ANNEXE III -
CONTRIBUTIONS DES CHAMBRES DE
MÉTIERS
La
présente contribution reprend l'essentiel des informations et des
propositions des chambres de métiers, dont la Mission sénatoriale
aura entendu un certain nombre de représentants au cours de ses
déplacements dans les différents massifs. C'est cette origine
« terrain » qui fait la valeur et authentifie cette
contribution, dont les chambres de métiers se tiennent prêtes
à débattre pour les préciser et les approfondir. S'il est
vrai en effet que des mesures spécifiques à l'artisanat de
montagne sont souhaitées, leur mise au point suppose un vrai dialogue
avec l'ensemble des parties concernées.
1. Existe-t-il des données permettant d'élaborer un bilan
statistique de l'artisanat en zone de montagne avec, par exemple,
l'évolution du nombre d'entreprises depuis 5 ans, une
décomposition par filières, et une mesure de l'effet sur le tissu
économique et démographique local des créations ou des
disparitions d'entreprises ?
Quel diagnostic général se dégage : déclin,
renouveau, atouts à valoriser ?
Réponse
:
À notre connaissance, il n'existe pas de bilan statistique de
l'artisanat en zone de montagne, c'est-à-dire couvrant la
totalité des massifs et l'intégralité de ceux-ci. Aucun
système global d'observation n'a été mis en place,
notamment par l'INSEE, malgré des tentatives remontant aux années
1980-1985, sur l'initiative de l'APCM. Des statistiques antérieures,
datant de la période 1975-1976, n'étaient pas plus exhaustives,
puisque les données relatives à l'artisanat de plusieurs
départements n'y étaient pas intégrées.
Il n'existe pas non plus de séries statistiques continues sur
l'artisanat par massif.
Cette constatation doit être nuancée pour tenir compte de
situations départementales particulières. En effet, dans les
départements dont la totalité du territoire est classé en
zone de montagne, les chambres de métiers disposent ou pourraient
disposer, à travers le répertoire des métiers qu'elles
tiennent, de sources permettant une connaissance précise des
évolutions de l'artisanat sur de longues périodes. Pour les
chambres de métiers dont seule une partie du territoire est en zone de
montagne, l'exploitation du répertoire est également possible
sous réserve d'un tri préalable. Mais cette exploitation suppose
et des moyens, et l'existence d'un enjeu qui les justifie, et le croisement
avec les données statistiques détenues par l'INSEE (voir
ci-dessous, réponse à la 1
ère
question in
fine). Il faut bien entendu qu'un cadre d'études commun à
l'ensemble des chambres de métiers ait été défini
au préalable.
Si l'absence d'un bilan statistique de l'artisanat empêche de
délivrer un diagnostic général appuyé sur des
chiffres, un certain nombre de constats sont cependant permis :
La zone de montagne n'est pas homogène, ni d'un massif à l'autre,
ni au sein d'un même massif et les conditions du développement
économique sont extrêmement diverses.
La moyenne montagne est souvent encore en déclin, alors que la haute
montagne connaît, grâce aux deux saisons touristiques,
été et d'hiver, un essor indéniable.
Le massif pyrénéen, avec ses vallées nord-sud,
« qui ne communiquent pas entre elles » montre
« un patchwork de situations cantonales diversifié, allant du
grand tourisme confirmé, aux sites industriels en difficulté en
passant par des zones agricoles en crise. Cette diversité rend une
interprétation générale délicate ».
Témoignages de chambres de métiers
:
-
Chambre de métiers de Haute-Savoie
:
Ce que l'on peut indiquer c'est, à l'heure actuelle :
- une stabilité dans la production avec un « ticket
d'entrée » de plus en plus élevé dans la
création d'entreprises dans le secteur très stratégique du
décolletage,
- un pourcentage d'entreprises du secteur alimentaire anormalement bas par
rapport aux potentialités démographiques et touristiques de
Haute-Savoie. Il s'agit d'un secteur à valoriser. La chambre de
métiers de Haute-Savoie a signé une convention avec la
Région pour un appui technique des métiers de bouche puisque l'on
constate un certain déclin de certains métiers comme les bouchers
sur des zones rurales et de montagne peu touristiques,
- un secteur du Bâtiment, très actif en zone de plaine mais
également en zone de montagne, en rénovation et en neuf, un
secteur des services en progression constante en raison d'un fort dynamisme
démographique,
- la chambre de métiers de Haute-Savoie est conduite, au regard de
la situation dégradée des métiers artisanaux de
l'alimentaire, à préconiser des mesures spécifiques en
matière d'équipement commercial.
