N° 485

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 24 juin 2009

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le bilan des maisons départementales des personnes handicapées ,

Par M. Paul BLANC et Mme Annie JARRAUD-VERGNOLLE,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About , président ; Mme Isabelle Debré, M. Gilbert Barbier, Mme Annie David, M. Gérard Dériot, Mmes Annie Jarraud-Vergnolle, Raymonde Le Texier, Catherine Procaccia, M. Jean-Marie Vanlerenberghe , vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Mme Muguette Dini, M. Jean-Marc Juilhard, Mmes Gisèle Printz, Patricia Schillinger , secrétaires ; Mmes Jacqueline Alquier, Brigitte Bout, M. Jean Boyer, Mme Claire-Lise Campion, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mme Jacqueline Chevé, M. Yves Daudigny, Mme Christiane Demontès, M. Jean Desessard, Mmes Sylvie Desmarescaux, Bernadette Dupont, M. Guy Fischer, Mme Samia Ghali, MM. Bruno Gilles, Jacques Gillot, Mme Colette Giudicelli, MM. Jean-Pierre Godefroy, Alain Gournac, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, M. Claude Jeannerot, Mme Christiane Kammermann, MM. Marc Laménie, Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Jacky Le Menn, Jean-François Mayet, Alain Milon, Mmes Isabelle Pasquet, Anne-Marie Payet, M. Louis Pinton, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, MM. René Teulade, Alain Vasselle, François Vendasi, René Vestri.


Vingt-cinq recommandations
pour améliorer le fonctionnement des MDPH

Faire de l'accueil une priorité et faciliter les démarches des personnes handicapées

1. Augmenter les moyens en personnels dédiés à l'accueil et renforcer leur formation pour faire face à l'afflux d'appels et l'augmentation de la fréquentation des MDPH ;

2. Généraliser la mise à disposition des usagers d'un numéro gratuit, y compris depuis un téléphone portable ;

3. Achever la modernisation des systèmes de traitement et de saisie des demandes et former les agents de l'accueil au nouveau logiciel afin qu'ils soient en mesure de délivrer instantanément les informations demandées par les usagers sur le suivi de leur dossier ;

4. Remplacer les formulaires actuels de demandes par le formulaire unique et permettre son téléchargement ;

5. Elargir les horaires d'ouverture au public et des permanences téléphoniques, pour atteindre dans toutes les MDPH une durée hebdomadaire minimale de trente-cinq heures.

Adapter la prestation de compensation du handicap

6. Etudier la possibilité de rendre la prestation de compensation du handicap (PCH) plus attractive, en particulier en prenant mieux en compte les aides ménagères qui pourraient faire l'objet d'un versement forfaitaire ;

7. Achever la mise en place de la PCH « enfant », avant le 1 er janvier 2010, en veillant à ce qu'elle réponde mieux aux besoins spécifiques des enfants et en formant les équipes pluridisciplinaires aux modalités de son évaluation.

Renforcer les moyens des équipes pluridisciplinaires et de la commission des droits et de l'autonomie pour améliorer l'instruction des demandes

8. Réduire les délais d'instruction de la PCH, de l'AAH, de l'orientation professionnelle et de la RQTH par une meilleure organisation des circuits d'évaluation et la fixation d'objectifs de performance ;

9. Poursuivre les opérations « zéro stock » dans les MDPH qui détiennent encore une quantité importante de dossiers en attente ;

10. Organiser la mise en oeuvre de la réforme de l'AAH en formant les équipes au futur guide d'évaluation et en organisant des partenariats avec les acteurs de l'insertion professionnelle, pour leur confier par exemple la réalisation de bilans de compétences ou d'entretiens d'orientation professionnelle ;

11. Développer l'utilisation de la procédure simplifiée pour certains types de prestations et renouvellements lorsqu'elle est recommandée par la CNSA ;

12. Autoriser et favoriser la mise en place de formations restreintes, de sections spécialisées ou géographiques de la CDAPH ;

