II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL
Votre rapporteur spécial est amené à formuler trois observations relatives aux crédits alloués à la fonction publique et à la réforme de l'Etat pour 2002, en tentant de présenter un bilan de l'action du gouvernement au cours de la législature.
A. LA FONCTION PUBLIQUE, PREMIÈRE PRIORITÉ DU GOUVERNEMENT TOUT AU LONG DE LA LÉGISLATURE
1. Toujours plus de fonctionnaires
a) Le gel de l'emploi public démythifié
Au
début de la législature, le gouvernement avait affirmé
vouloir « geler » l'emploi public, cette bonne
résolution étant motivée tant par des
considérations budgétaires que par un souci affiché de
bonne gestion. Sa position officielle consistait ainsi à stabiliser le
nombre de fonctionnaires, tout en procédant à des
redéploiements d'effectifs en direction des secteurs prioritaires comme
la justice ou la sécurité
6(
*
)
. Inversement, l'administration fiscale
et celle de l'équipement devaient voir leurs effectifs diminuer.
Cette ambition s'est brisée - rapidement - sur des résistances,
voire des corporatismes de nature syndicale, qu'il n'était du reste ni
étonnant ni illégitime de voir se manifester, mais auquel le
gouvernement n'a pas eu le courage de faire face,
préférant,
par facilité, renouer avec une politique qui, faute d'être
réformatrice, a au moins le mérite de la lisibilité :
créer des emplois supplémentaires.
Le graphique ci-après traduit bien l'abandon par le gouvernement de son
objectif initial de « geler » l'emploi public :
C'est à partir de la loi de finances pour 2001 que le gouvernement a
fait le choix de créations massives d'emplois publics telles qu'il n'y
en avait plus eu depuis le début des années 1990
7(
*
)
. Le présent projet de loi de
finances confirme ce choix, en l'amplifiant, puisqu'il prévoit la
création de 15.892 emplois budgétaires
supplémentaires
, dont 14.611 au sein des services de l'Etat et 1.281
dans les établissements publics.
Le tableau ci-après présente ces créations d'emplois par
section budgétaire :
-
• Ces arbitrages sont évidemment critiquables, et suscitent quelques interrogations.
Il paraît légitime de se demander jusqu'où va aller ce mouvement, d'autant plus que le nombre des élèves comme des étudiants diminue désormais très régulièrement, et que les projections démographiques montrent bien que cette décrue va se poursuivre.
Certes, le gouvernement indique que ces créations d'emplois s'inscrivent dans un plan pluriannuel ayant vocation à anticiper les départs importants à la retraite des enseignants. Ne paraît-il pas plus urgent - mais c'est aussi bien plus difficile - de réfléchir à la façon d'adapter le format de l'Etat à cette occasion historique que constitue une telle évolution ?
Cette question fondamentale , à laquelle le gouvernement n'a jamais donné d'autre réponse que quantitative, se pose plus généralement pour l'ensemble de la fonction publique , tant il est vrai que, comme le lui suggérait du reste un rapport du Commissariat général du Plan l'année dernière, il semble inconcevable de remplacer chaque fonctionnaire partant à la retraite.
En effet, non seulement cela entraînerait un coût budgétaire considérable, mais cela paraît également contradictoire avec les gains de productivité que les nouvelles technologies de l'information et de la communication sont susceptibles d'engendrer dans les services, permettant ainsi de réduire les effectifs et surtout d'enrichir le contenu de certains emplois publics.
- • Par ailleurs, des mesures « d'ordre » (c'est-à-dire de remise en ordre des personnels) sont prévues :
Le plan de résorption de la précarité dans la fonction publique
Au mois
de juin 2000, le ministère de la fonction publique et de la
réforme de l'Etat et plusieurs organisations syndicales de
fonctionnaires ont conclu un accord, d'une durée de cinq ans, tendant
à résorber la précarité dans la fonction publique.
En effet, en dépit d'un accord similaire conclu en 1996 - accord dit
« Perben » -, dont 2000 était la quatrième et
dernière année d'application
8(
*
)
, la fonction publique compte un grand
nombre d'emplois précaires, ayant parfois une longue ancienneté,
l'Etat s'autorisant ce qu'il refuse aux entreprises.
Pourtant, le même constat est dressé à l'issue de chaque
plan de résorption de la précarité :
«
les administrations recrutent fréquemment de nouveaux
agents non titulaires pour remplacer ceux ayant bénéficié
d'une mesure de titularisation
» notait le rapport annuel du
ministère, portant sur la période mars 1999-mars 2000.
Il subsiste en effet de nombreux emplois hors statut général dans
les trois fonctions publiques :
- 80.000 personnes en contrat à durée déterminée
dans la fonction publique d'Etat ;
- 320.000 dans la fonction publique territoriale ;
- 26.000 dans la fonction publique hospitalière.
