C. LE SAIP : UN PROJET DESTINÉ À REMPLACER PLEINEMENT LE RNA

1. Un projet visant à permettre le déclenchement de l'ensemble des moyens d'alerte pertinents sur une plate-forme unique

Le SAIP vise à permettre aux acteurs de la gestion de crise de lancer l'alerte en une unique opération sur différents vecteurs (sirènes, téléphonie mobile, et autres moyens : Radio France, France Télévisions, panneaux à message variable des gestionnaires d'infrastructures et des collectivités territoriales...) dans une zone géographique donnée.

Une expérimentation, menée le 18 juin 2009 dans trois départements de la zone de défense Sud-Est (Ain, Allier et Rhône), mobilisant 300 personnes (sapeurs-pompiers, techniciens, réservistes du RNA, employés communaux) avait permis de confirmer la faisabilité de la solution technique envisagée en remplacement du RNA : un coeur de dispositif constitué par un logiciel, pilotant un réseau de sirènes, et diffusant des messages d'alerte ou d'information sur un ensemble d'autres moyens d'alerte (les panneaux à message variable, notamment).

Afin de limiter le coût du volet « sirènes » , qui devait demeurer, conformément au rapport « Hirel », le moyen d'alerte « numéro un » 9 ( * ) , il a été décidé de s'appuyer en partie sur les sirènes existantes. Le SAIP repose ainsi, en plus de nouvelles sirènes sur le raccordement des sirènes du RNA, des sirènes des collectivités locales, et des sirènes des industriels soumis à obligation de disposer d'un plan particulier d'intervention dont la localisation géographique est jugée pertinente par les préfectures et la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises. Un travail de recensement des bassins à risque effectué en 2010 a abouti à l'identification de 1 743 bassins d'alerte, à couvrir par 5 338 sirènes à raccorder ou installer.

Le second volet du SAIP devait initialement reposer sur une solution technique permettant la diffusion, en toutes circonstances, de SMS d'alerte et d'information , en liaison avec les opérateurs de téléphonie mobile. Il a été remplacé, en 2015, et dans la perspective de l'« Euro 2016 », par le développement d'une application smartphone en libre téléchargement sur l' Apple Store et sur Google Play .

Enfin, il devait reposer sur des partenariats nationaux et locaux permettant aux différents médias de relayer les messages transmis par le coeur du SAIP 10 ( * ) .

Le partenariat du ministère de l'intérieur avec les médias
en matière d'alerte

Le ministère de l'intérieur a signé, en 2006, une convention de partenariat avec France Télévisions renouvelée en date du 3 septembre 2009, et actuellement en cours de renégociation. Celle-ci avait été déclinée par des conventions conclues avec France 2, France 3 et Réseau France Outre-mer (RFO).

La convention nationale de 2004 conclue avec Radio France a quant à elle été renouvelée le 16 juillet 2015. Elle est accompagnée de messages préformatés comprenant les consignes de sauvegarde pour treize types de risques différents. Les modules sonores prescrivant les comportements adaptés ont été enregistrés et mis à disposition de l'ensemble des stations émettrices de Radio France.

La pratique a révélé que les réseaux France Bleu et France Info étaient les mieux armés pour répondre à la diffusion de l'alerte par leur granularité optimale et la participation des équipes aux exercices. L'efficacité et la souplesse du dispositif ont permis la mise en oeuvre d'une ligne spécialisée de transmission des messages via le centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC). Il a donc été décidé de décliner localement la convention dans chaque département. Cela permet d'identifier les acteurs de diffusion de l'alerte dans les territoires et d'entretenir une mise à jour permanente des contacts entre préfectures et stations de diffusions.

Source : DGSCGC

Au total, le SAIP devait être constitué :

- d'un réseau de sirènes, interconnectées et déclenchables à distance, via l'infrastructure nationale partageable de télécommunication (réseau Antares 11 ( * ) ) afin de garantir un niveau de sécurisation satisfaisant ;

- d'une fonctionnalité permettant l'envoi de messages sous forme de SMS sur les téléphones mobiles des populations ;

- d'une fonctionnalité permettant aux acteurs disposant de moyens d'alerte et d'information de relayer l'alerte (automates d'appels des collectivités locales, panneaux à message variable de gestionnaires d'infrastructures de transport et de collectivités locales, médias partenaires...).