13. Simplifier le traitement des cartes de stationnement, d'invalidité et de priorité et étudier la possibilité de les regrouper en un seul document ;

14. Favoriser l'expression du projet de vie et mieux prendre en compte les souhaits (auditions en commissions plus restreintes) et l'environnement (visites au domicile) de la personne handicapée dans l'élaboration de son plan personnalisé de compensation ;

15. Renforcer la formation des membres des équipes pluridisciplinaires et des CDAPH (connaissance des handicaps, procédures et règlementations en vigueur, guide barème, etc.) et développer une doctrine partagée des décisions prises par les CDAPH ;

16. Privilégier le traitement amiable des litiges et assurer la pluridisciplinarité et l'équité des décisions prises par les TCI et les Cnitaat.

Stabiliser l'organisation et les moyens des MDPH

17. Ecarter l'hypothèse d'une intégration des MDPH dans les services du conseil général qui présente le double risque d'un désengagement de l'Etat et de la remise en cause de la participation des associations ;

18. Engager une expertise juridique et une large concertation sur le statut des MDPH et des personnels, afin d'étudier la possibilité de maintenir le Gip et de l'aménager, tout en garantissant une stabilité des personnels et une meilleure vision à moyen terme des financements ;

19. Préparer la mise en place des maisons de l'autonomie en favorisant la mutualisation des moyens et en identifiant les convergences possibles entre prestations et services accordés aux personnes âgées et handicapées ;

20. Valoriser l'expertise des personnels des Gip et donner à tous des perspectives de carrière, en développant la validation des acquis de l'expérience et en établissant une convention collective propre aux MDPH ;

21. Développer plus largement les actions de formation et de validation des acquis de l'expérience ;

22. Stabiliser les agents mis à disposition par l'Etat, en leur proposant d'opter, dans un délai d'un an, soit pour leur intégration à la fonction publique territoriale, soit pour leur détachement pour une durée déterminée fixée par convention soit, si cela est possible, pour leur affectation aux MDPH, en conservant leur statut d'origine ;

23. Mieux identifier les contributions de chaque partenaire du Gip (conseil général, associations en particulier), en valorisant leurs apports en nature dans le cadre d'un « budget vérité » ;

24. Garantir la compensation effective, au coût réel, des postes qui devraient être mis à disposition par l'Etat, conformément à la convention constitutive, mais non pourvus dans les faits ;

25. Permettre aux MDPH d'assumer le développement de leurs missions grâce à la signature de conventions pluriannuelles d'objectifs et de moyens, précisant les financements alloués par l'Etat et la CNSA.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Créées par l'article 64 de la loi Handicap du 11 février 2005 1 ( * ) pour être les interlocuteurs uniques des personnes handicapées et les accompagner dans leurs démarches, les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) sont nées de la réunion des commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (Cotorep) et des commissions départementales de l'éducation spéciale (CDES), ainsi que des sites pour la vie autonome (SVA). Elles ont vu juridiquement le jour le 1 er janvier 2006 et ont été progressivement mises en place au cours de l'année 2006.

Ainsi que le soulignait Marie-Thérèse Boisseau lors de l'examen du projet de loi précité au Sénat 2 ( * ) , les maisons départementales des personnes handicapées ont été conçues pour mettre fin au « parcours du combattant » des familles et, parfois même, des professionnels, et pallier le déficit d'information et de conseil dont se plaignaient les personnes handicapées : innovation majeure qui devait donc permettre, à la fois, la simplification des démarches, l'accueil, l'écoute et l'accompagnement de la personne handicapée et de sa famille, tout au long de la prise de décision, en d'autres termes, l'humanisation de l'instruction des dossiers , grâce à une approche pluridisciplinaire et individualisée.

