(2) Le mécanisme d'ajustement

Dans le cadre du mécanisme d'ajustement, les acteurs du marché disposant de réserves de flexibilité communiquent les conditions techniques et financières auxquelles RTE peut faire appel à eux, par un système d'offres à la hausse et à la baisse. RTE sélectionne ces offres en fonction de leur coût et des contraintes techniques exprimées par les acteurs . Ce mécanisme, qui fonctionne selon des règles de marché, a été étendu à des producteurs situés hors de France (Suisse, Espagne et Royaume-Uni).

M. Philippe de Ladoucette, président de la CRE, a insisté sur l'importance du rôle de ce mécanisme qui, a-t-il expliqué, « permet d'assurer en permanence l'équilibre des flux d'électricité sur le réseau ainsi que la sécurité, la sûreté et l'efficacité de son exploitation à un coût raisonnable » 251 ( * ) . Ayant rappelé que « la loi a confié à RTE la responsabilité du fonctionnement de ce mécanisme et au régulateur l'approbation préalable de ses règles 252 ( * ) » , il a indiqué que « l'un des objectifs que la CRE a fait partager au groupe des régulateurs européens est le renforcement de la compatibilité des différents mécanismes appliqués en Europe ».

Vos rapporteurs, tout en étant conscients de l'utilité d'un tel système, ne sauraient trop insister sur le fait qu'un tel marché de court terme doit se faire uniquement sur des bases physiques, entre les producteurs et le GRT . Il ne doit en aucun cas développer un caractère spéculatif, déconnecté des réalités physiques, au risque de constituer un facteur de déstabilisation du réseau. De ce point de vue, sa structure et son fonctionnement donnent des gages de crédibilité : RTE, acheteur unique, connaissant bien les centrales qui produisent pour lui, a en effet tous les moyens de savoir si les quantités qu'on lui propose et les coûts associés sont réalistes.

Pour un mécanisme d'interruption de certains gros consommateurs d'électricité ?

En parallèle du mécanisme d'ajustement, qui permet de faire appel aux capacités de production disponibles, il est possible, pour assurer l'équilibre du réseau, de mettre au point un mécanisme inverse jouant sur les capacités d'effacement de certains grands clients industriels.

M. Nicolas de Warren, directeur des relations institutionnelles d'Arkema, a plaidé pour l'instauration d'un tel dispositif, mettant en exergue l'exemple italien. En effet, selon lui, à l'occasion de l'incident du 4 novembre 2006, le GRT italien a « délesté les producteurs électro-intensifs qui ont restitué au réseau 800 MW, soit 20 % d'un volume total requis de 4 600 MW », ce qui a « permis de rétablir l'intégralité de la fourniture environ trente minutes plus tôt qu'en France, (...) les industriels [ayant] apporté leur contribution au rééquilibrage instantané du réseau » 253 ( * ) .

Il a donc souhaité que RTE effectue un recensement exhaustif des sites industriels capables de s'arrêter presque instantanément et avance sur la voie de la mise en place d'un tel mécanisme. Dans son esprit, il devrait s'agir d'une relation contractuelle assortie d'une rémunération des industriels pour cette sujétion, M. Nicolas de Warren faisant valoir qu'ils deviendraient « de facto des contributeurs occasionnels du service public ».

Interrogé à ce sujet par une délégation de votre mission le 23 avril 2007, M. Alessandro Ortis, président du régulateur italien (AEEG), a confirmé l'existence d'un dispositif d'interruptibilité de la fourniture d'électricité des consommateurs électro-intensifs moyennant rémunération afin d'assurer la sécurité d'approvisionnement en période de pointe, tout en expliquant que ce mécanisme n'en était toujours qu'à un stade expérimental.

Il revient avant tout à RTE et au ministre chargé de la politique énergétique d'évaluer l'intérêt de ce type de dispositif, lequel devrait dépendre en grande partie des exigences financières des industriels. Il semble toutefois à vos rapporteurs qu'il présente plus d'intérêt pour un pays en sous-capacité de production électrique, comme l'Italie, que pour un pays ayant des surcapacités, comme la France. Le mécanisme d'ajustement paraît, pour notre pays, le meilleur moyen d'assurer l'équilibre du réseau en temps normal, le dispositif proposé paraissant essentiellement adapté à des situations exceptionnelles comme celle du 4 novembre 2006. En conséquence, si le sujet devait avancer, la rémunération de la sujétion des industriels devrait être proportionnée à la probabilité qu'ils soient effectivement sollicités dans ce cadre. Le Parlement aurait du reste probablement à connaître de l'évolution de cette question, les dispositions de l'article 15 de la loi du 10 février 2000 paraissant insuffisantes pour autoriser RTE à conclure ce type de contrats (même si le niveau de rémunération lui-même ne relève pas du législateur).

* 251 Audition du 1 er février 2007.

* 252 Article 15 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000.

* 253 Audition du 14 mars 2007.

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