4. Le constat final et les propositions de la mission sur les opérations universitaires parisiennes

Au terme de ces développements visant à analyser de manière aussi précise et objective que possible, compte tenu des moyens d'investigation dont elle a disposé, la complexité du dossier des universités parisiennes, la mission se sent autorisée à formuler un constat sans complaisance.

Du fait de l'attractivité naturelle et historique des établissements parisiens, des carences de l'Etat dans la définition d'une politique immobilière universitaire, du rôle que se sont octroyés les universitaires dans la conduite de leurs projets immobiliers, du coût et de la rareté du foncier dans la capitale, de l'inertie jusqu'à une date récente de la région et de la Ville en matière de bâti universitaire, de l'instrumentalisation d'une partie du programme de restructuration des universités parisiennes pour remplir le patchwork de l'opération d'urbanisme de la Zac Rive gauche, de projets d'aménagements privilégiant les conceptions architecturales de leurs auteurs au détriment des besoins réels des étudiants et des enseignants chercheurs, du souci de conserver intra-muros des activités d'enseignement et de recherche dans un tissu urbain contraint ... force est de constater que l'immobilier universitaire parisien est parti à la dérive et n'est plus depuis longtemps piloté par l'Etat, et que l'improvisation depuis plus de 25 ans l'a emporté en ce domaine sur la raison.

Même si l'implantation de Paris VII dans la Zac Rive gauche répond à une certaine logique -encore que nombre d'autres sites parisiens, et aussi franciliens auraient peut-être constitués des solutions plus appropriées- le maintien de Paris VI à Jussieu représente à coup sûr la plus déplorable des décisions, ou plutôt des non-décisions, prises en matière universitaire. Devant la mission, M. Luc Ferry est convenu que « toutes les décisions prises concernant Jussieu avaient été mauvaises ».

Force est, par ailleurs, de constater que le Quartier latin n'est plus ce qu'il était entre les deux-guerres, voire dans les années 60, avant l'ouverture de l'université au plus grand nombre, et que les jeunes enseignants-chercheurs, comme les étudiants, aspirent à enseigner, à chercher et à étudier dans des locaux convenables, modernes et spacieux, même à la périphérie de Paris, voire en Ile-de-France plutôt que de le faire dans des locaux étriqués, insalubres, dangereux et sombres, lorsqu'ils ne sont pas aveugles...

On rappellera à cet égard que la première université scientifique française rassemble à Jussieu une forte majorité de chercheurs, qui ont sans doute animé le syndicalisme étudiant des années 60, mais qui sont aujourd'hui proches de l'âge de la retraite.

En dépit d'une année d'investigations, la mission n'est aujourd'hui pas en mesure d'identifier précisément le processus décisionnel et les autorités qui ont conduit à injecter autant d'argent public pour sécuriser un campus, et réhabiliter médiocrement une construction ingérable et inhumaine, dont la pérennité apparaît des plus aléatoires.

On pourrait évoquer, certes, le poids du lobby universitaire, qui a trop longtemps « caracolé » à son aise ; un certain « autisme » des équipes administratives du 3-5 boulevard Pasteur 83( * ) , dont les options ont perduré sans aucun recul critique tout au long des alternances ; un manque de curiosité de certains responsables à partir des années 90, qui avaient pourtant toutes les raisons de bien connaître le dossier de Jussieu ; la rétention d'informations de ceux qui savaient ; l'obscurité des documents budgétaires fournis au Parlement et les réponses alambiquées fournies à ses rapporteurs, qui n'ont pas permis aux assemblées, en temps utile, de jouer leur rôle de contrôle et de mettre en garde le gouvernement ; l'attribution de crédits affectés aux premiers travaux de désamiantage au début des années 80 et non consommés, dont les produits financiers ont pu tomber dans l'escarcelle de l'université principalement concernée, alimentant ainsi son trésor de guerre, comme d'ailleurs plus récemment celui de l'établissement public créé pour désamianter et rénover le campus, qui a fait fructifier des crédits de paiement trop généreusement accordés dans un contexte budgétaire pourtant contraint par nos engagements européens...

Bref, la conjugaison de tous ces facteurs, la négligence, le laisser-aller, le désordre, l'immobilisme, la force des choses... ont sans doute contribué au fiasco actuel : il n'est que temps que l'Etat se reprenne et recouvre ses compétences en matière de pilotage de l'immobilier universitaire parisien, ce qui n'exclut d'ailleurs pas, au-delà du contrôle du contenant, une redéfinition du contenu, c'est-à-dire, par exemple, des regroupements disciplinaires entre universités lorsque ceux-ci s'imposent.

Dans le même temps, les autres universités parisiennes ont toujours des besoins criants de réhabilitation et de regroupement, le logement étudiant à Paris est sinistré, les conditions de vie étudiante dans la capitale sont désastreuses, les moyens des premiers cycles des universités franciliennes extra-muros sont chichement mesurés, notamment en matière de recherche, les crédits d'Etat des contrats de plan en région au titre du plan U3M sont amputés par des redéploiements en interne non négligeables effectués au profit des deux principales opérations parisiennes...

Ainsi, sans contester l'excellence des formations scientifiques dispensées à Paris VI et le très haut niveau de la recherche qui y est pratiquée dans la plupart des disciplines 84( * ) , la mission estime que cette université doit rentrer dans le droit commun en matière immobilière, et aussi budgétaire.

Pour s'en tenir à quelques ordres de grandeur 85( * ) , le programme de mise en sécurité et de réhabilitation de Jussieu, qui est pour l'instant évalué à quelque 4,4 milliards de francs , et dont l'enveloppe a toutes les chances d'être largement dépassée selon nombre d'interlocuteurs autorisés de la mission 86( * ) , représente ou représentera environ le dixième des 50 milliards de francs du total des crédits du plan U3M, le tiers des quelque 18,4 milliards de francs apportés par l'Etat pour l'université dans les contrats de plan 2000-2006, un coût supérieur aux crédits d'Etat du seul contrat de plan francilien (4 milliards de francs) et le double des crédits inscrits dans le CPER (2,9 milliards de francs) pour le programme universitaire d'aménagement de la ZAC Rive-Gauche.