Malgré les difficultés qu'elles ont rencontrées lors de leur création (diversité des partenaires du groupement d'intérêt public [Gip], organisation et regroupement des personnels d'origines et de statuts différents, recherche d'un local, transfert des applications informatiques, mise en place des nouvelles méthodes de travail prévues par la loi, construction des partenariats locaux, etc.), les MDPH ont été globalement opérationnelles dès l'année 2007, en particulier grâce à la forte implication des conseils généraux et à l'appui logistique et financier de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

Alors qu'elles ont entamé leur troisième année de plein exercice, la commission des affaires sociales a souhaité dresser un premier bilan de leur activité, appréhender leurs difficultés et envisager quelques pistes de nature à les résoudre et à faciliter la réalisation des missions qui leur ont été confiées.

Outre les données chiffrées et les informations recueillies auprès de la CNSA, les auditions 3 ( * ) et les déplacements que ses rapporteurs ont réalisés dans plusieurs départements 4 ( * ) , ainsi que les témoignages volontaires reçus sur l'activité de certaines MDPH 5 ( * ) , ont contribué à éclairer sa réflexion et à relativiser les points de vue des différents acteurs - qui découlent bien souvent des particularités locales -, pour trouver des solutions aux difficultés rencontrées par les MDPH qui conviennent à l'ensemble des départements et s'inscrive, sans en trahir l'esprit, dans le cadre fixé par la loi.

Tel est l'objet de ce rapport.

I. LES MDPH : DES GUICHETS UNIQUES DOTÉS DE MISSIONS LARGES QUI TENDENT À S'ACCROÎTRE

Aux termes de la loi Handicap, les maisons départementales des personnes handicapées sont des guichets uniques qui doivent offrir aux usagers, dans un même lieu, l'accès à l'ensemble des droits et prestations auxquels ils peuvent prétendre.

A cette fin, sept missions principales leur ont été confiées : l'information ; l'accueil et l'écoute ; l'aide à la définition du projet de vie ; l'évaluation des demandes ; les décisions d'attribution et d'orientation ; le suivi de la mise en oeuvre desdites décisions ; enfin, l'accompagnement et la médiation.

Ces missions déjà vastes tendent à s'élargir et pèsent parfois fortement sur l'activité des MDPH. Pour répondre aux demandes des personnes handicapées et faire face aux évolutions de certaines de leurs missions, celles-ci doivent adapter leur fonctionnement et renforcer leurs moyens.

A. ACCUEIL ET INFORMATION : UNE DEMANDE CROISSANTE DES PERSONNES HANDICAPÉES

Parmi les missions qui incombent aux MDPH, l'accueil revêt une importance particulière puisqu'il vise à informer les personnes handicapées et leurs familles, à les accompagner dans leurs démarches et dans la formulation de leurs demandes. Il constitue le premier contact que les personnes handicapées ont avec la MDPH et un préalable à l'accès à tous les services qu'elle peut offrir.

La seconde enquête réalisée par la CNSA auprès des conseils généraux 6 ( * ) avait souligné la nécessité d'améliorer l'organisation de l'accueil, de mieux former les agents qui l'assurent et de favoriser la diffusion des informations en développant l'accessibilité des locaux et des services offerts par les MDPH.

Le rapport de la CNSA de 2008 7 ( * ) note de réels progrès, « tant par le nombre d'agents chargés de cette mission, que par l'organisation des locaux », désormais réunis en un lieu unique et auxquels ont très souvent été associées des antennes locales de proximité. Il est vrai que de nombreux départements ont fait de la mission d'accueil et d'information une priorité, choisissant même parfois de réaliser un audit spécifique sur cette activité et de former en conséquence les personnels qui y participent.

