c) Des femmes parfois recrutées en fonction de leur apparence physique ou utilisées comme faire-valoir d'un homme ?

Au cours des auditions de la délégation a été évoquée, à plusieurs reprises, la question de savoir si la nomination de femmes journalistes à certaines fonctions, en particulier à la télévision, n'était pas exagérément déterminée par leur aspect physique.

En particulier, Mme Mémona Hintermann a noté la préférence dont bénéficient parfois les « jeunes et jolies femmes » pour accéder aux fonctions de présentatrices de journaux télévisés.

Pour sa part, Mme Isabelle Germain a relevé l'exemple des journalistes chargées de couvrir l'actualité à l'Assemblée nationale, qui sont généralement « jeunes et jolies ».

Par ailleurs, si les femmes sont désormais assez nombreuses parmi les présentateurs, elles n'en ont pas pour autant nécessairement des responsabilités éditoriales au sein de la rédaction et ne maîtrisent donc pas forcément le contenu de l'information.

Ainsi, si le dépouillement de l'annuaire « Média SIG » fait apparaître une proportion de près de 46 % de femmes parmi les présentateurs de journaux ou de magazines télévisés sur les chaînes généralistes, les femmes ne sont que 17,5 % à y porter le titre de rédacteur en chef.

Comme l'a souligné Mme Michèle Cotta, de nombreuses femmes apparaissent à l'antenne, sans pour autant exercer de fonctions d'encadrement.

Les femmes peuvent donc être utilisées comme faire-valoir d'une équipe de responsables masculins. Tel est également parfois le cas dans des émissions animées par un tandem homme/femme.

Comment remédier à cette situation ?

Ainsi que l'a souligné Mme Dominique Alduy devant la délégation , il convient tout d'abord de veiller avec une plus grande vigilance à l'application concrète de l'arsenal législatif existant, déjà très développé, qu'il s'agisse des lois contre les discriminations à l'égard des femmes ou sur l'égalité salariale, au besoin en engageant des actions en justice devant les prud'hommes. Selon elle, les femmes exerçant des fonctions de responsabilité se doivent tout particulièrement de faire respecter les lois contre les discriminations dans les entreprises où elles travaillent.

A cet égard, Mme Michèle Cotta a souligné, à la lumière de sa propre expérience, l'effet d'entraînement que suscite la nomination d'une femme à un poste de responsabilité.

L'éventualité de l'adoption de mesures contraignantes de discrimination positive en faveur des femmes ne fait pas l'unanimité ; au cours de la table ronde organisée par la délégation, Mme Mémona Hintermann, par exemple, s'y est déclarée opposée, faisant observer que, même aux Etats-Unis, le concept de discrimination positive était contesté, certains Etats l'ayant abandonné par référendum ou projetant d'y renoncer.

De même, Mme Michèle Cotta s'est montrée réservée à l'égard de l'institution de quotas qu'elle a jugés difficiles à imposer.

Elle a néanmoins considéré comme nécessaire de sensibiliser les présidents d'entreprises de médias à la parité entre femmes et hommes. Elle a en outre suggéré d'instaurer des mécanismes de médiation permettant aux femmes de contester, au cas par cas, les processus de nomination discriminatoires à leur égard.

Pour sa part, Mme Christine Bruneau, présidente de l'association « Femmes de demain » 25 ( * ) , entendue par la présidente de la délégation, a estimé qu'il pourrait être utile d'établir dans chaque entreprise de médias, à partir d'un état des lieux dressant le bilan de la situation actuelle, un plan d'évolution, par exemple sur cinq ans, destiné à favoriser l'accession des femmes aux fonctions de responsabilité et à leur permettre d'intégrer les instances décisionnelles, en fixant des objectifs de progression à atteindre.

En outre, elle a suggéré que soit créé un prix institutionnel récompensant l'entreprise de médias assurant la plus large place aux femmes dans les fonctions de responsabilité. Un tel prix permettrait de récompenser une entreprise dont le comportement serait exemplaire en matière de parité entre les hommes et les femmes.

Interrogée sur ce point par Mme Gisèle Gautier, présidente, au cours de son audition devant la délégation, Mme Michèle Cotta a approuvé cette proposition, tout en faisant observer qu'il conviendrait d'exclure de l'éligibilité à ce prix les entreprises de la presse dite « féminine », où les femmes sont traditionnellement très présentes.

D'une manière générale, de même que dans les autres secteurs d'activité, le développement de la négociation au sein des entreprises et l'instauration de mesures incitatives destinées à favoriser l'accession des femmes à une pleine égalité professionnelle semblent préférables à l'institution de quotas.

A cet égard, il est à noter que la direction et les syndicats de Radio-France ont signé, en mars 2007, un intéressant accord sur l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes.

Selon le communiqué publié par l'entreprise, cet accord, « premier de cette nature dans une grande société de l'audiovisuel public », est destiné à « assurer de manière concrète l'égalité entre les hommes et les femme s », dans un objectif de lutte « contre toutes les formes de discrimination ». Très complet, cet accord concerne le recrutement, la rémunération, le travail à temps partiel, la maternité, l'adoption et le congé parental, l'évolution professionnelle, la mobilité, la formation professionnelle...

Il constitue un exemple à suivre pour les autres entreprises de médias.

A cet égard, la délégation tient à rappeler l'obligation de négociation prévue par la loi n° 2006-340 du 23 mars 2006 relative à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, en vue de la conclusion d'accords destinés à assurer de manière concrète l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans tous ses aspects.

Elle souligne la nécessité d'une mise en oeuvre concrète de cette loi dans des délais rapides, dans le secteur des médias comme dans les autres secteurs.

Il apparaît d'autant plus important de parvenir à une pleine égalité professionnelle dans ce secteur que, selon certaines analyses, la place insuffisante faite aux femmes dans les postes de responsabilité des médias n'est pas sans incidences sur le contenu de l'information.

* 25 Qui avait organisé, en partenariat avec l'UNESCO, les 7 et 8 mars 2005, un colloque intitulé « Femmes reporters - Donnons du poids à toutes les plumes ».

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