4. Engager une concertation entre partenaires sociaux afin de favoriser la mobilité des chercheurs français vers le Sud
Dès lors que l'on reconnaît la présence durable au Sud des opérateurs de recherche pour le développement comme essentielle à leur mission, il convient de trouver les moyens de favoriser la mobilité des chercheurs français vers le Sud.
Aujourd'hui, les agents de l'IRD ou du Cirad qui sont dans les pays du Sud relèvent soit du régime de l'expatriation, défini par un décret de 1967 127 ( * ) , soit de celui des missions de longue durée (limitées à quelques mois). Dans le contexte budgétaire actuel, de nombreuses voix s'élèvent pour dénoncer le coût de l'expatriation pour les finances publiques 128 ( * ) , mais aussi son manque de flexibilité, ce qui peut entraîner un décalage avec les besoins effectifs du pays hôte. Les missions de longue durée, plus courtes que les expatriations et inadaptées pour des projets de recherche nécessitant plusieurs années, ne peuvent s'y substituer, d'autant qu'elles soulèvent des difficultés pour la vie privée des agents, lesquels ne peuvent installer leur famille avec eux pour quelques mois dans le pays partenaire.
Le rapport des inspecteurs sur l'IRD indique que, sur les 2 176 agents que compte l'IRD, près de 40 % d'entre eux sont expatriés « pour des durées de deux à quatre ans afin de mener leurs travaux de recherche et contribuer au renforcement des compétences des pays d'accueil ». Le même rapport précise plus loin que « les durées d'expatriation varient en moyenne entre quatre et cinq ans, mais peuvent aller jusqu'à neuf ans. »
Les antennes de l'IRD hors de France reposent donc sur un nombre important de chercheurs expatriés, souvent pour une durée assez longue. Votre mission ne méconnaît pas l'atout que représente la présence sur le terrain dans la durée, spécialement dans le domaine de la recherche où les projets nécessitent du temps ; c'est précisément pour cela qu'elle se soucie de la faciliter et d'en assurer la soutenabilité financière.
Les inspecteurs de l'IRD suggèrent de limiter effectivement la durée des expatriations à quatre ans, de réduire le nombre d'expatriés, ou de faire évoluer leurs modalités de rémunération.
Votre mission suggère d'aller au-delà de ce raisonnement strictement quantitatif et d'élargir le débat : elle propose d'engager une concertation entre les partenaires sociaux autour de la création d'un nouveau statut de chercheur au Sud, entre les missions de longue durée et l'expatriation classique . Ce statut pourrait être proposé aux chercheurs, en fonction des besoins et des projets de partenariat. Il faciliterait les allers-retours de chercheurs entre la France et le Sud et leur donnerait l'occasion de se confronter régulièrement avec la communauté scientifique ; il contribuerait aussi, en favorisant la mobilité, à une plus grande diversité des chercheurs français au Sud, et notamment à une présence accrue au Sud de jeunes chercheurs et de chercheuses.
Si les organismes de recherche pour le développement peuvent s'appuyer sur une stratégie clarifiée, développer leurs synergies avec l'AFD, trouver un financement auprès de l'ANR et pérenniser leur présence au Sud, leur mission sera confortée.
Il convient, en conséquence, d'assurer la cohérence des politiques publiques, celles menées par les acteurs du développement comme celles qui interfèrent à la marge avec la recherche pour le développement.
* 127 Décret n° 67-290 du 28 mars 1967 fixant les modalités de calcul des émoluments des personnels de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à caractère administratif en service à l'étranger, modifié plusieurs fois depuis.
* 128 Selon le rapport d'inspection, l'indemnité d'expatriation représente 26,6 millions d'euros en 2012 pour l'IRD.