B. M. LAURENT MICHEL, DIRECTEUR DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DE LA PRÉVENTION DES RISQUES, MINISTÈRE DE L'ECOLOGIE, DE L'ENERGIE, DU DÉVELOPPEMENT DURABLE ET DE LA MER

Merci, Monsieur le Sénateur. Je vais essayer en quelques minutes et en étant évidemment complémentaire par rapport à l'exposé de cadrage qui vient d'être fait par François Gérard d'exposer la politique française en matière des risques liés aux tsunamis, exposé qui sera évidemment complété par mon collègue Bernard Deleplancque, du ministère de l'Intérieur. Comme vous le verrez en effet, ces politiques sont largement conjointes entre les deux ministères. J'indiquerai aussi ce qui relève à la fois de l'action nationale sur le territoire national et de l'action nationale en tant que participant à l'action internationale. Comme l'a expliqué François Gérard, s'il y a cette organisation internationale, c'est qu'il y a une réalité physique des phénomènes qui amène nécessairement à la coopération internationale.

J'exposerai rapidement quelques éléments sur les étapes de cette politique de prévention des risques, d'abord la connaissance et l'évaluation de l'aléa, puis (ce qui a déjà été évoqué), en raison de la nature du risque, le coeur du système, la mise en place des systèmes d'alerte. Par rapport à d'autres composantes ou d'autres politiques de la prévention des risques naturels, il y a des composantes qui sont beaucoup moins prégnantes dans le risque de tsunami, en particulier la protection ou le risque de vulnérabilité, même si on peut imaginer dans le cadre de politiques globales, certaines actions de prévention communes au risque de tsunami et au risque d'inondation. D'où le fait que, vraiment, la mise en place des systèmes d'alerte est fondamentale et qu'elle se couple avec le point suivant, l'information de la population (François Gérard l'a esquissé). Dans toute photo, il y a aussi les perspectives, au-delà du bilan et de l'état des lieux des actions, ce qui nous attend dans les quelques mois et années à venir.

La connaissance de l'aléa fait l'objet sur le territoire d'un certain nombre de travaux avec des études confiées entre autres au BRGM. L'état des lieux : des cartographies de l'aléa ont été réalisées sur les Antilles et la Méditerranée, avec l'identification des causes potentielles (séismes et glissements de terrain dits tsunamigènes) et l'élaboration de scénarios de propagation et de hauteur de vague sur la côte. Vous avez d'ailleurs une carte sur les Caraïbes.

Sur la Guyane, c'est en cours de réalisation, et sur la Méditerranée, il va falloir, dans le cadre du système d'alerte Atlantique Nord-Est et Méditerranée, affiner les cartographies avec des scénarios complémentaires.

Les systèmes d'alerte : sans surprise, vous voyez réapparaître les quatre bassins internationaux qui concernent la France, sans ordre d'importance. Le point d'abord sur la Méditerranée occidentale et l'Atlantique Nord-Est : en novembre à Athènes, dans le cadre du groupe intergouvernemental de coordination, la France a proposé de gérer un centre régional d'alerte aux tsunamis sur la Méditerranée occidentale et l'Atlantique Nord-Est, et par ailleurs, d'ores et déjà, le centre national qui pourrait être ensuite le support du centre régional a fait l'objet d'une décision conjointe des ministères chargés de l'Intérieur et du Développement durable pour le lancer avec une conduite du projet technique confiée au CEA en associant d'autres organismes, en particulier le SHOM et le CNRS. Le CEA sera le point focal pour le SATANEM. L'objectif est de proposer que ce centre national puisse être le coeur ou l'un des participants à un centre régional à financer de manière collective au niveau européen. Je n'en dis pas plus sur ce centre : Bernard Deleplancque a prévu de détailler davantage sa mise en oeuvre et on en parlera lors de la deuxième table ronde.

Dans l'océan Indien, la France, en s'articulant autour de l'île de La Réunion, travaille au réseau avec des actions qui ont été conduites sur le déploiement et la mise à niveau des réseaux de marégraphes, d'une part, impliquant SHOM, IPEV, les TAAF et le LEGOS, et des réseaux de sismographes, d'autre part. Cela devrait être achevé d'ici fin 2009 ; bien entendu, le volet « transmission de l'information » doit suivre.

Dans les Caraïbes, à nouveau on voit l'importance de la réflexion internationale au sens de ces grandes régions. Dans le cadre d'un groupe intergouvernemental de coordination, un dispositif est en cours de définition. Porto Rico pourrait apparaître comme le centre d'alerte régional. Évidemment, la France se doit de participer au réseau, en particulier les Antilles françaises, Météo France étant le point focal et l'Institut de physique du globe de Paris, le point de contact national.