L'ensemble de ces vecteurs d'alerte et d'information devait pouvoir être activé depuis un logiciel pilote.

Architecture technique initiale du projet SAIP

Note de lecture : Les parties noircies correspondent aux volets dont la mise en oeuvre n'a pas commencé.

Source : commission des finances du Sénat

La direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises indique que le SAIP devrait s'appuyer sur la norme « CAP », qui « permettra de garantir la multidiffusion, sécurisée et sourcée, des messages d'alerte, en dehors de l'administration (site Internet spécialisé sur l'alerte et l'information des populations, médias, médias sociaux, opérateurs d'applications informatiques proposant des fonctionnalités de géolocalisation sur leurs produits...) sous des modalités, techniques et juridiques, qui restent à préciser ». À l'heure actuelle, toutefois, seul le volet « sirènes » est en cours de raccordement au logiciel central.

2. Un système d'alerte national déclenché par l'État, en complément des dispositifs communaux

Le projet SAIP s'inscrit dans un cadre juridique et organisationnel largement inchangé, dans lequel l'alerte et l'information des populations demeure principalement une responsabilité de l'État 12 ( * ) .

Cette responsabilité est toutefois partagée avec les maires, qui exercent des missions de sécurité civile dans le cadre de leurs pouvoirs de police administrative générale 13 ( * ) . La jurisprudence administrative a précisé qu'il incombait au maire, au titre de ces pouvoirs de police, de préparer les situations de crise susceptibles de se présenter sur le territoire de sa commune, et notamment de mettre en oeuvre les mesures d'alerte et d'information des populations (Conseil d'État, 22 juin 1987, Ville de Rennes ).

Les préfets de département interviennent en cas d'accident, sinistre ou catastrophe dont les conséquences peuvent dépasser les limites ou les capacités d'une commune 14 ( * ) , en cas de carence du maire (pouvoir de substitution du préfet), ou en cas d'événement de vaste ampleur qui justifie à ses yeux qu'il prenne la direction des opérations de secours.

Concrètement, les préfectures pourront, en tant qu'autorités chargées du déclenchement, permettre aux SDIS d'accéder à la plate-forme d'activation du SAIP en leurs noms 15 ( * ) par le biais d'une convention. La première a été signée en juin 2017 dans l'Hérault.

L'application smartphone SAIP ne peut, quant à elle, être déclenchée que depuis le centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (COGIC). Des procédures sont mises en place pour permettre aux préfectures de saisir ce dernier rapidement et donner l'ordre du déclenchement.

Pour les communes, le SAIP ne constitue pas, en tout état de cause, le vecteur exclusif de l'alerte , chaque commune étant libre de retenir d'autres moyens d'alerte et d'information des populations en complément de ce dispositif. Elles peuvent notamment disposer de sirènes communales (dont certaines ont également été raccordées au SAIP), de panneaux à messages variables, ou de moyens plus artisanaux (mégaphones, etc.) puisqu'elles ne sont soumises qu'à une obligation de résultat et non de moyen.

Architecture fonctionnelle du SAIP

Source : ministère de l'intérieur


* 9 Rapport sur le réseau national d'alerte, p. 31.

* 10 Conformément à l'article R. 732-28 du code de la sécurité intérieure, les services de radiodiffusion sonore et de télévision diffusent à titre gracieux les consignes de sécurité, à la demande des autorités.

* 11 Rapport d'information de M. Jean Pierre Vogel, fait au nom de la commission des finances, n° 365 (2015-2016) - 3 février 2016.

* 12 Selon l'article L. 112-2 du code de la sécurité intérieure, « l'État est garant de la cohérence de la sécurité civile au plan national [...] Il veille à la mise en oeuvre des mesures d'information et d'alerte des populations ».

* 13 Article L. 2212-2, 5° du code général des collectivités territoriales.

* 14 Articles L. 747-2 et L. 742-3 du code général des collectivités territoriales.

* 15 Arrêté du 28 janvier 2014 relatif à l'utilisation du système d'alerte et d'information des populations par les services départementaux d'incendie et de secours.

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