II. LA DYNAMIQUE DES DÉPENSES DE PERSONNEL

La baisse significative des effectifs au sein de l'administration préfectorale visait notamment à parvenir à une meilleure maîtrise de la masse salariale dans un contexte de lutte contre le déficit du budget général de l'État. Il pouvait même en être attendu une réduction des dépenses de personnel. Or, ce poste budgétaire a continué de croître mettant ainsi en évidence une rigidité à la baisse .

A. LA CROISSANCE QUASI CONTINUE DE CE POSTE BUDGÉTAIRE

Les dépenses de personnel constituent la majeure partie des dépenses du programme « Administration territoriale » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ». En 2014, elles représentent 1,532 milliard d'euros en crédits de paiement (CP) sur un budget total de 1,726 milliard d'euros, soit 88,8 % .

Les dépenses de personnel (titre 2)
du programme « Administration territoriale »

Source : commission des finances d'après les projets annuels de performances de la mission « Administration générale et territoriale de l'État »

Alors que les effectifs du programme commencent à baisser aux tournants des années 2008-2009, la dépense en personnels continue de croître jusqu'en 2009 pour atteindre 1,517 milliard d'euros .

Ce n'est qu'à partir de 2010 que les effets des suppressions d'emploi dictées par la RGPP se font sentir . Entre 2009 et 2010, les crédits du titre 2 diminuent de 5,3 % et s'établissent à 1,437 milliard d'euros.

S'ensuit une relative stabilité de 2010 à 2012, alors même que les réductions d'emplois se poursuivent .

En 2013, ce poste budgétaire repart à la hausse (+ 4,5 %) en passant à 1,513 milliard d'euros, soit quasiment le niveau de la dépense enregistré quatre ans plus tôt en 2009.

Pour 2014, une faible augmentation de 1,2 % est prévue.

Au final, les suppressions d'emplois au sein de l'administration préfectorale ont freiné la progression des dépenses de personnel, mais ne l'ont pas interrompue.

B. LES FACTEURS DE RIGIDITÉ À LA BAISSE

1. Les mesures indemnitaires

Entre la baisse des effectifs et la dynamique des dépenses de personnel du programme « Administration territoriale », le paradoxe n'est qu'apparent . Pour le comprendre, il convient de passer en revue les composantes de la dépense en titre 2 que sont notamment le glissement vieillesse technicité (GVT) 19 ( * ) , les différentes mesures ayant un impact salarial et la contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », puis de les comparer à l'impact budgétaire des suppressions d'emploi.

Le tableau ci-dessous permet ainsi de mettre en lumière l'un des éléments de la mécanique de neutralisation des économies réalisées par le biais de la réduction de l'emploi .

Les principaux facteurs d'évolution de la masse salariale hors CAS « Pensions »

(en millions d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

Impact du schéma d'emplois

- 20,8

- 22,8

- 18,2

0,3

- 13,4

Mesures catégorielles

17,3

12,6

10

10,3

8

Mesures générales

6,6

4,5

3,9

7,8

11,3

GVT solde

3,8

- 2,2

- 5,6

7,5

1,6

Rebasage de dépenses au profil atypique*

12,2

Autres variations des dépenses de personnel

- 11,5

6,6

6,9

8,8

5,7

Total

- 4,6

- 1,3

-3

34,7

25,4

* La ligne « Rebasage de dépenses au profil atypique » correspond :

- au rachat des jours comptes épargne temps (CET) pour 2,7 millions d'euros ;

- à des mesures d'accompagnement des restructurations pour 3 millions d'euros ;

- à des mesures locales destinées aux collectivités d'outre-mer (COM) et à Mayotte pour 5 millions d'euros ;

- à la prise en compte du jour de carence pour 1,5 million d'euros.

La ligne « Autres variations des dépenses de personnel » comprend la prise en charge de divers mouvements de personnels entre programmes budgétaires. Ainsi, par exemple en 2014, elle retrace la rémunération de 103 fonctionnaires en provenance du programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » pour 5,7 millions d'euros.

