Audition de MM. Hervé GISSEROT, président-directeur général,
Jean-Noël BAIL, directeur des affaires économiques et gouvernementales,
David LECHLEITER, directeur des opérations vaccins,
et Mme Soizic COURCIER, directeur médical,
du laboratoire GlaxoSmithKline France
(mercredi 30 mars 2010)

M. François Autain, président - Mes chers collègues, nous poursuivons le cycle de nos auditions commencées la semaine dernière avec celle des représentants du laboratoire GlaxoSmithKline France, MM. Hervé Gisserot, président directeur général et Jean-Noël Bail, directeur des affaires économiques et gouvernementales.

Nous attendons également M. David Lechleiter, directeur des opérations vaccins et Mme Soizic Courcier, directeur médical.

Conformément aux termes de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, MM. Hervé Gisserot et Jean-Noël Bail prêtent serment.

M. François Autain, président - Je vous remercie.

Je vous propose de commencer votre audition par un bref exposé liminaire puis de répondre aux questions de notre rapporteur, M. Alain Milon et des membres de la commission.

Vous avez la parole.

M. Hervé Gisserot - Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, je vous remercie de nous donner l'opportunité de nous exprimer devant la représentation nationale dans le cadre de cette commission d'enquête.

Permettez-moi tout d'abord de vous rappeler en quelques mots la présence de GSK en France : avec près de 5 000 employés répartis sur toute la chaîne de valeur ajoutée du médicament - de la recherche à la commercialisation - nous disposons de quatre sites industriels et d'un site de recherche et développement.

Nous sommes également le premier laboratoire international en termes d'investissements sur notre territoire avec 850 millions d'euros investis au cours de ces trois dernières années.

Avec mes collègues, nous sommes à votre entière disposition pour répondre à vos questions mais je souhaiterais auparavant vous exposer brièvement quelle a été la contribution de GSK dans le contexte de la pandémie H1N1.

Comment GSK s'est-il organisé en amont et pendant la pandémie ?

Comme vous le savez, les pandémies peuvent être dévastatrices tant en termes de santé publique que sur le plan économique. C'est pourquoi, depuis près de dix ans, l'OMS a fait de la préparation au risque de pandémie une de ses priorités, incitant les gouvernements ainsi que l'industrie pharmaceutique à se préparer avec les solutions adaptées.

Dans ce contexte, GSK, en tant qu'acteur de santé publique, souhaitait être présent et ce sont de très importants investissements et dépenses qui ont été effectués ces dernières années, à hauteur de 2,5 milliards d'euros dans le domaine de la recherche.

M. François Autain, président - Mme Soizic Courcier et M. David Lechleiter venant d'arriver, je vais leur demander de prêter serment à leur tour.

Conformément aux termes de l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, Mme Soizic Courcier et M. David Lechleiter prêtent serment.

M. François Autain, président - Merci.

Nous pouvons poursuivre.

M. Hervé Gisserot - Depuis 2005, des contacts réguliers ont eu lieu avec la DGS pour tenir les autorités informées pas à pas des données cliniques et des démarches réglementaires sur le vaccin H5N1.

Mon prédécesseur, M. Christophe Weber, a également été auditionné en novembre 2005 par une mission d'information sur la grippe aviaire présidée par les députés MM. Jean-Marie Le Guen et Jean-Pierre Door sur le développement de notre vaccin adjuvanté.

Depuis le mois d'avril 2009, nos équipes de recherche et développement, industrielles, réglementaires et de pharmacovigilance se sont mobilisées sans relâche pour faire face aux demandes des Etats face à cette crise sanitaire.

En termes de production, nous avons revu nos priorités en fonction des recommandations de l'OMS. Cette décision nous a amenés à décaler dans le temps la production de certains vaccins moins prioritaires en termes de santé publique.

Pour préparer notre réponse aux côté des autorités à la pandémie H1N1, GSK s'est appuyé sur sa présence industrielle en France.

Nous avons ainsi accéléré nos investissements à Saint-Amand-les-Eaux, unité où, depuis plus de trois ans, nous avons investi plus de 550 millions d'euros, de manière à accroître la capacité mondiale de production de notre adjuvant ASO 3, partie intégrante du vaccin H1N1.

Nous avons également signé de nombreux accords de sous-traitance dans le domaine du remplissage, goulet d'étranglement de la production de vaccins, car les capacités industrielles de GSK et d'autres n'étaient pas suffisantes pour subvenir aux demandes des autorités, qu'elles soient françaises ou autres. Nous avons mobilisé nos réseaux industriels internes, comme notre site de Notre-Dame-de-Bonville ; nous avons également signé, en France, des contrats de sous-traitance avec les laboratoires Pierre Fabre.

Enfin, à partir d'Evreux, notre plus grand site industriel en France, nous avons exporté la moitié de la quantité mondiale de notre antiviral Relenza vers le reste du monde.

Dans ce contexte très évolutif, M. Jean Stephenne, président de GSK vaccins au niveau mondial, a adressé des courriers réguliers, une à deux fois par mois, à l'ensemble des gouvernements européens pour les tenir informés en temps réel et en toute transparence des progrès réalisés sur le plan industriel, réglementaire et clinique. Nous avons également souligné les éventuelles difficultés à anticiper en essayant des les résoudre avec les autorités.

J'en viens maintenant à la synthèse des conditions de négociation avec les autorités françaises et à leur calendrier.

A la demande de la DGS, les discussions se sont accélérées début mai 2009, suite au premier cas de grippe porcine survenu au Mexique et à la déclaration de pandémie de niveau 5 par l'OMS le 29 avril.

Les autorités ont rapidement identifié l'intérêt du vaccin GSK sur au moins trois aspects : nous disposions d'abord d'un dossier prototype H5N1 déjà approuvé par l'Agence européenne du médicament.

En second lieu, notre vaccin est adjuvanté et permet donc une réduction significative de la quantité d'antigène associée et une meilleure protection croisée.

Enfin, la réutilisation du vaccin est possible au-delà de la pandémie en cours grâce au stockage séparé de l'adjuvant et de l'antigène, à condition d'avoir obtenu les autorisations réglementaires.

M. Jean-Jacques Jégou - A combien s'élèvent les durées de conservation ?

M. Hervé Gisserot - Elles sont différentes selon les lots.

M. David Lechleiter - La durée de conservation de l'antigène est de 18 mois et celle de l'adjuvant de 36 mois. Ce sont les données mentionnées au contrat avec la France. Les produits sont livrés en flacons séparés. La reconstitution a lieu juste avant l'injection.

Un grand nombre de lots a été livré entre octobre et février ; certains ont été utilisés au début de la campagne de vaccinations. Quelques-uns sont encore stockés aujourd'hui.

M. Hervé Gisserot - L'intérêt des autorités françaises s'est traduit le 14 mai par une lettre d'intention portant sur la commande de 50 millions de doses de vaccins H1N1-GSK signée par le directeur de cabinet de Mme la ministre.

Notre production de vaccins a démarré le 22 juin, en amont de la signature du contrat avec la France. Ce contrat a été signé avec l'EPRUS le 10 juillet après plusieurs semaines de négociations.

On peut qualifier ce processus de décision de rapide ; je crois qu'il a été géré avec efficacité et exigence sur le plan scientifique et médical et également avec un grand sens mutuel des responsabilités.

Pourquoi était-il nécessaire de tenir des délais courts ? Il y avait deux raisons. En premier lieu, la capacité de production était limitée au niveau mondial, d'où la nécessité pour la France de se positionner très vite pour sécuriser les quantités souhaitées, particulièrement en l'absence d'un contrat de préréservation avec GSK. Nous étions liés contractuellement depuis parfois plusieurs années avec un certain nombre d'Etats. Tel n'était pas le cas pour la France ; si la France souhaitait bénéficier en priorité du vaccin GSK, il fallait qu'elle se positionne rapidement. En second lieu, nous devions définir nos propres besoins en termes d'investissement et de capacité de production.