-
Chambre de métiers d'Isère Grenoble
:
« La mesure de l'effet sur le tissu économique et
démographique local des créations ou des disparitions
d'entreprises ne peut être réalisée que par des
études qualitatives par territoire difficiles à réaliser
en raison du manque de financements disponibles.
Dans le cadre d'un contrat de développement Rhône Alpes l'Oisans a
fait l'objet d'une étude de ce type réalisée en commun par
la chambre de métiers, la CCI et l'agence d'urbanisme de la
région grenobloise. »
-
Chambre régionale de métiers
Languedoc-Roussillon
:
« L'Artisanat est resté pauvre en statistiques
économiques démontrant à la fois la poursuite d'un
déclin des zones dévitalisées, mais également une
« reconquête » non seulement d'habitants saisonniers,
mais permanents. Certes les artisans de service sont souvent âgés,
mais de nouvelles entreprises, dont le marché n'est souvent pas local -
et qui ont besoin de moyens rapides de transmission - sont également en
cours d'installation.
-
Chambres de métiers de l'Ain, du Doubs et du Jura :
Ces trois chambres ont travaillé à l'élaboration d'un
état des lieux de l'artisanat du massif du Jura en novembre 2000, qui en
présente l'évolution sur trois ans.
Parmi les conclusions :
§ Un secteur des entreprises de production bien représenté
(30,1%) contre 18,6% en France, exerçant principalement dans les
métiers de la mécanique, de la plasturgie et du bois,
§ Un vieillissement des chefs d'entreprises du Massif plus
particulièrement dans la production (âge moyen approchant 47 ans)
§ Des menaces sur le maintien des entreprises dans le secteur de
l'alimentation. Si des financements ont été obtenus dans les
années 1990/1995, en particulier pour réaliser des études
statistiques et des actions de communication en faveur des entreprises des
secteurs clés pour l'économie locale (lunetterie, plasturgie,
tournerie, tabletterie dans l'Ain), il n'en demeure pas moins vrai que ces
entreprises restent très fragilisées lors des hausses de
coût de revient (en 2001, le passage aux 35 heures) et de changements de
stratégie de leurs donneurs d'ordres (délocalisation). La
diminution des actifs des entreprises de production mettant à son tour
en péril le maintien d'autres activités artisanales dans les
domaines des services et de l'alimentation.
La chambre de métiers de l'Ain souligne également la grande
difficulté à trouver des repreneurs dans la partie
« Montagne du département ».
Ce constat souligne que l'artisanat en montagne ne se réduit pas au secteur des services, mais est créateur de richesses et d'emplois dans le secteur de la production, dans le Jura comme en Haute-Savoie. De même, dans une branche particulière de la production, l'artisanat d'art, il contribue au développement du tourisme en ajoutant à l'attractivité d'un territoire. Ce sera particulièrement vrai dans les Alpes du Sud.
Proposition : création d'un observatoire
économique
:
La chambre de métiers de Haute-Savoie conduit actuellement une
expérience remarquable
Un observatoire Économique est en cours de réalisation, il
intègrera à terme OLIA, un logiciel de cartographie en lien avec
Business Object et des outils d'analyse décisionnelle et d'enquête
(MODALISA). OLIA, Outil de Localisation et d'Implantation de l'Artisanat est un
logiciel développé par le réseau des chambres de
métiers.
L'observation économique a un coût et suppose une implication
de l'INSEE.
