B. ...IMMÉDIATEMENT SUIVIE D'UNE BAISSE ?

Non sans contradiction, à la suite de l'augmentation significative de la fiscalité des entreprises dans le cadre du collectif de l'été 2012 et des lois financières pour 2013, il a été procédé à la création du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), dont la finalité était de réduire les charges supportées par ces mêmes entreprises par la loi de finances rectificative du 29 décembre 2012 43 ( * ) . Ce dispositif, qui ne produisait néanmoins des effets qu'à compter de 2014, a été complété par le Pacte de responsabilité et de solidarité , annoncé en janvier 2014, dont les premières mesures sont entrées en vigueur en 2015. Malgré cela, le Gouvernement a procédé à une nouvelle hausse de la fiscalité des entreprises en 2014 , contribuant à rendre peu intelligible la stratégie fiscale poursuivie.

1. Le CICE et le Pacte de responsabilité et de solidarité

La politique de baisse des charges reposant sur les entreprises a essentiellement reposé sur le déploiement du CICE et du Pacte de responsabilité . Il convient de relever qu'en dépit de la volonté affichée de procéder précocement à une réduction de la fiscalité des entreprises, le CICE n'a bénéficié à ces dernières qu'à compter de 2014 ; en effet, ce crédit d'impôt a nécessairement un « effet retard », dès lors qu'il ne peut être déduit du montant d'impôt sur les sociétés dû qu'à compter de l'année suivant celle de constitution la créance, le remboursement du solde éventuel n'intervenant qu'à l'issue de quatre ans 44 ( * ) . Un tel effet était voulu par le Gouvernement, dès lors qu'il permettait d'afficher une diminution des charges afférentes à l'année 2013, encore que le bénéfice du dispositif et ses incidences budgétaires ne fussent perceptibles qu'à partir de 2014.

En tout état de cause, selon les annonces du Gouvernement, le CICE et le Pacte de responsabilité devaient permettre une baisse des prélèvements sur les entreprises de près de 40 milliards d'euros à l'horizon 2017 , à laquelle sont venus s'ajouter les effets des mesures en faveur de l'investissement ainsi que des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises (PME). Le pacte précité comportait, initialement, des allègements de cotisations sociales, une suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), la suppression de la contribution exceptionnelle d'impôt sur les sociétés et une baisse du taux de l'impôt sur les sociétés.

Pour autant, il faut souligner qu'en juin dernier, le Gouvernement a renoncé à supprimer la C3S et à procéder à une réduction du taux légal de l'impôt sur les sociétés en 2017 - celle-ci ne devant bénéficier, in fine , qu'aux PME -, aboutissant à minorer, pour cette année, le montant du Pacte de responsabilité et de solidarité de 5 milliards d'euros (voir infra ).

Il n'en demeure pas moins que, selon les estimations gouvernementales, les créances de CICE additionnées aux mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité représenteraient une réduction cumulée des prélèvements sur les entreprises de 32 milliards en 2016 (voir tableau ci-après).

Tableau n° 15 : Mesures en faveur des entreprises révisées en 2016

(en milliards d'euros)

2014

2015

2016

2017

CICE (créance fiscale)

- 11,0

- 17,0

- 18,0

- 19,0

Pacte de responsabilité et de solidarité

-

- 6,5

- 14,0

- 15,5

dont allègement des cotisations sociales

-

- 5,5

- 9,0

- 10,0

dont suppression progressive de la C3S

-

- 1,0

- 2,0

- 2,0

dont fin de la contribution exceptionnelle

-

-

- 3,0

- 3,0

dont baisse du taux d'IS

-

-

-

- 0,5

Total

- 11,0

- 23,5

- 32,0

- 34,5

Note de lecture : les chiffres sont arrondis. De ce fait, la somme apparente des arrondis peut différer de l'arrondi de la somme.

Source : rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances pour 2017

2. De nouvelles hausses d'impôts en 2014

Ainsi que cela a été indiqué précédemment, en dépit de la mise en place du CICE et de l'annonce du Pacte de responsabilité et de solidarité, le Gouvernement a procédé à de nouvelles augmentations des impositions acquittées par les entreprises en 2014 . En particulier, en même temps que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 comprenait les dispositifs permettant les premiers allègements de cotisations patronales prévues par le Pacte de responsabilité et de solidarité en 2015, la loi de finances, elle, procédait à une majoration de la contribution exceptionnelle d'impôt sur les sociétés , pour un effet ponctuel de 1,8 milliard d'euros en 2014, ou encore à la création d'une taxe sur les hautes rémunérations versées par les entreprises (0,3 milliard d'euros en 2014). Au total, des mesures nouvelles concernant les entreprises d'un montant de 2,7 milliards d'euros sont venues contrebalancer les premiers effets du CICE.

En outre, au cours de l'année 2014, la contribution exceptionnelle d'impôt sur les sociétés a été prolongée d'un an par la loi de finances rectificative du 8 août 2014, représentant un surcroît de recettes de 2,5 milliards d'euros en 2015 ; de même, en raison des critiques formulées par la Commission européenne concernant le projet de budget français pour 2015 dans le cadre du Two Pack , la loi de finances rectificative du 29 décembre 2014 a, notamment, prévu la non-déductibilité de certaines taxes comme la taxe de risque systémique (0,4 milliard d'euros en 2015) et une majoration de la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) (0,2 milliard d'euros).

3. Une réduction cumulée des prélèvements sur les entreprises de 16 milliards d'euros entre 2012 et 2016

Malgré ces dernières hausses d'impositions, les prélèvements sur les entreprises ont, de manière cumulée, reculé de 16 milliards d'euros entre 2012 et 2016 ; cette évolution découle, pour 12,5 milliards d'euros environ, des mesures adoptées par l'actuelle majorité gouvernementale, celles votées avant mai 2012 et maintenues après les élections ayant, elles aussi, contribué à la baisse du niveau des prélèvements entre 2013 et 2016.

Ceci signifie que , sur l'ensemble du quinquennat, les baisses de prélèvements décidées par la majorité gouvernementale en exercice sont restées inférieures dans leur montant aux allègements des cotisations sociales employeurs prévues par la précédente majorité dans le cadre de la loi de finances rectificative du 14 mars 2012, qui s'élevaient à 13,2 milliards d'euros et auraient dû s'appliquer dès 2013 .


* 43 Loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012.

* 44 Voir rapport d'information (n° 789, 2015-2016) de Marie-France Beaufils sur le profil des bénéficiaires du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) fait au nom de la commission des finances du Sénat, 13 juillet 2016.

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