TROISIÈME PARTIE
-
HUMANISME ET RESPONSABILITÉ :
LES DEUX PILIERS D'UNE NOUVELLE POLITIQUE
Les deux
premières parties du présent rapport viennent de tirer le signal
d'alarme :
la France se drogue !
Nos enfants sont de plus en plus nombreux à consommer de plus en plus
jeunes des produits de plus en plus dangereux. Certains nous disent que cette
banalisation correspond à un phénomène de
société irréversible. Il ne servirait à rien de
lutter et il faudrait se résigner à accompagner cette
évolution. Pourtant, nous ne pouvons pas croire à la
fatalité de la drogue.
Bien sûr, la toxicomanie reflète le malaise d'une
société qui ne va pas bien. Mais ce phénomène a
été exploité par une idéologie permissive qui a
trop inspiré une politique molle et des pratiques ou des discours
complaisants à l'égard de la drogue. Les responsables politiques
ont tendance à baisser les bras parce qu'ils ne mesurent pas la
gravité des enjeux mais aussi parce qu'ils finissent par croire ceux qui
leur affirment qu'il n'y a rien à faire. Cette démission est
inacceptable. Nous avons le devoir collectif de
garantir à nos
enfants le droit de vivre libres dans une société sans
drogue
. Alors, que pouvons nous faire ?
Il faut sans doute commencer par essayer de comprendre les causes du
succès de tous les produits psychoactifs, licites ou illicites. C'est
une condition nécessaire pour éviter les solutions simplistes qui
ne peuvent que mener à l'échec. En revanche, des idées
simples pour aborder un problème complexe peuvent être les
idées fortes garantes du succès. D'abord, en refusant
d'être utopiste ou fataliste, on peut se fixer un objectif
réaliste :
contenir le fléau puis tenter de le faire
refluer
. Ensuite, il faut adopter une stratégie anti-drogue qui
recueille le consensus de la nation. Nous pensons que c'est dans une
inspiration humaniste
, servie par une volonté politique sans
faille, que nous pourrons trouver les solutions acceptables par tous.
La dangerosité de toutes les drogues est avérée. Il
n'existe pas de drogues « douces », même si
diaboliser certaines d'entre elles serait contre-productif.
L'interdit
d'usage doit donc être réaffirmé
avec force dans des
conditions telles qu'il soit compris, accepté et respecté. Il
faut l'expliquer pour redonner du sens à la loi. C'est donc, en premier
lieu, un changement d'atmosphère et de philosophie qu'il faut instaurer
par un message clair. Cela correspond d'ailleurs au souhait exprimé par
75 % des Français.
En second lieu, la guerre à la drogue doit agir sur l'offre et sur la
demande.
La répression doit frapper durement toutes les formes de
trafic
et tous les profiteurs d'un système jusqu'ici trop laxiste.
En particulier, les « petits » dealers doivent être
poursuivis sans relâche, notamment, dans le périmètre des
écoles, sans pouvoir s'abriter derrière une indulgence
irresponsable pour le « simple » usager.
La demande de consommation de ces produits dangereux ne pourra diminuer que si
l'axe central de la nouvelle politique est
une prévention
réelle, une « prévention totale »
, faite
d'éducation à la santé, d'information et de formation,
de prise en charge psychologique, sanitaire et sociale, de réinsertion
et, bien entendu, de sanction.
L'objectif de la prévention doit être d'empêcher de
nouvelles personnes de tomber dans la drogue, et d'aider à en sortir
celles qui sont sous sa dépendance. Plus elle sera personnalisée,
plus elle aura de chances de succès. Elle aura aussi le souci de ne pas
stigmatiser l'usager de drogue qui n'est pas un marginal ou un
pestiféré, mais une personne en danger. La société
a un devoir de solidarité avec tous ses enfants, surtout les plus
vulnérables, mais sa compréhension doit être sans
faiblesse. La compassion n'est pas la complaisance. L'humanisme ne saurait
oublier la responsabilité individuelle ni les devoirs envers la
collectivité. Aussi, la personnalisation de la réponse de
prévention devra-t-elle trouver sa contrepartie dans le respect absolu
des obligations et sanctions prévues par la loi pour l'usager de drogue
interpellé.
La sanction
dès que l'interdit d'usage est transgressé est
un élément clef de la prévention. Il faut qu'elle soit
systématique, même si elle doit être proportionnée
à la faute. Elle sera aussi suffisamment diversifiée pour offrir
au juge une palette complète de réponses à la fois
judiciaires et socio-sanitaires susceptibles de s'adapter à chaque
situation.
La question de la drogue concerne la société toute
entière. Les parents, l'école, les associations, les institutions
et tous les citoyens ont un rôle à jouer. C'est un enjeu de
santé publique, de sécurité et d'évolution de la
nature même de notre société. Réagir est un devoir,
avant un désastre annoncé. Il n'est pas trop tard, mais il n'est
que temps.