II. LA FRANCE DOIT DONC SOUTENIR LEUR ADHÉSION ET Y DÉVELOPPER SA PRÉSENCE
Outre des considérations de solidarité politique, la France a tout intérêt, pour les raisons précédemment évoquées, à soutenir l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l'Union européenne. Cet appui à une adhésion simultanée doit donc être clairement réitéré au cours des mois nous séparant de l'échéance de 2007.
Cependant, afin que la France, mais aussi la Roumanie et la Bulgarie, puissent tirer profit de cette adhésion, il convient que notre pays y renforce notoirement sa présence et y favorise davantage encore l'installation de nos compatriotes .
A. UN SOUTIEN EXPLICITE À UNE DOUBLE ADHÉSION SIMULTANÉE
1. Notre pays s'est déjà largement engagé en ce sens
Le soutien français à l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l'Union européenne n'a rien d'une position nouvelle ou prise sur le tard.
Les liens politiques entre la France et la Roumanie sont anciens. Ils prennent racine dans le rôle joué par Napoléon III en faveur de la création du jeune Etat roumain au XIXème siècle, puis dans l'aide apportée par la France à l'édification et au développement de ce nouvel Etat. La fraternité d'armes née durant la Première Guerre mondiale s'est maintenue sous le régime communiste, à travers notamment une visite du Président de Gaulle en 1968. La chute du bloc communiste a ouvert plus largement la voie aux « retrouvailles » des deux peuples.
Plus récemment, et bien qu'ayant pu paraître un moment tendues en raison de la divergence d'appréciation entre Paris et Bucarest sur la question du conflit irakien et de la position à adopter vis-à-vis des Etats-Unis, le dialogue politique fourni entre la France et la Roumanie témoigne de la bonne qualité des relations entre les deux pays. Les visites ministérielles ont en effet été nombreuses depuis les visites d'Etat des Présidents respectifs en 1997 et 1999. A titre d'exemple, en 2003, se sont succédés côté roumain trois déplacements en France du Premier ministre, M. Adrian Nastase, et une visite officielle du Président, M. Ion Iliescu. Lors de cette dernière rencontre, qui s'est déroulée en novembre 2003, M. Jacques Chirac a « confirmé notre volonté de soutenir l'ambition 2004-2005 qui a été posée comme souhait ou condition par la Roumanie », ajoutant que la France l'aiderait « dans toute la mesure de ses moyens pour que ces objectifs soient atteints ».
Dans le même temps se rendaient en Roumanie le ministre délégué aux affaires européennes, Mme Noëlle Lenoir, le ministre du commerce extérieur, M. François Loos, et le ministre de l'agriculture, M. Hervé Gaymard, tandis que le ministre des affaires étrangères roumain, Mircea Geoana, était accueilli par deux fois en France. Ces visites croisées ont été l'occasion de réaffirmer le soutien de la France, tant à l'adhésion de la Roumanie en 2007 qu'à la signature du traité d'adhésion en 2005 au plus tard.
S'agissant de la Bulgarie, le soutien de la France s'est d'abord traduit par une coopération administrative s'inscrivant dans la perspective de l'adhésion à l'Union européenne. Notre pays a ainsi déployé des moyens pour relever la capacité administrative de la Bulgarie, condition indispensable pour intégrer l'acquis communautaire. La France a également aidé la Bulgarie dans de nombreux secteurs tels que l'agriculture, la justice et les affaires intérieures, les affaires sociales, la réforme de l'administration et de la fonction publique. Par ailleurs, notre pays a envoyé auprès du Premier Ministre bulgare un conseiller français chargé des questions européennes et de la coordination interministérielle.
Sur un plan plus politique, et malgré de brèves tensions dans nos relations bilatérales suite aux positions pro-Etats-Unis prises par la Bulgarie dans la crise irakienne, les contacts entre nos deux pays se sont nettement développés depuis 2001 : visites à Sofia du ministre de la défense, M. Alain Richard (novembre 2001), du ministre délégué aux affaires européennes, M. Pierre Moscovici (décembre 2001), du ministre de l'intérieur, M. Daniel Vaillant (mars 2002) et de la ministre déléguée aux affaires européennes, Mme Noëlle Lenoir (novembre 2002). Inversement, se sont rendus à Paris le ministre bulgare des affaires étrangères, M. Solomon Passy (octobre 2002), et le Premier Ministre, Siméon de Saxe-Cobourg-Gotha (novembre 2002).
Si toutes ces rencontres ont été l'occasion d'affirmer le soutien de la France au processus d'adhésion de la Bulgarie, celui-ci a été rappelé avec insistance en 2003 lors de la visite à Paris du ministre de l'intérieur, M. Georgi Petkanov (janvier), et à Sofia de son homologue français (février), et enfin lors de la visite à Paris du Président de la République, M. Gueorgui Parvanov (novembre) et à Sofia de la ministre déléguée aux affaires européennes, Mme Lenoir (décembre).
2. L'objectif 2007 est politiquement viable et économiquement réaliste
Le soutien de la France à l'adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie en 2007 ne constitue pas uniquement une pétition de principe qui serait dépourvue de tout lien avec les capacités réelles de ces pays à intégrer l'Union européenne. Il s'inscrit au contraire dans une démarche tenant compte des réalités économiques propres à ces pays et des déclarations politiques émanant des personnes les mieux qualifiées pour en juger .
