2. Combler les vides de la coopération entre les administrations
a) Une coordination actuellement centrée sur le travail illégal
En matière de travail illégal, les pouvoirs publics français ont favorisé le décloisonnement en mettant en place des structures interministérielles.
Au niveau national , la délégation interministérielle à la lutte contre le travail illégal (DILTI) a été créée le 11 mars 1997. Cette délégation a un rôle pivot de mise en relation, de communication, de formation et d'assistance avec ses interlocuteurs privilégiés que sont les administrations centrales et les organismes compétents en matière de lutte contre le travail illégal : les services de contrôle, les préfectures, les magistrats et les organisations professionnelles. La DILTI est consultée et formule des propositions sur les mesures législatives et réglementaires envisagées par les autorités politiques, ayant une incidence sur le travail illégal.
Au niveau local , l'ensemble des services concernés sont réunis autour du préfet au sein du comité opérationnel de lutte contre le travail illégal (COLTI) qui vise à coordonner l'action des différents services de l'Etat dans le cadre de plans départementaux 83 ( * ) .
Ces structures font montre d'une réelle efficacité. Toutefois, centrées sur les questions de travail illégal, elles ne concernent que très partiellement les fraudes au détachement 84 ( * ) . Ce statut se rattache en effet principalement à la question du respect des conditions de travail, distincte du problème du travail illégal.
C'est ainsi que les avantages tirés de la coordination interministérielle ne bénéficient malheureusement pas au contrôle des salariés européens détachés ni au traitement de la question des « faux indépendants ».
b) Des lacunes à combler
Parmi les avantages de la coopération interministérielle, figure notamment la possibilité offerte à l'inspection du travail de disposer d'information en matière de sécurité sociale, au même titre que les inspecteurs de l'URSSAF, dans le cadre d'une charte nationale de coopération signée en septembre 2005, sous l'égide de la DILTI 85 ( * ) entre le ministère du travail et les organismes sociaux.
Concrètement, ceci signifie qu'en matière de travail illégal, les inspecteurs du travail ont le droit, d'une part, de contrôler la situation des employeurs et des travailleurs au regard de la sécurité sociale et, d'autre part, de consulter les données détenues par les organismes de sécurité sociale.
Limité au travail illégal, ce dispositif ne vaut pas pour le contrôle de détachement des travailleurs, alors que les informations de sécurité sociale seraient souvent très utiles à l'action des inspecteurs du travail. En effet, la régularité des travailleurs vis-à-vis de la sécurité sociale de leur pays est un des éléments clés du respect de la directive 96/71.
A quoi bon renforcer la coopération européenne en matière de sécurité sociale, comme votre commission l'a proposé précédemment 86 ( * ) , si les informations recueillies ne peuvent être exploitées sur le terrain que par les inspecteurs des URSSAF et non par les inspecteurs du travail ? Les effectifs de contrôle étant limités, la mutualisation de l'information sur un tel sujet est une question de bonne administration.
D'ailleurs, la Commission européenne ne s'y trompe pas, qui n'autorise pas le ministère du travail français à demander à d'autres Etats membres des informations sur la sécurité sociale de leurs travailleurs détachés, dans la mesure où des informations ont déjà été transmises à la sécurité sociale française.
PROPOSITION N° 11 Autoriser l'inspection du travail à contrôler la situation des travailleurs détachés au regard de la sécurité sociale et permettre les échanges de données entre les organismes de sécurité sociale et l'inspection du travail dans le cadre de ces contrôles. |
* 83 Environ 30 % des contrôles effectués par les services de l'Etat en matière de lutte contre le travail illégal sont désormais des opérations décidées dans le cadre des COLTI.
* 84 Le principal point de contact entre les deux problématiques est la question du marchandage et du prêt illicite de main d'oeuvre.
* 85 Charte nationale de coopération en matière de lutte en matière de travail illégal.
* 86 Cf. page 41.