B. ENCADRER LA GESTATION POUR AUTRUI

Le régime juridique préconisé par le groupe de travail se rapproche autant que possible de celui de l'assistance médicale à la procréation. Sa rigueur est destinée à garantir que la gestation pour autrui se déroule conformément au principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.

1. L'exigence d'un agrément sous des conditions strictes des bénéficiaires de la gestation pour autrui et des gestatrices

Les bénéficiaires de la gestation pour autrui et les gestatrices seraient soumis à des conditions d'éligibilité strictes et devraient faire l'objet d'un agrément délivré par une commission pluridisciplinaire placée sous l'égide de l'Agence de la biomédecine.

* Les conditions requises des bénéficiaires de la gestation pour autrui

Le groupe de travail préconise en premier lieu de n'ouvrir le bénéfice de la gestation pour autrui qu'aux couples composés de personnes de sexe différent, mariées ou en mesure de justifier d'une vie commune d'au moins deux années, et en âge de procréer . Cette exigence est destinée à assurer une certaine cohérence dans le droit de la procréation médicalement assistée et à écarter tout droit à l'enfant.

En deuxième lieu, la gestation pour autrui ne serait autorisée que dans l'hypothèse où la femme ne pourrait mener une grossesse à terme ou ne pourrait la mener sans danger pour sa santé ou pour celle de l'enfant à naître .

Les gestations pour autrui dites de « convenance », qui iraient à l'encontre des règles posées par les lois de bioéthique, seraient ainsi écartées. Plusieurs personnes entendues par le groupe de travail, parmi lesquelles Sylvie Mennesson, co-présidente fondatrice de l'association Clara, ou Marcela Iacub, chercheuse au CNRS, ont toutefois souligné que les femmes ayant fait appel à une mère de substitution auraient infiniment préféré porter elle-même l'enfant.

Comme l'a relevé lors de son audition Jean-Luc Pouly, responsable du centre d'assistance médicale à la procréation du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand, les indications médicales pour lesquelles une femme ne peut porter un enfant ne peuvent être définies avec précision .

Certaines de ces indications tiennent à l'absence, à une malformation ou à des lésions de l'utérus, congénitales 114 ( * ) ou pathologiques 115 ( * ) . Il est également possible de considérer qu'une femme ayant effectué en vain plusieurs tentatives de fécondation in vitro ne peut porter d'enfant, même si les raisons de ces échecs ne sont pas toujours physiologiques. Enfin, il est des cas où une grossesse représenterait un risque pour la santé de la femme, alors même qu'elle ne souffrirait d'aucune lésion utérine, par exemple en raison d'une insuffisance cardiaque, pulmonaire ou rénale, ou de troubles de la coagulation.

La gestation pour autrui doit également pouvoir être autorisée en cas de risque pour la santé de l'enfant à naître . Il en va ainsi par exemple, comme l'a indiqué lors de son audition Jean-Luc Pouly, en cas de béance du col de l'utérus ou de troubles graves de la coagulation.

La diversité des cas dans lesquels une gestation pour autrui peut se justifier et la difficulté de les apprécier militent en faveur de la mise en place d'une commission pluridisciplinaire chargée de l'agrément des couples demandeurs.

Le groupe de travail considère en troisième lieu qu' au moins l'un des deux membres du couple demandeur d'une gestation pour autrui devrait être le parent génétique de l'enfant .

Cette solution a été retenue par la législation britannique relative à la gestation pour autrui et par la législation de l'Etat de l'Illinois, aux Etats-Unis. Elle présenterait l'intérêt d'assurer une certaine cohérence dans le droit de la procréation médicalement assistée qui interdit seulement, en principe, le double don de gamètes 116 ( * ) .

Exiger que la mère intentionnelle soit systématiquement la mère génétique de l'enfant permettrait sans doute de donner une assise solide à la maternité et d'éviter une dissociation trop importante des figures maternelles mais présenterait l'inconvénient de priver de l'assistance médicale à la procréation les femmes qui n'ont ni ovule ni utérus.

Enfin, les deux membres du couple demandeur devraient être domiciliés en France , afin d'éviter ce que l'on a coutume d'appeler péjorativement le « tourisme procréatif ». Telle est d'ailleurs la solution retenue par les législations grecque et britannique.