On rappellera par ailleurs que le coût prévisionnel des opérations de restructuration de l'ensemble des universités parisiennes hors Jussieu s'élève environ à 3,08 milliards de francs, soit un montant très inférieur à l'enveloppe officielle réservée au campus rénové de la seule Université Pierre et Marie Curie, qui accueille sur site, il convient de le rappeler, moins de 20 000 étudiants, soit 1 % de l'ensemble des étudiants accueillis dans notre système universitaire.

Alors que le Président de Paris VI bénéficie déjà de crédits d'Etat considérables, et exprime de nouvelles prétentions budgétaires pour le prochain contrat de plan, le campus d'Orsay a dû fermer ses portes aux étudiants au début 2003, faute de pouvoir chauffer ses locaux ; l'université de Créteil Paris XII qui s'est retrouvée à deux reprises en 2002 en cessation de paiement du fait d'un versement tardif de sa dotation, est confrontée à un manque criant de personnels enseignants et IATOS, alors que ses effectifs étudiants continuent d'augmenter, à la différence de ceux de Paris VI, et n'a pas la possibilité d'assurer son développement. Enfin, les crédits de la recherche ont fait l'objet des restrictions budgétaires que l'on sait dans la dernière loi de finances.

Si la mission n'a pas vocation à définir les responsabilités des uns et des autres dans la gabegie de Jussieu, il était de son devoir de lever une certaine loi du silence, et d'attirer l'attention du Sénat et de l'opinion sur une véritable fuite en avant budgétaire.

Ainsi, alors que le campus de Jussieu aurait dû, selon toute logique, être rasé en temps utile et reconstruit sur site, ou ailleurs, après valorisation de son foncier, la mission se demande, sauf à cautionner cette dérive budgétaire, s'il est encore temps de stopper le processus en cours, compte tenu des crédits déjà consommés et engagés, et d'envisager d'autres alternatives.


Certes, un arrêt des opérations en cours et programmées, dans l'hypothèse d'une destruction du campus, après désamiantage préalable hors présence universitaire supposerait un relogement rapide de Paris VI dans des conditions satisfaisantes : la mission mesure évidemment la dimension politique et la complexité d'une telle alternative, sans nul doute moins coûteuse, qui impliquerait de recueillir un difficile accord des parties concernées (Etat, région, Ville, universités, ...) ainsi que les protestations de tous ordres qui en résulteraient, notamment des universitaires et des chercheurs installés de longue date à Jussieu.

Elle proposera qu'une mission d'expertise technique et financière soit chargée dans les meilleurs délais, d'examiner la faisabilité d'une remise en cause de l'opération de Jussieu en chiffrant toutes les solutions alternatives, notamment au regard du coût actualisé des opérations en cours et programmées sur le campus et des perspectives prévisibles de dépassement.

La mission souhaiterait ainsi que ses premières investigations, qui sont certes partielles du fait de ses prérogatives limitées, de sa durée d'existence trop brève et de ses moyens d'expertise qui ne lui permettent pas d'appréhender la totalité d'un dossier ô combien complexe, soient prolongées de la manière la plus efficace.

Soucieuse d'assumer ses responsabilités, elle proposera en conséquence :

- qu'une mission d'expertise technique et financière , désignée par le gouvernement, soit chargée d'examiner en toute urgence toutes les solutions alternatives au programme actuel de mise en sécurité et de réhabilitation du campus de Jussieu et éventuellement de formuler des propositions assorties d'un calendrier précis ;

- que les inspections générales soient chargées par le ministre de l'éducation nationale d'établir un rapport sur la situation des universités parisiennes ;

- que la Cour des comptes soit chargée d'analyser les crédits affectés depuis le début des années 80 aux universités Paris VI et Paris VII, et à l'établissement public du campus de Jussieu, ainsi que leur utilisation ;

- qu'une commission d'enquête , dotée de tous ses pouvoirs d'investigation, soit créée au Sénat pour faire la lumière sur le processus et les éléments qui ont conduit à conserver et à réhabiliter le campus de Jussieu.

La mission proposera enfin qu'un débat d'orientation soit organisé prochainement au Sénat sur la situation générale du patrimoine immobilier universitaire.

*

* *

RÉSUMÉ DES PROPOSITIONS
DE LA MISSION D'INFORMATION

25 propositions autour de six priorités

- Meilleure utilisation du patrimoine immobilier universitaire

1. Accueil de nouveaux publics à l'université (développement de l'accueil des étudiants et des enseignants-chercheurs étrangers, développement de la formation continue des adultes à l'université dans le cadre de la formation tout au long de la vie, avec prise en compte équitable de ces activités de formation dans le déroulement de la carrière des enseignants-chercheurs concernés.

2. Développement des initiatives et activités estivales dans les locaux universitaires.

3. Organisation de colloques, même non strictement universitaires, aussi bien dans des lieux universitaires de prestige que dans des sites plus fonctionnels ;

4. Elargissement des horaires et des plages d'ouverture des bibliothèques universitaires.

5. Ouverture des universités en dehors des horaires et de l'année universitaires à des publics non bacheliers (université du temps libre, etc...)

- Amélioration des conditions de vie étudiante

6. Rénovation accélérée du parc des cités universitaires.

7. Extension des compétences des grandes agglomérations au logement étudiant ; celles-ci seraient appelées à jouer en ce domaine un rôle de chef de file, en mobilisant les financements de toutes les collectivités.

