D. LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE UNIVERSITAIRE : LE NÉCESSAIRE MAINTIEN D'UNE COHÉRENCE GÉNÉRALE
Le rappel des orientations du schéma des services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche fait apparaître clairement que le pilotage de la politique immobilière universitaire ne peut être exclusivement local.
1. Un document d'orientation à portée limitée : le schéma des services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche.
La
stabilisation prévisible de la démographie étudiante, avec
des situations cependant contrastées, impose une organisation plus
coordonnée des implantations universitaires : le schéma de
services collectifs de l'enseignement supérieur a ainsi défini
les grandes lignes d'une typologie des sites universitaires en distinguant
quelques grands centres pluridisciplinaires, pluri-établissements,
réunissant des formations supérieures de haut niveau, des
laboratoires de recherches dotés des infrastructures nécessaires
et répondant aux standards internationaux au sein des grandes
métropoles.
Un renforcement des capacités de négociation des
universités devrait donc s'effectuer dans le cadre de ce schéma
qui fixe les grandes lignes de l'aménagement du territoire universitaire.
Conformément à la loi d'orientation pour l'aménagement et
le développement durable du territoire, les services collectifs
d'enseignement supérieur et de recherche font partie intégrante
de la politique d'aménagement du territoire. Un schéma de
développement organise les modalités de leur répartition
sur le territoire national, dans une perspective de long terme et arrête
notamment les orientations pour renforcer les grands ensembles régionaux
et les grands axes d'une gestion prévisionnelle des effectifs. Son
contenu peut être résumé comme suit :
a) Une lisibilité insuffisante dans l'organisation territoriale de l'enseignement supérieur et de la recherche : deux logiques à concilier
L'absence de politique globale résulte d'abord du poids de l'histoire et de la distinction institutionnelle entre les établissements d'enseignement supérieur et les établissements de recherche. Elle résulte également des différences d'approche dans l'organisation territoriale de l'enseignement supérieur et de la recherche : un système d'enseignement supérieur traditionnellement piloté par une logique de formation, et naturellement enclin à s'implanter sur l'ensemble du territoire pour répondre à la demande sociale, au risque parfois d'une certaine dispersion et d'un manque de taille critique, et un système de recherche fondé sur l'excellence et la nécessité d'une compétitivité reconnue au niveau international, au risque d'une excessive concentration.
b) De nouvelles contraintes
L'ouverture des frontières et la mobilité
croissante
des étudiants, des enseignants et des chercheurs vont imposer à
nos universités d'être reconnues en Europe et dans le monde et
soumettre les laboratoires de recherche à une concurrence sur le plan
international.
La stabilisation, voire la décroissance des effectifs étudiants,
avec le déséquilibre qu'elles induisent entre les filières
peut aboutir à une compétition excessive entre les
établissements d'enseignement supérieur. Les départs
à la retraite de chercheurs, d'enseignants-chercheurs et de personnels
techniques et administratifs, qui seront particulièrement importants
dans certaines disciplines (la physique, la chimie, les sciences humaines et
sociales) et dans certaines zones géographiques (Île-de-France,
Provence-Alpes-Côte d'Azur...) risquent également
d'entraîner le dépérissement de certains centres
scientifiques et des fractures nouvelles entre les territoires.
Dans le même temps, le développement des nouvelles technologies
permet de mettre en place un certain nombre de ressources partagées
à différentes échelles et accroît les
possibilités de mise en réseau de différents sites
universitaires autour de centres plus importants.
L'objectif du schéma de services collectifs est ainsi d'éviter
l'apparition et le développement de nouveaux
déséquilibres, en organisant l'offre d'enseignement
supérieur et de recherche sur l'ensemble du territoire et en
définissant pour chaque échelle territoriale la forme de service
et d'équipement adaptée.
c) Une organisation de l'enseignement supérieur plus cohérente
Cette
organisation doit se faire par un développement des réseaux qui
ont vocation à mieux articuler les différents niveaux du
système d'enseignement supérieur :
Les grands centres universitaires pluridisciplinaires doivent regrouper souvent
plusieurs établissements, qui offrent sur l'ensemble des champs
disciplinaires des formations supérieures de haut niveau et des
laboratoires de recherche dotés des infrastructures nécessaires
et répondant aux standards internationaux ; ces centres doivent
être compétitifs avec les grandes villes universitaires (Munich,
Oxford ou Barcelone) et contribuer au développement des
métropoles régionales.
