E. LA SINCÉRITE DOIT TROUVER SA PLACE DANS LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES

1. Consacrer solennellement le principe de sincérité

En Grande-Bretagne et en Nouvelle-Zélande, qui font partie des pays ayant poussé le plus loin la réforme de leur comptabilité, le principe de sincérité sert pour apprécier la valeur des comptes de l'Etat. La révision de l'ordonnance organique relative aux lois de finances est donc l'occasion pour la France d'introduire solennellement dans la loi les modalités de mise en application de ce principe.

Le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, propose d'abord d'introduire un article spécifique dans la loi organique relative aux lois de finances , indiquant que " Les lois de finances présentent de façon sincère, compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler, l'ensemble des ressources et des charges de l'Etat " (article 2 de la proposition de loi organique).

Enfin, le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale propose d'insérer dans le titre IV portant sur la présentation et le vote des projets de lois de finances , un article spécifiquement consacré aux obligations relatives à l'établissement des comptes de l'Etat , reprenant les dispositions du plan comptable général : " Les comptes de l'Etat doivent être réguliers, sincères, et donner une image fidèle de son patrimoine, de sa situation financière et de ses résultats . ". Votre commission suggère plutôt d'intégrer ces dispositions au sein de l'article 2, afin de définir dans un article unique le champ d'application du principe de sincérité .

2. Faire certifier les comptes de l'Etat

Les comptes de l'Etat ne font pas l'objet, à la différence de ceux des entreprises, d'une certification ou d'un audit régulier . En Grande-Bretagne, le National Audit Office (NAO) a l'obligation de certifier les comptes de tous les ministères. En France, la Cour des comptes ne procède qu'à une déclaration générale de conformité (DGC) qui consiste à constater la conformité " entre les comptes individuels des comptables et la comptabilité des ministres " (article 36 de l'ordonnance organique). La Cour des comptes indique cependant que " la réalité n'est pas tout à fait celle là, et que les textes d'application sont imprécis. (...) Concrètement, la DGC est établie entre les comptes des comptables, qui relèvent de la Direction générale de la comptabilité publique, et leur synthèse élaborée par l'Agent comptable central du Trésor, qui relève également de cette direction, dans le compte général de l'administration des finances. Il s'agit donc d'un exercice de vérification de la cohérence formelle de comptes issus du même réseau administratif ; un tel exercice est nécessaire et la Cour des comptes doit s'assurer de son bon accomplissement, mais il n'est pas suffisant en lui-même pour attester de la sincérité des comptes ".

Votre commission considère que l'intervention de la Cour des comptes se situe largement en deçà des contraintes qui pèsent sur une entreprise, et ne permet pas de déceler l'ensemble des manipulations et des pratiques irrégulières dont peuvent faire l'objet les comptes de l'Etat. La Cour des comptes doit donc procéder à une véritable certification des comptes de l'Etat, évaluant leur régularité, leur sincérité et leur fidélité . Cette certification devrait permettre d'étendre le contrôle auquel procède la Cour sur les finances de l'Etat, et constituera un élément précieux pour éclairer le Parlement à l'occasion de la discussion des lois de règlement.

Votre commission s'accorde donc avec la proposition de loi organique du rapporteur général du budget de la commission des finances de l'Assemblée nationale, M. Didier Migaud, qui remplace la déclaration générale de conformité entre les comptes individuels des comptables et la comptabilité des ministres devant accompagner le projet de loi de règlement et prévue à l'article 36 de l'ordonnance du 2 janvier 1959, par une " certification (...) de la régularité, de la sincérité et de la fidélité des comptes de l'Etat ".

En l'absence de certification des comptes de l'Etat par la Cour des comptes, le Parlement ne pourrait vraisemblablement voter la loi de règlement sans demander au gouvernement une justification précise des opérations financières expliquant ce défaut de certification.

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