3. Le plafonnement des indemnités perçues au titre des organismes extraparlementaires

Une large majorité des membres de votre groupe de travail a souhaité engager une réflexion sur la présence des parlementaires au sein des organismes extraparlementaires (OEP) en vue de diminuer leur nombre. Il n'existe, à l'heure actuelle, aucune définition juridique de ces organismes : comme le rappelle le rapport d'activité du Sénat 2010, « sont regroupés sous la dénomination « organismes extraparlementaires » toute une série de conseils d'administration ou de surveillance d'établissements publics, d'entreprises publiques ou d'autorités indépendantes qui ont pour caractéristique commune de compter en leur sein la présence de parlementaires, désignés soit par le président du Sénat ou de l'Assemblée nationale soit par l'une ou l'autre des assemblées », en vertu soit de textes législatifs, soit de textes réglementaires. En d'autres termes, l'absence de critères précis permettant de définir les OEP apparaît comme la cause essentielle de leur nombre élevé.

En effet, au 30 septembre 2010, le nombre des organismes extraparlementaires s'élevait à 187, représentant 367 mandats de sénateurs (309 titulaires et 58 suppléants), sans prise en compte des députés. Si certains organismes ont été récemment supprimés, d'autres sont régulièrement créés par le législateur et, parfois, par le pouvoir réglementaire, contribuant ainsi à la hausse tendancielle de leur nombre. Il convient en effet de rappeler que ces organismes étaient au nombre de 147 au 30 septembre 2004, soit une augmentation de 1 à 2,5 en 6 ans, comme le rappelle le tableau récapitulatif ci-dessous :

Évolution du nombre des organismes extraparlementaires

Année

Nombre
d'organismes
nouveaux

Nombre total
d'organismes

Nombre de mandats (titulaires et suppléants)

Nombre de nominations effectuées

2003-2004

10

147

332 (265, 67)

65

2004-2005

20

151

333 (263, 70)

129

2005-2006

19

169

360 (300, 60)

89

2006-2007

8

175

380 (318, 62)

61

2007-2008

5

170

381 (320, 61)

62

2008-2009

9

183

357 (301, 53*)

174

2009-2010

14

187

367 (309, 58)

53

* 3 mandats non renseignés.

Source : Rapport d'activité du service de la séance du Sénat, 2009-2010.

On constate qu'au cours de la session 2009-2010, 14 organismes nouveaux ont été créés, liés à l'adoption de projets de loi majeurs. Il convient toutefois de noter que leur progression est limitée par les dispositions du décret n° 2006-672 du 8 juin 2006 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif, qui prévoient :

- une durée d'existence limitée à cinq ans pour les organismes créés en vertu d'un texte règlementaire à partir de 2006 ;

- la suppression, à l'échéance de trois ans à compter de la date de publication du décret précité, des organismes existants dont l'existence n'aurait pas été validée.

L'application de ces dispositions a permis la suppression de sept organismes au cours de la session parlementaire précédente.

Face à la croissance de ces OEP, votre groupe de travail a estimé qu'une définition claire de ces organismes dans lesquels siègent des parlementaires ès qualité devait être dégagée afin de disposer de critères objectifs permettant d'en limiter le nombre. Il convient à cet égard de rappeler qu'une réflexion est actuellement menée par le Secrétaire général du Sénat, à l'initiative de la présidence du Sénat, portant sur les conditions de création de ces organismes et l'analyse de la pertinence de leur existence.

Proposition n° 36

Dégager une définition des organismes extra-parlementaires afin d'en établir les critères constitutifs et d'en diminuer le nombre.

En effet, la présence de parlementaires dans ces organismes extérieurs, chargés de la protection des libertés publiques, de la surveillance de secteurs économiques ou d'un rôle de conseil ou de proposition à l'égard du Gouvernement, peut poser problème, tant au regard des conflits d'intérêts stricto sensu que pour le bon exercice de la mission de contrôle de l'action du gouvernement et d'évaluation des politiques publiques. Ainsi, le rapport d'activité du Sénat pour l'année 2010 constate que la « participation [des parlementaires] à ces travaux constitue [...] une obligation supplémentaire qui peut parfois être difficile à concilier avec l'exercice du mandat parlementaire ». C'est pourquoi vos co-rapporteurs se sont interrogés sur l'édiction d'une interdiction générale applicable aux parlementaires d'appartenir à un organisme extra-parlementaire. Votre groupe de travail a finalement jugé peu opportun de définir une telle prohibition : la participation des parlementaires à l'activité des OEP leur permet, comme l'ont rappelé certains membres de votre groupe de travail, de recueillir un certain nombre d'informations utiles pour mener à bien leurs missions de contrôle et d'évaluation des politiques publiques dans certains domaines sensibles (notamment celui des libertés publiques).

