4. La réduction du nombre des documents valant titre d'identité

Une piste pour améliorer la protection de l'identité de nos concitoyens consisterait à ne retenir comme documents valant titre d'identité que ceux dont les conditions de délivrance sont les plus sûres : la carte d'identité et le passeport. La question de la fusion de ces deux documents mérite également d'être étudiée même si elle soulève des difficultés juridiques et pratiques.

a) Retenir la carte d'identité et le passeport comme seuls documents valant titre d'identité pour l'ensemble des relations avec l'administration

La carte nationale d'identité et le passeport devraient être retenus comme les seuls documents valant justificatif d'identité pour l'ensemble des relations avec l'administration tant que d'autres documents, notamment le permis de conduire, n'offrent pas un niveau de sécurité équivalent. Ceci ne remettrait pas en cause la règle, posée notamment par l'article 78-2 du code de procédure pénale, selon laquelle il est possible de justifier de son identité par tout moyen à l'occasion d'un contrôle d'identité. Dans cette hypothèse, le passeport devrait acquérir la même valeur probante que la carte nationale d'identité.

Les habitudes de nos concitoyens ne s'en trouveraient guère bouleversées . La présentation d'une carte nationale d'identité est en effet exigée pour l'accomplissement de nombreuses démarches administratives, ce qui rend de fait sa possession quasiment obligatoire. Ainsi, aux termes du décret n° 2000-1277 du 26 décembre 2000 portant simplification de formalités administratives et suppression de la fiche d'état civil, une photocopie lisible de la carte nationale d'identité en cours de validité vaut justificatif de l'identité, de l'état civil ou de la nationalité française de l'usager dans le cadre des démarches administratives dites courantes. En outre, dans la mesure où environ 5 millions de cartes d'identité et 2,7 millions de passeports sont délivrés chaque année, on peut légitimement penser que la plupart des Français possède l'un au moins de ces deux documents.

Une telle obligation, bien que n'imposant pas la possession d'une carte d'identité ou d'un passeport, pourrait soulever en revanche une question de principe en raison de notre histoire . Ce fut en effet une loi du 27 octobre 1940 qui, dans un but de contrôle de la population, imposa aux personnes âgées de plus de 16 ans d'être titulaires d'une carte d'identité comportant leurs empreintes digitales et leur photographie et de déclarer leurs changements d'adresse. Toutefois, les réticences de la population et les pénuries de papier, de matériel et de personnel entravèrent considérablement la distribution de la carte. Après la Libération, elle fut supprimée et les fichiers détruits.

Pour autant, les dérives du passé, si elles ne doivent pas être oubliées, ne suffisent à justifier le refus de toute réforme, dès lors que des garanties appropriées sont apportées à la protection des libertés individuelles .

Une étude réalisée par le service des Affaires européennes du Sénat en février 2003 montre que la détention de la carte d'identité est obligatoire dans un grand nombre d'Etats européens - l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, les Pays-Bas et le Portugal - sans que cette obligation soit ressentie par leurs citoyens comme une atteinte à leurs droits 43 ( * ) .

b) Etudier la possibilité de fusionner la carte nationale d'identité et le passeport

La question de la fusion de la carte nationale d'identité et du passeport mérite également d'être étudiée même si elle soulève des difficultés juridiques et pratiques .

Ces deux documents constituent en effet à la fois des titres d'identité et, au sein l'Union européenne et de la plupart des Etats membres du Conseil de l'Europe, des documents de voyage. Leur délivrance peut faire l'objet d'une même demande et être soumise à une procédure unifiée.

Leur fusion simplifierait la vie de nos concitoyens et diminuerait leurs coûts de production. Elle s'avère toutefois difficile à réaliser dans la mesure où le passeport est soumis à de nombreuses normes internationales, édictées par l'OACI et l'Union européenne, qui devraient alors s'appliquer à la carte nationale d'identité et en contraindre à la fois le format, le contenu et les usages.

Ainsi, le format actuel de la carte nationale d'identité ne permet pas de recueillir les visas et les tampons imposés par certains Etats pour accéder à leur territoire et en sortir. En application du règlement n° 2252/2004 (CE) du Conseil du 13 décembre 2004, le passeport devra comporter une puce électronique intégrant des données biométriques -la photographie et les empreintes digitales- qui ne pourront être utilisées que pour vérifier l'authenticité du document et l'identité de son titulaire. La désignation des autorités et des organismes habilités à consulter les données sur le support de stockage des documents est en revanche régie par la législation nationale. En cas de fusion, la carte nationale d'identité devrait nécessairement intégrer de telles données et ne pourrait être utilisée à d'autres fins, par exemple d'authentification à distance et de signature électronique.

En l'état actuel du droit, la fusion de la carte nationale d'identité et du passeport reviendrait à supprimer la première au bénéfice du second, donc à retenir comme titre d'identité national un document de voyage soumis à des règles internationales sur lesquelles l'Etat a peu de maîtrise . C'est donc du choix des usages de la carte nationale d'identité que dépend cette piste de réforme.

* 43 Document n° LC-118 - février 2003.

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