B. MAIS, AU TOTAL, LA REDISTRIBUTIVITÉ DES DÉPENSES PUBLIQUES D'ÉDUCATION APPARAÎT PLUTÔT FAIBLE

1. Une redistributivité qualitativement médiocre

La « massification » de l'enseignement primaire et secondaire s'accompagne de résultats qualitatifs nettement contrastés : la scolarité de masse n'a pas débouché sur le diplôme , ou la qualification, de masse , et les écarts dans les performances des élèves sont corrélés à des écarts d'origine sociale .

S' agissant du baccalauréat , alors qu'environ 70 % d'une génération atteignent la terminale, un peu plus de 60 % ont effectivement le bac, dont environ 32 % un bac général, 17 % un bac technique et 11 % un bac professionnel avec des disparités importantes entre catégories socioprofessionnelles . Près de 90 % des enfants de cadres obtiennent le diplôme contre environ 45 % des enfants d'ouvriers.

TAUX D'OBTENTION DU BACCALAURÉAT PAR GÉNÉRATION

Sources : Duru-Bellat et Kieffer (2000) jusqu'aux générations 1959-1963 et enquêtes Emploi, Insee ; calculs Cerc.

Ces résultats inégaux s'accompagnent d' une forte détermination sociale en termes de fréquentation des différentes filières du secondaire avec une surreprésentation des enfants de cadres dans les terminales générales et des enfants d'ouvriers dans les terminales professionnelles.

Cette dernière sélection a une très forte incidence sur la poursuite du parcours de formation puisque, par exemple, si la quasi-totalité des bacheliers généraux et 83 % des bacheliers technologiques poursuivent leurs études, 70 % des bacheliers professionnels arrêtent les leurs.

Or, si on veut bien se reporter aux développements de la deuxième partie du présent rapport sur la différenciation salariale en fonction du niveau de diplôme et de la durée réelle des études, on relèvera que ces inégalités qualitatives ont des répercussions durables sur les revenus tout au long de la vie professionnelle de même, d'ailleurs, que sur d'autres composantes du statut social, comme, par exemple, le risque de chômage.

C'est dès le primaire que cette différenciation sociale des performances se met en place , si l'on en croit les tests d'évaluation réalisés à l'entrée du CE2 et à celle de 6 ème .

SCORES SELON L'ORIGINE SOCIALE DES ÉLÈVES À L'ENTRÉE EN CE2 ET EN 6 ÈME

Note : scores obtenus à la rentrée de septembre 2000. Les protocoles d'évaluation reposent sur un nombre variable d'items (par exemple 94 items pour l'évaluation de français de CE2), les scores sont ici systématiquement ramenés à 100.

Sources : Andrieux, Dupé et Robin, 2001 et Andrieux, Brézillon et Chollet-Remvikos, 2001.

A partir d'écarts initiaux non négligeables (ceux mesurés en CE2), les écarts se creusent pendant le primaire, notamment en mathématiques.

Le « profit » tiré de l'enseignement de masse apparaît ainsi très inégalement réparti sur un plan qualitatif .

Pire encore, pour une proportion trop importante de chaque classe d'âge, il est, sinon nul, au moins si peu représentatif que le système scolaire se refuse à le reconnaître .

Ce constat s'applique aux 18 % de jeunes qui quittent l'école , soit sans qualification (6 %), soit sans CAP, BEP ou BAC .

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Au total, l'égalisation réelle des opportunités est très loin d'être à la hauteur de la redistributivité monétaire qu'impliquent, en apparence, les dépenses publiques d'éducation .

Au demeurant, la redistribution monétaire des dépenses publiques d'éducation est elle-même remise en cause quand on l'apprécie sous certains angles.

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