N° 503

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 17 juin 1998

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur la proposition de loi de M. Jean-François LE GRAND, Mme Janine BARDOU, MM. Michel DOUBLET, Michel SOUPLET, Louis MINETTI et Paul RAOULT, relative à la mise en oeuvre du réseau écologique européen, dénommé Natura 2000,

Par M. Jean-François LE GRAND,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, Gérard César, Louis Minetti, vice-présidents ; Georges Berchet, William Chervy, Jean-Paul Émin, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Michel Barnier, Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat, Marcel-Pierre Cleach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Hilaire Flandre, Aubert Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis Grignon, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Hugo, Bernard Joly, Gérard Larcher, Edmond Lauret, Pierre Lefebvre, Jean-François Le Grand, Kléber Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Jean-Baptiste Motroni, Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Bernard Piras, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, M. Henri Weber.

Voir le numéro :

Sénat : 194 (1997-1998).


 

Environnement.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

En avril 1997, la Commission des Affaires économiques a adopté les conclusions du rapport d'information 1( * ) que votre rapporteur lui présentait au nom du groupe de travail 2( * ) " Natura 2000 ", qui portait sur la mise en oeuvre de la directive 92/43/CEE du 21 mars 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.

Après avoir rappelé que cette directive se donnait pour objet la protection d'habitats d'espèces faunistiques et floristiques significatifs, à travers la mise en place d'un réseau coordonnant des sites proposés par les Etats membres, le rapport soulignait que la protection de la biodiversité, à travers ce réseau écologique européen, devait tenir compte des exigences économiques, sociales et culturelles en s'assurant que les objectifs de développement économique intègrent la préservation de l'environnement dans une optique de développement durable.

Le rapport, ayant souligné toutes les difficultés de mise en oeuvre de cette directive au niveau français faisait un certain nombre de propositions, notamment sur le renforcement de la concertation à tous les niveaux. Il préconisait d'associer les propriétaires et les gestionnaires des futurs sites intégrés dans le réseau écologique européen, notamment lors de la définition des mesures de gestion à mettre en oeuvre dans ces sites.

Loin de parler de rupture ou de révolution dans des modes de développement économique, qui avaient contribué à maintenir la richesse et la diversité du paysage français, le rapport concluait à la nécessité d'une prise de conscience pouvant amener à des évolutions auxquelles les acteurs socio-économiques étaient prêts, à condition d'être pleinement associés au processus engagé.

La proposition de loi n° 194 déposée par les membres du groupe de travail Natura 2000, et soumise à votre examen, reprend les préconisations rappelées ci-dessus pour les traduire au niveau législatif.

Avant d'en examiner le contenu, votre rapporteur souhaite faire le point sur l'état d'avancement de la mise en oeuvre de la directive depuis l'installation du nouveau Gouvernement en juin 1997.

I. LA MISE EN OEUVRE DE LA DIRECTIVE 92/43 CEE - HABITATS NATURELS

A. RAPPEL DU CONTENU DE LA DIRECTIVE ET DU CALENDRIER PROPOSÉ INITIALEMENT

1. La préservation de la biodiversité à travers la constitution d'un réseau écologique européen.

La directive 92/43 CEE Habitats naturels contribue à la réalisation des objectifs de la convention de Rio sur la diversité biologique signée et ratifiée par la France, à travers la constitution d'un réseau européen cohérent de sites. Il s'agit d'assurer le maintien ou, le cas échéant, le rétablissement dans un état de conservation favorable, d'habitats naturels et d'espèces de faune et de flore sauvages d'intérêt communautaire dans leur aire de répartition naturelle 3( * ) .

Le réseau à constituer n'a pas pour objet de faire de ces sites " Natura 2000 " des sanctuaires de nature où toute activité humaine serait proscrite puisque le but principal de la directive est " de favoriser le maintien de la biodiversité, tout en tenant compte des exigences économiques, sociales, culturelles et régionales " .

La délimitation d'un site Natura 2000 doit permettre d'identifier une portion de territoire :

- qui abrite un ou plusieurs habitats naturels et/ou espèces d'intérêt communautaire (dont certains sont dits " prioritaires " et qui appellent donc une attention particulière) ;

- à l'intérieur duquel l'Etat membre aura à s'assurer de façon permanente que lesdits habitats et espèces sont maintenus dans un état de conservation favorable en adoptant, si nécessaire, des mesures de conservation appropriées. Dans un nombre limité de cas, l'Etat devra adopter des mesures permettant de rétablir un état de conservation favorable.

Ainsi le périmètre et la superficie d'un site ne constituent pas des critères en soi. Ils doivent traduire sur le terrain le meilleur compromis possible permettant à un ou plusieurs habitats naturels et espèces " cohabitant " sur un même territoire, au sein d'un contexte anthropique donné, d'être maintenus à long terme, ou éventuellement rétablis dans un état de conservation favorable.

Pour un site donné, surtout s'il est de grande superficie et qu'il contient plusieurs types d'habitats naturels et / ou d'espèces, la circulaire du 29 septembre 1995 précise qu'il convient d'établir un zonage interne sur la base d'une cartographie précise de ces habitats et de ces espèces.

Ce zonage permet d'identifier les relations éventuelles entre les " noyaux durs " des habitats proprement dits, les zones " tampon " et les espaces interstitiels. Sont considérés comme zones " tampon " les territoires pour lesquels un effet direct -ou indirect- sur ce " noyau dur " peut être démontré (bassins versants par exemple).

Ainsi, est-ce sur la base d'un tel zonage, et non pas seulement du périmètre extérieur du site, que devront être concertées et hiérarchisées les mesures de conservation qui se justifieraient.

On peut rappeler que les premiers résultats du travail d'inventaire mené pour la mise en oeuvre de la directive 92/43/CEE/Habitats naturels ont confirmé la richesse et la diversité du patrimoine national, qui relève de quatre des six régions biographiques identifiées en Europe (alpine, atlantique, continentale et méditerranéenne).

Ainsi, sur les 222 types d'habitats naturels retenus par l'annexe I de la directive, la France en possède 172 (dont 43 habitats prioritaires sur 66).

Parmi ces derniers, peuvent être signalés, par exemple, les habitats naturels suivants : herbiers de posidonies, lagunes, pré-salés continentaux, mares temporaires méditerranéennes, landes sèches littorales, sites d'orchidées remarquables sur formations herbeuses sèches semi naturelles sur calcaires, tourbières hautes actives, éboulis médio-européens calcaires, forêts alluviales résiduelles, forêts méditerranéennes endémiques.

Sur les 632 espèces à protéger au titre de l'annexe II, la France est concernée par 83 espèces animales et 57 espèces végétales (dont respectivement 8 sur 23 et 10 sur 165 des espèces prioritaires).

Parmi les habitats d'espèces prioritaires intéressant le territoire, on peut signaler : l'ours brun, le phoque moine, l'esturgeon, la tortue caouanne (côtes de Corse, Pyrénées-Atlantiques et Bretagne), la rosalie alpine (coléoptère), l'omphalodes littoralis (plante endémique atlantique), la viola hispida (plante endémique du bassin parisien).

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