2. Les observations de terrain montrent qu'à l'évidence, le
commerce et l'artisanat de montagne subissent des surcoûts
économiques, fiscaux et sociaux : surcoûts de chauffage, de
transport, impossibilité en zone dépeuplée de louer du
matériel et donc surcoût en termes d'outillage ou
d'équipement, etc. Peut-on chiffrer ces handicaps et quels dispositifs
permettent aujourd'hui de les compenser ?
Réponse
:
- Chambre de métiers de l'Isère - Grenoble :
o « Le chiffrage de ces handicaps peut se faire par une
évaluation du nombre d'heures perdues par grande famille
d'activité multipliées par un prix horaire.
o Ce travail devrait être réalisé par saison (surtout pour
l'hiver).
o D'autre part les surcoûts pour des postes tels que l'achat ou la
location de matériels peuvent aussi être évalués par
saison et par grande famille professionnelle.
N'oubliez pas la difficulté de trouver du personnel saisonnier dans les
zones à forte fréquentation touristique. » (voir
ci-dessous III.2 logements sociaux).
-
Chambre de métiers des Hautes-Alpes
:
« Les surcoûts sont évidents, mais difficiles
à quantifier. Ne pourrait-on pas demander à la
Fédération des centres de gestion une étude comparative
sur des entreprises installées en montagne ? »
-
Chambre de métiers des Alpes de Haute Provence :
« Il est clair que l'activité en montagne
génère des surcoûts que n'ont pas les entreprises en milieu
urbain. Les déplacements sont importants ; selon les lieux,
l'activité est impossible à certains moments de l'année.
Cette remarque pourrait être approfondie par un travail de comparaison
entre les comptes de résultats et les bilans d'entreprises
situées en zone urbaine et en zone de montagne.
-
Chambre de métiers de Haute-Savoie
:
« Impossible en l'état actuel de chiffrer ces handicaps
réels. Un constat cependant : le coût de la vie en
Haute-Savoie mais plus particulièrement dans les zones de montagne
à forte attractivité touristiques »
-
Chambre de métiers de Haute-Loire
:
« Nous ne disposons pas d'éléments chiffrés
sur les handicaps (surcoût de transport, équipement, etc....).
Toutefois, il serait opportun de mettre en place des dispositifs
spécifiques d'exonération fiscale »(pour compenser ces
surcoûts).
-
Chambre régionale de métiers du
Languedoc-Roussillon
:
La notion de surcoût d'exploitation est illustrée par de nombreux
exemples dus à l'éloignement, à la dispersion de
population, aux conditions climatiques....
3. Vue synthétique des aides financières et des mesures de
simplification au bénéfice des artisans de montagne. Quelles
mesures ont été prises par l'État et les
collectivités locales depuis 1985 en faveur des commerçants et
des artisans installés en zone de montagne ?
Réponse :
- Chambre de métiers de Haute-Loire
:
« Les aides financières et les mesures de simplification
mises en oeuvre ne semblent pas particulièrement performantes et ne sont
jamais citées ou reconnues comme des mesures entrant dans une
stratégie de maintien d'activité en zone de montagne ».
-
Chambre régionale de métiers du
Languedoc-Roussillon :
Les dispositifs spécifiques n'existent pas
: il n'y a
jamais eu de « loi Montagne Artisanat », peut être
par manque de propositions concertées, mais les volets
« montagne » des Contrats de Plan ont permis d'abonder les
enveloppes des mesures collectives au profit des artisans d'arrière pays
(mesures souvent étendues, de façon plus large, aux zones rurales
en difficulté). Aides financières et mesures de simplification
n'existent pas en tant que telles, mais les entreprises
bénéficient d'aides directes à l'installation (CIFA), au
développement (Plan de développement...) ou à l'action
collective »
- Chambre de métiers des Alpes de Haute Provence :
Les aides qui existent ne sont pas spécifiques. Il s'agit du FODAM
(Fonds d'aide à la modernisation, financement Europe et
Département, maintien du service de proximité dans les communes
de moins de 2000 habitants) et de la sous-mesure 3.2.4 du programme
Européen Objectif 2.