8. Plan d'urgence en faveur du logement étudiant à Paris.

9. Extension de la compétence des commissions de sécurité aux résidences universitaires et application des réglementations existantes.

- Expérimentation à une large échelle du transfert de propriété des bâtiments universitaires

10. Dévolution expérimentale et réversible des bâtiments universitaires aux collectivités et aux établissements volontaires et évaluation de ce transfert au bout de cinq ans, avant consolidation, extension ou abandon de l'expérience.

11. Expérimentation susceptible d'être encouragée par des aides spécifiques accordées aux collectivités et aux établissements volontaires, s'accompagnant du transfert correspondant des ressources.

12. Gestion immobilière mutualisée susceptible d'être expérimentée dans quelques sites universitaires importants, de type pôle européen ou pôle international de spécialité, sur la base également du volontariat, via la création d'un établissement public scientifique.

- Aménagement des procédures

13. Association plus en amont des territoires et des établissements aux projets immobiliers universitaires, dans le cadre des contrats de plan.

14. Allégement et déconcentration du système d'expertise.

15. Assouplissement de la gestion immobilière par programme.

16. Allégement du contrôle exercé par les contrôleurs financiers déconcentrés.

17. Simplification des contrôles lorsque la maîtrise d'ouvrage est exercée par l'Etat.

18. Etude des modes de financement des bâtiments universitaires, associant notamment un partenariat public-privé, pour accélérer les procédures de construction.

- Maintien d'un pilotage d'Etat en matière d'immobilier universitaire

19. Organisation d'un débat d'orientation au Sénat sur la situation générale du patrimoine immobilier universitaire.

20. Nécessité d'une cohérence intra et interrégionale de la carte universitaire, et d'une péréquation académique et régionale.

21. Harmonisation de l'implantation des formations courtes professionnalisées, et notamment contrôle de la création des STS par la centrale afin d'éviter doublons avec les départements d'IUT et développements anarchiques.

22. Mise en place de schémas directeurs immobiliers au niveau académique ou régional, afin de décliner de manière précise les orientations du schéma des services collectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche, en renforçant la portée de ce schéma.

- Réexamen de la politique immobilière menée en faveur des universités parisiennes

23. Création par le gouvernement, dans les meilleurs délais, d'une mission d'expertise technique et financière qui serait chargée d'examiner toutes les solutions alternatives au programme actuel de mise en sécurité et de réhabilitation du campus de Jussieu, et éventuellement de formuler des propositions assorties d'un calendrier précis.

24. Enquête confiée à la Cour des comptes pour recenser les crédits affectés depuis le début des années 80 aux universités Paris VI et Paris VII, et à l'établissement public administratif du campus de Jussieu, et analyser leur utilisation.

25. Création d'une commission d'enquête par le Sénat pour faire la lumière sur le processus et les éléments qui ont conduit à conserver et à réhabiliter le campus de Jussieu.

ANNEXES

ÉLÉMENTS COMPARATIFS SUR LE PATRIMOINE IMMOBILIER UNIVERSITAIRE
AU ROYAUME-UNI, EN ESPAGNE ET EN ITALIE 87( * )

LE PATRIMOINE IMMOBILIER UNIVERSITAIRE BRITANNIQUE

• Le patrimoine immobilier universitaire britannique en chiffres

En Grande-Bretagne, les 165 institutions d'enseignement supérieur répertoriées offrent à leurs étudiants des locaux d'une superficie totale de 25 millions de m 2 , sans compter les terrains non construits.

• Les revenus des universités britanniques

Les ressources des universités proviennent en grande partie du secteur public : le « Higher Education Funding Council of England » (HEFCE) distribue les fonds publics en fonction des besoins propres des universités. Celles-ci possèdent également des revenus propres générés par d'éventuelles sociétés issues de la recherche universitaire, des brevets, etc.

Certaines d'entre elles bénéficient de généreuses donations d'anciens étudiants ou du secteur privé (Cambridge vient ainsi de recevoir une donation de £ 45 millions).

Enfin, quelques collèges d'Oxford et Cambridge sont propriétaires fonciers, certains depuis le Moyen-Âge : ils tirent toujours des bénéfices de l'exploitation de ces terrains.

• La gestion du patrimoine immobilier

1. Le rôle des universités et de leurs « Estates services »

Les universités britanniques gèrent leurs ressources et leur patrimoine de façon autonome : elles sont libres d'investir leurs revenus dans l'enseignement ou bien dans leurs infrastructures (maintenance, rénovation, expansions).

Dans chaque université il existe un bureau dit « Estates services » ou « Property services », chargé de la gestion du patrimoine immobilier. Les « Estates services » des universités peuvent se regrouper pour la réalisation de projets communs touchant aux transports ou à l'environnement. Ces projets peuvent être initiés par le HEFCE dans le cadre de son plan « Good Management Practice Initiative » dont le but est d'amener les universités britanniques à une meilleure gestion de leurs ressources.


L'exemple de l'université de Cambridge

L'université de Cambridge possède un patrimoine immobilier d'une valeur de £ 960 millions administré par l'EMBS (Cambridge University's Estate Management and Building Service) : ce bureau est chargé de la maintenance des bâtiments et des jardins, de la gestion et du développement du patrimoine immobilier de l'université ainsi que de la recherche de fonds pour les projets de développement.

L'EMBS a par ailleurs pour vocation d'influencer le développement de l'industrie de la construction en Grande-Bretagne (à travers des collaborations sur le plan régional et national). Il oeuvre en particulier avec le « Cambridge City Council Environment and Planning » et le « Cambridgshire County Council » dont il doit suivre le « régional planning Guidance ».