Afin d'éviter que la précarité ne se reconstitue, l'accord
signé en juillet 2000 concerne l'ensemble des catégories de
fonctionnaires, et non pas seulement la catégorie C comme l'accord
Perben. Par ailleurs auront droit à la titularisation tous les
contractuels des trois fonctions publiques qui, au cours des huit
dernières années, justifient de trois ans d'activité en
équivalent temps plein.
- l'inscription de 6.917 emplois au titre de la régularisation d'emplois
« Berkani », soit 2.335 emplois au ministère de la
défense, 2.106 à celui de l'intérieur, 1.452 au
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, 962
à l'équipement, 35 à l'emploi, 20 à l'outre-mer, et
7 à la mer ;
- 2.500 régularisations de surnombres, dont 1.500 enseignants stagiaires
et 1.000 policiers, auxquelles il convient de retrancher 120 emplois pour
solde des diverses autres mesures d'ordre.
Soit un total de 13.293 emplois au titre de l'ensemble des mesures
d'ordre.
Si le gouvernement indique que ces mesures interviennent
«
à effectifs constants
», il convient bien
de garder à l'esprit qu'elles n'en emportent pas moins des
conséquences budgétaires, le versement d'une pension par exemple.
Au total, ce seront donc 29.185 emplois budgétaires
supplémentaires qui sont créés par le projet de loi de
finances pour 2002 (après 20.820 en 2001).
b) La question non réglée du devenir des emplois-jeunes
Les
emplois-jeunes peuvent être considérés comme des emplois
publics, puisque l'Etat prend en charge 80 % de leur
rémunération, et même 100 % pour les adjoints de
sécurité recrutés par le ministère de
l'intérieur et les aides-éducateurs embauchés par celui de
l'éducation nationale.
Le gouvernement a régulièrement modifié ses objectifs en
matière d'emplois-jeunes. Au départ, notamment lors de l'examen
de la loi du 16 octobre 1997, il avait affiché l'ambition de
parvenir, à la fin 2002, au recrutement de 350.000 emplois-jeunes. Puis
cet objectif a été avancé à la fin 2000, puis de
nouveau repoussé, en renvoyant la réalisation à la date
initialement fixée, soit fin 2002 !
Désormais, son objectif a changé de nature : il ne s'agit
plus de mesurer le dispositif en stock mais en flux.
Ainsi les documents
budgétaires pour 2002 indiquent-ils que ce dispositif doit viser
à «
porter à 360.000 à la fin 2002, le nombre
des jeunes qui auront bénéficié du programme depuis sa
création
»
9(
*
)
.
Le tableau ci-dessous indique le nombre d'emplois-jeunes embauchés au 30
juin dernier, sans que l'on ne sache plus très bien s'il s'agit d'un
stock ou d'un flux :
Pour la
première fois depuis le lancement du dispositif, les dotations
allouées aux emplois-jeunes diminuent, de 3,6 %, s'établissant
à 3,23 milliards d'euros (21,19 milliards de francs).
Il convient toutefois de noter que ce chapitre budgétaire fait
traditionnellement l'objet d'une
importante surdotation, puis d'une
régulation non moins importante en cours d'exercice
. Ainsi, la Cour
des comptes, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour
2000, note que «
les dépenses nettes ont été
inférieures de plus de 610 millions d'euros (4 milliards de francs)
aux crédits ouverts en LFI 2000
».
La question essentielle concerne toutefois le devenir des jeunes ainsi
recrutés.
Le 6 juin dernier, le gouvernement a annoncé un plan de
« consolidation » visant à pérenniser le
dispositif. Selon des informations transmises à votre rapporteur
spécial, ces mesures tendent, «
pour ce qui concerne les
emplois des ministères, à conserver les postes réellement
occupés et à assurer une certaine stabilité dans le
recrutement ; en effet, alors que les jeunes embauchés comme
aides-éducateurs ou adjoints de sécurité en remplacement
d'un jeune ayant rompu son contrat, ne pouvaient être recrutés que
pour la durée restant à courir jusqu'au terme de l'emploi
fixé à 5 ans, il a été décidé que les
embauches en remplacement le seraient pour une durée de cinq ans et que
l'aide apportée au financement du poste serait prolongée de
5 ans
».
Bref, les emplois seront consolidés - et les dépenses
pérennisées ! - mais on ne sait toujours pas ce que
deviendront les jeunes.
Il faut d'ailleurs probablement voir dans cette
incertitude quant à leur avenir la raison de la récente
manifestation des aides-éducateurs...
Votre rapporteur spécial en vient donc une fois encore à
s'inquiéter de la
probable intégration d'une part
conséquente des emplois-jeunes dans la fonction publique
, d'autant
plus que de très fortes pressions syndicales ne manqueront probablement
pas de s'exercer en ce sens.
2. La fonction publique : véritable priorité budgétaire du gouvernement
a) Des rémunérations publiques de plus en plus coûteuses
La
création de près de 16.000 emplois nouveaux va alourdir le poids
des dépenses de fonction publique, et réduire davantage encore
les marges de manoeuvre du budget de l'Etat.
