2. La reconnaissance inaboutie de la place des communes dans le statut de 2004
Dans le statut d'autonomie de 1996, seulement six articles concernaient les communes. En fait, aucun n'était entièrement dédié aux communes mais plutôt au rôle de l'Etat, du Territoire ou du tribunal administratif par rapport aux communes.
Au sein de la loi organique de 2004, 21 articles traitent des communes (la section 4 du chapitre 1 de la loi organique leur est spécifiquement dédiée). Par ailleurs, le titre III de la loi simple complétant le statut d'autonomie leur est entièrement consacré.
L'article 14 (10°) du statut donne à l'État la compétence pour fixer les règles relatives à l'administration, à l'organisation et aux compétences des communes, de leurs groupements et de leurs établissements publics, à la coopération intercommunale, au contrôle des actes des communes, de leurs groupements et de leurs établissements publics, au régime comptable et financier et au contrôle budgétaire de ces collectivités, à la fonction publique communale, au domaine public communal et au dénombrement de la population.
* La reconnaissance des communes polynésiennes en tant que collectivités territoriales de la République
L'article 6 de la loi organique énonce pour la première fois le principe selon lequel « Les communes de la Polynésie française, collectivités territoriales de la République, s'administrent librement dans les conditions prévues par la Constitution , la présente loi organique et les dispositions législatives qui leur sont applicables ».
Cet article marque, en droit, une étape décisive dans l'attribution d'un régime identique à celui de métropole et dans le renforcement du rôle des 48 communes polynésiennes
La qualification, par la loi organique, de collectivités territoriales de la République, implique que les communes polynésiennes se voient pleinement appliquer l'article 72 de la Constitution, qui affirme le principe de libre administration des collectivités territoriales et exclut toute hiérarchisation entre collectivités.
En effet, l'article 72 de la Constitution dispose qu'« aucune collectivité territoriale ne peut exercer une tutelle sur une autre ».
* Le statut de 2004 garantit aux communes une réserve minimale de compétences .
L'ancien statut ne déterminait pas les compétences des communes ; il se contentait de renvoyer à la législation applicable. En revanche, l'article 43 du nouveau statut réserve des compétences d'attribution aux communes, dès lors que la Polynésie française exerce une compétence de principe.
Dans le cadre des règles édictées par l'Etat et par la Polynésie française, il s'agit :
- de la police municipale ;
- de la voirie communale ;
- des cimetières ;
- des transports communaux ;
- de la construction, de l'entretien et du fonctionnement des écoles du premier degré ;
- de la distribution d'eau potable ;
- de la collecte et du traitement des ordures ménagères, de la collecte et du traitement des déchets végétaux ;
- ainsi que de la collecte et du traitement des eaux usées .
* Des possibilités de délégation de compétence de la collectivité aux communes restées inutilisées
Si le statut de 2004 autorise largement les délégations de compétence entre la Polynésie française et les communes, la collectivité n'a guère mis en oeuvre ce dispositif.
Le statut d'autonomie rappelle que l'Etat et la Polynésie française peuvent apporter leur concours technique et financier aux communes (art. 2 et 54 de la loi organique et article 10 de la loi simple). Ces concours peuvent être spécifiques. Ils sont organisés de la Polynésie française vers les communes.
Ainsi, selon l'article 54, la Polynésie française peut participer au fonctionnement des services municipaux par la mise à disposition de tout personnel de ses services, cabinets ministériels ou établissements publics dans le cadre de conventions passées entre le président de la Polynésie française et les communes.
Aux termes de l'article 48, les autorités de la Polynésie française peuvent déléguer aux maires les compétences nécessaires pour prendre les mesures individuelles d'application des actes prévus à l'article 140 dénommés lois du pays et des règlements édictés par ces autorités. La délégation de compétence ne peut intervenir qu'avec l'accord du conseil municipal de la commune et s'accompagne du transfert des moyens nécessaires à l'exercice des pouvoirs qui font l'objet de la délégation.
L'article 55 permet en outre à la Polynésie française de confier par convention aux communes ou aux établissements communaux ou de coopération intercommunale, au vu d'une demande ou d'un accord de leurs organes délibérants, la réalisation d'équipements collectifs ou la gestion de services publics relevant de sa compétence. La convention prévoit alors le concours financier de la Polynésie française.
M. Gaston Tong Sang, président de la Polynésie française, maire de Bora Bora et alors président du Syndicat pour la promotion des communes, a estimé que ces transferts devaient être mis en oeuvre, afin de confier par exemple aux communes l'entretien des quais, des routes et des aérodromes.
Le statut de 2004 organise par ailleurs la possibilité de délégations de compétences de la Polynésie française vers les communes . Ces délégations de compétence ne peuvent s'exercer, comme les précédentes, qu'avec l'accord du conseil municipal concerné et avec un transfert des moyens financiers nécessaires.
Le II de l'article 43 détermine les compétences à exercer avec l'appui de la Polynésie française. A la différence de la première catégorie de compétences propres aux communes, ce ne sont pas des compétences exclusives. Elles sont partagées avec la Polynésie française : les communes peuvent exercer en quelque sorte une option dans les conditions définies par les lois du pays et la réglementation édictée par la Polynésie française .
La réglementation édictée par la Polynésie française, peut par conséquent, dans ces matières, prévoir les modalités de l'intervention des communes, lorsque celles-ci souhaitent mettre en oeuvre la possibilité que leur offre la loi organique. Ces matières sont :
- les aides et interventions économiques,
- l'aide sociale,
- l'urbanisme ,
- la culture et le patrimoine local.
Ainsi, en application de l'article 50 du statut, dans les communes dotées d'un document d'urbanisme opposable aux tiers, le gouvernement de la Polynésie française peut donner, par arrêté pris sur la demande ou après accord du conseil municipal, compétence au maire, agissant au nom de la commune, soit pour l'instruction et la délivrance des autorisations individuelles d'occupation du sol et des certificats d'urbanisme , soit pour la seule délivrance de ces autorisations et certificats, dans les conditions prévues par la réglementation applicable en Polynésie française.
De nombreux élus ont d'ailleurs indiqué à vos rapporteurs que le délai d'obtention des autorisations d'urbanisme auprès de la collectivité était excessivement long et que les communes souhaiteraient pouvoir exercer cette compétence par délégation.
Par ailleurs, selon l'article 45, la Polynésie française peut, sur demande des conseils municipaux autoriser les communes à produire et distribuer l'électricité dans les limites de leur circonscription.
Ce travail en commun avec la Polynésie française peut également être initié par les communes :
- en contrepartie d'un apport de terrain, d'un financement ou d'une garantie financière des communes à la réalisation des programmes de logements sociaux, les communes signent des conventions particulières avec l'Etat et la Polynésie française. Ces conventions prévoient notamment les modalités de réservation de ces logements (art. 51). Cette possibilité apparaît toutefois très théorique puisque les communes ne sont guère en mesure de proposer des terrains ou une garantie financière, à l'inverse de la collectivité...
- les communes peuvent confier par convention à la Polynésie française la réalisation de projets d'équipements collectifs ou la gestion de services publics relevant de leur compétence. La convention prévoit alors la participation financière des communes (art. 55).