D. JUSTICE ET RÉCONCILIATION DANS LES BALKANS OCCIDENTAUX

La commission des questions politiques et celle des questions juridiques et des droits de l'Homme ont présenté trois textes relatifs à la répression des crimes de guerre et la réconciliation dans les Balkans occidentaux au cours d'un débat joint.

M. Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l'Homme du Conseil de l'Europe, a, dans son propos liminaire, souligné l'importance d'un tel débat à l'heure où 14 000 personnes disparues à l'occasion du conflit n'ont toujours pas été retrouvées. La situation de 450 000 personnes, déplacées ou réfugiées de l'intérieur, demeure également précaire, plus de quinze ans après la signature des accords de Dayton.

Il convient, selon lui, de faire émerger une vision politique pour l'ensemble de la région, doublée d'une détermination sans faille. Les premières initiatives serbe et croate en faveur de la réconciliation et de la justice, qu'il s'agisse de la présentation d'excuses nationales ou de l'ouverture des archives gouvernementales, méritent à cet égard le soutien du Conseil de l'Europe.

1. La protection des témoins : pierre angulaire de la justice et de la réconciliation dans les Balkans

La commission des questions juridiques et des droits de l'Homme a tenu à signaler les menaces qui pèsent sur les témoins entendus dans le cadre des procès pour crimes de guerre. Si leur identité est révélée, les intéressés et leurs familles sont notamment victimes de tentatives d'intimidation, voire de meurtres. Ces atteintes à leur sécurité constituent autant d'exemples pour dissuader d'autres témoins de venir déposer devant les cours et empêcher de la sorte le nécessaire travail de justice et donc de réconciliation.

Si, le Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) a mis en oeuvre un certain nombre de mesures en vue de protéger les témoins, son règlement de procédure prévoit toujours que l'identité d'un témoin anonyme puisse être divulguée aux parties trente jours avant l'ouverture du procès. Par ailleurs, l'arrivée à échéance de son mandat en 2013 suscite un certain nombre d'interrogations en ce qui concerne la protection des témoins au-delà de cette date.

M. Laurent Béteille (Essonne - UMP) a souhaité insister sur la difficulté à concilier droits de la défense et protection des témoins :

« Je souhaitais intervenir dans ce débat pour soutenir l'excellent rapport de notre collègue Gardetto au sujet de la protection des témoins car cela me paraît un point extraordinairement important.

Je crois que ces trois rapports, ainsi que l'intervention de M. le Commissaire aux droits de l'Homme se complètent de manière très harmonieuse et nous font bien comprendre l'impérieuse nécessité qu'il y a de mener ces procès qui sont extraordinairement difficiles, mais aussi extrêmement utiles pour pouvoir reconstruire la paix et instaurer des relations apaisées entre les différents peuples des Balkans.

Tout le monde comprend bien que l'on ne peut pas construire de véritables relations apaisées à l'échelle internationale sans détenir la vérité des choses, sans avoir une appréciation permettant d'écarter les faux héros et de se fonder sur une vérité historique.

Ces procès sont aussi extraordinairement difficiles, comme je l'ai dit, et l'on comprend que dans un climat aussi brutal, marqué par les événements dont chacun a parlé ici et qui sont franchement insupportables sur notre continent, il faille penser à la sécurité des témoins.

Il est vrai qu'en tant qu'avocat, l'anonymat me pose problème. Je pense en effet que le droit de la défense ne peut pleinement s'exercer que si l'on dispose de l'identité des témoins, et s'il est possible de vérifier qu'ils étaient bien témoins. J'ai entendu les solutions proposées, mais elles me semblent imparfaites.

Pour autant, dans cette affaire, l'essentiel, selon moi, est de protéger ces témoins sans lesquels la justice ne pourra pas être rendue.

Par ailleurs, je partage les inquiétudes exprimées par Mme Beck au sujet de l'après2013, en particulier concernant la sécurité des témoins dans le Kosovo. Il reste qu'il fallait rappeler tout cela avec force et je voulais remercier M. Gardetto de l'avoir fait.»

La recommandation adoptée par l'Assemblée invite les États membres concernés à renforcer les moyens alloués à la protection des témoins et à adapter leurs législations respectives. La réinstallation des témoins sur d'autres territoires doit également être encouragée. Le texte insiste sur la nécessité pour le TPIY de réviser son règlement de procédure et de mettre en place un mécanisme résiduel de protection de ses témoins, avant l'arrivée à échéance de son mandat.

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