* Les conditions requises de la gestatrice

Les conditions requises pour permettre à une femme de porter un enfant pour le compte d'autrui seraient elles aussi nombreuses et strictes.

En premier lieu, la gestatrice ne devrait pas être la mère génétique de l'enfant , afin de prévenir les conflits de filiation en facilitant son « désinvestissement affectif » lors de la grossesse, pour reprendre des termes employés par des psychanalystes. L'ovocyte devrait ainsi provenir de la mère d'intention ou, à défaut, d'une tierce donneuse.

Cette solution est retenue en Grèce mais pas au Royaume-Uni. Elle a recueilli l'assentiment de la plupart des personnes qui, lors de leur audition, se sont déclarées favorables à la légalisation de la maternité pour autrui.

En deuxième lieu, la gestatrice devrait avoir déjà eu au moins un enfant sans avoir rencontré de difficulté particulière pendant la grossesse .

Il s'agit de faciliter non seulement son « désinvestissement affectif » à l'égard de l'enfant qu'elle porte, mais également de prévenir les risques d'accident durant la grossesse ou l'accouchement et d'éviter que la gestatrice puisse se trouver privée de toute descendance dans l'hypothèse où un tel accident surviendrait et la rendrait stérile.

Cette solution a été retenue par la législation de l'Etat de l'Illinois, aux Etats-Unis. Le code de la santé publique français exige également que les donneurs de gamètes aient déjà procréé 117 ( * ) .

En troisième lieu, une même femme ne pourrait mener plus de deux grossesses pour le compte d'autrui , afin d'éviter qu'elle n'en fasse une profession, même si le groupe de travail préconise par ailleurs d'interdire la rémunération des gestatrices.

La gestatrice pourrait-elle être parente des membres du couple demandeur ?

Rien ne s'y oppose, a estimé Anne Cadoret, ethnologue, chargée de recherche au CNRS, membre du groupe de recherche et d'analyse du social et de la sociabilité, qui a rappelé lors de son audition que la maternité pour autrui était souvent pratiquée entre soeurs.

Toutes les psychanalystes favorables à la légalisation de la gestation pour autrui entendues par le groupe de travail, qu'il s'agisse de Geneviève Delaisi de Parseval, d'Elisabeth Roudinesco ou de Sophie Marinopoulos, ont au contraire jugé impératif d'interdire tout lien de parenté entre la gestatrice et le couple d'intention, afin d'éviter des pressions et des conflits familiaux ainsi qu'un brouillage de la généalogie de l'enfant. Elisabeth Roudinesco a notamment rappelé l'importance de l'interdit de l'inceste dans nos sociétés.

Après en avoir longuement débattu, les membres du groupe de travail préconisent, dans leur majorité, d' interdire à une mère de porter un enfant pour le compte de sa fille mais de laisser à la commission chargée de l'agrément des gestatrices le soin d'apprécier au cas par cas si telle ou telle femme doit être habilitée à porter un enfant pour le compte de sa soeur ou de sa cousine.

Enfin, la gestatrice devrait être domiciliée en France , afin d'assurer un suivi médical de qualité. Cette condition de domicile figure ainsi dans la loi grecque.

* L'exigence d'un agrément délivré sous l'autorité de l'Agence de la biomédecine

Le groupe de travail juge nécessaire de prévoir , en sus de ces conditions légales, un agrément des couples demandant à bénéficier d'une gestation pour autrui et des femmes prêtes à leur venir en aide .

Cet agrément pourrait être délivré selon la procédure préconisée par Israël Nisand, chef du service de gynécologie-obstétrique au centre médicochirurgical et obstétrical de Strasbourg, et Sophie Marinopoulos, psychanalyste au centre hospitalier universitaire de Nantes :

- les demandes seraient d'abord examinées par une équipe médico-psychologique qui s'assurerait de l'état de santé physique et psychique du couple demandeur et de la gestatrice ;

- en cas d'accord de cette équipe, le dossier serait transmis à une commission d'éthique indépendante composée de juristes, de psychanalystes, de médecins et de philosophes, qui statuerait au cas par cas et dont le caractère national permettrait d'assurer une plus grande équité dans les décisions.

Cette commission pluridisciplinaire pourrait être placée sous l'égide de l'Agence de la biomédecine -Carine Camby, directrice générale de l'Agence s'y est déclarée favorable lors de son audition.