Votre rapporteur spécial rappelle que les dépenses de la fonction
publique représenteront
43,3 % du budget général en
2002
, après 42,2 % en 2001.
Outre les créations d'emplois budgétaires nouveaux
réalisées essentiellement depuis deux ans,
la progression de
le rémunération des fonctionnaires résulte en partie du
coût de l'accord salarial du 10 février 1998, qui s'est
établi, au cours de ses trois années d'application (1998-2000),
à 6,30 milliards d'euros (41,3 milliards de francs) dans l'ensemble des
trois fonctions publiques.
Or, il convient de rappeler que les négociations salariales dans la
fonction publique visant à couvrir la période suivante ont
échoué, ce qui a amené le gouvernement à prendre
des mesures unilatérales.
Le ministre de la fonction publique a ainsi annoncé, en avril dernier,
les mesures de revalorisation suivantes, qui viennent s'ajouter à la
revalorisation du point fonction publique au 1
er
décembre
2000, déjà décidée :
- + 0,5 % au 1
er
mai 2001 ;
- + 0,7 % au 1
er
novembre 2001 ;
- + 0,5 % au 1
er
mars 2002 ;
- + 0,7 % au 1
er
décembre 2002.
Au total, pour la seule fonction publique d'Etat, ces mesures emportent un
coût de 2,98 milliards d'euros
(19,52 milliards de francs), dont 46
millions d'euros en 2000, 930 millions d'euros en 2001, 1,25 milliard
d'euros en 2002, et 750 millions d'euros en 2003. Elles concerneront
3,9 millions de fonctionnaires, dont 2,2 millions d'actifs et 1,7 million
de retraités.
Par ailleurs, le ministre a annoncé la distribution de points d'indice
différenciés jusqu'à l'indice nouveau majoré 350
(soit l'équivalent de 1,4 SMIC), ces mesures ayant un coût de
132,63 millions d'euros (870 millions de francs), dont 54,88 millions
d'euros (360 millions de francs) en 2001. Ces mesures concernent environ
615.000 fonctionnaires en activité et 350.000 retraités.
Toutes fonctions publiques confondues, le coût de l'ensemble des
mesures annoncées par le ministre de la fon,ction publique
s'établira à environ 5,18 milliards d'euros (environ 34 milliards
de francs).
Enfin, il convient de préciser que, afin de maintenir le pouvoir d'achat
des fonctionnaires, compte tenu d'une inflation plus importante que
prévu (1,6 % au lieu de 1,2 %), le ministre a annoncé un
« coup de pouce » supplémentaire de 0,4 % au
1
er
mars 2002, soit un coût de 445 millions d'euros
(près de 3 milliards de francs).
Les
négociations salariales dans la fonction publique :
un champ d'application extrêmement large
Au-delà des 2,2 millions d'agents civils de l'Etat
et de
ses établissements publics, il faut en effet comptabiliser dans l'emploi
public :
- les 455.000 agents des exploitants publics de la Poste et de France
Telecom ;
- les 321.000 militaires (hors appelés du contingent) ;
- les 1,507 million d'agents de la fonction publique territoriale ;
- les 857.000 agents de la fonction publique hospitalière (hors
médecins) ;
- ainsi que 148.000 enseignants des établissements
privés sous contrat et 125.000 salariés des
établissements de santé privés à but non lucratif
tarifés en dotation globale.
Au total, on recense donc 5,5 millions d'agents publics
10(
*
)
pour une population active de
22,4 millions,
soit plus d'un actif sur cinq
.
C'est la totalité de cette population qui est concernée par la
négociation salariale dans la fonction publique, même si seule une
partie de ses effets apparaît dans le budget de l'Etat.
b) Le budget général va-t-il devenir un budget de rémunération des fonctionnaires ?
Cette
progression des dépenses traduit la très forte inertie des
dépenses de rémunération de la fonction publique.
La part croissante des dépenses de personnel accentue en effet la
rigidité du budget de l'Etat.
Dans son rapport sur
l'exécution des lois de finances pour 1998, la Cour des comptes notait
que «
la part des dépenses de personnel et des
dépenses obligatoires dans le budget de l'Etat n'a cessé
d'augmenter au cours des derniers exercices. La rigidité du budget s'en
trouve accentuée et les efforts de réduction des dépenses
seront à l'avenir plus difficiles
».
La Cour des comptes note, par ailleurs,
la forte concentration de ces
dépenses.
Cinq ministères
11(
*
)
représentent 89,9 % (comme en en 1999 et après 89,4 % en 1998) de
l'ensemble des rémunérations d'activité versées par
l'Etat en 2000. A eux seuls, le budget de l'enseignement scolaire et celui de
l'enseignement supérieur regroupent plus de 50 % des dépenses
salariales du budget général, et 64,3 % de
celles des
ministères civils.
Le plus grave est sans doute que les dépenses de fonction publique
s'accroissent de façon largement automatique
, du fait du
mécanisme du glissement-vieillesse-technicité (GVT).
