c) La nécessité de lutter contre une source majeure d'inéquité : la ségrégation verticale

La ségrégation verticale renvoie à la sous-représentation des femmes aux niveaux les plus élevés de la hiérarchie professionnelle, indépendamment du secteur d'activité concerné.

(1) Dans les professions où elles sont présentes, les femmes sont peu nombreuses dans les postes de responsabilité et les fonctions de direction

La délégation, au cours de ses travaux, a constaté des formes insidieuses de ségrégation et d'inégalités qui ont tendance à perdurer dans des métiers où la présence des femmes devient importante.

Au cours de son audition, Mme Catherine Marry a relevé que la féminisation notable de la médecine et des professions juridiques, par exemple, s'accompagnait d'une certaine ségrégation par spécialités et modes d'exercice.

Ainsi, en médecine , les femmes sont concentrées dans certaines spécialités comme la dermatologie, la pédiatrie ou encore la gynécologie médicale. Plus souvent salariées que les hommes, elles sont peu nombreuses à avoir le titre de professeur.

Dans la magistrature , où les femmes sont désormais majoritaires, elles sont encore peu représentées parmi les chefs de cours et tribunaux 13 ( * ) .

(2) Les femmes sont plus souvent que les hommes soumises au temps partiel, aux statuts précaires et au chômage

Selon l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale 14 ( * ) , la pauvreté des femmes au travail tend à augmenter , ce qui s'explique par le fait que les emplois à temps partiel sont essentiellement occupés par des femmes, et que les différences de salaire entre les hommes et les femmes sont encore importantes. De surcroît, comme la délégation a eu l'occasion de le démontrer au cours de ses travaux antérieurs, les familles monoparentales, qui sont essentiellement dirigées par des femmes, sont plus particulièrement touchées par la pauvreté.

En vingt ans, les formes particulières d'emploi - apprentissage, intérim, stages et contrats aidés, contrat à durée déterminée (CDD) - ont doublé, passant de 6 % de l'emploi total en 1982 à 12 % en 2005. Les jeunes sont les plus touchés, et parmi eux, aussi bien les hommes que les femmes car ils ont en commun le manque d'expérience professionnelle. En revanche, les écarts se creusent après l'âge de 25 ans, les femmes étant alors plus exposées aux formes particulières d'emploi, et notamment au CDD.

Les femmes représentent aujourd'hui près des deux tiers de l'emploi non qualifié. Il y a vingt ans, la population des emplois non qualifiés était majoritairement ouvrière, masculine et industrielle. Elle est aujourd'hui essentiellement employée, féminine et tertiaire .

À un niveau d'analyse plus détaillé, les chercheurs du CEREQ ont signalé à la délégation que le degré de stabilisation dans l'emploi des femmes était beaucoup moins élevé que celui des hommes au niveau CAP-BEP : par exemple, les femmes sont presque quatre fois plus nombreuses que les hommes à connaître une situation de « non-emploi prolongé » à ce niveau de formation.

Par ailleurs, les métiers des femmes sont, dans les nomenclatures, plus flous que ceux des hommes, moins négociés, leurs compétences sont moins claires, et s'agissant des emplois non qualifiés, leurs perspectives d'évolution de carrière sont plus réduites. Un homme qui occupe un emploi non qualifié a donc plus de chances qu'une femme d'évoluer vers un emploi qualifié.

(3) Les effets induits de la ségrégation : inégalités salariales et inégalités en termes de retraite

Selon les « Chiffres clés de l'égalité entre les femmes et les hommes » publiés en 2007 par le Service des droits des femmes et de l'égalité, l' écart de rémunération entre les hommes et les femmes, calculé par rapport à la rémunération médiane, est de 19 % en 2005 et n'a guère évolué depuis 1997. En outre, les montants des retraites perçues sont plus faibles pour les femmes. En 2004, les retraités âgés de 60 ans ou plus percevaient, par mois, un montant total de pension, brut de prélèvements sociaux, égal en moyenne à 1 296 euros. Les femmes, avec 1 020 euros mensuels, disposaient d'un montant inférieur de 38 % à celui des hommes (1 636 euros). Du fait de la montée du taux d'activité des femmes, ces écarts tendent à se réduire, mais ils seraient encore de 25 % en 2040.

(4) Une situation générale dans l'Union européenne

Plus généralement, le rapport de la Commission européenne au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, sur l'égalité entre les femmes et les hommes, présenté en février 2007, confirme que dans l'ensemble de l'Union européenne, le marché de l'emploi reste dans une large mesure cloisonné. « L'évolution des indices de ségrégation professionnelle et sectorielle par sexe ne montre aucun signe de baisse significative » et il semble donc que l'augmentation de l'emploi des femmes se fasse principalement dans des secteurs d'activité et des professions déjà majoritairement féminins. Près de quatre salariées sur dix travaillent dans l'administration publique, la santé et l'action sociale ou l'éducation, tandis que la moitié des salariées sont employées administratives, vendeuses ou travailleuses peu ou non qualifiées.

Ce rapport s'inquiète également du déséquilibre persistant entre femmes et hommes dans la présence aux postes décisionnels, tant politiques qu'économiques . Moins d'un tiers des cadres sont des femmes et les conseils d'administration des 50 plus grandes entreprises européennes cotées ne comptaient qu'une femme pour dix hommes en 2005. Dans les Parlements nationaux, la proportion moyenne de femmes n'est que de 24 %. Elle est de 33 % au Parlement européen.

L'une des conséquences de ces différences et inégalités subies par les femmes sur le marché de l'emploi se mesure par la persistance de l'écart de rémunération entre les femmes et les hommes. Les femmes gagnent en moyenne 15 % de moins que les hommes pour chaque heure travaillée.

En matière sociale, les femmes présentent un plus grand risque d'exclusion et de pauvreté, en particulier parmi les personnes âgées et les parents isolés. Le taux de femmes de plus de 65 ans en situation de risque de pauvreté 15 ( * ) est de 20 %, soit 5 points de plus pour les hommes du même âge, tandis que celui des familles monoparentales est de 34 %. Par ailleurs, le taux de chômage de longue durée est de 4,5 % pour les femmes, soit 1 point de plus que pour les hommes . Les femmes constituent également la majorité des inactifs et sont donc particulièrement vulnérables face au risque de pauvreté.

* 13 Cf. infra II - A - 1

* 14 Quatrième rapport de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion social - Paris - La Documentation française, 2006, 164 p.

* 15 C'est-à-dire ayant un revenu en-dessous du seuil de pauvreté, défini comme 60 % du revenu médian.

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