Enfin, comme la suggéré Jean-Luc Pouly, responsable du centre d'assistance médicale à la procréation du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand, les praticiens appelés à apporter leur concours à une gestation pour autrui ne pourraient siéger au sein de la commission chargée de la délivrance de ces agréments.

Le groupe de travail considère en outre qu' une habilitation spécifique devrait être exigée des praticiens et des centres de procréation médicalement assistée , selon les procédures en vigueur définies par deux décrets du 22 décembre 2006 et du 4 avril 2008, pour pratiquer la gestation pour autrui.

Les centres de procréation médicalement assistée sont autorisés par la commission exécutive de l'agence régionale de l'hospitalisation après avis du comité régional de l'organisation sanitaire et de l'Agence de la biomédecine. Il en existe actuellement une centaine. Ils sont composés d'équipes pluridisciplinaires comportant notamment des cliniciens gynécologues-obstétriciens, des urologues, des biologistes et des psychologues.

L'agrément des praticiens pour exercer une ou plusieurs activités cliniques ou biologiques d'assistance médicale à la procréation est quant à lui délivré par l'Agence de la biomédecine, pour une durée de cinq ans.

2. La définition d'un régime légal, et non contractuel

Le groupe de travail est hostile à une contractualisation de la gestation pour autrui, d'autant que le droit commun des obligations serait inapplicable en l'espèce. Ainsi, les conventions souscrites par les parties au Royaume-Uni constituent en réalité des déclarations d'intention dépourvues de toute force exécutoire. Aussi est-il préconisé de définir dans la loi et de préciser par décret l'ensemble des règles applicables, comme en matière d'adoption par exemple.

* La mise en relation des couples demandeurs et des gestatrices

Les couples demandeurs et les gestatrices pourraient être mis en relation par des associations à but non lucratif , qui devraient être agréées par l'Agence de la biomédecine .

En aucun cas, cette prestation ne pourrait donner lieu à rémunération, ni à publicité , comme le prévoit actuellement la loi britannique.

Les associations agréées qui respecteraient ces règles ne pourraient être sanctionnées pour les délits de provocation à l'abandon d'enfant et d'entremise en vue d'une gestation pour autrui, prévus par l'article 227-12 du code pénal, qui resteraient applicables dans le cas contraire.

Les couples demandeurs pourraient également obtenir des renseignements auprès des centres de procréation médicalement assistée habilités.

* L'accompagnement de la gestation pour autrui

La gestatrice devrait bénéficier de tous les droits sociaux afférents à la maternité -droits à congé, protection du contrat de travail, prestations sociales- mais pas de droits supplémentaires à la retraite.

Les parents d'intention devraient bénéficier de droits à congés pour l'accueil de l'enfant calqués sur les droits à congés en matière d'adoption, c'est-à-dire des congés post-naissance.

Un accompagnement psychologique devrait leur être proposé pendant la grossesse et après l'accouchement.

Conformément au principe de la gratuité du don, qui constitue l'un des fondements des lois de bioéthique, la gestation pour autrui ne pourrait donner lieu à rémunération mais à un « dédommagement raisonnable » , comme au Royaume-Uni.

Ce dédommagement, à la charge du couple demandeur, serait destiné à couvrir les frais qui ne seraient pas pris en charge par la sécurité sociale, par exemple, des frais de garde-robe, de garde d'enfants...

* L'intervention du juge judiciaire

La gestation pour autrui serait subordonnée, pour les couples et les gestatrices agréés, à une décision du juge judiciaire .

Le magistrat devrait :

- vérifier leurs agréments ;

- recueillir leurs consentements écrits, ainsi que celui du conjoint, du partenaire d'un pacte civil de solidarité ou du concubin de la gestatrice ;

- les informer des conséquences de leur engagement au regard notamment du droit de la filiation ;

- fixer le montant du dédommagement raisonnable devant être versé par le couple bénéficiaire à la gestatrice, ce montant pouvant le cas échéant être révisé en cas d'évènement imprévu au cours de la grossesse.

Ces dispositions s'inspirent des règles prévues par le code de la santé publique en cas de procréation médicalement assistée exogène.

* Les règles relatives au déroulement de la grossesse

Il appartiendrait à la gestatrice, et à elle seule, de prendre les décisions afférentes au déroulement de la grossesse, notamment de demander son interruption .