Ainsi, l'essentiel de la progression des dépenses de l'Etat
résulte des dépenses de fonction publique, comme le montre le
tableau ci-après, qui provient du rapport économique, social et
financier annexé au projet de loi de finances pour 2002 :
Ainsi, de 1997 à 2002, les dépenses de la
fonction
publique, qui ont augmenté de 15,9 % depuis le début de la
législature, ont représenté plus de 70 % de la
progression des dépenses au titre des dix premiers postes du budget
général, soit 15 milliards d'euros (98,39 milliards de francs)
sur 21 milliards d'euros (137,75 milliards de francs).
Les dernières informations relatives à l'exécution de la
loi de finances initiale de 2001 laissent présager une accentuation de
cette tendance. Au 31 août 2001, les rémunérations,
pensions et charges sociales s'établissaient à 60,96 milliards
d'euros (399,9 milliards de francs), contre 59,47 milliards d'euros (390,1
milliards de francs) à la même date de 2000, et à
57,69 milliards d'euros (378,4 milliards de francs) en 1999. En un an, ces
dépenses ont augmenté de 2,5 %.
3. Les 35 heures dans la fonction publique : un piège pour le gouvernement
Suite à l'échec, à la fin de l'hiver 2000, des négociations engagées avec les organisations syndicales en vue de parvenir à un accord-cadre national relatif à la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans la fonction publique, le gouvernement avait renvoyé les négociations au niveau ministériel, et a publié un décret relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat 12( * ) , qui entrera en vigueur au 1 er janvier 2002.
Les principales dispositions du décret du 25 août 2000
Le
décret du 25 août 2000 définit les principes de la
réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat :
- la durée du travail effectif est fixée à 35 heures par
semaine dans les services et établissements publics administratifs de
l'Etat ainsi que dans les établissements publics locaux
d'enseignement ;
- le décompte du temps de travail est réalisé sur la base
d'une durée annuelle de travail effectif de 1.600 heures maximum,
étant précisé que cette durée annuelle peut
être réduite pour tenir compte des sujétions liées
à la nature des missions et à la définition des cycles de
travail qui en résultent ;
- l'organisation du travail doit respecter des garanties minimales, sauf
exception : lorsque l'objet même du service public en cause l'exige
en permanence, notamment pour la protection des personnes et des biens, et
lorsque des circonstances exceptionnelles le justifient ;
- le travail est organisé selon des périodes de
référence dénommées cycles de travail, les horaires
de travail étant définis à l'intérieur du cycle,
qui peut varier entre le cycle hebdomadaire et le cycle annuel ; les
cycles de travail sont définis par arrêtés
ministériels, et peuvent être définis par service ou par
nature de fonction ; les conditions de mise en oeuvre de ces cycles et les
horaires de travail en résultant sont définis pour chaque service
ou établissement.
Le gouvernement a toutefois affirmé à plusieurs reprises,
notamment au Sénat lors de l'examen des crédits de la fonction
publique et de la réforme de l'Etat, que la réduction du temps de
travail dans la fonction publique serait réalisée à
effectifs constants.
Or, il semble que le gouvernement soit confronté à de très
grandes difficultés au cours de ces négociations, qui, pour
l'instant, n'ont abouti que dans deux ministères : celui de la
défense et celui de l'environnement. Par ailleurs, il devrait y avoir,
selon l'expression du ministre, «
un non accord non
conflictuel
», aux ministères de l'équipement et de
l'agriculture.
Ces négociations donnent lieu à des conflits sociaux,
précisément en raison du refus de la part du gouvernement
d'assortir la réduction du temps de travail de créations
d'emplois. Il est vrai que, de ce point de vue, le gouvernement s'est
placé lui-même dans une situation pour le moins paradoxale :
répéter à l'envi que les 35 heures créent beaucoup
d'emplois... sauf dans la fonction publique ! Il est vrai que le rapport
Roché sur le temps de travail dans les trois fonctions publiques avait
montré que le passage aux 35 heures demanderait, dans certaines
administrations, de travailler plus...
Pour sortir de ces difficultés, le gouvernement est donc
contraint :
- de s'affranchir de la réglementation qu'il a lui-même
édictée :
par exemple, au ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie, certains agents pourraient
bénéficier d'une durée annuelle de travail de
1.530 heures, voire de 1.420 heures (au lieu des 1.600 heures
prévues) ;
- de créer des emplois, malgré ses engagements
réitérés en sens contraire :
il a ainsi
prévu la création de 45.000 emplois sur trois ans dans la
fonction publique hospitalière, pour un coût de 1,52 milliard
d'euros (10 milliards de francs). Ainsi, les personnels hospitaliers de
nuit, qui sont déjà aux 35 heures, devraient progressivement
passer, d'ici au 1
er
janvier 2004, à une semaine de travail
de 32 heures 30, ce qui ne peut évidemment qu'inciter les syndicats de
la fonction publique à prendre ce cas en exemple pour en demander la
généralisation à l'ensemble des fonctionnaires soumis
à des sujétions professionnelles particulières.