Quelles ont été les étapes clés ? L'avis positif de la Commission européenne a été reçu le 29 septembre.

GSK a souhaité que tous les pays européens ayant commandé le vaccin reçoivent les premières livraisons en même temps. C'est dans ce cadre que la France a reçu 1,1 million de doses le 9 octobre 2009.

Au 4 janvier 2010, date de la notification unilatérale par le Gouvernement de la modification du contrat, 12,3 millions de doses avaient été mises à disposition, soit 25 % du total selon le planning de livraison indicatif.

Les 18 millions de doses souhaitées par la France suite à la révision unilatérale du marché ont fini d'être livrés le 16 février 2010.

Pour les 32 millions de doses restantes, la grande majorité des étapes industrielles avait déjà été réalisée à la date de la notification du 4 janvier 2010. Toute la production en vrac était ainsi finalisée et la moitié des quantités était déjà conditionnée en flacons remplis.

A ce jour, les discussions se poursuivent avec l'EPRUS dans le but d'aboutir à un accord transactionnel souhaité par GSK et par les autorités.

Des accords similaires ont déjà été signés par GSK avec une vingtaine de pays européens - Allemagne, Hollande, Belgique - ainsi qu'avec le Japon, à hauteur des deux tiers de la valeur initiale du contrat.

C'est sur cette base que nous avons fait une proposition étayée à l'EPRUS et GSK n'identifie aucun élément spécifique, dans le contexte français, qui justifierait une approche différente.

Avant de conclure, je tiens à souligner l'esprit de responsabilité dans lequel GSK s'est inscrit à tous les niveaux, qu'ils soient scientifique, contractuel et sociétal.

En termes de responsabilité scientifique et réglementaire, les décisions appartiennent aux autorités internationales, européennes et nationales compétentes. Notre responsabilité est de fournir les données nécessaires à leur prise de décision éclairée.

Tout au long du développement et de la fabrication du vaccin, les données ont été soumises en intégralité et en totale transparence à l'EMA et à l'AFSSAPS au fur et à mesure de leur génération.

En termes de responsabilité contractuelle, dans le cas d'une vaccination de masse et dans un contexte pandémique, il est non seulement logique mais incontournable pour un industriel que l'Etat prenne à sa charge la responsabilité de l'utilisation du produit. Ce principe est d'ailleurs mis en place dans tous les pays européens.

En revanche, nous assumons pleinement et entièrement notre responsabilité pharmaceutique en termes de qualité des produits délivrés.

En termes de responsabilité sociétale, depuis l'émergence du risque pandémique au printemps 2009, GSK s'est tenu à une position constante de réserve en termes de communication, vis-à-vis notamment du grand public.

Nous n'avons jamais, tant au niveau international que français, participé à quelque communication que ce soit qui aurait pu majorer la perception du risque pandémique ou qui aurait surestimé le bénéfice vaccinal.

Dans notre esprit, il appartenait aux pouvoirs publics, sans la moindre interférence de notre part, de communiquer auprès du grand public sur la stratégie choisie de gestion de la pandémie.

En conclusion, dans un contexte de grande incertitude scientifique et épidémiologique et face aux critiques rétrospectives, il me paraît important de souligner que pas un jour n'a été perdu.

Moins de cinq mois se sont écoulés entre la lettre d'intention et la livraison des premières doses le 9 octobre ; ces doses ont permis, comme vous le savez, de démarrer la campagne de vaccination auprès des professionnels de santé.

GSK se veut acteur de santé publique et partenaire dans la durée des autorités françaises, quelles que soient les circonstances.

Nous sommes tout à fait ouverts aux réflexions en cours afin d'apprendre de cet exercice pandémique grandeur nature, comment mieux nous préparer tous ensemble - Gouvernement, agences, professions de santé, citoyens et industriels - aux inévitables pandémies du futur.

Gageons que la commission d'enquête que vous présidez contribuera à mieux nous préparer collectivement à ces enjeux de santé publique.

M. François Autain, président - Notre souhait à tous est de clarifier les conditions dans lesquelles a été gérée cette crise.

La parole est au rapporteur.

M. Alain Milon, rapporteur - Concernant les investissements, quand le groupe GSK a-t-il fait le choix stratégique d'investir dans la fabrication de vaccins contre les grippes pandémiques ?

Quels ont été la nature et le montant de ces investissements ?

Lors de son audition par la commission d'enquête, le directeur général de la santé a relevé que l'industrie pharmaceutique n'était tout simplement pas prête à répondre à une demande importante de vaccins. Cette affirmation s'applique-t-elle à votre entreprise ?

GSK a-t-il accepté des commandes de vaccin H1N1 qu'il n'était pas en mesure d'honorer ?

Pourquoi votre laboratoire n'a-t-il pas été candidat à l'appel d'offres lancé en 2005 par le gouvernement français pour la fourniture de vaccins contre le virus H5N1 ?

M. Hervé Gisserot - S'agissant de la dernière question, en 2005, nous avions le sentiment de ne pas avoir encore suffisamment avancé dans nos recherches pour pouvoir nous engager dans un tel contrat de préréservation. Voilà pourquoi nous n'avons pas répondu à cet appel d'offres.

Pour pouvoir être un acteur responsable vis-à-vis des autorités, il nous fallait avoir plus développé, recherché, de façon à nous assurer que nous avions un produit à la clef.

Voilà ce qui a incité GSK à avoir cette attitude réservée à l'époque de l'appel d'offres.

M. François Autain, président - Deux laboratoires ont signé cet accord en 2005. Il s'agissait à l'époque de Sanofi Pasteur et de Chiron, qui a été ensuite absorbé par Novartis.

Il semble que, dans les autres pays, GSK ait signé ces accords en 2006. Est-ce exact ?

M. David Lechleiter - De mémoire, GSK est entré en 2006 dans ces différents pays, quelques mois après la date à laquelle la France avait décidé de poser la question.

GSK avait décidé, au moment où la France avait commencé ce processus, qu'il n'avait pas suffisamment de certitudes.

M. Michel Guerry - A ce moment, n'étiez-vous pas déjà fabricant de la moitié de la production mondiale à Evreux ?

M. Hervé Gisserot - Nous étions déjà en relation avec les autorités françaises à propos du Relenza. Dans le compte rendu de l'audition de mon prédécesseur, en 2005, on peut lire : « Lorsque le Gouvernement a lancé l'appel d'offres, nous avons estimé qu'il était trop tôt pour s'engager sur quoi que ce soit ; rien ne dit que les fabricants parviennent à mettre au point un vaccin suffisamment immunogène pour que la réaction soit suffisante après deux doses ».

M. Alain Milon, rapporteur - Il parle bien de deux doses ?

M. Hervé Gisserot - A l'époque, le vaccin H5N1 comportait deux doses.

En revanche, dès que nous avons eu le sentiment de disposer d'un vaccin prometteur, nous avons informé les autorités. Certes, nous n'avions pas répondu à l'appel d'offres mais il ne fallait pas que les autorités passent à côté d'une éventuelle opportunité.

M. Jean-Jacques Jégou - A quelle date la souche H1N1 vous a-t-elle été remise par l'OMS ?

M. Hervé Gisserot - La souche a été remise aux différents laboratoires non par l'OMS mais par les laboratoires de référence travaillant au nom de l'OMS. Pour ce qui nous concerne, nous avons reçu la souche utilisée pour la production le 22 juin 2009.