1. Des moyens qui gagneraient à être encore renforcés et mieux organisés pour faire face à l'afflux d'appels et de visites

Souvent organisé en « pôle », la fonction d'accueil regroupe :

- la réception des appels téléphoniques , dont le nombre n'a cessé d'augmenter chaque année dans l'ensemble des MDPH, atteignant dans certaines d'entre elles de 3 773 8 ( * ) à 7 860 appels par mois 9 ( * ) . Face à cet afflux croissant, le taux de réponse moyen demeure insuffisant, 40 % 10 ( * ) à 50 % 11 ( * ) des appels n'obtenant pas de réponse immédiate ;

- l'accueil électronique , encore peu usité, se développe peu à peu, certaines maisons ayant mis en place des « Boîtes mail contact » qui permettent de transférer, le cas échéant, aux services compétents les demandes des usagers. Ainsi, la MDPH de Paris, qui reçoit en moyenne jusqu'à 142 courriels par mois, s'est astreinte à y répondre dans un délai maximal de cinq jours ouvrables. 62 % sont traités directement par le Pôle accueil, les 38 % restants étant transférés vers les services spécialisés de la MDPH : il s'agit de demandes de formulaires, d'informations générales sur la législation ou le handicap, du suivi du dossier ou d'échanges avec des partenaires extérieurs ;

- l'activité d'accueil physique et d'orientation des personnes qui se présentent à la MDPH ou dans les antennes réparties sur le territoire départemental connaît aussi une augmentation significative. Elle est ainsi passée de 10 690 personnes en 2006 à 15 060 personnes en 2008 dans le Calvados, soit plus de 40 % de hausse de la fréquentation. A Paris, le nombre d'usagers accueillis a atteint 32 413 en 2008 ;

- enfin, certaines maisons ont mis en place un accueil de second niveau, plus spécialisé , assuré par une personne « référente » du dossier ou, parfois, par une équipe pluridisciplinaire qui assure des permanences hebdomadaires 12 ( * ) . Il permet d'aider les personnes handicapées à formuler leur demande, de favoriser l'expression de leurs besoins, de les informer de l'avancement de leur dossier et de les orienter dans leurs démarches.

En réponse aux demandes et exigences accrues des usagers, la plupart des maisons ont augmenté les moyens en personnels accordés à ce service (14 % en moyenne des agents y sont affectés), l'équipe pouvant représenter jusqu'à une dizaine d'agents dans un département de taille moyenne. D'autres ont repensé leur organisation, en confiant à certains agents dédiés à l'accueil physique la prise en charge des appels en attente, lorsqu'ils sont disponibles 13 ( * ) .

Par ailleurs, un réel effort de formation de ces agents a été réalisé . Certains d'entre eux ont été formés à la prise en charge des appels, ceux-ci ne devant pas excéder une durée de trois à quatre minutes, grâce à la mise en place d'un protocole de réponse et de fiches techniques qui permettent de répondre rapidement aux questions les plus fréquemment posées. D'autres ont été sensibilisés aux comportements à adopter face à une personne handicapée lors de sa visite à la MDPH.

Cet effort de formation, qui donne d'ores et déjà de bons résultats, devra toutefois être généralisé à l'ensemble des personnels des MDPH, afin d'offrir, partout sur le territoire, une même qualité d'accueil. Ces formations devront porter en particulier sur les modalités de prise en charge des appels téléphoniques, la connaissance du handicap, la gestion d'éventuels conflits, etc.

* 1 Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.

* 2 Séance du 1 er mars 2004.

* 3 Voir liste des personnes auditionnées en annexe.

* 4 MDPH de Paris, du Val-de-Marne, de Seine-et-Marne, des Ardennes, de l'Yonne et du Calvados.

* 5 MDPH de l'Aisne, de l'Essonne, de la Dordogne, du Loiret et des Pyrénées orientales.

* 6 CNSA : « Les MDPH vers la maturité ? » - Rapports annuels et statistiques 2007.

* 7 Rapport 2008, « Droit universel d'aide à l'autonomie : un socle, une nouvelle étape », octobre 2008.

* 8 MDPH du Calvados.

* 9 MDPH de Paris.

* 10 MDPH de Paris.

* 11 MDPH du Val-de-Marne.

* 12 MDPH du Calvados par exemple.

* 13 MDPH des Ardennes.

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