N° 206

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 17 février 2005

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 février 2005

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation pour l'Union européenne (1), sur la proposition de directive relative aux services dans le marché intérieur (E 2520),

Par MM. Denis BADRÉ, Robert BRET,

Mme Marie-Thérèse HERMANGE et M. Serge LAGAUCHE,

Sénateurs.

(1) Cette délégation est composée de : M. Hubert Haenel, président ; MM. Denis Badré, Jean Bizet, Jacques Blanc, Jean François-Poncet, Bernard Frimat, Simon Sutour, vice-présidents ; MM. Robert Bret, Aymeri de Montesquiou, secrétaires ; MM.  Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, Yannick Bodin, Didier Boulaud, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Louis de Broissia, Gérard César, Christian Cointat, Robert Del Picchia, Marcel Deneux, André Dulait, Pierre Fauchon, André Ferrand, Yann Gaillard, Paul Girod, Mme Marie-Thérèse Hermange, MM. Serge Lagauche, Gérard Le Cam, Louis Le Pensec, Mmes Colette Melot, Monique Papon, M. Yves Pozzo di Borgo, Mme Catherine Tasca, MM. Alex Turk, Serge Vinçon.

Union européenne.

INTRODUCTION

La proposition de directive sur les services dans le marché intérieur a été adoptée par la Commission européenne le 13 janvier 2004. Elle a alors été transmise au Parlement européen et au Conseil. Le Parlement européen devrait l'examiner en séance plénière en juin prochain. Ce texte s'inscrit dans le processus de réformes économiques lancé par le Conseil européen de Lisbonne en 2000 pour faire de l'Union européenne l'économie la plus compétitive et la plus dynamique du monde à l'horizon 2010.

Si le marché intérieur des marchandises est réalisé, la Commission européenne fait le constat d'un retard très important dans la mise en place d'un véritable marché intérieur des services, qui représentent pourtant 53,6 % du PIB de l'Union (hors administrations publiques et services sociaux) et 70 % des emplois, mais seulement 20 % des échanges intra-communautaires. La libre circulation des services se heurte en effet à d'importants obstacles, tenant à la diversité des législations et réglementations nationales en matière de conditions d'exercice de certaines activités, de protection des consommateurs, ou de réglementation des ventes. Ces difficultés ont été détaillées dans un rapport de la Commission rendu public le 30 juillet 2002.

La Commission explique que cette situation fait obstacle à l'application de l'article 14.2 du Traité instituant la Communautés européenne, selon lequel le marché intérieur comporte un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux est assurée. Par ailleurs, l'article 49 du même traité dispose que les restrictions à la libre prestation des services à l'intérieur de la Communauté sont interdites à l'égard des ressortissants des États membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire de la prestation.

I. PRINCIPALES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE DIRECTIVE SUR LES SERVICES DANS LE MARCHÉ INTÉRIEUR

La proposition de directive touche à deux aspects distincts (article l er ) :

- la liberté d'établissement des prestataires de services ;

- la libre circulation des services.

Les domaines suivants sont exclus du champ de la directive : services financiers, communications électroniques, transports. La proposition de directive ne porte pas sur le domaine fiscal, sauf exceptions (article 2).

Par ailleurs, dans son exposé des motifs, la Commission européenne indique que la proposition de directive ne s'applique pas aux activités relevant de l'article 45 du Traité instituant la Communauté européenne. Celui-ci dispose que les activités participant dans un État membre, même à titre occasionnel, à l'exercice de l'autorité publique, sont exceptées de l'application des dispositions du Traité relatives à la liberté d'établissement.

La notion de service est définie comme toute activité économique non salariée visée à l'article 50 du Traité instituant la Communauté européenne et consistant à fournir une prestation qui fait l'objet d'une contrepartie économique (article 4).

Toutes les activités non économiques telles que définies par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) sont donc exclues, tels les services d'intérêt général (SIG) et notamment les services fournis par l'État dans le cadre de sa mission de service public (éducation, justice). A contrario, tous les services économiques tels que définis par la CJCE (1 ( * )) , visant aussi bien les particuliers que les entreprises, sont concernés, y compris les services d'intérêt économique général (SIEG) comme le secteur de la santé.

Par ailleurs, il est précisé que le projet de directive se cumule avec les directives sectorielles (article 3).

A. LE LIBRE ÉTABLISSEMENT DES PRESTATAIRES DE SERVICES

Le chapitre II de la proposition de directive concerne le libre établissement des prestataires .

1. Une simplification allant jusqu'à la suppression des régimes d'autorisations

La Commission propose une simplification des procédures (article 5), un guichet unique (article 6) un droit à l'information des prestataires (article 7), et la mise en place de procédures par voie électronique (article 8).

La Commission souhaite par ailleurs supprimer ou limiter les régimes d'autorisations imposées par les États-membres pour l'exercice d'une prestation de services. Un régime ne pourra exister qu'à la condition d'être non discriminatoire, justifié par une raison impérieuse d'intérêt général, et s'il est démontré qu'une mesure moins contraignante comme un contrôle a posteriori ne pourrait pas répondre à l'objectif poursuivi (article 9). L'autorisation donnée par un État ne devra pas faire double emploi avec les exigences des autres États membres et devra valoir pour tout le territoire national, pour une durée illimitée sauf raison impérieuse d'intérêt général (articles 10 et 11). Les charges imposées aux prestataires devront être proportionnées au coût des procédures et l'absence de réponse dans un délai raisonnable vaudra octroi de l'autorisation (article 13).

Le projet de directive mentionne plus précisément les exigences interdites (article 14). Il s'agit notamment des exigences fondées sur la nationalité ou le siège des sociétés, l'obligation d'avoir son établissement principal sur le territoire de l'État membre, l'interdiction d'être inscrit dans les registres ou ordres professionnels de plusieurs États membres, l'obligation de constituer ou de participer à une garantie financière ou de souscrire une assurance auprès d'un organisme établi sur le territoire .

D'autres exigences doivent être évaluées (article 15). Il s'agit notamment des limites quantitatives ou territoriales (ex : distance géographique minimum entre prestataires), des exigences relatives à la forme juridique des personnes morales, à la détention du capital, aux tarifs obligatoires minimum ou maximum, aux ventes à perte et soldes. Dans ce cas, le respect des trois principes de non-discrimination, de nécessité (sauf raison impérieuse d'intérêt général), et de proportionnalité devra être vérifié.

2. Une obligation de notification à la Commission européenne

A partir de l'entrée en vigueur de la directive, les États membres ne pourront introduire de nouvelles exigences que si elles sont conformes aux trois critères mentionnés et si elles découlent de circonstances nouvelles. Les États membres seront alors tenus de notifier à la Commission, « à l'état de projet », les nouvelles dispositions législatives, réglementaires et administratives , sans que cela ne les empêche cependant de les adopter. Dans les trois mois de la notification, la Commission pourra adopter une décision pour demander à l'État membre concerné de s'abstenir d'adopter ou de supprimer les dispositions en cause.

* (1) La Commission européenne donne comme exemple :

- pour les services aux entreprises : conseil en gestion, certification et essais, publicité, recrutement ;

- pour les services aux particuliers et aux entreprises : conseils légaux ou fiscaux, services immobiliers, construction, distribution, location de voitures, agences de voyage, sécurité ;

- pour les services aux particuliers : services de santé, service à domicile comme soins aux personnes âgées, tourisme, services audiovisuels, loisirs, centres sportifs.

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