M. David Lechleiter - S'agissant de nos investissements, ils ont commencé en 2004 dans le domaine pandémique. Ces investissements ont été très significatifs en 2005/2006. Ils s'étalent sur la période 2004/2010. N'ayant commencé qu'en 2004, il est compréhensible qu'en 2005, nous n'ayons pas estimé être suffisamment prêts, notamment en matière de capacités industrielles, pour répondre à la demande de l'Etat français.

M. Hervé Gisserot - Bâtir un dossier approuvé par l'Agence européenne du médicament nécessite un certain développement. Il s'agit, par anticipation, même si la demande excédait l'offre, d'essayer d'avoir des capacités de production mondiale permettant de répondre au mieux de nos possibilités aux demandes potentielles des différents Etats.

M. David Lechleiter - L'engagement que GSK a pris vis-à-vis des différents Etats de leur livrer les quantités demandées était-il mesuré ? Nous avons simulé des projections au moment où nous avons signé les contrats avec les différents Etats sur la base de rendements hypothétiques de la souche antigénique, sans connaître bien entendu les résultats des essais cliniques immunologiques et en fonction de l'expérience tirée du H5N1 et des vaccins saisonniers.

Il est fréquent, pour la production d'un vaccin grippal saisonnier, que le rendement antigénique oscille entre 40 et 70 mg par oeuf ; pour la projection des capacités industrielles que nous avons allouées aux différents Etats dans ce processus, on s'était basé sur un rendement conservateur à 22 mg, bien en-deçà de la fourchette normale de rendement de la souche antigénique par oeuf, ce qui nous plaçait dans une zone suffisamment confortable pour espérer pouvoir livrer à temps.

On a dû bien entendu jouer avec un grand nombre d'autres incertitudes puisqu'au moment où nous avons signé les lettres d'intention ou les contrats, nous ne savions pas à quel moment nous recevrions les souches des laboratoires de référence, laquelle serait la plus efficace en production, quels seraient les rendements, à quelle date nous pourrions utiliser toutes les capacités de remplissage, etc.

Comme pour tous les autres industriels, des choix ont dû être faits, avec un grand nombre d'incertitudes mais je pense que les hypothèses étaient raisonnables.

Il s'est avéré que le rendement de la souche H1N1 a été très faible, ce qui a été une grande surprise pour tous les laboratoires, y compris pour les laboratoires de référence et pour l'OMS. Ceci nous a mis un peu en retard par rapport à notre planification, bien que nous ayons pu commencer à livrer les premières doses dès octobre, plus tôt que d'habitude. Ceci révèle le niveau d'énergie que nous avons déployé pour accélérer la production. Le rythme de production et de livraison a ensuite été plus conservateur pour tous les laboratoires.

M. Alain Milon, rapporteur - Quand GSK a-t-il été contacté par le Gouvernement français en vue de l'achat de vaccins contre la grippe H1N1 ? Qui étaient vos interlocuteurs du côté de l'Etat ? Quel a été le calendrier de ces négociations ?

M. Hervé Gisserot - Nous étions depuis plusieurs années en contact régulier avec les autorités. Il se trouve que, début avril, nous avions eu un échange avec M. Didier Houssin et une partie des experts de la DGS pour parler du H5N1, présenter nos dernières données et faire un point d'étape régulier.

Quinze jours plus tard s'est déclaré le premier cas de grippe au Mexique ; début mai, nous avons été contactés par la DGS pour accélérer ces discussions. Nous avons passé le pont du 8 mai en conférence téléphonique permanente avec M. Didier Houssin ; M. François Hébert était également impliqué dans ces discussions à la fois avec l'équipe française et un certain nombre de représentants de la division « vaccins monde » de GSK basée en Belgique.

Ces discussions ont abouti, le 14 mai, à cette lettre d'intention. Jusqu'au 14 mai, dans notre esprit, M. Didier Houssin était celui qui pilotait l'ensemble des discussions, de nature médico-scientifique. On ne connaissait pas encore le montant des doses et on n'avait pas abordé l'ensemble des aspects contractuels. Vous avez probablement eu accès à cette lettre d'intention, signée par M. Georges-François Leclerc, le 14 mai.

M. François Autain, président - On va l'avoir, semble-t-il.

M. Hervé Gisserot - Je l'ai ici !

M. Jean-Jacques Jégou - Les discussions avec la DGS faisaient-elles apparaître que les achats de vaccins auprès de GSK s'inscrivaient dans une stratégie de vaccination de l'ensemble de la population ou avaient-ils pour objet de compléter d'autres commandes ?

Mme Soizic Courcier - A ce moment-là, je crois que le ministère de la santé n'avait pas décidé quelle stratégie vaccinale il allait mettre en place.

M. Hervé Gisserot - Les autorités ne nous ont jamais consultés sur la stratégie vaccinale.

La lettre d'intention du 14 mai, signée par M. Georges-François Leclerc, indique : « Comme suite à votre offre par courrier électronique du 10 mai 2009, adressée au directeur général de la santé, je vous confirme l'intention du Gouvernement français de procéder à la commande de 50 millions de doses adjuvant et antigène de vaccins adjuvantés contre le nouveau virus A H1N1 ».

M. Guy Fischer - Le Gouvernement vous a-t-il proposé de fragmenter sa commande ?

M. Hervé Gisserot - Je pense que le Gouvernement aurait souhaité fragmenter mais la France n'avait pas de contrat de préréservation. Nous avons permis à la France, qui était très intéressée par le vaccin de GSK, de se retrouver sur un pied d'égalité avec des pays qui avaient signé un contrat de préréservation deux ou trois ans auparavant et qui avaient payé pour cela. Il y a presque là une dimension éthique !

M. Jean-Jacques Jégou - Pensez-vous que la DGS a commandé une dose importante pour rattraper le retard de l'Etat français ?

M. Hervé Gisserot - Nous n'avions aucune information sur le statut des autres industriels, ni sur leur stratégie, qui n'était d'ailleurs pas déterminée. Elle l'aurait été que ceci aurait été fait avec trop de rapidité.

Le Gouvernement a souhaité se positionner. Le professeur Didier Houssin évoquait le fait que nous étions en situation de proposer des parts de production. C'est ce que nous avions fait avec les Anglais et les Allemands.

M. Alain Milon, rapporteur - Le 10 mai, le Gouvernement répond donc à vos propositions ?

M. Hervé Gisserot - Nous-mêmes étions en négociation interne avec notre groupe, de manière à pouvoir garantir une certaine capacité de production et le Gouvernement répond en effet à notre offre du 10 mai.

La lettre comporte également le prix par dose.

M. Alain Milon, rapporteur - Comment a été déterminé le prix unitaire de dose proposé par votre laboratoire à l'Etat ? Ce prix a-t-il été différent de celui proposé à d'autres Etats européens et si oui, pourquoi ? Y-a-t-il eu des négociations sur le prix avec les autorités françaises ?

M. Hervé Gisserot - La première phase s'est terminée le 14 mai. A partir de cette date, nous sommes entrés dans une autre phase qui a été pilotée par l'EPRUS, tout particulièrement par le général Avaro, directeur général adjoint de l'EPRUS. De notre côté, c'est M. David Lechleiter qui a conduit les négociations avec l'EPRUS. Celles-ci ont fait l'objet de nombreuses réunions entre le 14 mai et le 10 juillet, date de la signature, réunion à laquelle nous étions un certain nombre à venir en toute fin de processus. J'y étais, M. Thierry Coudert, directeur général de l'EPRUS également, ainsi que MM. Jean Marimbert, directeur général de l'AFSSAPS, et Noël Renaudin, président du Comité économique des produits de santé. C'est au cours de cette réunion que nous avons finalisé le contrat.