* Les règles relatives à l'établissement de la filiation de l'enfant

Si cruel cela puisse paraître pour les parents intentionnels et comme vos rapporteurs l'ont déjà indiqué, il est essentiel que la gestatrice puisse devenir la mère légale de l'enfant si elle le souhaite .

Lui dénier ce droit reviendrait à admettre une forme d'asservissement d'un être humain par un autre. Dans l'hypothèse où la gestatrice déciderait d'exercer ce droit, elle ne serait nullement tenue de verser des dommages et intérêts au couple demandeur puisqu'il n'y aurait pas de contrat.

Les règles préconisées par le groupe de travail ont pour objet d'assurer le respect de cet impératif tout en évitant les incertitudes juridiques auxquelles peut donner lieu la législation britannique.

La gestatrice qui désirerait devenir la mère légale de l'enfant devrait en exprimer la volonté dans le délai légal de la déclaration de naissance, soit trois jours à compter de l'accouchement . Son nom figurerait alors dans l'acte de naissance et les règles du droit commun de la filiation s'appliqueraient .

Si la gestatrice n'était pas mariée ou si, étant mariée, son époux ne souhaitait pas être le père légal de l'enfant, le père intentionnel pourrait en devenir le père légal en le reconnaissant devant l'officier de l'état civil.

Si la gestatrice était mariée et si son époux en était d'accord, le nom de ce dernier figurerait également dans l'acte de naissance et la présomption « pater is est » jouerait, à moins que le père intentionnel n'ait reconnu l'enfant avant sa naissance. Dans cette hypothèse, le conflit de filiation paternelle serait tranché par le tribunal de grande instance, au profit du père génétique. A défaut d'avoir effectué une reconnaissance prénatale, le père intentionnel conserverait la possibilité de saisir le tribunal de grande instance pour contester la paternité du mari de la gestatrice et faire établir la sienne, dès lors qu'il serait le père génétique de l'enfant.

Dans cette hypothèse, il appartiendrait, le cas échéant, au juge de déterminer les modalités de garde de l'enfant.

Le déséquilibre entre le père et la mère intentionnels que ces règles semblent entraîner ne constitue que la conséquence de l'application du droit commun de la filiation : la preuve de la maternité résulte de l'accouchement ; celle de la paternité se fait par tous moyens, le plus employé étant l'expertise génétique.

L'application de ces règles de droit commun permettrait au couple ayant demandé la gestation pour autrui de ne pas être privé de tout lien avec l'enfant.

Enfin, une telle hypothèse devrait être rarissime compte tenu des précautions prises pour éviter qu'une femme s'engage inconsidérément dans une grossesse pour autrui. Selon les indications recueillies par la délégation du groupe de travail qui s'est rendue au Royaume-Uni, où ces précautions sont nettement moindres, les cas où la mère de substitution aurait décidé de garder l'enfant seraient extrêmement rares.

Dans l'hypothèse , la plus probable, où la gestatrice n'aurait pas exprimé le souhait de devenir la mère légale de l'enfant dans les trois jours suivant l'accouchement, les noms des parents intentionnels devraient être inscrits sur les registres de l'état civil en exécution de la décision judiciaire ayant autorisé le transfert d'embryon et sur présentation de celle-ci par toute personne intéressée .

Ainsi, l'enfant ne pourrait être privé de filiation et les bénéficiaires de la gestation pour autrui ne pourraient se rétracter au dernier moment , au motif par exemple qu'ils se seraient séparés ou que l'enfant serait handicapé, pour se soustraire à leurs obligations légales de parents .

3. Le maintien en l'état des règles relatives à l'adoption et à l'assistance médicale à la procréation

Plusieurs personnes entendues par le groupe de travail se sont inquiétées des répercussions de la légalisation de la maternité pour autrui sur les règles relatives à l'assistance médicale à la procréation et à l'adoption.

* Les répercussions de la légalisation de la maternité pour autrui sur les règles relatives à l'assistance médicale à la procréation

Lors de son audition, Jean Hauser, professeur de droit, directeur du Centre européen de recherche sur la famille et les personnes de l'université Montesquieu - Bordeaux 4, a estimé que la légalisation de la maternité pour autrui impliquerait de revoir l'ensemble des lois de bioéthique. En fait, la principale question concerne le principe de l'anonymat des donneurs de gamètes .