Source : commission des finances d'après les projets annuels de performances de la mission « Administration générale et territoriale de l'État »

L'impact du schéma d'emplois correspond aux économies dégagées des suppressions d'emplois dès lors que moins d'agents sont à payer. Cet impact a varié entre 22,8 millions d'euros et 18,2 millions d'euros sur la période allant de 2010 à 2012.

Dans le même temps cependant, diverses mesures (générales ou catégorielles) sont intervenues. Elles ont contribué à effacer tout ou partie de l'impact du schéma d'emplois.

Par exemple en 2010, 17,3 millions d'euros ont été versés au titre de mesures catégorielles et 6,6 millions d'euros au titre de mesures générales (c'est-à-dire résultant de l'augmentation de la valeur du point de la fonction publique).

Les mesures catégorielles en 2010

(en euros)

Catégorie ou intitulé de la mesure

Coût en année pleine

Effets extension année pleine mesures 2009

Mesures statutaires

5 235 143

Plan de requalification des personnels administratifs

1 061 410

Amélioration des carrières de catégorie C

1 099 703

Revalorisation indiciaire pour l'ensemble des personnes de catégorie B

3 074 030

Mesures indemnitaires

12 047 589

Indemnité de performance et d'objectif

2 186 901

Revalorisation des régimes indemnitaires pour garantir l'attractivité du ministère

6 228 318

Dispositifs visant à favoriser la mobilité professionnelle

3 632 370

Total

17 282 732

Source : projet annuel de performances pour 2010 de la mission « Administration générale et territoriale de l'État »

Au total, les mesures catégorielles et générales se sont donc élevées en 2010 à 23,9 millions d'euros , soit un montant supérieur cette année-là aux économies dégagées de la réduction des emplois.

Souvent mis en avant pour expliquer l'effacement des économies réalisées via la réduction de l'emploi, le GVT n'intervient en réalité que de manière marginale . En 2010 par exemple, il ne s'élevait qu'à 3,8 millions d'euros. En 2011 et 2012, il devient même négatif du fait du départ en retraite de fonctionnaires auxquels était attaché un GVT positif significatif.

Tout se passe donc comme si la moindre dépense en titre 2 du fait du départ de fonctionnaires non remplacés était neutralisée (en totalité ou en partie) par des mesures indemnitaires en faveur des agents restant en place .

2. La contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions »

Les mesures indemnitaires représentent un premier facteur de rigidité à la baisse des dépenses de titre 2 du programme « Administration territoriale », mais elles ne sont toutefois pas le facteur le plus important. La contribution au CAS « Pensions » joue un rôle plus prépondérant .

L'évolution de la contribution au CAS « Pensions »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après les projets annuels de performances de la mission « Administration générale et territoriale de l'État »

En 2008, la contribution s'établissait à 335,2 millions d'euros, soit 24,1 % des crédits de personnel. Elle a connu une augmentation régulière et forte depuis cette date pour atteindre 479,9 millions d'euros en 2014, soit une hausse de 43,2 % par rapport à 2008 . Pour prolonger l'exemple précédent choisi sur l'exercice 2010, cette année-là la contribution au CAS « Pensions » a progressé à elle seule de 16,5 millions d'euros (à rapporter aux 20,8 millions d'euros d'économie résultant de l'impact du schéma d'emplois).

C'est donc une dépense obligatoire (la contribution au CAS « Pensions ») qui explique principalement la difficulté de parvenir à une réduction de l'enveloppe consacrée au titre 2 de l'administration préfectorale, y compris dans un contexte de baisse des effectifs .


* 19 Le GVT permet de tenir compte de l'incidence positive (ou négative) sur la masse salariale des avancements, de l'acquisition d'une technicité accrue, de l'arrivée de nouveaux fonctionnaires ou de départs.

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