ANNEXE N° 3 - ECLAIRAGES SUR QUELQUES DOSSIERS LITIGIEUX

Il a semblé nécessaire à votre rapporteur spécial d'illustrer le propos général du rapport par quelques exemples de dossiers ayant fait l'objet de litiges.

Cinq exemples ont ainsi été retenus, qui visent à montrer différentes facettes des enjeux liés à l'application du droit communautaire de l'environnement :

- le contentieux relatif aux dates de chasse , qui vient d'être classé ;

- le dossier relatif à la protection de certains espaces, dans le cadre du programme Natura 2000 , qui a fait l'objet d'efforts importants de la part de l'administration française au cours des derniers mois, afin de respecter les engagements pris auprès de la Commission européenne ;

- le dossier relatif à la pollution due aux nitrates en Bretagne , qui souligne l'importance de l'application du droit communautaire et la nécessité d'une coopération satisfaisante entre les services des différents ministères ;

- l'enjeu de la mise en oeuvre de la directive relative au traitement des eaux résiduaires urbaines , qui met en évidence l'implication des collectivités territoriales dans ce processus ;

- l'affaire de l' étang de Berre , qui permet de souligner les liens entre droit communautaire et conventions internationales.

I. LES DATES DE CHASSE : UN CONTENTIEUX ENFIN CLASSÉ

Lors de la réunion « Infractions » du 4 avril 2006, la Commission européenne a décidé de classer le dossier des dates de chasse, pour lequel la France avait été condamné par la Cour de justice par un arrêt du 7 décembre 2000 12 ( * ) .

L'objet du litige portait sur l'application d'un article d'une directive très ancienne : l'article 7 de la directive 79/409/CEE du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages.

L'article 7 de la directive 79/409/CEE

«1. En raison de leur niveau de population, de leur distribution géographique et de leur taux de reproductivité dans l'ensemble de la Communauté, les espèces énumérées à l'annexe II peuvent être l'objet d'actes de chasse dans le cadre de la législation nationale. Les Etats membres veillent à ce que la chasse de ces espèces ne compromette pas les efforts de conservation entrepris dans leur aire de distribution.

« 2. Les espèces énumérées à l'annexe II partie 1 peuvent être chassées dans la zone géographique maritime et terrestre d'application de la présente directive.

« 3. Les espèces énumérées à l'annexe II partie 2 peuvent être chassées seulement dans les Etats membres pour lesquels elles sont mentionnées.

« 4. Les Etats membres s'assurent que la pratique de la chasse, y compris le cas échéant la fauconnerie, telle qu'elle découle de l'application des mesures nationales en vigueur, respecte les principes d'une utilisation raisonnée et d'une régulation équilibrée du point de vue écologique des espèces d'oiseaux concernées, et que cette pratique soit compatible, en ce qui concerne la population de ces espèces, notamment des espèces migratrices, avec les dispositions découlant de l'article 2. Ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s'applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance. Lorsqu'il s'agit d'espèces migratrices, ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s'applique la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant leur période de reproduction et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification. Les Etats membres transmettent à la Commission toutes les informations utiles concernant l'application pratique de leur législation de la chasse.»

La Commission avait adressé au gouvernement français, le 13 novembre 1997, une lettre de mise en demeure pour inobservation de la directive précitée, en particulier de son article 7, qu'elle considérait mal transposé.

Cette lettre de mise en demeure fut suivie d'un avis motivé, adressé le 5 août 1998, puis d'une saisine de la Cour de justice le 10 février 1999.

Dans son arrêt rendu le 7 décembre 2000, la Cour déclare que, « en ne transposant pas correctement l'article 7, paragraphe 4, de la directive 79/409/CEE du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages, en ne communiquant pas toutes les mesures de transposition pour l'ensemble de son territoire et en ne mettant pas correctement en oeuvre ladite disposition, la République française a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive ».

Les principaux griefs étaient la non communication des dates de chasse en Alsace-Moselle et l'absence de transposition du principe de protection complète :

- à l'ouverture, car il ne suffit pas de protéger une majorité d'oiseaux d'une espèce donnée à 80 % ou 90 % ou d'éviter un prélèvement significatif d'oiseaux ;

- à la clôture, dans la mesure où, pour 31 espèces, il y avait chevauchement entre les dates de chasse et celle de la migration de retour.

La France a alors engagé un processus de modification de sa législation et de sa réglementation sur la chasse en général, et les dates de chasse en particulier.

Ceci s'est traduit, notamment, par l'inscription dans la loi du principe de protection complète et l'adossement des décisions au niveau national à la synthèse des travaux scientifiques et techniques réalisée par l'observatoire national de la faune sauvage et de ses habitats.

Le stade précontentieux n'a ainsi guère évolué à la suite de l'arrêt du 7 décembre 2000, puisque la Commission n'a adressé qu'une lettre de demande d'informations, soit le stade antérieur à la lettre de mise en demeure.

Ainsi que l'a indiqué le ministère de l'écologie et du développement durable à votre rapporteur spécial, « l'évolution des dates de chasse en France a privilégié une approche centrée sur la lisibilité de dates pertinentes par milieu concerné, par groupes d'espèces proches dans la diversité géographique et climatique française (DPM, zones humides, Alsace-Moselle, reste du territoire). Cette perspective visant à la meilleure protection d'ensemble de groupes d'espèces n'a pas été contestée devant les juridictions nationales ni jugée illégale pour les cinq espèces suivantes : Nette rousse, Fuligule morillon, Râle d'eau, Poule d'eau, Foulque macroule ».

Les échanges avec la Commission européenne se sont poursuivis durant une période relativement longue, jusqu'à aboutir à l'envoi, le 27 mars 2006, de l'arrêté ministériel relatif aux dates de chasse qui a permis à la Commission, le 4 avril 2006, de classer cette affaire.

Neuf années se seront donc écoulées entre la première lettre de la Commission et la clôture du dossier, et plus de cinq ans entre l'arrêt de la Cour et celle-ci...

* 12 Affaire C-38/99.

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