B. CRISES ÉCONOMIQUE, FINANCIÈRE, SOCIALE ET ENVIRONNEMENTALE : UNE MUTATION POLYMORPHE

« La crise c'est quand le vieux monde se meurt et que le nouveau monde peine à naître ». (Gramsci)

1. Face au risque de relégation des objectifs du développement durable derrière l'urgence de la crise économique et financière

La crise économique et financière ouverte en 2008 a été placée au centre des préoccupations mondiales. Elle a partout fait resurgir la menace de la récession, plongé des millions de personnes dans le chômage et la misère, ruiné des milliers d'épargnants et, notamment en Europe, révélé la nécessité d'une meilleure gestion des finances publiques, indispensable pour relancer la croissance. Il est significatif qu'en France, la charge annuelle correspondant aux seuls intérêts de remboursement de la dette s'élève à près de 50 milliards d'euros. Les Etats sont aujourd'hui face à un choix politique entre austérité et nouveau modèle de croissance, dérégulation ou intervention publique.

Or, on le sait, les questions économiques et financières, sujet « sérieux » par excellence, ont toujours pris le pas sur les questions environnementales, parent pauvre des négociations internationales. La crise économique focalise les attentions mais aussi les moyens : l'illusion d'une dissociation de ces deux questions prévaut encore aujourd'hui largement.

Davantage encore que le risque que les questions environnementales soient reléguées au second plan, une lecture unilatérale de cette crise serait une profonde erreur. Le monde est en effet aujourd'hui en proie non pas à une crise mais à des crises, qui signent simultanément la faillite d'un modèle de production et de consommation sur lequel nos sociétés ont toutes fondé leur développement, qui n'a rien de durable. Crises de l'énergie, du développement et de l'environnement, mais aussi crise de la sécurité alimentaire, changements climatiques, crise économique mondiale et pauvreté. Ces crises sont en réalité liées les unes aux autres et nécessitent une démarche axée sur le développement durable. Elles sont étroitement interconnectées.

Tout est lié. A commencer par l'évolution de notre démographie à l'échelle de la planète, qui, combinée à l'évolution de nos modes de production et de consommation, est inquiétante.

Un récent rapport de l'académie britannique des sciences estime que le 21 ème siècle est de ce point de vue une période critique : la population mondiale est actuellement de 7 milliards et devrait atteindre en 2050 8 à 11 milliards. Selon ce rapport : « le monde est face aujourd'hui à un choix très clair : nous pouvons choisir de rééquilibrer l'utilisation des ressources selon un schéma de consommation plus égalitaire, recadrer nos valeurs économiques pour refléter vraiment ce que notre consommation signifie pour notre planète, et aider les individus dans le monde entier à faire des choix de production informés et libres, ou bien nous pouvons choisir de ne rien faire et nous laisser entraîner dans un tourbillon de maux économiques, sociopolitiques et environnementaux, conduisant à un avenir plus inéquitable et inhospitalier » .

Parallèlement, la concentration de dioxyde de carbone dans l'atmosphère ne cesse d'augmenter de plus en plus rapidement : elle s'est accrue de 9 % depuis 1992 et atteint aujourd'hui près de 390 parties par million. Le réchauffement climatique lui aussi s'accélère : la température a augmenté de 0,4°C depuis 1992. Et on connaît les différents scénarios catastrophiques d'une augmentation de 2 ou 3°C d'ici 2050.

Toutes ces évolutions, ajoutées à la finitude de nos ressources naturelles et de nos matières premières, laissent entrevoir un lien durable entre les effets de ces différentes crises et la recomposition géopolitique qui sera le moteur des négociations internationales. Les lignes se croisent aujourd'hui : il est urgent d'agir.

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