B. DES STRUCTURES AFFECTÉES PAR LE REDÉCOUPAGE RÉGIONAL

Si le statut des FRAC a été consolidé légalement, leur organisation est parfois confrontée aux incertitudes nées du redécoupage régional.

1. Un statut consolidé sur le plan législatif...

L'article 57 de la loi LCAP est venu instituer, à l'article L.116-1 du code du patrimoine, un label « Fonds régional d'art contemporain » et encadrer, aux articles L.115-1 et L.116-2 du même code, les possibilités de cession des oeuvres. De la sorte, une consécration légale a été accordée aux FRAC. Ce faisant, les missions de ces structures, à commencer par la présentation des oeuvres au public dans et hors les murs et les actions de médiation et d'éducation artistique et culturelle, ont été rappelées.

Lors de l'examen par le Sénat du texte précité, les rapporteurs pour la commission de la Culture, de l'Éducation et de la Communication, Mme Françoise Férat et M. Jean-Pierre Leleux, ont ainsi estimé que « cet article conforte [...] le statut de ces structures irremplaçables grâce à la mise en place du "Label FRAC" et leurs collections sont sécurisées grâce à un renforcement du dispositif juridique. » 40 ( * )

Par ailleurs, dans une réponse à une question écrite publiée en avril 2016, le ministère de la Culture et de la Communication a précisé que « le projet de loi relatif à la "liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine" rendant possible l'attribution de plusieurs appellations par région, le ministère envisage la coexistence de plusieurs FRAC dans une même grande région. » 41 ( * )

2. ...mais une organisation parfois confrontée à des incertitudes

En dépit de cette reconnaissance législative, le redécoupage régional interroge l'organisation de certains FRAC.

Sur les 23 FRAC existants, 16 sont directement concernés par la nouvelle carte des régions. En outre, 2 grandes régions - le Grand Est et la Nouvelle-Aquitaine -, comportent 3 fonds sur leurs territoires.

Cette nouvelle configuration a fait l'objet d'un débat en mars 2016 au Centre Georges Pompidou, qui a réuni des représentants des FRAC, de Régions de France et du ministère de la Culture et de la Communication.

Des réflexions plus poussées ont été poursuivies localement ; elles n'ont pour l'heure pas encore été achevées 42 ( * ) .

Carte des fonds régionaux d'art contemporain 43 ( * )

Au cours de la table ronde, M. Bernard de Montferrand, président de l'association Platform, a indiqué la nécessité pour les FRAC de « réinventer la régionalisation culturelle ». Selon lui, dans les régions fusionnées, « il ne faut pas recentraliser, mais développer plutôt des coopérations entre les FRAC » , ajoutant qu'il est possible de « gagner en efficacité en coopérant davantage ».

C'est, pour lui, à cette condition que pourront être maintenues dans ces grandes régions la vitalité de la création artistique, la diversité des institutions culturelles et la proximité géographique avec les publics. À titre de comparaison, le dynamisme de l'art contemporain en Allemagne repose sur un réseau très dense de 200 associations d'art, les Kunstvereine.

Dans cette perspective, des pistes de coopération ont été évoquées :

- la mutualisation des bibliothèques numériques des FRAC, aux fins de leur transmission au ministère de l'Éducation nationale ;

- la circulation , sur l'ensemble du territoire d'une région fusionnée, des expositions réalisées par l'un des fonds situés en son sein ;

- l' organisation d'expositions communes aux FRAC, notamment à l'étranger ;

- et une collaboration plus affirmée des fonds avec certaines collectivités encore peu associées, comme les petites communes.

Certaines de ces formes de coopération ont d'ailleurs pu trouver un aboutissement concret.

Quelques exemples de coopération entre fonds régionaux d'art contemporain

Les fonds régionaux d'art contemporain (FRAC) ont construit différentes formes de coopération, notamment entre ceux situés dans une même région fusionnée.

Ces coopérations passent tout d'abord par des expositions communes (exposition des Frac Bourgogne et Franche-Comté à Dôle de novembre 2016 à février 2017, expositions des Frac Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon à Agde de juin à août 2016 et à Centrès de juin à octobre 2016, expositions des Frac Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine à Châlons-en-Champagne, Strasbourg et Vandoeuvre-lès-Nancy entre février et juillet 2017).

Un « partenariat » entre les Frac Auvergne et Rhône-Alpes - Institut d'art contemporain de Villeurbanne (IAC) a d'ailleurs été engagé, afin de « croiser leurs compétences et la richesse de leurs collections sur l'ensemble du territoire de la nouvelle grande région », les collections du premier ayant été exposées dans les locaux du second de décembre 2016 à février 2017, et l'exercice inverse devant être réalisé.

Des collaborations sont également nouées autour de projets d'itinérance des collections (ainsi le cas des Frac Ile-de-France, Normandie Caen et Normandie Rouen en 2017).

Une autre forme de partenariat sont les résidences d'artistes croisées (un programme d'accueil d'artistes issus de régions voisines ayant été initié par les Frac Alsace, Champagne-Ardenne, Lorraine, Bourgogne et Franche-Comté en 2004).

De manière plus marginale, des collaborations existent enfin à travers des commandes d'oeuvres conjointes (une commande ayant été passée par les Frac Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes en 2016)

Au-delà de ces coopérations ponctuelles, les FRAC sont structurés autour d'un réseau national depuis 2005.

Dans ce cadre, ils sont amenés à participer à des expositions collectives en France (par exemple à Toulouse en 2013) ou à l'étranger (à Singapour, en Corée du Sud et en Thaïlande en 2017).

Ils ont également développé des outils partagés, avec la constitution d'un portail des collections et d'un espace de travail en ligne, ou encore la publication de vidéos et de documents de présentation.

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Dans le contexte très évolutif qui existe actuellement, les institutions culturelles, comme les FRAC, dont les partenaires institutionnels sont directement affectés par les redécoupages territoriaux, doivent être l'objet d'un suivi au long cours, partagé entre les collectivités et l'État, afin d'éviter que ces redécoupages ne portent préjudice à l'accès aux pratiques culturelles dans les territoires concernés.


* 40 Rapport d'information sur le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (Tome I) n° 340 (2015-2016), de M. Jean-Pierre Leleux et Mme Françoise Férat, fait au nom de la commission de la Culture, de l'Éducation et de la Communication, déposé le 27 janvier 2016, p. 37.

* 41 Réponse à la question n° 87346 de M. Hervé Féron, Député de Meurthe-et-Moselle, publiée le 19 avril 2016.

* 42 Parmi les réflexions en cours, il a été annoncé récemment de « nouveaux modes de travail et de collaboration » pour les FRAC situés dans la région Grand Est, dont les directions formeront un « collectif », les projets seront « singuliers mais complémentaires et interdépendants » et un comité de suivi garantira la concertation permanente (publication du conseil régional du Grand Est du 11 avril 2017 : http://www.grandest.fr/frac-grand-se-repositionnent/).

* 43 Source : Ministère de la Culture et de la Communication, « Les principaux réseaux et programmes financés par le ministère de la Culture (création artistique) », septembre 2013, p. 6.

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