Les autres pôles universitaires sièges d'universités
doivent proposer un éventail large de formation, offrir des formations
de troisième cycle plus spécialisées et disposer de
capacités de recherche sur quelques créneaux d'excellence.
Les implantations universitaires, IUT et antennes universitaires des villes
moyennes devront être renforcées en coordination avec la carte des
STS : il s'agit moins de créer de nouveaux sites que de structurer
les implantations existantes pour renforcer le développement
économique local, en s'appuyant sur les formations professionnalisantes,
sur l'insertion de ces formations dans le tissu économique local et sur
la création de plate-formes technologiques en lien avec les PME-PMI.
d) Une recherche mieux répartie
Le
développement des métropoles régionales impose de
rééquilibrer le potentiel de recherche sur le territoire,
notamment en direction des régions à dynamique universitaire
forte où les organismes de recherche restent encore peu implantés
: le Nord-Pas-de-Calais ou la Bretagne par exemple. Cette stratégie
d'aménagement du territoire repose sur un soutien accru aux
équipes scientifiques locales, dès lors qu'elles sont
évaluées positivement et qu'elles s'insèrent dans un
réseau de centres d'excellence.
Elle s'appuie également sur la mise en place d'une gestion
prévisionnelle des effectifs, permettant d'optimiser la
répartition disciplinaire et géographique des compétences,
sur un rapprochement accru entre les organismes de recherche et les
universités et sur l'implantation d'équipements structurants.
e) Un système d'enseignement supérieur et de recherche davantage inséré dans le tissu local
Depuis
le plan U2000, l'université est devenue une composante essentielle du
développement urbain. Si l'augmentation des capacités d'accueil
peut être considérée comme achevée, à
l'exception de la région parisienne et de Paris, cette politique de
construction doit cependant dans les années à venir, laisser la
place au renouvellement, à la rénovation et à la mise en
sécurité du patrimoine universitaire. Elle devra contribuer
à améliorer la qualité de vie et de travail des
étudiants et des personnels (logements étudiants,
bibliothèques, équipements culturels, équipements
sportifs, vie associative...). Cet objectif constitue, comme il a
été vu, un volet important des contrats de Plan
État-région conclus pour les années 2000-2006.
En outre, il est souhaitable que l'enseignement supérieur et la
recherche jouent un rôle croissant dans le développement
économique local : la création d'
« incubateurs » en lien avec les établissements
d'enseignement supérieur et de recherche, la constitution de centres
nationaux de recherche technologique associant laboratoires publics et
privés, l'instauration de plates-formes technologiques entre les
établissements d'enseignement professionnel, les départements
d'IUT et les entreprises devraient y contribuer.
f) Une cohérence territoriale fondée sur la mise en réseau
La mise
en réseau des différents centres d'enseignement supérieur
et de recherche constitue une priorité pour l'organisation territoriale
de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Cette mise en réseau suppose une identification des principaux
pôles de compétence sur l'ensemble du territoire, quel que soit le
domaine considéré (réseau des génopôles, des
maisons des sciences de l'homme, des centres de recherche technologique...).
Elle passe également par la multiplication des échanges entre les
différents centres, au moyen notamment de l'infrastructure de
télécommunication à très haut débit que
constituera Renater III, qui permettra à tous les sites
d'être interconnectés aux réseaux européens du
même type.
g) Les observations de la mission
La
mission d'information tient à rappeler que ce schéma a
été soumis à une concertation, tant au plan national que
régional, notamment avec la Délégation du Sénat
à l'aménagement et au développement durable du territoire.
Des modifications importantes ont été apportées notamment
sur l'ouverture internationale, le développement des nouvelles
technologies et la formation tout au long de la vie, les regroupements
interrégionaux...
Certaines observations faites par la Délégation du Sénat
ont été prises en compte, en particulier celles relatives aux
nouvelles technologies et à la culture scientifique et technique, au
rôle du CNAM en matière d'accueil de nouveaux publics et à
la nécessité de mener des études à caractère
prospectif en vue de la révision du schéma. En revanche, les
annexes ont été maintenues même si elles ne comportent pas
toutes un aspect prospectif ou normatif.
Au total, la mission tient rappeler que le schéma n'est pas un document
de programmation mais d'orientation ; il ne participe pas directement au
processus d'allocation des crédits même si les lois de finances
permettent de respecter les engagements des contrats de plan qui couvrent la
première période du schéma.