B. L'ABSENCE DE RÉFORME FISCALE D'ENVERGURE
En revanche, aucune réforme fiscale d'envergure n'a été réalisée dans les années 1990.
1. La fiscalité locale des personnes physiques
Tel est
tout d'abord le cas en matière de fiscalité locale des personnes
physiques.
Comme le rappelle l'OFCE, «
le seul bouleversement d'envergure --
l'introduction, au Royaume-Uni, de la Poll tax, ou Community charge,
impôt forfaitaire local sur toutes les personnes physiques majeures, par
le gouvernement Thatcher en 1990 --, s'était
révélé suffisamment désastreux sur le plan
politique pour calmer les ardeurs des plus fervents
réformateurs
».
On peut également rappeler qu'en France une loi votée en 1990 par
l'Assemblée nationale se proposait de remplacer la part
départementale de la taxe d'habitation par une taxe
départementale sur le revenu des personnes sur le mode des centimes
additionnels à l'impôt sur le revenu des personnes physiques.
Plusieurs réformes significatives méritent cependant d'être
évoquées :
- en France, l'allégement des impôts locaux sur les ménages
(1999-2001), avec notamment la réduction de la taxe d'habitation ;
- en Espagne, la cession aux communautés autonomes (qui,
désormais, assurent le financement des dépenses de santé)
d'une part plus importante d'impôts nationaux (impôt sur le revenu,
TVA) et l'instauration pour elles de la possibilité de créer
leurs propres taxes, et par conséquent d'en fixer l'assiette et le taux
(cf. encadré ci-après).
La réforme de la fiscalité locale en Espagne, selon
Fitch
Ratings
« Les évolutions en matière de fiscalité locale
qui sont intervenues en Espagne ont été marquées par 4
étapes principales.
1982-1987 : Les communautés autonomes participent aux recettes de l'Etat
(
Participaciones en Ingressos del Estado
, PIE) en fonction du coût
effectif des compétences décentralisées.
1987-1995 : La PIE est révisée et évolue vers une
répartition selon des critères objectifs (démographie,
effort fiscal régional). Par ailleurs, en 1992, les communautés
obtiennent une part de 15% de l'IRPP collecté sur leur territoire.
1996-2001 : A partir de 1997 et progressivement jusqu'à 2001, les
régions reçoivent une tranche supplémentaire de 15% de
l'IRPP (avec autonomie sur le taux national de +/- 20%). L'impôt sur les
jeux leur est par ailleurs confié.
A partir de 2002 : Le cadre réglementaire applicable aux
communautés autonomes est régulièrement
renégocié et a été renouvelé le 27 juillet
2001 (modifications applicables en janvier 2002). Les nouveaux accords se
traduisent globalement par un accroissement de l'autonomie fiscale des
communautés en prévoyant :
- une hausse de la responsabilité fiscale régionale : les
recettes des collectivités locales vont devenir plus dépendantes
des taxes locales. Les régions recevront désormais :
- 33% du produit de l'impôt sur le revenu.
- 35% des recettes de TVA.
- 40% des taxes sur les carburants, le tabac et l'alcool ainsi que la
totalité de l'impôt sur le patrimoine et de la taxe sur les
immatriculations automobiles.
Les communautés autonomes disposent par ailleurs de la faculté de
créer leurs propres taxes et par conséquent d'en
déterminer l'assiette et d'en fixer le taux. A titre d'exemple,
l'Estrémadure a créé un impôt sur les
dépôts bancaires. La Catalogne a créé un impôt
sur les grandes surfaces et les Baléares envisagent la création
d'une taxe de séjour.
La modification de la structure des recettes de la plupart des régions
espagnoles : en juillet 2001, les impôts représentent environ 29%
des recettes courantes des régions espagnoles et cette part doit
croître à hauteur de 50% à partir de 2002.
Les régions qui sont le plus susceptibles de bénéficier de
cette autonomie fiscale accrue sont celles qui disposent de bases fiscales
dynamiques et importantes.
Selon Fitch, le système actuel présente les faiblesses suivantes :
- L'autonomie sur les taux des impôts d'état est faible bien que
les communautés puissent jouer sur les abattements et les
dégrèvements (ex: enfants à charge).
- La volatilité des impôts de flux pèsera sur les
communautés. En effet, l'IRPP est fortement lié au cycle
économique et la part des impôts indirects (sans autonomie)
augmente.
- Le remplacement des anciennes dotations par la quote-part d'impôts
d'état est calculé sur la seule base de 1999. On a mesuré
le produit (pro forma) des 33% de l'IRPP et des 35% de TVA sur l'assiette de
1999; soit X ce produit. On a compensé la différence entre X et
les dotations supprimées (base 1999) par une dotation nouvelle. Le
risque est que si 1999 était une année faste pour la
fiscalité, on minore la dotation de remplacement versée
dorénavant. Enfin, la collecte des impôts d'état reste
centralisée. »
Source : Nicolas Painvin (directeur du département Finances publiques
de l'Agence Fitch Rating)s, in Jean Arthuis, Fiscalité locale : quelles
pistes pour la réforme ?, rapport d'information du Sénat
n°289 (2002-2003)