cadre de la réforme. Par ailleurs, le taux de gel des terres a été réduit, ce qui a permis une augmentation substantielle des superficies cultivées.

Ainsi, les montants des subventions relatives aux céréales sont globalement stables : plus un milliard au titre de l'aide compensatrice (augmentation des superficies cultivées) et moins un milliard au titre de l'aide au gel des terres (baisse des superficies " gelées ").

En revanche, les subventions au secteur bovin ont sensiblement progressé pour compenser les difficultés financières des éleveurs, liées à la crise de l'ESB à partir du printemps 1996. A ce titre, environ 1,6 milliard a été versé en 1996, notamment sous la forme de compléments exceptionnels à la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes et à la prime spéciale aux bovins mâles.

Les indemnités spéciales de montagne et de piedmont (ISM et ISP) ont fortement progressé en raison d'un complément exceptionnel décidé en 1995 et versé en 1996 (+ 633 millions).

SUBVENTIONS D'EXPLOITATION REÇUES PAR LA BRANCHE " AGRICULTURE "

Valeur 1995

(en milliards de francs)

Valeur 1996

en milliards de francs)

Aides nouvelles ou revalorisées par la réforme de la PAC

39.847

41.852

- Aides compensatrices pour les céréales, oléagineux et protéagineux (1)

27.266

28.450

- Aide au gel annuel des terres (2)

4.606

3.690

- Aides à l'élevage nouvelles ou revalorisées (3)

7.975

9.712

Autres subventions

10.206

10.910

TOTAL

50.053

52.762

(1) Aides compensatrices aux producteurs de graines oléagineuses et de protéagineux (SIDO) + Aide compensatrice aux producteurs de céréales (ONIC).

(2) Aide au gel des terres (ONIC) + aide à la jachère industrielle (SIDO).

(3) Prime à la vache allaitante + Prime aux gros bovins (OFIVAL) + Prime à l'herbe (CNASEA).


L'examen détaillé du compte d'exploitation et du compte de revenu

- au niveau du compte d'exploitation


Outre la part importante des subventions, les prises en charge de cotisations sociales par l'Etat passent de 600 millions à près de 1,2 milliard. De plus, aux exonérations et réductions de cotisations de prestations familiales sur les bas salaires, s'ajoutent en 1996, comme pour les autres activités, des exonérations au titre des autres cotisations sociales sur les bas salaires.

Les salaires versés progressent de 2 % (3 % de hausse de taux de salaire horaire et diminution de 1 % du volume de travail salarié). Les cotisations sociales à la charge des employeurs s'accroissent de 2,5 %. Compte tenu des prises en charge par l'Etat, comptabilisées dans le poste " Subventions ", le montant des cotisations supportées in fine par la branche agriculture diminue de 6 %.

Les impôts liés à la production
versés par la branche agriculture continuent de se réduire en 1996 (1,8 milliard au lieu de 2 milliards en 1995). Cette diminution de 200 millions s'explique par la suppression à partir de la campagne 1996-1997 de la taxe de solidarité au profit du BAPSA, qui était prélevée sur les céréales, les oléagineux et les betteraves industrielles. En quelques années, la diminution des impôts liés à la production a été particulièrement importante : au début des années 1990, ils s'élevaient à environ 8 milliards de francs ;

- au niveau du compte de revenu

Selon les sources du SCEES et de l'INSEE, pour la quatrième année consécutive, le montant des intérêts versés par la branche agriculture se réduit en 1996 : - 3,2 %. Cet allégement des charges financières de l'agriculture est la conséquence directe de la baisse des taux d'intérêt des prêts à moyen et long terme (bonifiés et non bonifiés) et surtout de la réduction importante des taux à court terme (5,8 % au lieu de 7,8 % en 1995).

Les cotisations sociales des exploitants augmentent à un rythme relativement rapide en 1996 (+ 5,3 %). En effet, l'évolution de l'assiette, sur laquelle reposent les cotisations de 1996, intègre en partie les fortes augmentations du revenu en 1994 et 1995.

Le montant des impôts fonciers sur les terres exploitées en faire-valoir direct continue à se réduire en 1996 (- 8 % par rapport à 1995) en raison notamment de la poursuite du démantèlement de la part départementale de la taxe sur le foncier non bâti. En 1996, les montants versés sont inférieurs d'environ un tiers à ceux de 1990.

Les transferts courants divers versés passent de 123 millions en 1995 à 719 millions en 1996. Ils comprennent cette année :

- 419 millions de pénalités laitières, versés en 1996 au titre du dépassement du quota laitier au cours de la campagne 1995-1996 ;

- 300 millions de cotisations interprofessionnelles versées par les producteurs des grandes cultures au profit des éleveurs de bovins ; ces 300 millions sont également comptabilisés dans le poste " transferts courants divers reçus ", en ressources du compte de revenu de la branche.

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