3. Des ressources propres très faibles, en contradiction avec le principe de libre administration
Les recettes de fonctionnement des communes de Polynésie française proviennent essentiellement des dotations de l'État : dotation globale de fonctionnement, dotation d'aménagement, dotation aux élus locaux, dotations spéciale au titre des instituteurs, dotation de développement rural 43 ( * ) .
Elles perçoivent une redevance pour l'enlèvement des ordures ménagères et peuvent établir une taxe sur l'électricité et une taxe de séjour.
Par ailleurs, l'assiette des centimes additionnels que peuvent lever les communes est limitée aux impôts territoriaux suivants : la contribution sur les licences, la taxe sur les propriétés bâties et les patentes. A ces recettes fiscales s'ajoutent un certain nombre de taxes qui sont pour l'essentiel perçues dans les Iles du Vent.
Les communes n'utilisent pas pleinement leur potentiel fiscal. La plupart des communes des archipels éloignés ont renoncé à mettre en place une taxe sur l'électricité, même si l'énergie électrique est fournie par des équipements communaux.
Les dépenses de fonctionnement représentent plus de 70 % du budget des communes polynésiennes.
Les ressources d'investissement des communes comprennent des dotations et des subventions de l'Etat (dotation globale d'équipement, Fonds d'Investissement pour le développement économique et social), des versements du Fonds intercommunal de péréquation et des subventions de la collectivité..
Lors de sa rencontre avec vos rapporteurs à l'assemblée de la Polynésie française, M. Oscar Temaru, président de cette assemblée, maire de Faa'a, a estimé que les communes polynésiennes n'avaient pas les moyens d'assumer leurs compétences.
M. Gaston Tong Sang, président de la Polynésie française, maire de Bora Bora et alors président du Syndicat pour la promotion des communes, a jugé indispensable de mettre en oeuvre l'émancipation des communes. Il a jugé que le changement, lors des élections municipales de mars 2008, de 35 équipes sur 48, devait favoriser cette mutation, à condition d'apporter aux nouveaux maires la formation nécessaire 44 ( * ) .
Soulignant l'insuffisance caractérisée du personnel d'encadrement dans les communes polynésiennes, il a précisé que le taux d'encadrement atteignait, pour 4.000 agents, 6 % en 2008, contre 1,5 % en 2003, mais restait très inférieur aux taux d'encadrement du personnel des communes de métropole, qui s'élève à 16 %.
M. Gaston Tong Sang a expliqué que la convention conclue par le Syndicat pour la promotion des communes avec le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) avait permis des progrès considérables dans la formation des élus et des agents municipaux. Le SPCPF a en effet signé en 1998 avec le CNFPT un partenariat, renouvelé tous les trois ans, pour l'élaboration de programmes de formation des élus et des personnels des communes polynésiennes.
Soulignant que les communes devaient assurer l'ensemble des services de proximité (adduction d'eau, électricité, gestion des déchets et traitement des eaux usées), il a expliqué qu'elles ne percevaient cependant aucune recette fiscale pour en assurer le financement , la taxe d'habitation et la taxe foncière étant perçues par le pays. La collectivité perçoit également une redevance sur l'activité des fermes perlières, qui n'apporte donc aucune recette directe aux communes des Tuamotu où les fermes sont pourtant implantées.
Les élus de Rangiroa ont également indiqué à vos rapporteurs que la collectivité percevait l'essentiel des recettes fiscales liées au tourisme et à la perliculture, alors que ces deux activités sont implantées dans les îles qui manquent de ressources.
M. Gaston Tong Sang, président de la Polynésie française, maire de Bora Bora, a indiqué que le pays et les communes percevaient respectivement une taxe de séjour, celle des communes ne pouvant dépasser 200 francs CFP par nuit, par touriste, et celle du pays étant proportionnelle au prix des nuitées et versée au GIE Tahiti Tourisme.
Il a insisté sur l'absence, en fait, de libre administration des communes en raison de leur dépendance totale à l'égard des transferts , les dotations de l'Etat et de la collectivité assurant près de 99 % des ressources des petites communes comme Rapa 45 ( * ) . Il a estimé que les communes bénéficiant d'une activité économique soutenue, comme Bora Bora, dépendaient encore à 70 % des dotations de l'Etat et du FIP, tandis que les grandes communes comme Papeete en dépendaient à 60 %.
Il a jugé qu'une modification des dispositions législatives relatives à la fiscalité en Polynésie française devrait :
- redéfinir les conditions de fixation des taux et de répartition des recettes fiscales aujourd'hui attribuées au pays ;
- prévoir un soutien spécifique de l'Etat afin de permettre aux communes d'assurer les services de proximité.
MM. Gaston Tong Sang et Michel Buillard, député-maire de Papeete, considérant la faiblesse des bases imposables de la plupart des communes, ont estimé la mise en oeuvre d'une nouvelle répartition des ressources fiscales du pays préférable à la création de nouveaux impôts .
Lors d'une réunion avec les services du haut commissariat, M. Jacques Witkowski, alors secrétaire général, a estimé que les communes étaient dans une position de vassalité à l'égard du territoire, l'absence de grilles définissant le taux de participation de la collectivité au financement des projets communaux permettant que cette participation varie fortement selon l'orientation politique et la docilité du maire.
M. Jean Petit, trésorier payeur général, a confirmé à vos rapporteurs que les communes polynésiennes ne disposaient d'aucune indépendance, en raison de l'absence de fiscalité locale. Il a précisé que si la collectivité n'attribuait pas de subvention de fonctionnement aux communes, le versement des aides à l'investissement était déterminant et très inégalitaire.
Il a cependant souligné que les communes étaient peu endettées, l'absence de ressources propres les empêchant de recourir à l'emprunt.
* 43 Voir en annexe au présent rapport les recettes de la commune de Rangiroa.
* 44 Vos rapporteurs ont également relevé que sur les 33 membres du conseil municipal de Taravao (Iles du Vent), 26 étaient de nouveaux élus.
* 45 La situation financière de cette commune au 18 juin 2008 fait en effet apparaître, pour l'exercice 2007, l'absence de ressources propres.