Ce sont en premier lieu les chefs d'Etat et de gouvernement des Quinze qui ont adressé un signal politique fort à la Roumanie et à la Bulgarie dès le Conseil européen de Copenhague en décembre 2002, en se donnant pour objectif l'adhésion en 2007. Ce signal a été réaffirmé lors du Conseil européen de Thessalonique en juin 2003, où ont été également soutenus les efforts des deux pays pour atteindre l'objectif de conclusion des négociations dans le courant de l'année 2004. Tout récemment encore, ce message a été répété clairement lors du Conseil européen de Bruxelles en juin 2004.
Aujourd'hui, et au regard de l'avancement des négociations et des travaux d'adhésion des deux pays, le respect du calendrier fixé semble largement soutenable. Les responsables politiques et administratifs, tant nationaux que communautaires, rencontrés par la délégation ont dans l'ensemble très largement confirmé que d'énormes progrès avaient été consentis par les deux pays sur la voie de l'adhésion et que les différents chapitres restant à clôturer le seraient en temps voulu si les efforts continuaient d'être aussi soutenus, ce à quoi se sont d'ailleurs très fermement engagés les dirigeants roumains et bulgares.
Les populations de ces pays, qui ont consenti de très importants sacrifices en vue de l'adhésion, attendent impatiemment de se voir confirmer le calendrier et les orientations qui ont été fixés depuis plusieurs années. Il s'agit donc aujourd'hui de faire en sorte que leur « europhilie », qui ne s'est pas démentie depuis, malgré les difficultés économiques et sociales auxquelles elles ont été confrontées, ne soit pas déçue .
En outre, repousser l'horizon de l'adhésion à une date ultérieure à 2007 laisserait à penser, comme l'ont d'ailleurs fait remarquer les différentes personnalités roumaines et bulgares rencontrées, que leur pays serait relégué dans un autre groupe de pays candidats incluant, notamment, certains des pays de l'ex-Yougoslavie, sans que ne soient récompensés les efforts fournis depuis plusieurs années pour être intégrés aussi rapidement que possible après l'entrée récente des dix nouveaux Etats adhérents.
Enfin, la délégation se doit d'évoquer les excellents travaux déjà réalisés par plusieurs de nos collègues députés et sénateurs 3 ( * ) qui, tous sans exception, concluent à la capacité de la Roumanie et de la Bulgarie de remplir très rapidement les conditions requises à l'adhésion et appellent la France à continuer de soutenir clairement l'ambition des dirigeants de ces deux pays d'achever les négociations en 2004, de signer le traité d'adhésion en 2005 et de rejoindre l'Union européenne en 2007.
3. Roumanie et Bulgarie doivent adhérer en même temps
La France doit continuer, non seulement à soutenir la double adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l'Union européenne, mais également une double adhésion simultanée, au 1 er janvier 2007, avec si possible un calendrier identique pour les deux pays (clôture des négociations en 2004 et signature du traité d'adhésion en 2005). Il ne s'agit évidemment pas d'un simple souci de symétrie, mais d'une volonté de satisfaire équitablement des pays qui ont suivi un processus d'adhésion parallèle et ont consenti des sacrifices proportionnellement identiques pour satisfaire aux exigences communautaires dans le délai leur étant imparti .
La délégation est bien consciente du fait que Roumanie et Bulgarie ne présentent pas aujourd'hui le même degré d'avancement dans les négociations en vue de l'adhésion, puisque six des trente chapitres restent à clore pour la première tandis que la seconde a achevé provisoirement ses négociations techniques. Mais il faut garder à l'esprit que la Roumanie est partie de beaucoup plus loin que les autres pays candidats et qu'elle avait donc un retard bien plus important à rattraper. De plus, l'opinion publique roumaine a besoin de messages d'encouragement pour comprendre que les efforts demandés par le Gouvernement et les institutions communautaires ne sont pas vains.
Les dirigeants roumains rencontrés par la délégation ont souligné toute l'importance qu'ils attachaient à une double adhésion simultanée. Les responsables bulgares s'y sont également montrés très favorables, et se sont même dits prêts à apporter à la Roumanie toute l'assistance technique dont elle aurait besoin pour être en mesure d'adhérer début 2007. Ils ont toutefois précisé refuser, fort légitimement d'ailleurs, qu'un éventuel retard de la Roumanie ne pénalise leur pays en reportant pour les deux la date d'adhésion après 2007.
La délégation a bien noté que
l'évolution des négociations d'adhésion entre l'Union
européenne et les deux pays était guidée par le principe
-parfaitement équitable- selon lequel chacun d'entre eux serait
traité selon ses mérites propres. Elle a également retenu
que la Commission européenne, dont elle a rencontré l'un des
représentants pour la Bulgarie, était favorable au principe d'une
double adhésion simultanée. Aussi tient-elle à insister
sur l'intérêt politique et économique qu'il y aurait, tant
pour les deux pays concernés que pour les pays déjà
adhérents, à ce que la Roumanie et la Bulgarie puissent toutes
deux rejoindre en même temps les 25 membres actuels de l'Union
européenne.
* 3 Rapport d'information de M. François Loncle pour la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur le processus d'adhésion à l'Union européenne de la Bulgarie, déposé le 22 novembre 2001 (n° 3417) ; Rapport d'information de M. André Ferrand pour la Délégation pour l'Union européenne du Sénat sur la Roumanie et l'Union européenne, déposé le 4 novembre 2003 (n° 52) ; Rapport d'information de M. Jérôme Lambert pour la Délégation de l'Assemblée nationale pour l'Union européenne sur l'adhésion de la Bulgarie à l'Union européenne, déposé le 3 mars 2004 (n° 1479) et Rapport de M. Jacques Myard pour la même délégation sur le processus d'adhésion de la Roumanie à l'Union européenne, déposé le même jour (n° 1480).