N° 65

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 7 novembre 2000

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur la situation, la gestion et les rémunérations des personnels du ministère de l'emploi ,

Par MM. Joseph OSTERMANN et Gérard BRAUN,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Fonctionnaires et agents publics.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Au cours de l'année 1998, votre commission des finances a été destinataire de la copie d'un référé du Premier président de la Cour des comptes, M. Pierre Joxe, en date du 28 juillet 1998, adressé à la ministre de l'emploi et de la solidarité, Mme Martine Aubry, attirant son attention sur trois dysfonctionnements affectant la gestion des personnels de son ministère.

M. Pierre Joxe écrivait en effet : " à l'occasion d'un contrôle des effectifs budgétaires et du régime indemnitaire des services déconcentrés du ministère chargé du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, qui a porté sur les exercices 1992 à 1995, et après avoir examiné les réponses au relevé de constatations provisoires adressé à ce propos au directeur de l'administration générale et de la modernisation des services, la Cour a relevé que les effectifs dont disposait le ministère étaient éloignés des prévisions et autorisations de la loi de finances initiale. Une amélioration de leur gestion prévisionnelle lui paraît dès lors indispensable. Le non-respect des dispositions régissant le régime des indemnités accessoires des agents de catégorie C conduit enfin à poser la question de leur refonte ".

Votre rapporteur spécial du budget de l'emploi a eu l'occasion d'interroger la ministre sur ce point lors de l'examen des crédits de l'emploi pour 2000, au Sénat, le 6 décembre 1999.

Or, en janvier dernier, la Cour des comptes a publié un rapport particulier relatif à La fonction publique de l'Etat , qui consacre notamment un chapitre aux personnels du ministère de l'emploi et de la solidarité.

Ce rapport est globalement accablant, et votre rapporteur spécial des crédits de la fonction publique est intervenu lors du débat d'orientation budgétaire pour 2001, le 6 juin dernier, afin de demander au gouvernement quelles mesures il comptait prendre pour améliorer la gestion des personnels de l'Etat, auxquels 40 % du budget de ce dernier sont consacrés.

C'est dans de contexte que, sur la recommandation du président de votre commission des finances, vos rapporteurs ont décidé d'entreprendre une mission de contrôle sur pièces et sur place, conformément aux prérogatives qu'ils tiennent de l'article 164-IV de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959, relative à la situation, la gestion et les rémunérations des personnels du ministère de l'emploi.

Par ailleurs, la loi de finances pour 2000 prévoit la création de 130 emplois supplémentaires au bénéfice des services du ministère de l'emploi, alors que la gestion de ses effectifs s'est révélée défaillante, et que ces créations étaient présentées par la ministre comme indispensables à la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail que le gouvernement a imposée aux entreprises.

Il apparaissait donc nécessaire à vos rapporteurs que la représentation nationale soit éclairée sur l'efficience des dépenses ainsi engagées.

Il convient en effet de souligner que les effectifs réels des administrations de l'Etat diffèrent sensiblement des emplois budgétaires. Il est extrêmement difficile de connaître le nombre exact des premiers, déconnecté de celui des seconds, d'autant plus que chaque département ministériel a des pratiques de gestion de ses effectifs très différentes.

Ces différences sont liées, notamment, au temps partiel, un emploi à temps plein pouvant servir à rémunérer plusieurs agents à temps partiel, aux gels d'emplois, aux personnels recrutés sur crédits, en particulier les contractuels, ou encore à la pratique des surnombres.

Pourtant, le Parlement, afin d'assurer la maîtrise des recrutements et des dépenses de personnel, accorde une double autorisation, sur les emplois d'une part, sur les crédits d'autre part.

L'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances comporte plusieurs dispositions relatives aux emplois budgétaires.

Son article 1 er , alinéa 5, précise que " les créations et transformations d'emplois ne peuvent résulter que de dispositions prévues par une loi de finances ". Son article 32 prévoit que le projet de loi de finances est accompagné d'annexes explicatives faisant notamment connaître " les crédits afférents aux créations, suppressions et transformations d'emplois ". Quant à son article 43, il indique que les créations, suppressions et transformations d'emplois effectuées par la loi de finances ne peuvent résulter que des modifications de crédits correspondantes " dûment explicitées par les annexes ".

Les dotations en emplois figurent ainsi, au stade du projet de loi de finances, dans les annexes dudit projet, appelées " bleus budgétaires ", et après son vote, dans les annexes aux décrets de répartition, dites " verts budgétaires ". Ces documents décrivent donc les emplois budgétaires.

Si le Parlement, parce qu'il le vote, connaît le nombre des emplois budgétaires, totaux mais aussi ceux alloués à chaque département ministériel, il manque d'informations pertinentes sur les effectifs réels mais aussi sur les rémunérations des agents de l'Etat.

Le présent rapport tend à améliorer cette information, en ce qui concerne les personnels de la section emploi du ministère de l'emploi et de la solidarité.

Vos rapporteurs se sont attachés à analyser non seulement la gestion de ces personnels, mais aussi à obtenir des informations concernant leurs rémunérations et, surtout, à estimer l'adéquation des moyens du ministère de l'emploi en personnels à ses missions.

