8. Audition de Biomasse Normandie et M. Jean-Léonce Dupont, sénateur du Calvados

M. Dominique Plumail , directeur de Biomasse Normandie , a tout d'abord présenté les missions dévolues à son association.

Créée en 1983 avec l'appui du Conseil Régional de Basse-Normandie et de l'ADEME, Biomasse Normandie regroupe de nombreux acteurs impliqués dans le bois-énergie : départements, administrations régionales, chambres consulaires, organismes professionnels et associations de protection de l'environnement et de consommateurs. Elle a pour mission statutaire, a-t-il déclaré, de conduire des travaux de recherche/développement et mener des actions de conseil et d'appui portant sur la valorisation énergétique et agronomique de la biomasse, les économies d'énergie et l'utilisation des énergies renouvelables, particulièrement en agriculture et en milieu rural.

Depuis 1995, a-t-il ajouté, l'association a en charge l'animation et la coordination du programme « Plan-bois et développement local » piloté par le Conseil régional et l'ADEME de Basse-Normandie, programme dans le cadre duquel Biomasse Normandie assiste les collectivités territoriales qui envisagent de développer un projet bois-énergie et conduit des missions d'étude, de conseil, d'expertise et d'assistance à maîtrise d'ouvrage.

M. Jean-Léonce Dupont, sénateur du Calvados, a quant à lui, souligné les nombreuses vertus de la biomasse : soutien au développement local, réduction de la facture énergétique, valorisation de ressources abondantes inemployées, réduction des émissions polluantes. Il a, par ailleurs, insisté sur la maturité des technologies employées, soulignant qu'au cours des vingt dernières années, les chaudières bois avaient bénéficié de grands progrès technologiques sous l'impulsion notamment de constructeurs d'Europe septentrionale et continentale : systèmes d'alimentation en combustible complètement automatisés, contrôle continu de la combustion, évacuation automatique des cendres, dépoussiérage des fumées...

M. Dominique Plumail a également souligné l'intérêt économique du recours à la biomasse, déclarant qu'avec le concours d'une TVA à taux réduit l'énergie bois serait compétitive dans de nombreux cas et permettrait de dégager une économie de l'ordre de 20 % par rapport au gaz naturel.

Il a fait valoir, en outre, que le principal avantage économique du bois-énergie se situait au niveau de la stabilité du prix final de l'énergie sur le long terme, puisqu'à la différence des énergies fossiles, le combustible bois n'était que très peu influencé par les variations conjoncturelles du prix du baril de pétrole.

M. Dominique Plumail a ainsi regretté que la longue tradition de chauffage au bois en France profite essentiellement au chauffage individuel et industriel, relevant que le chauffage collectif au bois ne représentait dans l'habitat et le tertiaire que 210.000 tep/an, soit 2,3 % de l'énergie-bois produite en France.

La France, a-t-il poursuivi, est relativement mal classée dans le domaine du chauffage collectif : si on prend la consommation de chaleur collective au bois par habitant, le ratio de la France est dix fois plus faible que celui de la Suède, la Finlande, le Danemark ou encore l'Autriche où les pouvoirs publics encouragent très fortement la diversité de leur approvisionnement, notamment à partir de bois-énergie.

M. Jean-Léonce Dupont a rappelé, quant à lui, que la sécurité d'approvisionnement en bois-énergie était généralement considérée par les collectivités territoriales, les organismes de promotion ou les sociétés d'exploitation comme un des principaux obstacles à la mise en oeuvre d'une chaufferie bois, signalant que dans de nombreuses régions, il n'existait pas encore de structure commerciale de taille significative pour l'approvisionnement des chaufferies en combustible bois. M. Dominique Plumail a fait remarquer que les exploitants étaient parfois tributaires des fournisseurs de proximité qui n'étaient pas toujours en mesure de garantir la quantité et la qualité du combustible.

M. Claude Belot , rapporteur , a alors souligné que la priorité devait porter sur l'organisation de l'approvisionnement, en favorisant la mise en place de structures multi-filières résultant de l'association des professionnels des secteurs de la gestion des déchets, de la filière forêt-bois et des organismes publics ou privés (ressource bocagère, déchets des collectivités...). M. Dominique Plumail a ainsi cité en exemple la société bas-normande Biocombustibles SA, créée en mars 1996, pour sécuriser l'approvisionnement des chaufferies bois. Constituée initialement par 25 sociétés régionales, professionnels de la forêt, de l'industrie du bois, de l'agriculture, des déchets et de l'environnement, cette entreprise compte désormais plus de 40 actionnaires. En 2005, a-t-il précisé, Biocombustibles SA a commercialisé 125.000 tonnes de bois et devrait commercialiser plus de 170.000 tonnes en 2006.

M. Dominique Plumail a ensuite mis en exergue les principes fondamentaux sur lesquels l'approvisionnement en bois des chaufferies a été bâti en Basse-Normandie :

- la mutualisation des moyens et la mise en oeuvre d'une logistique articulée autour de multiples plates-formes de stockage et de conditionnement, dans l'objectif de transformer les matières premières en combustible normalisé et de les transporter vers les chaufferies ;

- la mise à disposition par les actionnaires de leurs ressources (sous-produits des industries du bois, bois de rebut, bois issus de l'entretien des paysages urbains, bocagers et forestiers) et diversification des débouchés, afin que l'utilisation énergétique des ressources ligneuses dans les chaufferies urbaines n'entre pas en compétition avec les usages industriel ou agricole du bois ;

- la commercialisation du combustible bois garantissant aux maîtres d'ouvrages et aux exploitants de chauffage un approvisionnement sécurisé (quantité, qualité, prix, gestion des cendres ...) ;

- le fonctionnement à l'image d'une coopérative, en rétrocédant aux actionnaires une part majeure des bénéfices sous forme de compléments de prix et de dividendes.

Par ailleurs, M. Jean-Léonce Dupont a suggéré d'élargir le champ d'application de la TVA à taux réduit aux chaufferies bois dédiées, cette mesure étant particulièrement importante pour les maîtres d'ouvrage qui ne récupèrent pas la TVA (établissements d'enseignement, bailleurs sociaux, hôpitaux publics et associatifs, maisons de retraite ...).

M. Claude Belot, rapporteur, a toutefois objecté que cette mesure risquait de conduire à une multiplication des petites chaufferies au détriment des réseaux de chaleur.

Enfin, M. Dominique Plumail a souligné l'importance pour les petites communes de disposer d'un appui technique et juridique pour monter des projets biomasse, regrettant que de nombreux élus locaux, pourtant motivés, abandonnent en cours de route, faute de disposer d'un soutien adapté de nature à les décharger des tâches administratives, juridiques, financières...

C'est pourquoi, il a salué la décision prise par plusieurs départements confrontés aux mêmes difficultés de transférer la maîtrise d'ouvrage des projets à une instance départementale, citant le syndicat départemental des déchets du Lot ou les syndicats départementaux d'électricité de la Loire ou de la Nièvre, reconvertis en syndicats d'énergie.

Il a fait valoir qu'une maîtrise d'ouvrage déléguée (syndicat mixte créé à l'initiative du Conseil Général et des communes candidates) permettait de prendre en charge l'étude, la réalisation, le financement, voire l'exploitation des chaufferies et réseaux de chaleur bois pour le compte des collectivités territoriales, dans le cadre d'un transfert de compétence « distribution de chaleur ».

De telles structures, a-t-il conclu, seraient un puissant levier pour promouvoir le développement de chaufferies collectives au bois, et tout particulièrement des réseaux de chaleur en milieu rural.

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