Par la force des choses, la gestatrice ne pourrait être anonyme . La plupart des psychanalystes entendus par le groupe de travail estiment d'ailleurs qu'il serait préférable, pour l'enfant, qu'il la connaisse et puisse entretenir des relations avec elle, la comparaison avec une nourrice étant souvent effectuée. Lors de son audition, Marie-Christine Le Boursicot, magistrate, membre du Conseil supérieur de l'adoption, a estimé pour sa part qu'un secret relatif devrait être organisé pour la protéger : son identité serait consignée sur un registre spécial et accessible à l'enfant s'il en manifestait la volonté. Ce secret relatif ne vaudrait dans l'avenir que pour les tiers.

Pour autant, la légalisation de la maternité pour autrui implique-t-elle inéluctablement la levée de l'anonymat des donneurs de gamètes ?

Dans sa contribution écrite, Françoise Dekeuwer-Défossez, professeure émérite à l'université de Lille 2, fait observer que : « Les enfants nés d'une insémination artificielle avec donneur, qui ne peuvent connaître le nom de leur géniteur, auront beau jeu de s'estimer discriminés dans la mesure où les enfants nés d'une gestation pour autrui auront accès à leurs origines . »

Le don de gamètes et le don de gestation ne peuvent cependant être traités de manière identique, ce qu'illustrent les particularités du régime préconisé pour encadrer la gestation pour autrui.

Le groupe de travail considère donc que la question de la levée de l'anonymat des donneurs de gamètes peut et doit faire l'objet d'une réflexion et d'un débat spécifiques dans le cadre de la révision en préparation des lois de bioéthique .

* Les répercussions de la légalisation de la maternité pour autrui sur les règles relatives à l'adoption

Lors de son audition, Jean Hauser a estimé que la légalisation de la maternité pour autrui aurait également des répercussions sur le droit de l'adoption : « Comment interdire le contrat anticipé d'adoption, passé avec une mère qui doit accoucher, si l'on admet par ailleurs le contrat de mère de substitution même si elle est la mère biologique ? Comment continuer à réserver l'adoption plénière aux couples mariés ? »

Ces interrogations sont partagées par Françoise Dekeuwer-Défossez, qui fait valoir dans sa contribution écrite que : « Les risques de déstabilisation de l'adoption ne sont pas moindres. Actuellement, une frontière étanche sépare la famille qui abandonne l'enfant de celle qui l'adopte. Il n'est pas question en France d'« open adoption » et le passage obligatoire par l'aide sociale à l'enfance (ou par une oeuvre d'adoption), en empêchant toute communication, prémunit contre nombre de dérives, sentimentales ou financières. Or, la tentation existe bel et bien, aussi bien chez les adoptants que chez les mères qui ne peuvent pas assumer leur enfant, de rechercher un arrangement direct. Evidemment, la prohibition de l'article 348-5 du code civil serait fort affaiblie par l'admission de la gestation pour autrui qui repose nécessairement sur un arrangement direct entre la mère qui accouche et la famille qui élèvera l'enfant . »

Ces inquiétudes sont tout à fait légitimes. Toutefois, d'ores et déjà les règles d'accès à l'adoption et à l'assistance médicale à la procréation sont différentes et tous les couples désireux d'adopter ne rempliraient pas les conditions requises pour pouvoir bénéficier d'une gestation pour autrui. En outre, tous les couples désireux de recourir à une gestation pour autrui ne sont pas prêts à entreprendre une démarche en vue de l'adoption, et réciproquement.

Dès lors, le groupe de travail considère qu' il est possible de légaliser la gestation pour autrui sans nécessairement revoir l'ensemble des règles relatives à l'adoption.

* * *

Lors d'une réunion conjointe qui s'est tenue le mercredi 25 juin 2008, la commission des affaires sociales et la commission des lois du Sénat ont autorisé la publication du rapport du groupe de travail commun sur la maternité pour autrui , en rappelant que ses recommandations constituent une contribution à la réflexion en cours n'engageant ni les deux commissions ni, a fortiori , le Sénat tout entier .

* 114 Il s'agit du syndrome de Mayer Rokitansky Kuster Hauser (MRKH), qui toucherait une femme sur 4 000 à la naissance.

* 115 Fibromes, cancer, syndrome distilbène, accident obstétrical...

* 116 Article L. 2141-3 du code de la santé publique.

* 117 Article L. 1244-2 du code de la santé publique.

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