c) Les Alpes : une situation préoccupante
Les conditions du franchissement des Alpes par les transports de marchandises sont elles aussi préoccupantes.
(1) Les affirmations du rapport Brossier
Selon le rapport Brossier de 1998, l'évolution du trafic routier de marchandises transalpin (tunnels du Mont-Blanc et du Fréjus) dépend fortement de l'ouverture par la Suisse de son territoire au trafic de l'UE, comme l'indique le graphique ci-après.
Projections du transport routier de marchandises à travers les Alpes
En millions de tonnes
Source
: rapport Brossier de 1998
L'hypothèse d'une ouverture progressive, par la Suisse, de son
territoire aux flux de marchandises est retenue par le rapport Brossier ainsi
que par le schéma de services collectifs de marchandises.
L'importance d'une plus grande ouverture de la Suisse s'explique par le fait
que celle-ci est actuellement relativement peu ouverte aux flux transalpins de
marchandises, comme l'indique le tableau ci-après.
La répartition des flux de marchandises à travers les Alpes
En %
|
France |
Suisse |
Autriche |
Part des flux |
33 |
17 |
50 |
Source
: schéma de services collectifs de
transports de marchandises.
Le rapport Brossier estime les capacités à moyen terme des
tunnels du Fréjus et du Mont-Blanc respectivement à
48 millions de tonnes pour le Fréjus (soit environ 8.000 poids
lourds par jour) et 20 millions de tonnes pour le Mont-Blanc (environ
3.000 poids lourds par jour), soit une capacité totale
estimée de 68 millions de tonnes. Ces chiffres sont loin des flux
constatés aujourd'hui et des flux prévisionnels pour
l'année 2010, même si l'on retient la projection la plus haute, de
35 millions de tonnes par an.
Ainsi, selon le rapport Brossier, les infrastructures actuelles seraient
suffisantes à moyen terme.
(2) Un jugement optimiste
Ces
considérations peuvent sembler optimistes, pour deux raisons
essentielles.
Tout d'abord, les évaluations basses du rapport Brossier et le
schéma de services collectifs de transport de marchandises tablent sur
un passage accru du trafic par la Suisse. Cette perspective peut sembler
irréaliste. Il semble donc nécessaire de retenir les projections
hautes du rapport en matière d'évolution du transport routier de
marchandises. En outre, on peut s'interroger sur la pertinence d'une approche
qui consiste à souhaiter reporter le problème sur l'un de nos
voisins.
Ensuite, les contraintes liées à la sécurité
-dramatiquement rappelées par la catastrophe survenue dans le tunnel du
Mont-Blanc le 24 mars 1999, qui a fait 39 morts- et à la
protection de l'environnement pourraient remettre en cause cette analyse. En
effet, des considérations de sécurité pourraient conduire
à limiter le trafic dans les tunnels en deçà du seuil
envisagé par le rapport Brossier. Si tel était le cas, le
développement du transport ferroviaire serait d'autant plus
indispensable. En effet, l'opposition des habitants des zones concernées
au développement du transport routier pourrait inciter à une
solution alternative au doublement des tunnels routiers existants.
(3) Des travaux indispensables pour améliorer le transport ferroviaire
Le
rapport Brossier affirme en revanche la nécessité
d'investissements dans le domaine des infrastructures ferroviaires.
L'évolution des projections de transport ferroviaire de marchandises
pourrait être d'ici à 2010 une stabilisation ou un doublement,
selon que la politique suisse d'ouverture aux flux européens
réussit ou non, comme l'indique le graphique ci-après.
Projections du transport ferroviaire de marchandises à travers les Alpes
En millions de tonnes
Source
: rapport Brossier de 1998 (cité dans
Conseil national des transports, Rapport sur les conséquences
à court, moyen et long terme à tirer de l' incendie dans le
tunnel du Mont-Blanc
, 24 février 2000).
Contrairement à ce qui est affirmé pour le transport routier, les
infrastructures existantes ne semblent pas suffisantes à moyen terme.
Au prix d'investissements relativement modestes (10 % des sommes
prévues pour la liaison Lyon-Turin) sur le tronçon ferroviaire
fret Ambérieu-Turin, la capacité annuelle de la ligne pourrait
être portée à 16 millions de tonnes par an.
Ces chiffres sont à rapprocher des projections estimées de 10
à 25 millions de tonnes par an.
Dans ces conditions, la réalisation de la ligne Lyon-Turin,
décidée par un accord franco-italien de janvier 2001, qui
concernerait à la fois les voyageurs et les marchandises et dont la
réalisation est prévue pour l'année 2012, apparaît
indispensable. Cette ligne fait partie des 14 projets prioritaires
européens et du réseau ferroviaire trans-européen. Le
coût en serait de 10,7 milliards d'euros.
Une limitation du trafic dans les tunnels alpins, consécutive à
un renforcement des contraintes en matière de sécurité et
de protection de l'environnement, rend la réalisation de cette liaison
d'autant plus indispensable.
Proposition n°
55.
: Réaliser rapidement
le TGV Lyon-Turin.