B. L'ABSENCE TRÈS PRÉOCCUPANTE DE RÉFORMES STRUCTURELLES
1. Les retraites publiques : immobilisme et conservatisme
Votre
rapporteur spécial s'en était déjà
inquiété l'année dernière : la question du
financement des retraites des fonctionnaires de l'Etat va se poser
rapidement, l'explosion du coût des pensions de la fonction publique
étant déjà programmée.
Le rapport économique, social et financier annexé au projet de
loi de finances pour 2001 comportait des développements
extrêmement intéressants sur ce point
13(
*
)
. Votre rapporteur spécial
déplore que ce type d'informations, extrêmement utile au cours des
débats budgétaires, soit absent du rapport économique,
sociale et financier annexé au présent projet de loi de finances.
Le « papy boom » dans la fonction publique aura, si rien
n'est fait, des conséquences dramatiques sur le budget de l'Etat.
Or, le gouvernement n'a pris aucune mesure à même d'engager la
moindre réforme. Il s'est contenté d'installer un Conseil
d'orientation des retraites (COR), dont les premiers travaux, empreints de
sérieux et d'objectivité, concluent à la
nécessité d'agir, et mettent en exergue les écarts entre
le régime vieillesse des salariés du privé et celui des
fonctionnaires, à l'avantage des seconds.
Dans une des notes rédigées à l'occasion de la
réunion du COR du 4 juillet dernier, on peut lire que
«
l'allongement à 40 ans de la durée de cotisation
pour les fonctionnaires diminuerait les besoins de financement pour les
retraites des fonctionnaires et irait dans le sens d'une réduction des
inégalités entre les salariés du secteur privé et
ceux du secteur public
».
Par ailleurs, le COR a également souligné que
ces
disparités entre les retraites publiques et privées vont
s'accroître en l'absence de modification législative
. Les taux
de remplacement (rapport entre le dernier salaire et la pension versée)
sont aujourd'hui relativement proches entre les secteurs public et
privé, puisqu'ils varient de 55 % à 72 % du salaire brut
dans le premier, et de 55 % à 70 % dans le second (retraites
complémentaires comprises). Si rien n'est fait, le taux de remplacement
se situera en 2040 entre 45 % et 57 % dans le secteur privé, mais entre
55 % et 75 % pour les fonctionnaires.
Votre rapporteur spécial considère qu'il faut saisir
l'opportunité de l'évolution démographique qui va affecter
la fonction publique pour réduire le nombre de fonctionnaires et doter
notre pays d'un Etat moins lourd mais plus efficace. Il est également
favorable à un alignement de la durée de cotisation des
fonctionnaires, aujourd'hui de 37,5 années, sur le droit commun
applicable aux salariés du secteur privé, soit 40 ans depuis la
réforme courageuse de 1993.
2. La gestion des ressources humaines dans la fonction publique : surtout ne rien faire !
En janvier 2000, la Cour des comptes publiait un rapport particulier consacré à La fonction publique de l'Etat , premier acte de la démarche de contrôles systématiques engagés par la haute juridiction financière sur ce sujet.
Le rapport de la Cour des comptes de janvier 2000 : l'Etat, un employeur accablant
Le
rapport public particulier de la Cour des comptes de janvier 2000 consacre
d'importants développements à la gestion des emplois, des
effectifs et des rémunérations de plusieurs
ministères :
- l'éducation nationale, pour l'enseignement secondaire ;
- l'économie, les finances et l'industrie, pour la direction
générale des impôts et la direction générale
de la comptabilité publique ;
- l'intérieur, au titre des personnels des préfectures et de la
police nationale ;
- la justice, pour les personnels de l'administration
pénitentiaire ;
- l'emploi et la solidarité, en particulier ses services
déconcentrés ;
- l'équipement ;
- l'agriculture.
Ce rapport est accablant pour l'Etat-employeur tant sont nombreux les
dysfonctionnements ou irrégularités constatés
:
emplois en surnombre ou bloqués, existence de mises à disposition
ou de détachements injustifiés ou irréguliers,
système de contrôle des effectifs réels insatisfaisant,
gestion prévisionnelle des ressources humaines défaillante, voire
carrément inexistante, dépenses indemnitaires financées
sur des ressources extra-budgétaires, avantages indus sans base
juridique autre qu'une simple décision ministérielle,
méconnaissance des effectifs de fonctionnaires...
En avril dernier, la Cour des comptes a publié le 2
ème
tome de ce rapport public particulier, qui présente les résultats
des contrôles de la gestion des emplois et des
rémunérations dans six ministères :
- l'économie, les finances et l'industrie, pour la direction
générale des douanes et des droits indirects ;
- la défense, en particulier les personnels militaires de la gendarmerie
nationale ;
- l'éducation nationale, en ce qui concerne les enseignants-chercheurs
et les personnels enseignants du second degré ;
- la justice, au titre de l'administration centrale, et des services
judiciaires ;
- les administrations centrales du ministère de l'emploi et de la
solidarité ;
- l'équipement, pour l'ensemble des personnels titulaires et
contractuels.