4. Sur la nécessité de maintenir des services de
proximité, qualifiés « d'intérêt
général » par la loi Montagne, dans les zones
menacées de dépeuplement. Peut-on chiffrer les besoins, quelles
sont les mesures prises dans ce domaine ainsi que les réflexions en
cours sur la base d'observations étrangères ou
d'expériences réussies ?
Réponse
:
S'il est possible, le chiffrage des besoins reste à faire sur la base
d'analyses statistiques fines, délimitant les zones menacées de
dépeuplement.
Plusieurs départements ont institué des dispositifs d'appui au
maintien ou à la réimplantation de services
d'intérêt général (services de première
nécessité, -alimentation, mécanique automobile,
dépannage, soins à la personne..), sous certaines
conditions : taille de la commune, absence de l'initiative privée,
absence de concurrence directe dans la commune ou la zone
considérée, consultation des professionnels effectuant des
tournées etc..
Cet
interventionnisme
repose sur le constat que l'existence (ou la
réapparition) d'un marché solvable ne suffit pas à elle
seule à entraîner automatiquement la réinstallation de
services disparus et le retour d'artisans et commerçants pour les
assurer. Le département des Hautes-Alpes, notamment, a mis en place un
dispositif efficace, le FODAM (fonds départemental d'aide à la
modernisation), dont la mise en oeuvre se fait en concertation avec les
chambres de métiers et les organisations professionnelles
intéressées.
Cette aide avait été également mise en place par le
Conseil général des Alpes de Haute- Provence, pour favoriser
l'installation de commerce multi-services en milieu rural dans les communes de
moins de 500 habitants où l'initiative privée faisait
défaut. Il s'agissait d'une aide à l'investissement et d'une aide
au fonctionnement. Cette aide a permis l'implantation d'épiceries sur de
toutes petites communes.
Proposition de la chambre de métiers des Alpes de Haute Provence :
un FODAM spécial zone de montagne ou encore une fiscalité
différente pour les artisans de ces zones (ex : tauX de TVA
réduits).
Voir note transmise par la chambre de métiers des Hautes-Alpes.
5. Quel est votre bilan du dispositif applicable à la
pluriactivité et aux groupements d'employeurs ? Quelles sont les
perspectives ?
Réponses
:
I. La présence de la pluriactivité va s'étendre sur
tout le territoire
:
La vitalité de cette forme d'emploi a été mise en
évidence à travers de nombreuses études locales et
nationales, ces dernières années :
- présence de la pluriactivité sur tout le territoire ;
- faiblesse relative de la pluriactivité agricole comparée aux
autres secteurs. Près des 2/3 des pluriactifs n'ont aucun revenu
agricole ;
- plus de 86% des pluriactifs associent salariat et non salariat ;
En montagne, dans le département de la Savoie, par exemple, le
pourcentage de pluriactifs est plus fort que dans l'ensemble de la France :
- 40 % des agriculteurs
- 27 % des commerçants et artisans
- 49 % des professions libérales s'y déclarant pluriactifs.
Deux facteurs principaux sont venus accompagner cette montée en
puissance de la pluriactivité
:
- L'attitude des individus face au travail a considérablement
évolué ces dernières années.
- L'attitude de la FNSEA et de l'APCA qui n'appellent plus à bloquer
toutes les mesures favorables à la pluriactivité.
L'APCA écrit en mai 2000 : « la pluriactivité
doit coexister en totale harmonie avec les acteurs du monde rural. L'ensemble
des professions rurales doit être soumis à un principe
commun : mêmes droits, mêmes devoirs » (Pour une
simplification de la pluriactivité en agriculture - Chambre
d'agriculture - n° 888- Mai 2000)
II - L'imbroglio actuel des régimes sociaux :
A) Il est nécessaire d'organiser une information simple des pluriactifs
pour leur permettre de se situer dans leur environnement administratif
très complexe.
L'expérience de « permanences conjointes des
différentes caisses » organisées localement dans les
zones de forte pluriactivité devrait être multipliée et
très largement améliorée.
Les expériences de guichet unique sont peu nombreuses, et semblent
n'avoir été tentées qu'en Savoie et dans les Hautes-Alpes,
et encore dans ce département, très récemment.