A partir de ce moment, nous avons eu deux types de relations, l'une très opérationnelle avec l'EPRUS, l'autre avec le cabinet de la ministre de manière à l'informer sur les éventuelles difficultés à anticiper, afin de mobiliser les autorités françaises vis-à-vis de l'Agence européenne des médicaments et d'avoir un parcours règlementaire aussi peu sinueux que possible.

M. Jean-Noël Bail - S'agissant des prix, la politique tarifaire a été, pour l'ensemble des pays européens avec lesquels nous avons contracté, de 7 euros par dose. Ce prix était cohérent avec nos pratiques, qui s'échelonnent entre 4 et 15 euros selon les pays, la France, pour son vaccin saisonnier, étant plutôt dans le bas de cette fourchette, avec 4,11 euros.

Le prix de 7 euros est un point médian, ce qui nous a permis de dire que pour le vaccin H1N1, nous pratiquions une politique cohérente avec nos prix pour les vaccins saisonniers.

M. Hervé Gisserot - Certains commentaires laissent penser que nous aurions utilisé une sorte de position de force pour fixer un tarif.

M. François Autain, président - C'est exact !

M. Hervé Gisserot - Le tarif dont nous parlons a été fixé dans les contrats de préréservation. Nous n'étions alors pas dans un contexte pandémique. Les gouvernements n'avaient pas le couteau sous la gorge. Ce prix n'a donc pas été déterminé le 14 mai mais dans ces contrats signés en amont !

Par ailleurs, la France, qui n'avait pas de contrat de préréservation avec GSK, en avait avec deux autres sociétés, à des tarifs plus élevés, au moins pour l'une d'elles.

Nous avons donc choisi au contraire la seule voie simple et responsable : trouver un prix moyen européen, ne pas négocier et s'assurer que toutes nos énergies aillent vers la mise à disposition du vaccin dans les meilleurs délais.

M. Alain Milon, rapporteur - C'était l'objet de ma question suivante : les interlocuteurs de la commission ont fait état du rapport de force favorable aux laboratoires au moment de la négociation des contrats. Avez-vous la même perception du contexte de ces négociations ? Vous y avez donc répondu.

Par ailleurs, ils ont également souligné que la France avait été contrainte de passer des commandes fermes pour la totalité de ses besoins, car les laboratoires avaient indiqué que les commandes optionnelles ne pourraient, si elles étaient confirmées, être livrées qu'en 2010.

GSK s'est-il opposé à l'inclusion d'une clause de révision dans le contrat passé avec la France ?

D'autres Etats ont-ils obtenu de passer des commandes révisables ?

M. Hervé Gisserot - On verse peut-être là dans un débat qui a une dimension sémantique.

Que signifie « rapport de force » ? Nous avons souvent eu le sentiment d'être nous-mêmes sous une pression extrême pour pouvoir satisfaire l'ensemble des autorités qui souhaitaient avoir accès à notre vaccin. Dans les premiers jours de mai, nous avons effectivement mis les autorités face à leurs responsabilités en leur disant que la France pouvait encore être traitée sur un pied d'égalité par rapport aux Allemands et aux Anglais.

Il ne s'agissait pas de faire usage d'une position de force mais de ne pas laisser espérer quelque chose qui ne se serait pas produit.

M. François Autain, président - Si une partie de la commande n'avait pas pu être livrée, cela n'aurait pas été dramatique !

M. Hervé Gisserot - On avait besoin d'un engagement clair, au-delà de la simple intention.

M. Alain Milon, rapporteur - Cela peut être compréhensible !

M. David Lechleiter - Pour mémoire, GSK a souhaité, dans ses relations avec les Etats européens, opérer de la façon la plus transparente et la plus consistante possible. Cela a pu être perçu comme une certaine intransigeance, GSK ayant souhaité que les conditions avec les différents Etats soient à peu près les mêmes, notamment pour ce qui relevait de la forme du contrat. On disposait donc de relativement peu de flexibilité mais nous agissions sur la base d'un contrat accepté par tous les Etats européens.

Par ailleurs, à l'époque de la négociation du contrat sur lequel la France a dû se positionner relativement rapidement pour confirmer les commandes, nous commencions la production des premiers lots. Il était très important, fin juin, que la France confirme sa position pour pouvoir réserver les premiers lots qui entraient en production et qui ont été livrés début octobre. On souhaitait, dans un souci d'éthique et de transparence, que tous les Etats européens reçoivent en même temps les premières doses.

La pression temporelle que l'Etat français a sans doute perçue venait de cette réalité industrielle, que d'autres Etats n'ont pas rencontrée parce qu'ils avaient réservé leurs doses en 2005 ou 2006.

M. Hervé Gisserot - Ceci laisse à penser qu'il serait sage de préparer les futures pandémies dans la sérénité !

M. François Autain, président - J'espère que l'on n'aura pas une pandémie par an ! Compte tenu des modalités de financement de l'OMS, qui compte assujettir les fabricants de vaccins à une taxe, il est possible que l'on ait d'autant plus de pandémies que les besoins de l'OMS sont importants mais si cette modalité de financement est remise en cause, le rythme des pandémies sera peut-être un peu plus normal !

On en a eu trois au cours du siècle dernier ; je ne vois pas pour quelle raison on en aurait une dizaine au cours de celui-ci ! Je sais que chacun attend avec impatience cette pandémie dévastatrice, qui hélas ne vient pas ! Elle n'a pas eu lieu avec le SRAS, ni avec le H5N1, pas plus qu'avec le H1N1. Il est vrai que tous les espoirs sont permis : il peut fort bien y avoir autre chose l'année prochaine, personne ne peut le savoir mais, personnellement, j'espère que nous n'aurons pas de pandémies tous les ans, d'autant qu'il faudra essayer de savoir ce qu'est une pandémie et comment on la définit. Mais ce n'est pas le problème du jour et je ferme donc la parenthèse.

M. Alain Milon, rapporteur - GSK s'est-il opposé à l'inclusion d'une clause de révision dans le contrat passé avec la France ? D'autres Etats ont-ils obtenu de passer des commandes révisables ?

Votre laboratoire avait souhaité dans les contrats l'inclusion d'une clause d'exonération totale de sa responsabilité de fabricant, y compris d'une éventuelle responsabilité du fait de produits défectueux.

Cette demande traduisait-elle une incertitude sur la qualité de votre processus de production de vaccins ?

M. Hervé Gisserot - S'agissant du premier point, nous avons souhaité un engagement ferme ; dès lors, il ne peut y avoir de tranches conditionnelles. Nous n'avons pas déterminé le montant de commande ferme que souhaitaient les autorités - c'était de leur pleine et entière responsabilité - mais une fois ce montant déterminé par les autorités, nous avons souhaité qu'il ne soit pas conditionnel. Si tel avait été le cas, cette partie aurait été produite après toutes les commandes fermes.

M. Alain Milon, rapporteur - L'avez-vous dit ?

M. Hervé Gisserot - Bien sûr. On savait à cette époque que cela nous plaçait dans une hypothèse où ces commandes conditionnelles seraient livrées courant 2010. De facto , cela ramenait à la commande ferme.

M. Alain Milon, rapporteur - Au départ, il s'agissait d'une commande pour une vaccination à deux doses ; puis on est passé à une dose. Pouvait-on réviser la commande à ce moment ?

M. Hervé Gisserot - Je ne suis pas au courant de la moindre clause d'un contrat qui anticipe cet aspect des choses. La réalité a montré qu'il n'y avait pas besoin d'une clause pour que les autorités le fassent.