Les observations soulignées dans ce rapport vont malheureusement dans
le même sens que celles du premier.
La Cour des comptes a également présenté les mesures
prises par le gouvernement à la suite de ses enquêtes. Elle note
d'entrée de jeu que «
mises à part les dispositions
adoptées dès avant la parution du premier rapport de la Cour sur
la fonction publique de l'Etat, les mesures effectivement prises ne concernent
que quelques ministères et sont de portée
limitée
», et considère que «
la
refonte des dispositifs de gestion et de rémunération des
personnels de l'Etat est une oeuvre de longue haleine
».
A la suite du rapport de la Cour des comptes, le gouvernement a pris trois
types de mesures :
1) des dispositions de portée générale :
la
publication de la circulaire du 1
er
octobre 1999 rappelant les
règles fondamentales concernant l'élaboration et la
publicité des textes relatifs à la rémunération des
fonctionnaire, et la création de l'Observatoire de l'emploi public par
le décret du 13 juillet 2000
14(
*
)
.
Votre rapporteur spécial, en tant que membre de l'Observatoire de
l'emploi public, estime que ses travaux présentent une qualité
réelle et permettent notamment de progresser dans la voie d'une plus
grande transparence en matière d'effectifs, en particulier par la mise
au point d'une matrice décrivant le passage des effectifs
budgétaires aux effectifs payés et en fonction, et aux effectifs
gérés.
Toutefois, il s'interroge sur les conséquences qui seront tirées
de ces travaux, avant tout techniques. En effet, il convient de prendre garde
de tirer des enseignements déjà largement connus, du type :
«
la gestion de l'emploi public recouvre des
réalités différentes selon les
ministères
», «
malgré des
progrès, les difficultés perdurent dans la production et la
circulation de l'information sur les ressources humaines
», ou
encore «
la gestion prévisionnelle des effectifs, des
emplois et des compétences représente un enjeu majeur pour
les trois fonctions publiques
». Ces vérités
s'imposaient à l'évidence dès avant la création de
l'Observatoire de l'emploi public...
Il semble que les missions assignées à l'Observatoire sont trop
restrictives. L' « observation » dont il est question se
limite au champ juridique, et ignore la dimension économique. Il
conviendrait, au cours des années prochaines, qu'il s'intéresse
à des notions davantage statistiques et qu'il puisse réaliser des
études de productivité.
D'autre part, les discussions qui ont lieu au sein de l'Observatoire restent
trop internes à l'administration, conduites en « vase
clos » entre représentants de l'administration et syndicats de
fonctionnaires. Il conviendrait que les travaux de l'Observatoire servent
à alimenter le débat public sur le rôle et
l'évolution de l'administration, ainsi que sur le rapport entre les
effectifs de la fonction publique et la qualité des services
publics ;
2) la sincérité budgétaire :
sur ce point, la
Cour des comptes note que «
des évolutions positives
peuvent être constatées pour la budgétisation des
rémunérations. En revanche, la situation reste insatisfaisante
pour ce qui est de la présentation et du respect des dotations
budgétaires en emplois, une aggravation devant même être
relevée dans certains cas
», notamment au ministère
de l'éducation nationale et à celui de l'économie, des
finances et de l'industrie ;
3) la refondation juridique des régimes indemnitaires :
la
publication de plusieurs décrets et arrêtés est intervenue
pour plusieurs ministères, mais n'a pas toujours constitué une
réelle amélioration : par exemple, en ce qui concerne les
ministères de l'intérieur et de la justice, la Cour des comptes
note que «
réguliers en la forme, ces textes ne simplifient
pas l'architecture des systèmes indemnitaires
[...]
et
n'affectent pas le fond de ses observations
». En revanche, des
progrès sont plus notables aux ministères de l'équipement,
de l'agriculture, ou encore de l'économie, des finances et de
l'industrie.
Ces rapports de la Cour des comptes sur la fonction publique de l'Etat
devraient être complétés, dans les années à
venir, par d'autres études portant sur la fonction publique territoriale
et la fonction publique hospitalière.
C. LA « RÉFORMETTE » DE L'ÉTAT
1. La vision du gouvernement : affichage et micro-décisions
Trop
souvent, le gouvernement se contente, en matière de réforme de
l'Etat, d'afficher des axes de réforme nombreux et ambitieux, mais se
limite, dans les faits, à un ensemble de micro-décisions.
Suite à la réunion du comité interministériel pour
la réforme de l'Etat (CIRE) du 12 octobre 2000, le site Internet du
ministère de la fonction publique et de la réforme de l'Etat
n'affiche ainsi pas moins de 17 axes de réforme
15(
*
)
!
Mais, indéniablement,
le gouvernement manque d'un projet d'ensemble.
M. Michel Sapin, dans un article qu'il a publié en juin
dernier
16(
*
)
,
écrivait : «
Loin d'un irréel grand soir,
[la réforme de l'Etat]
est faite de réalités
quotidiennes, de mesures nouvelles constatées sur le terrain,
d'engagements nombreux, individuels et collectifs
».