-
Chambre de métiers de Savoie
: « La
Savoie a mis en place un guichet unique, et ce, dès 1985. Les organismes
de protection sociale des trois principaux régimes uniquement y sont
représentés
sans moyens financiers spécifiques
. Ces
permanences mensuelles conjointes sont essentiellement
fréquentées par les assurés qui préparent la
liquidation de leurs droits à la retraite.
Le guichet unique
est très peu utilisé par les pluriactifs en
activité
, car mal connu et peu adapté aux
réalités professionnelles (horaires, périodicité et
localisation inadéquats, absence de confidentialité des propos
tenus).
Contrairement aux voeux exprimés par les intéressés lors
des travaux inter-consulaires sur la pluriactivité,
réalisés en Savoie de 1987 à 1991, les administrations
(
DDTE, services fiscaux)
n'y sont pas présentes.
L'accessibilité égale pour tous les citoyens aux administrations
sur l'ensemble du territoire préconisée par la loi Montagne n'est
toujours pas d'actualité ».
B) Certes, un progrès notable : La Caisse Unique de protection
sociale pour les pluriactifs non-salariés :
La loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 a fait faire un énorme
progrès à l'assuré qui exerce deux activités
professionnelles non salariés (l'une relevant du régime agricole,
l'autre du régime non-agricole).
Cet assuré est affilié
au régime de l'activité
principale
, pour une durée de 3 ans renouvelable. Son
activité principale est déterminée en fonction de ses
revenus et du temps passé dans chaque activité.
C)
Mais, peu de choses sont faites pour un assuré qui exerce
une activité salariée se conjuguant avec une activité
non-salariée,
(alors que 86 % des pluriactifs associent salariat et
non salariat).
1 -
Détermination de l'activité principale
:
Le seuil des 1 200 heures nécessaire, outre la condition cumulative
de revenus salariés au moins égaux à ceux tirés de
l'activité non salariée, souvent dénoncé par les
assurés, est encore plus exorbitant aujourd'hui en regard du
récent abaissement de l'horaire légal de travail.C'était
pour une semaine de 40 heures, l'équivalent de 7 mois de travail
à plein temps. Il y aurait lieu de ramener les heures nécessaires
à un chiffre plus raisonnable : l'équivalent de 5 mois
à plein temps serait plus adapté.
2 -
Évolution de la réglementation au niveau des cotisations
sociales des pluriactifs
:
Concernant l'échec de la mise en place de caisses pivot, au profit des
pluriactifs qui exercent une activité salariée en
parallèle avec une activité non-salariée, deux conclusions
s'imposent :
- la résistance des caisses de protection sociale qui éprouvent
bien des difficultés à communiquer entre elles.
- la réforme envisagée ne réglait pas les problèmes
posés par la détermination de l'activité principale.
Il faut en conséquence, et quel que soit le poids des
«
corporatismes »
des caisses de protection
sociale, avancer sur une harmonisation des prestations, quel que soit le
régime de protection sociale, salarié ou non salarié.
3 -
Conditions d'accès et d'exercice de l'activité
:
a) Les artisans souhaitent obtenir les mêmes taux bancaires que les
agriculteurs et le respect, par les agriculteurs, des mêmes normes
techniques et d'hygiène qui leur sont imposées.
b) Professions du bois : il est souhaitable de mettre de l'ordre dans
l'immatriculation des professions forestières et du bois. Ainsi,
souligne en particulier la chambre de métiers de Haute-Vienne, les
scieurs sont immatriculés au répertoire de métiers, les
débardeurs à la Mutualité sociale agricole (MSA), de
même que les bûcherons, les exploitants forestiers au registre du
commerce.
En zone de montagne, il semble que le bilan du dispositif soit mitigé
pour les entreprises artisanales du moins, alors qu'il avait fait naître
des espoirs forts. Cela tient à ce que les entreprises qui
adhèrent effectivement aux groupements sont bien moins nombreuses que
celles qui ont manifesté en amont un intérêt pour ce type
de structure. Cela tient à la rareté de la main- d'oeuvre
qualifiée, au faible nombre d'entreprises utilisatrices, au total et par
type d'activité, à la diversité des métiers
susceptibles d'être exercés. La formule du groupement d'employeurs
n'a pas obtenu le succès escompté, du moins dans les zones de
montagne.