L'université de Cambridge, ayant estimé qu'elle devait construire de nouveaux campus afin de faire face aux besoins urgents de la recherche et de l'enseignement, s'est lancée il y a trois ans dans le plan de développement le plus ambitieux de son histoire, doté d'un budget de £ 550 millions (alors qu'elle annonce par ailleurs un déficit de £ 11.6 millions). L'EMBS est chargé de mener à bien ce développement. 50 000 m 2 supplémentaires ont été ouverts en octobre 2000. Les projets en cours sont généralement confiés à de grands architectes (Sir Norman Foster a dessiné les plans de la nouvelle faculté de droit).

2. Le rôle des associations

• L'« Association of University Directors of Estates of the United Kingdom » regroupe les responsables des « Estates services » ci-dessus mentionnés ». L'AUDE, se divise en régions disposant d'un représentant qui siège au comité exécutif de l'Association. Trois ou quatre réunions par an ont lieu dans chaque région et une réunion nationale annuelle de trois jours réunit les membres, ainsi que les principaux partenaires de l'Association (HEFCE/Universities UK), c'est-à-dire l'équivalent britannique de la Conférence des présidents d'université.

Outre les relations avec les partenaires institutionnels ou privés, l'AUDE est chargée de promouvoir l'excellence dans la gestion du patrimoine immobilier universitaire, donner un avis consultatif sur de nouveaux projets de loi, diffuser l'information concernant la gestion du patrimoine dans l'ensemble du secteur de l'enseignement supérieur, proposer des solutions aux problèmes les plus courants posés par la gestion du patrimoine immobilier universitaire. L'AUDE assure également la liaison avec d'autres professionnels du secteur (The Association of University Engineers » et « The Association of University Chief Security Officers »).

• Fondée en 1970, l'« Association of University Engineers » regroupe 103 universités membres. Les buts de l'association sont de développer et de promouvoir auprès des institutions partenaires (AUDE, UUK, HEFCE) les compétences des ingénieurs qui opèrent au sein des universités, d'assurer la maintenance des bâtiments et l'échange d'information entre les ingénieurs.

• Créée en 1996, l'« Environmental Association for universities and Colleges » (EAUC) regroupe 170 institutions d'enseignement supérieur britanniques. Le but de cette association est de faire en sorte que le développement du patrimoine immobilier universitaire se fasse en accord avec le respect de l'environnement. Les échanges d'information et le partage des expériences réussies dans le domaine du développement durable se font par le biais d'une lettre d'information adressée aux membres et la tenue d'une conférence annuelle.


Les outils à la disposition des « Estate services » et des associations

1/ « The Joint Procurement Policy and Strategy group » (JPPSG) www.jppsg.ac.uk : ce service en ligne permet aux responsables des «Estates services» de faire des appels d'offre ou bien de s'informer sur les projets en cours.

2/ « The Higher Education Estates Website » www.heestates.ac.uk : ce site regroupe l'ensemble des associations mentionnées ci-dessus ainsi que les principaux partenaires institutionnels des « Estates services ». Il s'agit d'un site ressource où l'ensemble des acteurs du secteur peuvent échanger de l'information, dialoguer et exposer leurs projets.

3/ « The Association of Higher Education Facilities Officers » (APPA) www.appa.org : cette association internationale fondée en 1914, dont le but est d'assurer la meilleure gestion possible (par le biais de la recherche et de la diffusion de l'information) des bâtiments à vocation éducative, offre ses services aux responsables du patrimoine immobilier universitaire aux Etats-Unis, au Canada, au Mexique ainsi que dans d'autres pays.

3. Le rôle de l'Etat

Le HEFCE (Higher Education Funding Council of England) est l'organisme gouvernemental chargé de la répartition des fonds publics alloués aux universités. Il est relayé par des conseils régionaux dans les zones de dévolution (Ecosse, Irlande du Nord, Pays de Galles) ; il alloue des fonds spéciaux aux institutions qui ont besoin de rénover leurs bâtiments, mais qui manquent de moyens, ainsi qu'aux institutions qui administrent des bâtiments anciens.

L'HEFCE est chargé par ailleurs de contrôler les investissements publics pour la maintenance du patrimoine immobilier universitaire. Pour ce faire, il évalue les stratégies des universités, les projets qui engagent des fonds, la bonne gestion et la maintenance des biens immobiliers des universités. L'HEFCE tient ce rôle d'audit lors de visites régulières.

L'HEFCE a également un rôle de conseil : il a lancé par exemple le projet « Estate Management Statistics », dont le but est de permettre aux universités d'avoir accès à une meilleure information afin qu'elles mettent en place des techniques de gestion plus performantes. Le principe du projet repose sur la mise en commun des initiatives des différentes universités britanniques. Les résultats de l'enquête préalable ont permis aux universités participantes d'améliorer leurs propres techniques.

LE PATRIMOINE IMMOBILIER UNIVERSITAIRE ESPAGNOL

Le système universitaire espagnol trouve son fondement dans la Constitution du 27 décembre 1978. Celle-ci a en effet mis fin à un système d'enseignement supérieur jusqu'alors très centralisé, en proclamant d'une part, le principe d'autonomie des universités et en instituant, par ailleurs, une nouvelle répartition des compétences entre l'Etat et les communautés autonomes qui a conduit à transférer à ces 17 communautés, l'exercice de la plupart des compétences relatives à l'enseignement supérieur. Ce nouveau processus de décentralisation s'est achevé, en ce qui concerne l'enseignement supérieur, en 1996.

Le système d'enseignement supérieur espagnol est constitué de 48 universités publiques, 12 universités privées et 4 universités relevant de l'Eglise. Il comprend également deux universités restées à la charge de l'Etat (l'université d'enseignement à distance et l'université internationale Menedez Pelayo).

Une première loi, dite loi de réforme universitaire du 25 novembre 1983, est venue préciser les dispositions applicables aux établissements d'enseignement supérieur espagnol. Cette loi a été abrogées par la loi organique sur les universités du 21 décembre 2001, mais les textes pris pour son application, notamment les différentes lois élaborées par les communautés autonomes, demeurent pour l'heure en vigueur.