M. Alain Milon, rapporteur - Uniquement en France !

M. Hervé Gisserot - En effet.

M. Jean-Jacques Jégou - Lors de leurs négociations avec les différents Etats, des représentants du groupe ont-ils pris en compte le risque de résiliation unilatérale ?

Le prix proposé permettait-il dès lors une couverture au moins partielle de ce risque ?

M. Hervé Gisserot - Il y a de nombreuses facettes dans la réponse à cette question.

Je ne suis pas un expert en droit des marchés publics à travers l'Europe mais je ne crois pas que l'ensemble des gouvernements européens puissent, selon leur droit national, résilier de commande unilatéralement comme le Gouvernement français l'a fait. Il y a là une spécificité française du code des marchés publics. Nous n'avons jamais contesté cette résiliation unilatérale pour motif d'intérêt général. Nous avons simplement, sur un plan juridique, considéré que celle-ci devait être associée à une indemnisation du préjudice. Je crois savoir que, dans d'autres pays européens, notamment de droit anglo-saxon, les autorités n'ont pas cette marge de manoeuvre.

S'agissant du prix, celui-ci a été fixé en amont et ne tient en aucune façon compte de ce risque potentiel.

M. Jean-Jacques Jégou - Vous n'êtes pas couvert et vous n'avez pas envisagé la restitution ?

M. Hervé Gisserot - Non. Personnellement, j'ignorais, au moment de la discussion, qu'il pouvait exister une telle résiliation pour motif d'intérêt général. On était à des années lumière de ce type de considération. En mai, juin et juillet, on travaillait tous sous très forte pression ; en septembre et octobre, on avait encore des réunions pour savoir si on ne pouvait pas aller plus vite !

M. Jean-Jacques Jégou - La sincérité de M. Hervé Gisserot n'est pas pour moi en cause, mais je vais aller au bout de ma pensée et être quelque peu cruel : avez-vous dressé un bilan de l'opération financière qu'a constituée la livraison de 50 millions de doses ?

M. François Autain, président - Vous anticipez sur les questions du rapporteur !

M. Jean-Jacques Jégou - Je laisserai donc le rapporteur poser ma question !

M. François Autain, président - La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin - Pouvez-vous nous indiquer la ventilation des 50 millions de doses commandées ? Je ne dispose que du chiffre de 9 857 500 dans les stocks de Depolabo.

Certaines doses vous sont-elles revenues et existe-t-il des commandes non fabriquées ?

M. David Lechleiter - Je confirme qu'au moment de la négociation, on n'avait jamais envisagé que le contrat puisse être annulé en cours de livraison.

M. François Autain, président - Il n'y a pas que vous !

M. David Lechleiter - S'agissant des livraisons, GSK avait livré 12,3 millions de doses au 31 décembre ; à la mi-février, on avait livré 18 millions de doses. Aucune de ces doses n'a été retournée à GSK, qui a alors arrêté les livraisons, à l'exception d'un lot arrivé en France et qui ne lui était pas destiné, les étiquettes n'étant pas libellées dans la bonne langue.

Le processus complet de production devant s'étaler sur 22 semaines, la totalité de la production de vaccins en vrac était engagée. Pour les trois quarts environ, la quantité d'antigène avait déjà été dosée, pour la moitié, le remplissage des flacons était effectué, étape industrielle majeure, quasiment la dernière avant l'envoi au client.

Les 9,8 millions de doses que vous évoquez doivent constituer le stock restant à l'EPRUS sur les quantités livrées par GSK. Je ne connais pas les chiffres des stocks de l'EPRUS.

M. Jean-Jacques Jégou - Le retour est bien de 32 millions de doses ?

M. David Lechleiter - On n'a pas eu de retour de produits. La négociation sur l'annulation d'une partie de la commande porte sur 32 millions de doses.

M. Alain Milon, rapporteur - Vous n'avez pas répondu à la question portant sur la clause d'exonération totale de la responsabilité du fabricant...

M. Hervé Gisserot - Il y a effectivement eu un certain nombre de discussions autour de ce sujet. La clause qui était proposée par GSK - la même que dans l'ensemble des pays européens - n'était peut-être pas aussi claire que l'auraient souhaité les autorités françaises. Nous n'avons, dans mon esprit du moins, jamais envisagé de ne pas assumer la totalité de nos responsabilités pharmaceutiques mais la formulation que nous avions proposée dans le contrat était ambiguë et nécessitait une révision. C'est ce qui a été fait dans le cadre de la réunion qui a eu lieu à l'EPRUS. C'est l'un des rares exemples où le contrat français a été assez nettement reformulé par rapport à la proposition de GSK, afin d'établir de la façon la plus claire qui était responsable de quoi.

M. David Lechleiter - Dans la première version du contrat, la réduction de la clause de responsabilité tenait compte du fait qu'il existait deux aspects des bonnes pratiques de fabrication que nous risquions de ne pouvoir respecter, la langue utilisée pour l'étiquetage, étant donné les délais de livraison très rapides, et le respect de la chaîne du froid : GSK demandait aux Etats de prendre livraison des produits en sortie d'usine et n'avait donc pas la possibilité de maintenir la chaîne du froid jusqu'à l'endroit de stockage.

Cela fait partie des négociations juridiques qui doivent avoir lieu ; l'Etat a pu mettre en avant les raisons pour lesquelles le problème d'étiquetage n'était pas acceptable ; on a donc mis en place une clause correspondant au souhait de l'Etat, indiquant que GSK prenait en charge la responsabilité pharmaceutique des bonnes pratiques de fabrication, l'Etat prenant à sa charge la responsabilité pouvant découler de la décision d'utiliser le vaccin. La discussion a duré quelque temps et a été difficile, car technique, mais a abouti à la satisfaction de l'Etat.

M. Alain Milon, rapporteur - Le contrat passé avec GSK exclut expressément toute garantie des délais de livraison et ne prévoit aucune pénalité de retard, pour quelque cause que ce soit. Cette stipulation a-t-elle également été imposée par GSK ?

Quelle était la justification des clauses de confidentialité très étendues prévues à l'annexe D du contrat et celle de la liste un peu surprenante des informations non soumises à confidentialité ?

Il semble que toutes les commandes de vaccins H1N1 aient été passées dans le cadre de contrats avec les autorités sanitaires ou leurs représentants. Etait-il exclu et pour quelle raison, que tout ou partie de l'approvisionnement en vaccins emprunte les circuits habituels de commercialisation et de distribution des produits de santé ?

M. Hervé Gisserot - Il est exact que les autorités nous ont à plusieurs reprises demandé de nous engager au-delà de l'indicatif en termes de scénarios de livraison, ce à quoi nous avons répondu que nous n'étions pas en mesure de le faire. La souche n'était même pas encore à notre disposition ; le rendement était donc impossible à anticiper. Sur la base de notre expérience, nous avions proposé plusieurs scénarios en fonction du rendement de la souche.

La seconde grande incertitude était réglementaire. Il s'agissait de savoir à partir de quand on aurait un produit définitivement approuvé par les autorités. Bref, pour un certain nombre de raisons, nous avons jugé indispensable de ne pas nous engager fermement. Nous aurions probablement dû nous engager sur des points que nous n'étions pas sûrs de pouvoir tenir. Le fait que l'on ait souhaité s'en tenir à un calendrier indicatif montre avec quelle transparence nous avons discuté, ayant mis sur la table les difficultés que nous anticipions, qui étaient réelles.

