3. Des représentations encore trop souvent stéréotypées
Une autre dérive dans l'utilisation de l'image de la femme dans la publicité, également préoccupante, quoique moins fréquemment dénoncée, concerne les stéréotypes véhiculés par les messages publicitaires quant aux rôles respectifs des femmes et des hommes.
Ce problème a été évoqué à plusieurs reprises au cours des auditions de la délégation, notamment à propos des publicités télévisées ou autres représentant la femme au foyer comme un être dépourvu d'intelligence, une « Bécassine » débordée face à des tâches ménagères simples.
Les représentations stéréotypées des femmes ont été dénoncées dans le cadre de « l'espace public de débat » mis en place par le ministère de la parité, en 2004. Selon le rapport de synthèse, « les sous-entendus véhiculés par les messages publicitaires [...] témoignent de la persistance de stéréotypes quant aux rôles respectifs des femmes et des hommes : la femme est tantôt une séductrice impénitente, tantôt une ignorante des questions mécaniques et techniques, uniquement préoccupée de l'esthétique ou du confort du véhicule... ».
22 % des publicités critiquées dans ce cadre l'ont été pour des motifs de non-conformité à la modernité. Ces motifs ont suscité plus de la moitié des critiques contre les publicités pour des grands magasins, des marques automobiles et agroalimentaires, dénoncées pour une « présentation particulièrement rétrograde des femmes ou des rapports entre les femmes et les hommes ».
Beaucoup de publicités pour produits alimentaires ou marques automobiles ont été critiquées pour motifs de discrimination dans la mesure où elles utilisent souvent une vision traditionnelle de la femme. Ainsi, les publicités pour produits alimentaires présentent largement les femmes en train de cuisiner ou de faire les courses : deux tiers de ces publicités signalées l'ont été pour des motifs de discrimination.
Au cours de son audition devant la délégation, Mme Mercedes Erra, présidente exécutive de Euro RSCG Monde, a estimé que les images de la femme dans la publicité reflétaient les représentations qu'en avait l'opinion publique aujourd'hui, ces images rendant compte d'un imaginaire donné à une époque donnée.
Elle a reconnu que les avancées - réelles - de la cause des femmes se heurtaient néanmoins à des blocages dans les représentations et à la prégnance des stéréotypes.
Selon Mme Mercedes Erra, la représentation traditionnelle de la femme en « ménagère » est désormais rejetée par la plupart des femmes qui ne souhaitent pas être réduites à cette image, même si celle-ci recouvre incontestablement une réalité, la femme continuant d'assurer l'essentiel des tâches domestiques, à hauteur de deux à trois heures par jour.
D'après elle, la publicité actuelle fait une large place à deux représentations de la femme : la mère et la séductrice.
Or, alors que les représentations de la femme dans la publicité demeurent trop souvent stéréotypées, il semble que le BVP n'intervienne pas à l'encontre de publicités, télévisées ou autres, véhiculant des stéréotypes sexués portant préjudice aux femmes, ainsi que l'a regretté au cours de son audition devant la délégation Mme Florence Montreynaud, responsable du réseau « La Meute ».
Interrogé sur ce point, M. Jean-Pierre Teyssier, président du Bureau de vérification de la publicité, a déclaré que le BVP n'avait reçu aucune plainte de consommateur à ce sujet et a rappelé que toute publicité comportant une dimension choquante pouvait lui être signalée. En effet, la charte déontologique du BVP relative à l'image de la personne humaine inclut la lutte contre les stéréotypes.
En revanche, celle-ci n'entre pas explicitement dans les missions actuelles du CSA, définies à l'article 15 de la loi du 30 septembre 1986 précitée, qui font seulement référence à la « lutte contre les discriminations » en général.