En application des textes précités, les universités espagnoles sont compétentes pour administrer les biens qui intègrent leur patrimoine, qu'il s'agisse des biens relevant du domaine public qui leur sont affectés pour l'exercice de leurs missions, des biens patrimoniaux mis à leur disposition par une administration publique ou encore des biens dont elles sont propriétaires. Il convient toutefois de noter que la gestion des biens relevant du domaine public ayant été en partie dévolue aux communautés autonomes, la législation applicable à ces différents biens est selon le cas celle édictée par l'Etat ou celle de la communauté autonome de ressort de l'établissement.

En application des dispositions de la loi dite de réforme universitaire du 25 août 1983, reprises dans la loi organique sur l'université du 21 décembre 2001 (cf annexe I le détail des dispositions de la loi relative au patrimoine des universités), l'autonomie des universités emporte notamment pour ces établissements la capacité « d'élaborer, d'approuver et de gérer leur budget ainsi que d'administrer leurs biens ».

Cette même loi rappelle par ailleurs que « le patrimoine de chaque université est constitué de l'ensemble de ses biens, droits et obligations ».

1. L'ampleur du patrimoine immobilier des universités

D'après les informations fournies par les « gérants 88( * ) » des universités dans le cadre d'une étude intitulée « l'université espagnole en chiffres », réalisée à la demande de la Conférence des recteurs d'universités espagnoles, la superficie des bâtiments et installations universitaires s'élevait, en 2000, à 7 526 611 m 2 .

Ce chiffre doit toutefois être considéré avec précaution dans la mesure où 13 des 47 universités publiques espagnoles, qui assurent un enseignement « présentiel » n'ont pas répondu à cette étude, dont 4 des 6 universités publiques relevant de la communauté autonome de Madrid, et notamment la Complutense qui est la première université espagnole en nombre d'étudiants inscrits (115 000 étudiants).

Ce chiffre ne concerne pas non plus les bâtiments des 12 universités privées et des 4 universités espagnoles relevant de l'Église, qui sont régis par les règles d'organisation et de fonctionnement de ces établissements et par celles édictées par la communauté autonome dont elles relèvent.

2. La nature du patrimoine immobilier des universités publiques espagnoles

D'après l'étude précitée, le patrimoine immobilier des universités comprend, outre les terrains :

- les bâtiments destinés à l'enseignement (salles de classe, laboratoires, salles informatiques) : 2 389 408 m² ;

- les bâtiments destinés à la recherche (instituts et centres de recherche, services techniques) : 330 951 m² ;

- les bureaux et séminaires du personnel de recherche : 871 936 m² ;

- les centres de calcul : 43 840 m² ;

- les bâtiments de l'administration (services de la présidence, services administratifs de chaque composante, salles de réunions...) : 756 888 m² ;

- les bibliothèques universitaires, départements de périodiques et archives : 532 182 m² ;

- les installations sportives : 587 413 m² ;

- les installations culturelles : 165 156 m² ;

- les services de reprographie, cafétérias, restaurants universitaires, locaux destinés aux étudiants, boutiques : 778 530 m² ;

- les résidences universitaires : 470 901 m² ;

- les parkings : 599 406 m².

3. Le statut du patrimoine immobilier universitaire

Les biens qui intègrent le patrimoine immobilier sont :

- les biens patrimoniaux de l'université, biens dont elle est propriétaire par cession, donation, legs ou acquisition ;

- les biens relevant du domaine public « affectés à la réalisation des missions de l'université » par l'Etat ou la communauté autonome de ressort. L'université exerce, à l'encontre de ces biens 89( * ) , les droits et obligations du propriétaire. Lorsque ces biens cessent d'être nécessaires pour assurer les missions de l'université, l'administration d'origine pourra réclamer leur restitution, ou si celle-ci n'était pas envisageable, le remboursement de leur valeur calculée à la date où la restitution devait intervenir ;

- les biens patrimoniaux mis à la disposition de l'université par une administration publique espagnole pour l'exercice de ses missions, et à l'égard desquels elle exerce un droit d'usage.

4. La gestion du patrimoine immobilier des universités

La loi organique sur les universités du 21 décembre 2001 prévoit que « l'administration et la disposition des biens qui relèvent du domaine public ainsi que celles des biens patrimoniaux sont régies par les dispositions générales applicables à ces types de biens ».

Ces dispositions sont :

- d'une part, les principes fondamentaux applicables aux biens du domaine public et aux biens patrimoniaux, tels qu'ils sont déterminés par le code civil espagnol, ainsi que les bases du régime juridique des administrations publiques qui, en vertu de la Constitution, sont demeurés de la compétence de l'Etat ;

- d'autre part, les législations respectives que les 17 communautés autonomes ont élaboré pour déterminer le régime juridique applicable aux biens domaniaux et patrimoniaux qui leur sont propres.

La loi du 21 décembre précitée dispose, en outre, que « sans préjudice des dispositions applicables au patrimoine historique espagnol, les actes de disposition des biens immeubles (...) seront décidés par l'université, après accord du conseil social 90( * ) , conformément à ce que prévoit la réglementation établie par la communauté autonome de ressort ».

En application de cet article, les lois des différentes communautés autonomes, qui fixent les dispositions applicables aux conseils sociaux des universités de leur ressort, ont prévu la compétence de cet organe pour autoriser (sur proposition du conseil de gouvernement de l'université ou à leur seule initiative) « tout acte d'aliénation ou de disposition de biens qui relèvent du patrimoine de l'université, ainsi que les décisions de désaffectation de biens du domaine public d'une certaine valeur ».

Enfin, les statuts de chaque établissement déterminent, dans le cadre des lois édictées par leur communauté autonome de ressort, les autres organes (junta de gobierno 91( * ) , recteur de l'université) qui seront susceptibles d'autoriser l'aliénation de biens patrimoniaux de l'université en fonction de leur valeur (cf. annexe II les statuts de l'université autonome de Madrid).