M. David Lechleiter - C'est ce qui explique également l'absence de clauses de pénalité, puisque nous n'avions pas de calendrier ferme, ce qui empêchait d'avoir une base pour un calcul de pénalités. Un grand nombre de conditions pour pouvoir fixer un calendrier précis de livraison ne relevaient pas de notre pouvoir. Il s'agissait de la date à laquelle l'OMS déciderait de libérer une souche du laboratoire de référence et de la date à laquelle les autorités réglementaires décideraient d'accorder aux laboratoires des AMM. Il nous a donc semblé très difficile de nous engager sur un calendrier déterminé en majeure partie par des tiers.

M. François Autain, président - Disposiez-vous de la souche lorsque vous avez signé le contrat ?

M. David Lechleiter - Le contrat a été négocié pendant toute la durée du mois de juin ; la version initiale de la clause de responsabilité date du 3 juin. Plusieurs souches nous ont été envoyées le 22 juin mais on ignorait laquelle aurait le meilleur rendement et serait finalement utilisée dans la production. Cela a évolué un peu en parallèle mais nous avons connu un grand nombre d'incertitudes pendant la négociation. Le rendement final de la souche restait une incertitude majeure, ainsi que le timing des délivrances d'AMM par les autorités réglementaires.

M. François Autain, président - Il semble qu'on aurait pu distinguer dans le contrat les causes de retard relevant de votre responsabilité et celles qui n'en relevaient pas.

M. Hervé Gisserot - Je ne sais si l'on peut dire que le rendement de la souche relève de notre responsabilité ! Ce rendement peut aller du simple au double ! Le rendement des premiers lots, le 22 juin, s'élevait à 17 mg, ce qui est extrêmement faible.

Mme Marie-Thérèse Hermange - Qu'est-ce que cela signifie ?

M. Hervé Gisserot - Cela représente la production d'antigène par oeuf.

Grâce à l'expertise de sociétés comme GSK dans le domaine des vaccins, on arrive toutefois à doubler les rendements avec des optimisations de process qui nécessitent aussi des ajustements réglementaires. En passant de 17 à 35 mg, vous modifiez votre dossier d'AMM et créez un problème supplémentaire, maintes fois souligné dans nos courriers à l'AFSSAPS, à l'EPRUS et au cabinet de la ministre de la santé. Nous avons toujours mis les problèmes sur la table sans chercher à survendre.

Vous trouverez peu d'exemples d'un vaccin délivré aussi rapidement, à l'exception de celui de Baxter.

M. François Autain, président - Selon vous, il n'était donc pas nécessaire de prévoir des pénalités puisque vous avez respecté votre engagement...

M. Hervé Gisserot - Nous avons livré pratiquement dans les délais que nous nous étions fixés - même si on espérait le faire fin septembre. Cependant, du fait de la multitude des obstacles - variations réglementaires, etc. - la montée en puissance des livraisons n'a pas eu lieu au rythme que nous avions escompté. Nous pensions arriver plus rapidement à des livraisons de l'ordre de 2 millions de doses par semaine, ce qui n'a pas été le cas.

M. Jean-Jacques Jégou - Quelle est la date de délivrance de l'AMM ?

Mme Soizic Courcier - Le 29 septembre 2009.

M. Alain Milon, rapporteur - Vous n'avez pas répondu aux questions sur les clauses de confidentialité, ni à celles portant sur les circuits habituels de commercialisation...

M. David Lechleiter - La mise en place de la clause de confidentialité, relativement normale en matière commerciale, nous a paru plus nécessaire encore dans le cadre d'une négociation d'un contrat avec les Etats européens, qui pouvait être sujet à toutes sortes de spéculations. Il s'agissait plus de protéger la confidentialité qu'auraient souhaitée les Etats que de raisons commerciales.

M. Hervé Gisserot - Le contrat a été conclu sous le fondement de l'article 3-7° du code des marchés publics. Je me souviens d'une réunion au ministère de l'intérieur portant sur la sécurisation de l'acheminement du vaccin, non seulement pour la France mais aussi pour les pays pour lesquels le vaccin transiterait par la France.

J'ai eu le sentiment d'une problématique traitée avec beaucoup d'attention sur le plan de la sécurité - ce qui me paraissait tout à fait justifié à l'époque.

M. Alain Milon, rapporteur - Pouvez-vous nous en dire plus à propos des circuits habituels de commercialisation ?

M. David Lechleiter - Ce vaccin est un vaccin prépandémique ; il dispose d'une AMM et a donc suivi une procédure réglementaire. Dans chaque pays, il n'a été commercialisé qu'avec des Etats et le commercialiser sur un marché privé ne me paraît adapté.

En tout état de cause, ce vaccin n'a pas fait l'objet de dépôts de dossiers de remboursement dans les différents Etats. Ce sont des procédures très encadrées, qui prennent un certain temps et qui n'étaient donc pas adaptées à ce type de produit.

M. Hervé Gisserot - GSK n'a jamais eu l'intention de commercialiser le vaccin par les canaux traditionnels. Sa forme multidoses le rend inadapté à ce type de distribution. Il a toujours été conçu pour être mis à la disposition des seuls Etats.

On a beaucoup débattu ces derniers mois de la problématique entre monodose et multidoses.

L'expérience démontre que disposer d'une partie des vaccins en monodose est pertinent mais nous ferions une lourde erreur en pensant que nous pourrions aborder une future pandémie - la plus tardive possible - avec une approche monodose. On sait que le principal goulet d'étranglement est le remplissage. C'est utopique à mes yeux !

Les autorités françaises nous ont beaucoup questionnés pour savoir si nous ne pouvions pas faire du monodose. Nous avions un dossier réglementaire multidoses ; cela nous enfermait donc dans une certaine logique mais je crois surtout que si l'on veut répondre de manière rapide et adaptée à un risque pandémique, il faudra toujours envisager une approche largement multidoses.

M. Alain Milon, rapporteur - Vous réclamez une indemnité équivalente à 150 millions d'euros. L'EPRUS nous a dit qu'il proposait 36 millions d'euros. Où en sont vos négociations avec le ministère de la santé quant au montant de l'indemnisation ? Sont-elles terminées ? Si tel est le cas, quelle indemnisation avez-vous reçue ?

Enfin, quand avez-vous eu connaissance du fait qu'une seule dose suffisait à garantir l'immunogénicité de la majorité de la population et à quoi est dû le fait qu'une seule dose suffise ?

M. François Autain, président - N'aurait-on pas pu prévoir dans le contrat une clause de révision qui tienne compte du nombre d'injections ?

Mme Soizic Courcier - Les essais cliniques avec le vaccin H1N1 ont démarré au mois d'août 2009 ; nous avons obtenu les premiers résultats préliminaires sur un très faible nombre de volontaires le 14 septembre 2009.

Ils ont été échangés immédiatement avec l'EMA. Ces résultats démontraient que l'immunogénicité après la première dose était relativement élevée mais ces résultats ne permettaient pas aux autorités de conclure qu'une seule dose était suffisante. Il fallait attendre d'autres résultats ; ceux-ci sont venus au fur et à mesure. C'est pourquoi l'EMA a recommandé une seule dose fin novembre.

M. François Autain, président - Vous n'avez pas répondu sur l'éventualité d'une clause optionnelle tenant compte du nombre de doses. Etait-ce envisageable ?

M. Hervé Gisserot - Je ne sais pas. Cette discussion n'a pas eu lieu.

M. François Autain, président - C'est dommage ! Ce n'est pas de votre fait : si le Gouvernement ne vous a pas posé cette question...

Mme Soizic Courcier - On est parti du dossier maquette H5N1, pour lequel il était nécessaire d'avoir deux doses pour obtenir une protection. Au moment où on a commencé à développer le vaccin H1N1, l'incertitude sur la virulence du H1N1 et sur le fait qu'il pouvait muter ne permettait pas d'envisager cette option.