Aussi le gouvernement a-t-il dû se sentir quitte de sa tâche,
lorsqu'il a annoncé
ses deux principales mesures de l'année
2001 : la suppression de la fiche individuelle d'état civil, et la
suppression récente de la certification conforme de copies de
documents...
Certes, ces décisions ne sont pas négligeables
puisqu'elles simplifieront la vie de nos concitoyens, mais elles en disent
surtout long sur la part d'archaïsme que recèle encore
l'administration française, et paraissent
peu ambitieuses, notamment
au regard des réformes, parfois profondes, qu'ont entreprises les
principaux pays développés.
La réforme de l'Etat à l'étranger : des enseignements à tirer pour la France
Au cours
de l'année 2001, votre rapporteur spécial a effectué une
étude comparative sur la réforme de l'Etat dans 21 pays
étrangers d'un niveau de développement comparable à celui
de la France
17(
*
)
. Or, la
quasi-totalité des exemples étrangers montre l'existence d'une
nette corrélation entre la réduction du format et des missions
de l'Etat et une réforme de celui-ci
susceptible d'obtenir quelque
succès significatif.
La réforme de l'Etat apparaît, dans de très nombreux pays,
comme une
nécessité
faisant consensus, bien plus souvent
que comme un choix politique partisan : la réforme de
l'organisation administrative, de la procédure budgétaire ou de
la fonction publique a été engagée suite à des
difficultés, parfois très sérieuses, dont les
gouvernements étaient bien décidés à sortir.
Ces
réformes ont été, le plus souvent, soutenues, tant par
l'opinion publique que par les grandes formations politiques et organisations
syndicales
, sans regain de conflits sociaux particuliers, et au-delà
des alternances politiques.
La première orientation de la réforme de l'Etat concerne la
modernisation de la gestion publique, qui vise à apprécier les
résultats obtenus par les administrations et services publics.
Si
l'état d'avancement de ces réformes varie selon les pays, la
tendance générale est la même : attention
portée aux résultats plus qu'aux moyens, introduction de
nouvelles méthodes comptables, adoption de méthodes proches de
celles existant dans le secteur privé.
Le deuxième volet est relatif aux réformes, parfois profondes,
qu'a subies la fonction publique :
gestion des ressources humaines
dynamisée, assouplissement des dispositions statutaires, voire
alignement sur le droit du travail, plus grandes possibilités de
rémunération au mérite, sensibilisation des fonctionnaires
aux résultats de l'administration par la responsabilisation et la
recherche de l'efficacité.
Le troisième axe de la réforme de l'Etat concerne la
simplification et la modernisation des structures administratives :
systèmes administratifs reposant sur des agences, souvent puissantes et
gérées comme des entreprises privées, amélioration
de la qualité du service rendu, intérêt porté
à la satisfaction des usagers-clients, réforme des
administrations centrales, simplification des démarches administratives,
développement de l'administration électronique.
Par ailleurs, les instruments dont s'est doté notre pays pour impulser
la réforme de l'Etat disposent de moyens trop souvent insuffisants, et
manquent indéniablement d'ambition. Tel est le cas du fonds pour la
réforme de l'Etat.
Le manque d'ambition du fonds pour la réforme de l'Etat
Votre
rapporteur spécial a réalisé, au cours de l'année
2001, un contrôle de l'emploi des crédits du fonds pour la
réforme de l'Etat (FRE)
18(
*
)
.
Le fonds pour la réforme de l'Etat, créé en 1996 en vue de
participer au financement d'opérations innovantes de modernisation de
l'administration, tant au niveau central que déconcentré, devait
à l'origine contribuer à l'amélioration de la
qualité des relations entre l'Etat et les citoyens, de la
décision publique et de la gestion publique.
Or, le bilan financier du FRE apparaît extrêmement
nuancé : la multiplicité des opérations
cofinancées en cinq ans - 488 projets au titre de la section centrale,
et 2.045 au titre de la section territoriale - et l'impression de
« saupoudrage » budgétaire viennent brouiller la
portée de l'instrument de réforme de l'Etat que constitue le
fonds, d'autant plus que ses dotations sont relativement modestes, une centaine
de millions de francs chaque année en moyenne.
Par ailleurs, de nombreux ministères et services considèrent le
FRE comme un
moyen d'obtenir des financements complémentaires
à leurs crédits de fonctionnement
, si bien que
l'emploi
des dotations du fonds n'est pas toujours conforme aux objectifs qui lui
avaient été initialement assignés
. Quel lien, en
effet, existe-t-il entre la réforme de l'Etat et l'achat de
téléviseurs ou de bicyclettes pour des brigades de gendarmerie,
ou avec la réparation de la chaudière d'une cité
administrative ?
Enfin, des
procédures administratives excessivement lourdes
et
une
absence d'évaluation de l'impact des opérations
financées
mettent en évidence la
contradiction
fondamentale à laquelle le fonds est confronté : il est mis
en oeuvre par un Etat qui ne s'est pas encore engagé sur la voie de
réformes structurelles.