En revanche, au sein des OEP, votre groupe de travail a distingué le cas particulier des autorités administratives indépendantes (AAI), pour lesquelles il propose que la fonction de président soit incompatible avec le mandat de parlementaire , en raison de la difficulté de concilier ces fonctions avec l'exercice du mandat parlementaire, tant sur le plan matériel que sur le plan déontologique. Cette incompatibilité n'empêcherait pas un parlementaire d'être désigné par son assemblée comme commissaire d'une AAI, l'interdiction portant uniquement sur la présidence qui ne pourrait plus revenir à un député ou un sénateur (voir supra ) 98 ( * ) .

En tout état de cause, quelle que soit la catégorie d'OEP à laquelle appartiendrait un parlementaire, les membres unanimes du groupe de travail ont prôné le plafonnement des indemnités susceptibles de leur être versées à ce titre, en le limitant au seul défraiement des dépenses engagées par le parlementaire pour participer aux travaux de l'organisme .

Proposition n° 37

Limiter les indemnités que peuvent percevoir les parlementaires au titre de leur activité au sein d'un organisme extra-parlementaire au seul défraiement des dépenses engagées pour participer aux travaux de l'organe.

Il convient toutefois de préciser que de nombreux OEP ne proposent aucune compensation financière pour les parlementaires au titre de leur participation aux travaux de ces instances. Certains, en revanche, prévoient, dans leurs règlements intérieurs, des indemnités forfaitaires au titre de la participation effective des parlementaires aux séances de l'OEP auquel ils appartiennent sous la forme, par exemple, de jetons de présence. Ces indemnités sont parfois considérées comme des salaires perçus et sont, à ce titre, soumis à l'impôt sur le revenu. Il en est ainsi des indemnités dont bénéficient les membres de la Commission nationale du débat public (CNDP) 99 ( * ) .

D'autres OEP ont fixé les conditions et les modalités d'indemnités de déplacements, à l'instar du Centre national d'art et de culture Georges Pompidou 100 ( * ) . Toutefois, les sénateurs et députés renoncent souvent au bénéfice de ces indemnités.

Enfin, des indemnités et des vacations liées directement à l'activité de leurs membres peuvent être allouées aux commissaires présents dans certains organismes. Ainsi, les commissaires de la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL) 101 ( * ) perçoivent des indemnités forfaitaires, liées à leur présence aux séances de la Commission ; ils perçoivent aussi des vacations, versées à l'occasion de chaque rapport établi et de chaque mission assurée par les membres de la Commission. En revanche, les frais de déplacement sur le territoire national ne sont pas remboursés par la CNIL, dans la mesure où ses membres bénéficient d'un remboursement de la part de l'Assemblée dont ils sont issus. Il n'en est pas de même pour les déplacements à l'étranger dont les dépenses sont prises en charge par la CNIL.

Il s'ensuit que le bénéfice de ces indemnités est souvent facultatif et laissé à la libre appréciation des parlementaires eux-mêmes ou des OEP via leurs règlements intérieurs.

Enfin, votre groupe de travail propose que les indemnités perçues par les sénateurs au titre de leur activité dans un organisme extra-parlementaire soient incluses dans le plafond que les membres du groupe de travail souhaitent appliquer aux rémunérations accessoires.

Proposition n° 38

Inclure dans le plafond prévu pour les rémunérations accessoires les indemnités perçues par les parlementaires au titre de leur activité dans un organisme extra-parlementaire.


* 98 Il convient de rappeler que la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au défenseur des droits rend incompatible la fonction de défenseur des droits avec un mandat électif.

* 99 Article 14 du décret n° 2002-1275 du 22 octobre 2002 relatif à l'organisation du débat public et à la Commission nationale du débat public, complété par l'arrêté du 22 décembre 2005 relatif aux frais et indemnités des membres de la Commission nationale du débat public et des commissions particulières.

* 100 Décret n° 90-437 du 28 mai 1990 modifié fixant les conditions et les modalités de règlement de frais occasionnés par les déplacements des personnels civils sur le territoire métropolitain de la France lorsqu'ils sont à la charge de l'État, des établissements publics nationaux à caractère administratif et de certains organismes subventionnés.

* 101 Décret n° 99-487 du 11 juin 1999 relatif aux indemnités susceptibles d'être allouées aux membres de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, complété par un arrêté du 11 juin 1999 fixant les taux des indemnités susceptibles d'être alloués aux membres de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page