Chaque université est par ailleurs chargée d'établir et de mettre à jour l'inventaire de ses biens, droits et actions, exception faite des biens dits fongibles. Cet inventaire, généralement réalisé par les services du gérant, est un document public.

Annexe n° 1

Dispositions de la loi organique sur les universités,
du 21 décembre 2001, relatives au patrimoine de ces établissements

Article 2 relatif à l'autonomie universitaire

« Les universités sont dotées de la personnalité morale » (...)

« Pour l'application de la présente loi, l'autonomie des universités comprend : ....h) l'élaboration, l'approbation et la gestion de leur budget ainsi que l'administration de leurs biens ».

Article 80 relatif au patrimoine de l'université

1. Le patrimoine de chaque université est constitué de l'ensemble de ses biens, droits et obligations. Les biens affectés à l'exercice de ses missions et les actes qu'elle réalise pour la mise en oeuvre desdites missions, ainsi que les produits qui en résultent, bénéficient d'une exemption fiscale dès lors que les impôts et exemptions bénéficient directement à l'université en sa qualité de contribuable, à moins que la loi n'autorise le transfert de la charge fiscale.

2. Les universités assurent les droits et obligations du propriétaire à l'égard des biens du domaine public qui leur sont affectés pour l'exercice de leurs missions, ainsi qu'à l'égard des biens que l'Etat ou les communautés autonomes pourraient leur affecter dans le futur aux mêmes fins. Ces dispositions ne sont pas applicables aux biens qui relèvent du patrimoine historique espagnol. Lorsque les biens auxquels se réfère la première phrase du présent alinéa cessent d'être nécessaires pour assurer le service universitaire ou sont utilisés à des missions distinctes de l'université, l'administration d'origine pourra réclamer leur restitution, ou si celle-ci n'était pas envisageable, le remboursement de leur valeur calculé à la date où la restitution devait intervenir.

Les administrations publiques pourront mettre à la disposition des universités publiques des biens patrimoniaux qui relèvent de leur propriété, afin que celles-ci les utilisent pour l'exercice de leurs missions.

3. L'administration et la disposition des biens du domaine public ainsi que celles des biens relevant du domaine privé sont régies par la réglementation générale applicable à ces matières. Sans préjudice de la législation applicable au patrimoine historique espagnol, les actes de disposition des biens immeubles ou des biens meubles d'une valeur importante seront décidés par l'université, après accord du conseil social, dans le respect de la réglementation établie par la communauté autonome de ressort.

Article 81 relatif à la programmation et au budget

« Le budget de l'université comprend notamment : (...)

- c) les recettes provenant de subventions de personnes publiques ou privées, ainsi que de successions, dons et legs ;

- d) les produits provenant de son patrimoine et de toutes les activités économiques qu'elle développe en application des dispositions de la présente loi et de ses statuts ».

Annexe n° 2

Exemple de dispositions relatives au patrimoine de l'université figurant dans les statuts de l'université autonome de Madrid

Article 78 : L'université autonome de Madrid bénéficie de l'autonomie économique et financière dans le cadre prévu par les dispositions de la loi de réforme universitaire et par les présents statuts.

Article 79 :

1. Le patrimoine de l'université autonome de Madrid est constitué de l'ensemble des biens, droits et actions qui lui sont propres.

2. L'université exerce les droits et obligations du propriétaire à l'encontre des biens relevant du domaine public de l'Etat qui lui ont été affectés pour l'exercice de ses missions, ainsi que des biens du domaine public qui lui seront affectés dans l'avenir par l'Etat, ou par sa communauté de ressort, aux mêmes fins. Ces dispositions ne sont pas applicables aux biens qui relèvent du patrimoine historique espagnol.

Article 80 : L'administration et la disposition des biens relevant du domaine public comme celles des biens patrimoniaux de l'université sont régies par les dispositions des présents statuts, sans préjudice de ce qui est prévu par les lois prises pour l'application de l'article 149.1.18 de la Constitution.

Article 81 : Les biens de l'université affectés à l'exercice de ses missions, les actes qu'elle réalise pour la mise en oeuvre de celles-ci, ainsi que les produits qui pourraient en résulter bénéficieront d'une exemption fiscale.

Article 82 : Si les dispositions législatives confèrent à l'université le pouvoir d'exercer les actes suivants, les organes compétents pour exercer ces actes seront :

a) sans préjudice de ce que prévoit l'article 53.3 de la loi de réforme universitaire (actuel article 80 de la loi organique sur les universités) le conseil social, sur proposition de la « junta de gobierno », pourra décider la désaffectation des biens du domaine public, ainsi que la vente, permutation ou cession des biens patrimoniaux dont la valeur, selon une évaluation effectuée par expert, excède 601 012 euros.

b) la « junta de gobierno » pourra autoriser la vente des biens patrimoniaux de l'université dont la valeur, évaluée par expert, n'est pas supérieure à 601 012 euros.

c) le recteur de l'université pourra décider la vente de tous les biens patrimoniaux dont la valeur, évaluée par expert, est inférieure à 60 101 euros.

Article 83 : L'université autonome de Madrid élaborera et tiendra à jour l'inventaire de ses biens, droits et actions, exception faite de ceux qui ont un caractère fongible.

LE PATRIMOINE IMMOBILIER UNIVERSITAIRE ITALIEN

1. Le statut des biens immobiliers universitaires

Depuis 1989 et la loi n° 168 du 9 mai, les universités italiennes sont autonomes vis-à-vis de l'Etat en ce qui concerne notamment la recherche, l'éducation et le financement.

D'après l'article 7 de la loi susnommée, sur l'autonomie financière et comptable des universités, les entrées financières des universités sont constituées de :

- virements de l'Etat ;

- contributions obligatoires ;

- formes autonomes de financement.