Plutôt que de publier un nombre impressionnant de circulaires, dont la
mise en oeuvre effective se fait attendre, ce qui n'est du reste pas
étonnant puisque l'ensemble de ces textes tend trop souvent à
constituer un galimatias à la portée normative extrêmement
réduite,
le gouvernement devrait s'attacher à améliorer
la qualité des services publics.
Parmi ses 17 priorités de réforme de l'Etat, figure
l'amélioration de la qualité de l'accueil et du service rendu aux
usagers. Or, la lecture du rapport annuel 2001 de l'Inspection
générale des affaires sociales (IGAS), intitulé
Les
institutions sociales face aux usagers
, montre qu'il reste de très
amples efforts à fournir pour atteindre cet objectif.
Sans entrer dans les détails, votre rapporteur spécial rappellera
simplement que, selon l'IGAS, les services publics sanitaires et sociaux ont
besoin de «
se réformer profondément pour s'adapter
aux nouveaux besoins
» des usagers. Si des progrès
importants ont été accomplis depuis une vingtaine d'année,
le rapport note que «
les usagers ont encore des raisons
d'être mécontents, parfois pour des raisons
particulièrement sérieuses
». Quelques exemples
suffiront à illustrer les défaillances qui persistent :
«
une difficulté générale à traiter
les usagers les plus fragiles
», «
une
administration insuffisamment réceptive aux plaintes des
usagers
», «
un droit de recours très
affaibli
», «
organiser le service public autour de
l'usager
», «
en finir avec le splendide isolement
des institutions
»...
2. Le « préalable à la réforme de l'Etat », une initiative parlementaire
Il
convient toutefois de rappeler avec force que l'année 2001 a vu
l'adoption de la plus importante réforme de l'Etat engagée
depuis 1958 : le vote de la loi organique du 1
er
août
2001 relative aux lois de finances
, qui réforme profondément
l'ordonnance du 2 janvier 1959.
Votre rapporteur spécial ne reviendra évidemment pas sur le
contenu de ce nouveau texte fondamental, qui vise à satisfaire deux
objectifs principaux :
- réformer le cadre de la gestion publique pour l'orienter vers les
résultats et la recherche de l'efficacité ;
- renforcer la transparence des informations budgétaires et la
portée de l'autorisation parlementaire.
Cette nouvelle loi organique, qui constitue, selon l'expression du
Président Alain Lambert, «
le préalable à la
réforme de l
'
Etat
», est une initiative du
Parlement, le Sénat ayant contribué à enrichir
considérablement le texte définitif.
Or, le gouvernement a tendance à s'attribuer l'initiative de cette
réforme d'envergure. Il conviendrait qu'il s'attache surtout à la
mettre en oeuvre avec application, par exemple pour la mise en place
d'indicateurs de résultats
19(
*
)
.
La
mise en place d'indicateurs de résultats :
les conclusions du comité d'enquête sur le coût et le
rendement des services publics
Au cours
de cette année, le comité d'enquête sur le coût et le
rendement des services publics, dont est membre votre rapporteur
spécial, a consacré une étude à la mise en place
d'indicateurs de résultats dans les trois ministères
suivants : l'éducation nationale, la justice et la police nationale.
Le rapport indique clairement que ses conclusions portent sur les seuls
indicateurs de résultats, «
à distinguer des
indicateurs d'activités et de moyens qui concernent ce que l'on a pu
appeler la « productivité » de
l'administration
». Il précise également que
«
la question de l'usage de ces indicateurs, et en particulier des
conséquences qu'on en tire en termes d'allocation de moyens, est
restée volontairement ouverte car elle fait encore largement l'objet de
débats
».
Le rapport tire de ces trois expériences un certain nombre de
conclusions et fait plusieurs recommandations, dont les suivantes :
- si l'état d'avancement des trois expériences et
différent, l'éducation nationale présentant une avance
relative, elles ont néanmoins des points communs importants ;
- il convient de distinguer indicateurs de résultats et indicateurs
d'activité, «
sous peine de risques contre-productifs
d'efficacité. Par exemple, une diminution des redoublements dans un
établissement scolaire entraînera des économies, mais ne
sera pas obligatoirement en rapport avec une amélioration des acquis des
élèves. La notion de délai moyen de jugement qui a
constitué l'essentiel de la communication du ministère de la
justice sur l'activité des juridictions pose des problèmes
analogues
» ;
- la recherche d'un indicateur de résultat unique est à
proscrire ;
- il faut s'efforcer d'éliminer les facteurs externes
d'efficacité, qui faussent les comparaisons éventuelles ;
- l'usage des indicateurs de résultats ne doit pas seulement rester
interne à l'administration, mais susciter des débats publics,
notamment en direction des usagers des services publics : ils doivent donc
être rendus publics ;
- grâce à une formation adéquate des responsables
administratifs, les indicateurs de résultats doivent devenir un outil
essentiel du management public.