Dernier point, qui aurait pu être le premier au niveau chronologique : au niveau de l'océan Pacifique, donc sur la Polynésie française et le Pacifique Sud-Ouest, la France participe au dispositif d'alerte en s'articulant autour du point focal qu'est le CEA. Il y a, bien entendu, encore des améliorations du système possibles et nécessaires en renforçant le dispositif d'instrumentation sur le Pacifique sud-ouest, la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et la Polynésie.

Je vous ai indiqué les grandes lignes. Dans les éléments importants qui seront détaillés par le ministère de l'Intérieur, il y a toute cette phase de qualification des missions de l'alerte, la question de la mise au point de l'alerte descendante comme on dit, pour que l'on puisse utiliser le signal de manière opérationnelle en termes de protection civile : cela vous sera exposé par la suite.

Un des éléments qui doit concourir à l'efficacité de manière générale en termes de prévention des risques naturels particulièrement sur les tsunamis, et donc dans l'alerte descendante et la réaction face au phénomène, est la sensibilisation des populations : un certain nombre d'actions démarrées depuis quelques années devront être poursuivies et amplifiées en liaison avec la mise en place opérationnelle ou le renforcement des systèmes d'alerte.

Par rapport aux jeunes populations, des documents à destination des enfants ont été préparés et peuvent s'intégrer à des programmes éducatifs à l'école, des formations pour les enseignants aussi sont conduites. Sur des bassins spécialement exposés, des actions ont été conduites par les préfectures des Antilles et, dans le cadre de l'élaboration du plan de secours spécialisé, de La Réunion. En particulier dans ce cadre, nous allons participer à un exercice d'alerte sur l'ensemble du bassin. On peut signaler une initiative européenne mais à laquelle on se doit de faire écho, la création, à l'initiative de la Commission européenne, d'un centre d'information aux tsunamis pour le bassin Atlantique Nord-Est et Méditerranée.

Pour les perspectives, je dirais que l'on a maintenant clairement identifié ce qu'il faut faire ; la volonté politique et les financements que vous avez évoqués, Monsieur le sénateur, dans vos rapports se traduisent progressivement par la mise en place de ces systèmes d'alerte. Il faut désormais coordonner nos systèmes nationaux avec la commission océanographique intergouvernementale, être force de proposition et participer au système. Au-delà de toute la mise en oeuvre opérationnelle, nous aurons à voir aussi si, pour le centre régional Atlantique Nord-Est et Méditerranée, un consortium de partenariat peut émerger autour ou avec notre centre d'alerte national. Le système d'alerte dans les Caraïbes doit encore se finaliser donc il faut que nous soyons force de proposition.

Je finirai ainsi : comme vous l'avez dit, la loi Grenelle I et l'amendement sénatorial ont prévu la mise en place des centres d'alerte, c'est en bonne voie. La loi a aussi demandé l'intégration des risques de tsunami dans les plans de prévention des risques majeurs. Que peut signifier l'intégration du risque de tsunami dans les plans de prévention des risques majeurs ? Les plans de prévention des risques majeurs travaillent beaucoup sur la réduction de la vulnérabilité, soit en limitant les constructions dans les zones exposées, soit en renforçant les dispositifs de protection des bâtiments. Dans le cadre du risque tsunami, il apparaît difficile, quand des bâtiments sont en bordure de mer de les protéger. Nous n'aurons pas une vision de compréhension des risques classiques comme pour d'autres risques. En revanche, on pourra peut-être se recaler dans la vision globale du risque de submersion marine puisque de toute façon c'est un risque qu'on doit évoquer avec les phénomènes de montée des eaux liés aux changements climatiques et les phénomènes de fortes vagues. Cela amènera sûrement, au moins dans des zones de côtes basses, à envisager ce que l'on appelle des replis stratégiques, comme cela se fait déjà dans certains pays. Le tsunami n'est pas forcément le facteur déclenchant, c'est un ensemble de considérants qui amèneront peut-être à dire que certaines zones peuvent envisager des replis ; à l'inverse, on imagine mal la ville de Nice se replier totalement sur ses collines.

Le plan de prévention des risques majeurs pour les tsunamis n'a pas tout à fait les mêmes considérants. Dans l'esprit du législateur, cela vise à développer l'information préventive et la sensibilisation des populations ; nous partageons tous ce souhait, qui devra être intégré dans les politiques à la fois de l'État mais aussi dans les politiques des communes, les dossiers communaux sur les risques majeurs, les plans communaux de sauvegarde articulés, bien entendu, avec les plans de l'État.

Voilà un point sur la gestion de l'alerte qui sera complété dans la foulée par le ministère de l'Intérieur.

M. Roland COURTEAU

Très bien. Merci Monsieur Laurent Michel. Sans attendre, je donne la parole à Monsieur Bernard Deleplancque, qui est sous-directeur de la gestion des risques au ministère de l'Intérieur, de l'Outre-mer et des collectivités territoriales.

Je voudrais auparavant excuser le premier vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, Monsieur Jean-Claude Etienne, qui, au dernier moment, a eu un problème de transport, mais son assistant est là.

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