Chambre de métiers des Alpes de Haute Provence
:
« les groupements d'employeurs existent sur ces zones. Ils pourraient
avec une information différente solutionner quelques problèmes de
main d'oeuvre dans les entreprises artisanales ».
5. Quelles sont les mesures prises et les réflexions conduites en
matière d'amélioration du statut des femmes ou de conjoint
collaborateur et d'application des 35 heures ?
Les chambres de métiers
de montagne
n'ont fait part
d'avancées spécifiques sur ces sujets. On relèvera
cependant que les 35 heures, en zone de montagne à vocation touristique
en particulier, sont irréalistes ou constitueraient un handicap
important en pleine saison. Le témoignage cité plus haut des
chambres de métiers du massif du Jura soulignait les surcoûts
provoqués par les 35 heures dans les entreprises de production, dont le
marché est tributaire de cours mondiaux.
III - Pistes et propositions présentées par les chambres de
métiers
Outre un certain nombre de propositions exposées ci-dessus, il convient
de présenter une série de remarques et de pistes qui
mériteraient d'être explorées pour déboucher sur des
mesures à prendre dans l'intérêt des territoires de
montagne.
1.
Pression foncière
: les chambres de
métiers soulignent l'impact d'une forte fréquentation touristique
et notamment d'une forte demande de résidences secondaires sur les
valeurs foncières. « Sans constitution de réserve de
terrains, les entreprises auront beaucoup de difficultés à se
créer et à se développer »
2. Logements sociaux
: les chambres de métiers
soulignent la rareté ou l'insuffisance des logements sociaux, qui fait
obstacle à l'embauche de salariés et d'apprentis. Ce
phénomène n'est pas propre à la haute montagne et aux
stations de sport d'hiver, mais touche aussi la moyenne montagne. La chambre de
métiers de Vaucluse par exemple le signale.
3. Zone économique de montagne
: considérant que la
montagne n'est pas un territoire homogène, pas plus que le rural ou la
ville, des chambres de métiers avancent l'idée de
zone
économique de montagne
, qui constituerait le champ d'application de
mesures spécifiques favorisant le maintien, la création-reprise
et le développement des entreprises. Un certain nombre de
paramètres permettrait de la définir.
La nature et la portée des dispositifs juridiques, fiscaux, sociaux,
financiers devrait l'objet d'une approche attentive, à mi-chemin entre
les régimes de droit commun et les dispositifs envisagés pour les
zones les plus dégradées, appelées à être
constituées en zones franches rurales de montagne.
4.
Zone franche rurale montagne
: des chambres de
métiers du Massif central (Lozère, Cantal...) proposent
d'instituer des zones franches rurales, à l'instar des zones franches
urbaines
a) Des paramètres permettraient de la définir :
Réunir au moins deux des trois critères
ci-après :
- cumul des soldes naturels et migratoires négatifs,
- et/ou diminution de la population d'au moins 5% entre les derniers
recensements,
- et/ou densité inférieure à 30 habitants au km²
- et
potentiel fiscal inférieur à 200 euros/habitant.
b) La zone franche rurale montagne comporterait un « arsenal » juridique, financier, fiscal, social dérogatoire permettant le maintien de la population et renforçant l'attractivité de la zone (Chambre de métiers de la Lozère)
-
Mesures d'ordre juridique
:
o Régime spécifique de la transmission du patrimoine
professionnel.
o Reconnaissance de la notion de moyenne montagne.
o Refonte des critères d'éligibilité à la P.A.T,
dont le périmètre d'application a des incidences sur les
entreprises artisanales.