D'après ce même article, revu par le loi n° 537 de  1993, les universités et les organismes inter-universitaires de recherche et de services reçoivent annuellement de l'Etat, trois grandes catégories de financements :

- un fonds pour les dépenses de fonctionnement (personnel, manutentions ordinaires du patrimoine) ;

- un fonds destiné à la construction et aux grands investissements ;

- un fonds de développement pour la recherche scientifique universitaire.

L'autre fonds naturel de financement est constitué par les inscriptions des étudiants. A noter également un financement provenant de dons et legs.

Les universités peuvent donc gérer de manière autonome leurs fonds, dans la mesure où ceux-ci sont utilisés et/ou considérés à des fins institutionnelles. L'Etat n'entre donc pas directement dans les choix financiers des universités même s'il se réserve le droit, par l'intermédiaire de la Cour des comptes, par exemple, de vérifier le bon fonctionnement et le bien-fondé des finances de celles-ci.

Les universités italiennes disposent de trois types de biens immobiliers :

- les concessions de l'Etat ;

- leurs propres possessions ;

- les locations.

En premier lieu, le patrimoine de l'Etat est géré par l'Agenzia del Demanio 92( * ) . Cette agence, dépendant du Ministero dell'Economia e delle Finanze 93( * ) , gère en particulier les concessions immobilières de l'Etat en faveur d'organismes publics ou privés. Ces concessions sont attribuées sur demande des universités. Légalement, un décret interministériel entre le directeur de l'Agenzia del Damanio et le responsable du département « Programmation, coordination et affaires économiques » du ministero dell'Istruzione dell'Università e della Ricerca 94( * ) (MIUR) fonde les bases légales de ces concessions.

Le premier texte historique concernant l'utilisation de biens de l'Etat par les universités, date de 1933 (décret royal du 31 août 1933, n° 1592). L'article 46 de ce décret, « pour chaque université et institut supérieur, est concédée, à titre gratuit et perpétuel, l'utilisation des biens immobiliers de l'Etat mis à leur disposition, et tout le matériel mobilier relatif, de quelque nature que ce soit, en devient leur propriété » leur a permis d'avoir accès à la majeure partie des biens immobiliers de l'Etat qu'elles utilisent encore à l'heure actuelle. Ce texte reste encore aujourd'hui en vigueur, assorti de modifications ultérieures.

En effet, ce texte a plusieurs fois été révisé ou complété notamment par la loi du 7 janvier 1958, n° 4 et, plus récemment, par la loi du 23 décembre 1996, n° 662 : « mesures de rationalisation des finances publiques » puis celle du 27 décembre 1997, n° 449 : « mesures pour la stabilisation des finances publiques » . L'article 1, alinéa 95 de la loi du 23 décembre 1966, n° 662 fixe les modalités d'acquisitions de biens de l'Etat : « Le ministero dell'Università e della Ricerca Scientifica e Technologica 95( * ) promeut (...) les accords avec les institutions locales territoriales pour la destination, à usage perpétuel et gratuit des universités, les dépenses de manutention ordinaire et extraordinaire étant à leur charge, de biens immobiliers appartenant au patrimoine de ces mêmes institutions. »

Enfin la loi du 2 avril 2001, n° 136 : « dispositions en matière de développement, valorisation et utilisation du patrimoine immobilier de l'Etat, ainsi que d'autres dispositions en matière d'immobilier public » précise dans ses articles 1 et 2 certains aspects concrets concernant les concessions immobilières de l'Etat aux universités publiques.

Concernant les bâtiments destinés au logement des étudiants boursiers et les restaurants universitaires, ceux-ci sont gérés par un organisme spécial, indépendant de l'université. Ces organismes dépendent de la région. Ce sont les A.DI.SU ( Aziende regionali per il diritto allo studio universitario 96( * ) ). Leur action est déterminée par une loi régionale.

Par exemple, pour la région de Rome, le Lazio, la loi régionale du 31 octobre 1994, n° 51, fixe leurs statuts.

1. Reviennent à la région, l'orientation, la programmation et la coordination des interventions déterminées par l'article 1, pour leur réalisation, en conformité avec l'article 25 de la loi n° 390 de 1991, la Région adopte un des modes suivants :

a) elle institue des organismes régionaux pour le droit aux études universitaires,

b) elle stipule une convention appropriée avec les universités.


L'alinéa 1 de l'article 2 stipule que ces organismes, à la différence des universités, sont dépendants des régions mais qu'ils peuvent également utiliser des bâtiments appartenant à l'université locale, pour le logement des étudiants, comme c'est le cas à l'université de Bologne, par exemple. Ces logements sont alors cédés à ces organismes pour cet usage précis, comme mentionné ci-dessus.

Le patrimoine immobilier de ces organismes est également déterminé par l'article 25 de la loi de 1994 :

1. L'A.DI.SU dispose des moyens patrimoniaux et financiers suivants :

a) biens mobiliers et immobiliers acquis à titre de propriété ou pour usage,

b) financement annuel de la Région, dans la mesure déterminée par la loi d'approbation du bilan régional, sur les bases des critères stabilisés du plan triennal et annuel décrits aux articles 28 et 29,

c) contributions de sujets privés ou publics,

d) financements régionaux pour les dépenses d'investissement,

e) rente et intérêts de leurs propres biens patrimoniaux, ainsi que de services fournis.

2. Font partie du patrimoine de l'ADISU compétent les biens mobiliers et immobiliers propriété de la Région déjà destinés à l'application du droit aux études universitaires (...)

3. Pour une meilleure réalisation des interventions citées au titre II, la commission régionale peut prêter aux ADISU d'autres biens immobiliers.