M. François Autain, président - En septembre, on savait que le H5N1 n'avait rien à voir avec le H1N1.

M. Hervé Gisserot - Certes, mais le contrat a été signé le 10 juillet et je puis comprendre, en tant que citoyen, que les autorités françaises aient souhaité s'appuyer sur le dossier H5N1, qui était validé.

M. François Autain, président - Si les autorités vous avaient demandé une clause optionnelle de ce type, y auriez-vous été opposé ?

M. Hervé Gisserot - Je ferais preuve de spéculation en répondant à une telle question ! Je ne le sais pas. Nous n'avons pas été amenés à le faire, focalisés que nous étions sur l'obtention de l'AMM du H1N1 et la mise à disposition des vaccins. On peut penser a posteriori que cette discussion n'aurait peut-être pas été inutile mais nous étions mobilisés sur tout autre chose !

M. François Autain, président - Ce n'est pas de la lucidité a posteriori puisque dès juin, l'InVS disait bien que le H1N1 n'était pas plus grave qu'une grippe saisonnière. Par conséquent, on pouvait dès ce moment-là penser que les deux injections nécessaires pour le H5N1 avaient beaucoup moins de chances de l'être pour un virus qui n'était pas plus grave que le virus saisonnier qui n'exige qu'une injection - sauf pour les enfants. J'ai ici le compte rendu de l'audition de Mme Françoise Weber, qui dit que, dès juin, on savait que cette grippe n'était pas plus grave qu'une grippe saisonnière - même si elle développait certains aspects spécifiques concernant la gravité chez les jeunes, etc.

Ce n'est pas vous que je critique mais le fait que le Gouvernement aurait pu profiter de cette connaissance pour vous demander si cette possibilité de tranches optionnelles n'était pas envisageable.

Vous me répondez que vous n'avez jamais été soumis à une telle demande. J'en prends acte.

Mme Soizic Courcier - Le problème de la virulence ne permet pas de régler le problème de l'immunogénicité.

Or, à ce moment, nous n'avions pas de données sur l'immunogénicité générée par le virus H1N1. En outre, celle-ci peut être différente selon les populations, comme vous l'avez rappelé.

M. Hervé Gisserot - En tout état de cause, nous avons mené les études nécessaires pour clarifier cette question dans les meilleurs délais. Nous sommes allés jusqu'à réaliser une étude clinique avec des doses encore plus réduites d'antigène pour voir si le vaccin pouvait s'avérer suffisant. Nous avons vraiment essayé de bâtir un ensemble de données cliniques pour éclairer la décision publique.

Pour ce qui est de la compensation de la résiliation, je voudrais d'abord préciser, monsieur le rapporteur, que je parlais des deux tiers de la valeur du contrat initial et non de la valeur des doses dont la commande a été annulée. La valeur initiale du contrat était de 350 millions d'euros. Nous souhaiterions donc que l'indemnisation nous permette d'atteindre les deux tiers de ce montant. Son niveau devrait donc être plutôt de l'ordre de la centaine de millions.

M. François Autain, président - Et on vous en propose 36...

M. Hervé Gisserot - J'aimerais d'ailleurs que ces données restent confidentielles à ce stade.

M. François Autain, président - Cela ne figurera que dans le procès-verbal qui paraîtra au mois d'août. Je vous souhaite d'avoir terminé vos négociations d'ici là !

M. Hervé Gisserot - Je le souhaite également ! Les discussions se poursuivent. Notre volonté est d'aboutir à un accord transactionnel car nous souhaitons être partenaires en toutes circonstances, dans le respect du partenaire industriel que nous avons été tout au long de ce processus.

M. François Autain, président - Il y a un contrat !

M. Hervé Gisserot - Il y a aussi, au-delà du contrat, un certain nombre de points que nous avons soulignés dans les courriers adressés à l'EPRUS pour étayer notre demande d'indemnisation. Nous espérons que la raison saura l'emporter, comme cela a été le cas dans une vingtaine de pays, sur des principes strictement similaires à ceux proposés à la France et au Japon.

M. François Autain, président - Combien de pays sont-ils réfractaires ?

M. Hervé Gisserot - Fort peu, en dehors de ceux qui refusent la discussion. En Grèce et en Espagne, il n'y a pratiquement pas de discussions entre GSK et les autorités. Partout ailleurs, nous avons abouti ou sommes sur le point d'aboutir à des accords cohérents et homogènes. Nous souhaitons qu'il y ait une cohérence entre les pays ; les autorités françaises souhaitent une cohérence entre les laboratoires...

M. François Autain, président - Elles parlent plus de concurrence que de cohérence !

M. Hervé Gisserot - Mais nous, nous parlons de cohérence ! Nous souhaitons que chaque gouvernement, alors qu'il avait le sentiment d'avoir été traité de manière cohérente et équitable lors de la signature du contrat, puisse réviser ce contrat de manière cohérente.

C'est la démarche de GSK. Les arguments ont été entendus à travers l'Europe. Nous aimerions qu'ils puissent l'être également en France, où nous sommes de longue date un partenaire qui a toujours tenu ses engagements au sens large du terme, y compris à travers notre présence sur le territoire.

M. François Autain, président - Vous avez cité l'Espagne. Il m'est revenu que les contrats de GSK avec l'Espagne comportaient des clauses de révision. Vrai ou faux ?

M. Hervé Gisserot - Je ne sais pas.

M. David Lechleiter - Je ne connais pas la réponse.

M. François Autain, président - Pourriez-vous nous communiquer ultérieurement la réponse ?

M. Hervé Gisserot - Bien sûr.

M. Jean-Jacques Jégou - De telles commandes de l'Etat français et du monde entier donnent lieu à des mises en place industrielles, des investissements et des dépenses. Pouvez-vous nous en donner le niveau ? Quel pourcentage de vos collaborateurs a-t-il été impliqué dans la fabrication du vaccin H1N1 ?

En second lieu, si l'Etat vous mettait dans la situation qu'ont acceptée certains de vos confrères, subiriez-vous de lourdes pertes financières et les résultats de GSK s'en verraient-ils lourdement affectés et pourraient-ils être déficitaires ?

M. Hervé Gisserot - Le chiffre d'affaires que nous avons réalisé au quatrième trimestre s'élève à 942 millions d'euros, ce qui constitue un chiffre d'affaires significatif, mais qu'il faut mettre en perspective avec les investissements réalisés et avec la prise de risque que cela représente car, quoi qu'en pensent certains, l'industrie pharmaceutique n'a jamais souhaité qu'une pandémie puisse se déclarer, je souhaiterais le souligner devant la représentation nationale.

Il est très difficile d'anticiper exactement nos revenus 2010 puisque nous sommes dans la phase de finalisation des contrats révisés avec pratiquement l'ensemble des Etats. Je pense que l'on se dirige malgré tout vers le chiffre de deux tiers de la valeur des contrats initiaux que j'évoquais.

Je n'ai plus le chiffre exact que cela pourrait représenter pour 2010 mais ces chiffres doivent être communiqués avec beaucoup de précaution, notamment pour des entreprises cotées en bourse. Je ne voudrais donc pas que des chiffres prospectifs émanant de moi puissent être utilisés dans les médias, ceci pouvant avoir un impact non négligeable sur une société comme GSK.

M. Jean-Jacques Jégou - Est-ce un problème pour vous et quelle est son intensité ?

M. Hervé Gisserot - Un règlement qui ne nous satisferait pas mettrait-il la société financièrement en danger ? Non ! Nous devons cependant rester partenaires et chacun doit faire un effort. Nous devons faire un pas vers les autorités, y compris dans les pays où le droit ne permet pas de modifications unilatérales.