-
Mesures fiscales
: le dispositif, d'une durée de 5 ans
comporterait
o L'exonération d'impôt sur les bénéfices pour les
entreprises existantes, transmises ou créées dans ces zones,
o L'exonération de plein droit de taxe professionnelle pour les
entreprises transmises ou créées dans ces zones,
o L'exonération de la taxe foncière sur les
propriétés bâties pour l'immobilier professionnel,
o Un crédit d'impôt pour investissements
o La réduction de la TVA sur les activités de main d'oeuvre.
o La généralisation de l'amortissement dégressif
o La détaxation des carburants professionnels
o Une mesure spécifique en matière d'impôt sur le revenu
pour tout nouvel arrivant.
-
Mesures sociales
:
o Allégement des charges sociales afin d'en affecter l'équivalent
à une augmentation des salaires
o L'exonération des cotisations patronales du 1
er
au
50
ème
salarié sur la fraction de
rémunération inférieure ou égale à 1,5 SMIC
pour les entreprises artisanales, industrielles et commerciales, y compris les
professions libérales, de 50 salariés au plus.
o Baisse globale des prélèvements grâce à une
collecte en guichet unique à compétence globale
o Reconnaissance du rôle de formateur des tuteurs en entreprises
o Assouplissement des 35 heures.
-
Mesures financières :
o Dotation jeune entreprise artisanale pour faciliter la création et la
reprise
o Bonification d'intérêts, notamment pour investissement de
contrainte, mise aux normes etc....
o Mise en place au plan départemental ou de pays de plates-formes
d'initiative artisanale accordant des avances remboursables sans
intérêts.
5. Contrats territoriaux artisanaux de service (Chambre de
métiers du Cantal)
L'artisanat en milieu rural doit assurer les services de proximité
nécessaires à la population. Dans les situations où le
marché n'assurerait pas à lui seul la juste
rémunération de l'artisan, il conviendrait d'inscrire le champ de
ses prestations dans un contrat territorial artisanal de service.
a) Objectif du contrat territorial artisanal de service :
-
assurer la présence d'un artisan dans chaque commune,
- garantir un service de proximité
- créer un maillage territorial d'entreprises.
b) Contenu du contrat :
-
assurer à l'artisan ou à son conjoint un travail
rémunéré non artisanal, complémentaire à son
activité artisanale, lui procurant un complément de revenu.
Exemple d'activités : ramassage scolaire, portage des repas
à domicile, entretien du patrimoine, environnement, accompagnateur-guide
pêche en montagne, garderie d'enfants.
- La mise en place d'un tel contrat, organisation d'une forme de
pluriactivité, favoriserait la transmission d'entreprises difficilement
viables avec la seule activité exercée par le cédant et
d'attirer des candidats à la création-reprise d'entreprise.
6.
Moyens d'action des chambres de métiers de montagne :
une dotation « animation économique »
renforcée pour financer les surcoûts.
Les chambres de métiers conduites à assumer leur mission
d'appui à la création-reprise d'entreprise, d'accompagnement du
créateur-repreneur, à participer à l'élaboration et
à la mise en oeuvre des projets de développement
économique, sont tenues de rapprocher leurs services de l'artisan. Les
déplacements, générant des surcoûts matériels
et salariaux, la tenue de permanences décentralisées, la
création d'antennes font peser sur les chambres de métiers de
montagne des surcoûts importants, qui devraient trouver des compensations
dans des financements exorbitants des règles habituelles.
Chambre de métiers du Jura
: « le coût
journalier de l'agent, dans le cadre de la dotation « animation
économique de la DECAS titre I doit être relevé pour les
départements situés en zone de montagne ».
*
* *
En
conclusion, c'est en raison de l'interdépendance qui unit les
différents acteurs de la vie économique, en montagne plus encore
que partout ailleurs, que les que les chambres de métiers proposent des
mesures spécifiques ou dérogatoires pour les artisans de la
montagne ou pour certaines zones particulièrement
défavorisées, menacées de dépeuplement, des
massifs.
De telles mesures méritent d'être analysées en partenariat
avec l'ensemble des acteurs. Elles n'ont leur justification que dans les
écarts qui caractérisent ces zones par rapport au territoire
national ; elles ont vocation à être temporaires, à
faire l'objet d'évaluations d'impact. Pour autant, lorsqu'un
développement endogène apparaît impossible, la
solidarité nationale doit jouer.