Les universités disposent également de bâtiments qui leur sont propres. Ces édifices sont légués, achetés ou construits. L'université, grâce à la loi d'autonomie mentionnée précédemment, dispose d'une totale liberté, selon les termes juridiques et financiers inscrits dans cette loi, quant à la gestion et à sa politique immobilière. Elle ne peut pas contracter en vue d'un achat immobilier un partenariat avec une entreprise privée. Les fonds sont entièrement en provenance de l'Etat. De plus, les activités regroupées à l'intérieur de ces bâtiments doivent être, comme pour les biens immobiliers concédées par l'Etat, à but institutionnel.

Enfin, les universités disposent, pour très une faible part, de bâtiments en location. Ces derniers sont souvent des recours « d'urgence » pour le logement d'étudiants.

2. La gestion du patrimoine immobilier

L'université est libre de gérer son patrimoine immobilier comme elle le souhaite. Quelques points importants sont cependant à souligner.

Les fonds utilisés pour la construction, l'achat, la restauration ou le fonctionnement des biens immobiliers des universités proviennent intégralement de l'Etat.

Le MIUR verse à chaque université des fonds pour la gestion de son patrimoine, selon un plan de programmation de plusieurs années élaboré en comité de direction de l'université.

La politique générale des universités, en matière de biens immobiliers, est de regrouper ses centres de recherche, d'éducation et d'administration tout en maintenant son patrimoine actuel. Elles essayent, également, dans la mesure du possible d'être propriétaire de tous leurs bâtiments, en diminuant au maximum les nécessités de locations.

Au sein des universités, le patrimoine immobilier est, le plus souvent, géré par deux services : le service du patrimoine et le service technique, le premier ayant un rôle administratif et le second un rôle technique et de manutention.

3. Commentaires sur l'étude

Les universités contactées ont le plus souvent participé avec intérêt à l'étude mais certaines données, comme le montant du patrimoine immobilier ou le budget alloué aux services de gestion du patrimoine, n'ont pas pu être fournies. Il semble, d'une part, que pour certaines universités, la valeur réelle de leur patrimoine soit difficile à estimer, compte tenu des édifices artistiques et historiques dont ils sont propriétaires. D'autre part, les fonds alloués à la gestion du patrimoine provenant de plusieurs « enveloppes » du MIUR et étant ensuite redistribués au sein de l'université à plusieurs services, il est difficile d'avoir une estimation correcte de ce budget. Il faudrait également ajouter à cela, les fonds exceptionnels plus importants octroyés pour la construction ou l'achat pris en compte dans une programmation à plus ou moins long terme et qu'il est difficile d'intégrer dans un budget annuel.

Enfin, il est à noter une différence importante entre université « jeune » et « ancienne » concernant la part des biens concédés par l'Etat et la part des biens propres. Les universités les plus anciennes ont, en majorité, une importante part de leur patrimoine immobilier provenant des concessions de l'Etat. Les universités plus jeunes, en revanche, ont un patrimoine immobilier propre plus important que les biens concédés par l'Etat.

Le cas particulier de l'université de Bologne (voir « quelques chiffres ») résulte de la politique d'acquisition immobilière menée par le précédent recteur durant 15 ans.

Quelques chiffres

Les universités qui ont servi de base à ce rapport sont les suivantes :

Université de Turin

Date de création : 1404

Nombre d'étudiants : 56 293 (2000/2001)

Université de Milan

Date de création : 1923

Nombre d'étudiants : 60 315 (2001/2002)

Personnel : 2 644 + 2 052 = 4 696 (2001/2002)

Université de Bologne

Date de création : 1088

Nombre d'étudiants : 95 693 (2000/2001)

Personnel : 3 053 + 2 785 = 5 838 (2001/2002)

Patrimoine privé (en millions d'euros) : 195 (60 %)

Patrimoine de l'Etat (en millions d'euros) : 124 (40 %)

Budget approximatif 2001 pour la gestion du patrimoine (en millions d'euros) : 11,3

Université de Rome I « La Sapienza »

Date de création : 1303

Nombre d'étudiants : 139 000 (2001/2002),

Personnel : 4 900 + 6 000 = 96 141 (2000/2002)

Patrimoine privé : 30 % du patrimoine immobilier total (dont la moitié en location)

Patrimoine de l'Etat : 70 % du patrimoine immobilier total

Université de Naples « Federico II »

Date de création : 1224

Nombre d'étudiants : 96 141 (2000/2001)

Patrimoine privé : 20 % du patrimoine immobilier total

Patrimoine de l'Etat : 80 % du patrimoine immobilier total Patrimoine total

Université de Palerme

Date de création : 1779

Nombre d'étudiants : 58 304 (2000/2001)

*

* *

Après plus d'un an d'investigations ayant consisté en une vingtaine d'auditions, à l'envoi de questionnaires écrits dans les académies, à un déplacement en formation plénière sur le campus de Jussieu -actuellement en cours de désamiantage et de réhabilitation-, la mission d'information de la commission des affaires culturelles du Sénat chargée d'étudier le patrimoine immobilier universitaire a effectué le constat suivant :

- ce patrimoine est aujourd'hui considérable, mal utilisé et fortement dégradé ;

- la politique immobilière universitaire est désormais largement contractualisée et témoigne d'un recul de l'Etat au profit des collectivités locales et des universités ;

- cette politique suppose un nécessaire maintien d'une cohérence générale afin d'éviter une dilution excessive de la carte universitaire.

Le rapport de la mission évoque également la situation spécifique du bâti universitaire francilien, et surtout parisien. La mission s'est notamment interrogée sur la légitimité des deux principales opérations parisiennes : le déménagement de Paris VII sur la Zac Paris Rive gauche et la rénovation controversée et coûteuse du campus de Jussieu, qui devrait être réservée à la seule université de Paris VI.

Le rapport de la mission comporte 25 propositions ordonnées autour de six priorités.

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