CHAPITRE I - QUAND LES ÉTATS AJOURNENT, LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AGISSENT

De nombreux États ont mis en place d'ambitieuses politiques nationales de lutte contre le changement climatique - on pense récemment, pour la France, à la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique - mais la négociation internationale progresse difficilement et avec des résultats aléatoires. La France, pays hôte de la COP21, a un rôle important à jouer pour remobiliser à cette occasion la communauté internationale sur des objectifs significatifs et concrets. Le terrain est plutôt favorable : les esprits semblent avoir évolué depuis les négociations précédentes, une chance d'avancer se trouve aujourd'hui à notre portée.

Nous avons, en France, la responsabilité collective de favoriser cette avancée. Le Sénat a décidé de mobiliser l'ensemble de ses instances dans cette perspective. La délégation aux collectivités territoriales s'est ainsi attachée à mettre en valeur le rôle moteur des collectivités territoriales dans la lutte contre le changement climatique. De fait, nos collectivités territoriales ont su lancer de façon exemplaire, depuis les années 1990 au moins, des actions de toutes natures favorables au climat. Grâce à ses collectivités, la France pourra se présenter lors de la Conférence de Paris comme un pays dynamique et efficace.

Le présent rapport d'information vise à illustrer et à faire connaître ce puissant facteur de crédibilité de notre pays dans sa responsabilité de pays hôte de la conférence. Il vise aussi à saluer une action locale sans laquelle les engagements qui seront pris par les États resteraient très largement ineffectifs.

I. QUAND LES ÉTATS AJOURNENT...

Beaucoup d'États - on vient de citer la France mais on pense aussi à l'Allemagne et à bien d'autres pays - mettent en oeuvre au plan national des politiques actives de réaction au changement climatique. Elles prennent souvent la forme de tentatives d'endiguer ou de prévenir les impacts négatifs de l'activité économique, et même d'en tirer parti.

Cette démarche est légitime et nécessaire : alors que certains effets du réchauffement sont déjà sensibles sur la faune et la flore, il faut identifier et diffuser des variétés et des espèces adaptées aux nouvelles conditions ; alors que se répètent des accidents climatiques aux conséquences désastreuses, il est indispensable de mettre localement en place des mesures de prévention efficaces ; alors que le marché de l'emploi souffre de l'évolution des conditions de la production industrielle, il est intéressant de créer localement des « emplois verts » non délocalisables.

Pour autant, les politiques économiques, et donc les positions des États dans la négociation internationale, restent globalement conçues en fonction de l'objectif de soutenir ou de relancer la croissance de la production et de la consommation, indépendamment de leurs effets sur le climat.

Dans la négociation interétatique, c'est sous cet angle que l'on a tendance à poser les questions, en particulier celle de l'évolution des modèles énergétiques qui structurent encore très largement nos modes de production et de consommation. Les intérêts nationaux, identifiés à ces modèles qui ont fait dans leur domaine la preuve de leur efficacité, prévalent sur un bien commun environnemental plus difficile à appréhender.

Ceci explique les résultats assez anodins de la 15 e Conférence des parties (COP15) de la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, réunie à Copenhague en décembre 2009 : un accord de principe, certes, sur l'objectif de ne pas dépasser une augmentation moyenne de 2° C en 2100 par rapport à 1850, mais pas de contraintes juridiques, pas de dates butoirs, pas d'objectifs quantitatifs en ce qui concerne la réduction des émissions de gaz à effet de serre. C'est ainsi que les États tergiversent.

On a, il est vrai, enregistré depuis lors une évolution des positions étatiques. Les accords de Durban, en 2011, ont permis de relancer l'ambition d'aboutir à un résultat efficace en 2015 à Paris ; la COP20 de Lima a insisté en 2014 sur la nécessité d'efforts supplémentaires pour parvenir aux objectifs de maintien du réchauffement climatique, sur fond de consensus désormais plus ou moins général concernant la pertinence des données scientifiques relatives au réchauffement. Les choses progressent aussi dans les relations bilatérales, comme en témoigne l'accord de novembre 2014 entre les États-Unis et la Chine pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.

C'est pourquoi on peut estimer que le terrain est aujourd'hui favorable à une réussite de la COP21.

Or, si le dérèglement climatique est global, les solutions sont avant tout locales.

Aussi, et au-delà du bénéfice diplomatique attendu de la mise en valeur de l'action des collectivités territoriales, le succès des engagements que les États pourront souscrire en décembre prochain dépendra très largement de la capacité des collectivités à les mettre en oeuvre, avec les moyens que résume l'ensemble du présent rapport d'information : sans la mobilisation des acteurs privilégiés de la transition énergétique que sont les collectivités territoriales, l'accord de Paris risque de demeurer lettre morte.

En d'autres termes, quand les États cesseront de tergiverser, ce sera toujours aux collectivités, comme aux autres acteurs majeurs que sont les citoyens et les entreprises, de réaliser sur le terrain les objectifs fixés.

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