Dans un pays comme le nôtre, on ne peut pas non plus considérer qu'il ne nous reste plus que nos yeux pour pleurer ! Ce débat là est en cours ; j'ose espérer qu'il aboutira de manière satisfaisante. La vie de l'entreprise n'est pas en danger mais la qualité de la relation risque de s'en trouver impactée de part et d'autre.

Nous souhaitons montrer notre ouverture d'esprit sur de tels dossiers ; notre industrie étant amenée à travailler durablement avec les autorités, nous souhaitons vraiment que cet accord soit transactionnel, à la satisfaction des deux parties concernées.

M. Jean-Jacques Jégou - Et s'il ne l'était pas ?

M. Hervé Gisserot - Je préfère ne pas envisager cette hypothèse !

M. François Autain, président - Ne dites pas trop que vous ne souhaitez pas créer trop d'ennuis au Gouvernement car vous risquez alors de devoir en passer par ses fourches caudines !

M. Hervé Gisserot - Il me semble avoir donné une réponse plus étoffée ! J'ai aussi souligné qu'il est important que le Gouvernement comprenne qu'il a un partenaire industriel à ses côtés, au sens large du terme !

Mme Marie-Christine Blandin - Quel est le montant du crédit d'impôt recherche correspondant aux travaux de recherche-développement menés par GSK sur le vaccin H1N1 ?

Par ailleurs, quelles sont les conditions dans lesquelles sont organisés les contacts entre les représentants de GSK et l'OMS ?

Enfin, le vaccin pandémique H1N1 de GSK, qui est un vaccin adjuvanté, pourra-t-il être utilisé pour une vaccination saisonnière ?

M. Hervé Gisserot - Nous bénéficions en effet du crédit d'impôt recherche au titre des études réalisées dans le cadre de nos développements cliniques.

Mme Soizic Courcier - En France, deux études cliniques ont été réalisées, l'une totalement française et l'autre multinationale, en Allemagne et en France.

Je ne dispose pas du montant exact du crédit d'impôt recherche mais on pourra vous le communiquer.

Pour ce qui est de l'OMS, les collaborateurs de GSK ne sont jamais invités à leur demande mais participent à des réunions à l'initiative de l'OMS, pour échanger et confronter des données.

Quant à la fabrication du vaccin saisonnier, nous attendons toujours la recommandation de l'OMS.

M. François Autain, président - Est-elle connue ?

Mme Soizic Courcier - On la connaît aujourd'hui. L'OMS a recommandé un vaccin trivalent pour la prochaine saison, intégrant la souche pandémique H1N1.

M. Hervé Gisserot - L'adjuvant reste disponible ; tant que sa durée de péremption n'est pas écoulée, il représente un stock en prévision de la prochaine pandémie.

Mme Marie-Christine Blandin - Allez-vous le mettre dans le vaccin saisonnier trivalent ?

Mme Soizic Courcier - Non, mais nous développons un vaccin pour les personnes âgées qui utilise cet adjuvant de façon à obtenir une protection plus importante ; en effet, chez les patients âgés, la protection assurée par le vaccin saisonnier n'est pas totale. Il y a donc une marge de progression importante.

M. François Autain, président - Il y a beaucoup à dire sur l'efficacité du vaccin saisonnier !

M. Michel Guerry - Jusqu'à quand le ministère de la santé a-t-il exercé sur vous de très fortes pressions pour que vous fabriquiez ce vaccin ?

M. Hervé Gisserot - L'attitude du ministère a toujours été la même jusqu'en novembre-décembre. Je me rappelle d'une discussion, la première de cette nature - la date m'échappe mais elle se situait dans les premiers jours de décembre - au cours de laquelle le cabinet de la ministre nous a indiqué qu'il réfléchissait à des scénarios alternatifs de cession de vaccins, anticipant le fait que le Gouvernement pourrait se retrouver avec trop de vaccins.

Tout au long des semaines précédentes, on a eu des discussions sur un seul et unique sujet, la manière de tenir les délais et d'accélérer la mise à disposition des vaccins et ce, au moins jusqu'à fin novembre.

M. Guy Fischer - Pour la grippe saisonnière, quel est le pourcentage de la population de personnes âgées vaccinées par rapport à la population générale ?

Mme Soizic Courcier - Nous suivons les recommandations du Haut Conseil de la santé publique en la matière, qui recommande de vacciner préférentiellement les personnes âgées et les populations à risque.

Pour ce qui est du pourcentage de personnes âgées par rapport à la population générale, je ne saurais dire.

M. David Lechleiter - De mémoire, les objectifs de santé publique de la plupart des pays d'Europe de l'ouest correspondent à une couverture vaccinale de 70 % de la population de plus de 65 ans ; en France, je crois qu'on est légèrement en retrait. On n'a jamais atteint ce taux de couverture mais je crois que 60 % des plus de 65 ans sont vaccinés tous les ans.

M. François Autain, président - C'est en effet en France que l'on vaccine le plus contre la grippe saisonnière.

Il me reste une demande à vous adresser : la loi HPST impose désormais aux laboratoires - grâce à un amendement de M. le rapporteur - de faire connaître la liste des associations qu'ils subventionnent. Cette liste devra être communiquée à partir de juin prochain. Ne pourriez-vous - bien que la législation ne vous l'impose pas - nous indiquer la liste des contrats que vous avez passés avec certains experts qui vous conseillent et qui siègent, notamment, dans des instances, comme le Haut Conseil de la santé publique, le Comité technique des vaccinations ou le Comité de lutte contre la grippe ?

Nous comprendrions que vous puissiez ne pas répondre aujourd'hui mais, si cela ne vous pose pas de problèmes éthiques ou déontologiques, nous serions très heureux de pouvoir avoir connaissance de ces contrats de manière à les comparer avec les déclarations de ces mêmes experts qui, pour le coup, y sont tenus par la loi.

M. Hervé Gisserot - GSK est convaincu que, pour sortir de ce débat qui crée beaucoup de suspicion autour de la relation entre experts, autorités et industriels, la seule voie est celle de la transparence. Personne n'a rien à se reprocher ; nous devons travailler ensemble : il y va de l'intérêt général !

A une époque où l'on parle d'économie de l'innovation et où les pouvoirs publics - à fort juste titre à nos yeux - souhaitent renforcer les partenariats public-privé, il y aurait contradiction à ne pas soutenir ces relations de proximité entre l'expertise industrielle et l'expertise tout court. Comme me le rappelle souvent Mme Soizic Courcier, nous ne pourrions pas développer les médicaments, y apporter notre valeur ajoutée, sans pouvoir nous appuyer sur cette expertise qui ne se situe pas au sein de nos entreprises mais est extérieure.

Pour résoudre ce débat qui resurgit régulièrement en période de crise, il nous faut aller vers la transparence ; GSK est en tous points favorable à une transparence qui doit aller en s'accentuant. Nous sommes déjà parmi les entreprises les plus transparentes. L'ensemble de nos résultats cliniques sont publiés sur nos sites. Nous faisons de plus en plus état des relations que nous entretenons avec l'ensemble des partenaires de santé. Nous ne finançons jamais d'associations de patients au-delà du tiers de leur budget, de manière qu'on ne puisse supposer le moindre lien de dépendance.

Nos règles de comportement, d'éthique et de transparence sont déjà très avancées. Je pense que l'industrie est convaincue dans sa globalité que c'est la voie à suivre.

M. Christian Lajoux l'a rappelé dans un débat qu'il a eu avec vous dans un journal que vous connaissez bien. Nous souscrivons donc totalement à ce souhait et nous allons aller dans cette direction.

M. François Autain, président - Si vous pouvez le faire, la commission vous en sera reconnaissante.

Merci pour la façon dont vous avez répondu aux nombreuses questions qui vous ont été posées.

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