Il convient d'ailleurs de rappeler que la gestion, en particulier dans ses aspects financiers, des personnels du ministère de l'emploi n'a encore jamais constitué un sujet d'inspection à part entière de l'Inspection générale des affaires sociales. En outre, les questions de personnels ne sont pas prédominantes dans les préoccupations des responsables des services du ministère.

A cet égard, vos rapporteurs souhaitent procéder à un rappel de l'organisation des services du ministère.

La gestion des emplois du ministère de l'emploi et de la solidarité est confiée à deux directions distinctes au sein de l'administration centrale, les directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP) et les directions départementales (DDTEFP) relevant de la compétence de la direction de l'administration générale et de la modernisation des services (DAGEMO).

Les missions des directions régionales et des directions départementales sont définies par l'instruction ministérielle du 17 janvier 1995, annexée au présent rapport.

A l'instar de l'ensemble des services déconcentrés de l'Etat, les directions régionales et départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle sont placées sous l'autorité du préfet de région ou du préfet de département du lieu de résidence, à l'exception des sections de l'inspection du travail, qui relèvent directement du ministre et de la direction des relations du travail du ministère, leur indépendance dans l'établissement d'un procès-verbal sanctionnant la méconnaissance du droit du travail étant garantie par la convention 81 de l'Organisation internationale du travail.

La direction départementale est l'échelon opérationnel des services déconcentrés, la direction régionale jouant un rôle d'intermédiaire consistant à :

- rendre compte à l'administration centrale de la situation constatée en matière d'emploi, d'état des relations sociales, ou d'application sur le terrain des textes, directives ou circulaires de l'administration centrale ;

- animer et coordonner l'action des services déconcentrés en matière d'emploi, de travail et de formation professionnelle.

Cette dernière mission implique un lien hiérarchique qui revêt un caractère largement implicite, garant d'une cohérence minimale et de l'application uniforme dans chaque département des différents textes et des politiques de l'emploi.

Pour des raisons liées à l'efficacité de l'organisation, les directions régionales constituent un échelon arbitral en matière de répartition des crédits de fonctionnement.

Il peut également exister des spécificités locales d'organisation. Ainsi la direction régionale du Nord-Pas-de-Calais a-t-elle créé, à titre expérimental, un poste de secrétaire général dans le but de renforcer l'efficacité des services déconcentrés en matière de gestion des crédits et des moyens.

En ce qui concerne la gestion des personnels, ce lien hiérarchique est plus prononcé, puisque le directeur régional est le notateur final de l'ensemble des fonctionnaires accomplissant leurs missions au sein des services déconcentrés du ministère. De plus, les décisions importantes sont négociées, débattues et arrêtées par le comité technique régional et interdépartemental (CTRI), présidé par le directeur régional.

Toutefois, une part importante de cette gestion échappe au directeur régional, d'une part, parce que l'affectation des personnels au sein d'un service ne relève initialement que de la seule administration centrale, et, d'autre part, parce que les orientations données par la direction régionale laissent toute latitude aux directeurs départementaux de décider parallèlement des moyens à mettre en oeuvre pour y répondre.

Vos rapporteurs ont d'abord adressé un questionnaire à la ministre de l'emploi et de la solidarité afin d'obtenir des informations sur la façon dont le ministère gérait ses personnels.

Ils ont ensuite procédé à l'audition d'une dizaine de personnalités concernées plus ou moins directement par les moyens alloués à la mise en oeuvre de la politique de l'emploi, qu'ils appartiennent au service public de l'emploi, ou non. Le compte-rendu de ces auditions figure en annexe au présent rapport.

Ils ont également effectué plusieurs déplacements au sein des services déconcentrés du ministère, dans les directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle en l'occurrence, où ils ont rencontré de nombreux agents du ministère. Au cours de ces déplacements, ils ont aussi souhaité s'entretenir avec les trésoriers-payeurs généraux afin de savoir comment la paye des fonctionnaires était assurée, et les emplois contrôlés.

Enfin, ils se sont rendus à la DAGEMO, puis au ministère de la fonction publique, où ils ont rencontré le directeur général de l'administration et de la fonction publique.

Vos rapporteurs souhaitent remercier l'ensemble de leurs interlocuteurs qui, à l'exception de certains hauts fonctionnaires plutôt désinvoltes à l'égard de la représentation nationale, les ont très bien accueillis.

Ils ont pu mesurer les grandes qualités professionnelles de ces fonctionnaires dont le sens du service public est exemplaire et leur maîtrise des dossiers parfaite. Ils souhaitent adresser des remerciements particuliers à Mme Marie-Caroline Bonnet-Galzy, directeur de la DAGEMO, qu'ils ont rencontrée à deux reprises, d'abord au Sénat puis au ministère, qui a manifesté un grand intérêt à la conduite de cette mission, que confirme notamment la qualité exceptionnelle des réponses qu'elle leur a apportées.

Après avoir rappelé le contexte du budget de l'emploi, et la place des dépenses de personnel en son sein, vos rapporteurs ont tenté d'analyser les affirmations du ministère concernant sa pénurie d'effectifs, puis ont examiné la façon dont ces derniers sont gérés.

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