C. DES OUTILS DE SOUTIEN FINANCIER À RENFORCER AUTOUR D'UN FEBECS AUJOURD'HUI INSUFFISANT

1. Le FEBECS, outil financier toujours insuffisant
a) Le FEBECS, un fonds au service de la mobilité

Devant le constat des freins importants à la mobilité dans les outre-mer, un fonds a été créé en 2000 pour soutenir les déplacements éducatifs, culturels et sportifs des jeunes ultramarins : fonds d'échange éducatif, culturel et sportif (FEBECS).

Le fonds d'échange éducatif, culturel et sportif (FEBECS)

Le fonds d'échange éducatif, culturel et sportif (FEBECS) a été créé par les articles 40 et 63 de la loi du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer (LODEOM) et est régi par la circulaire du 19 septembre 2014 qui fera l'objet d'une mise à jour pour 2019 ; il est géré par le ministère des outre-mer .

Le FEBECS est destiné à soutenir le déplacement des jeunes de la Guadeloupe, de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, de la Martinique, de la Guyane, de La Réunion et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Il a été étendu en 2003 à Wallis-et-Futuna par convention. Mayotte est également intégrée depuis 2013.

Ce fonds bénéficie à des associations - fédérations sportives, associations culturelles et socio-éducatives - et finance les déplacements de jeunes de moins de 30 ans - scolaires, sportifs et artistes - des territoires précités hors de leur territoire de résidence - hexagone ou environnement régional des territoires - dans le cadre d'une compétition , de manifestations ou d'échanges éducatifs, culturels et sportifs.

Le FEBECS est exclusivement dévolu au financement des déplacements des jeunes dans un plafond de 80 % du coût moyen du billet d'avion. La répartition des crédits est entièrement déconcentrée auprès des préfets qui réunissent sous leur égide un comité d'attribution des subventions.

Le FEBECS était, jusqu'en 2017, financé par la seule direction générale des outre-mer, le ministère des sports ayant décidé en 2018 de contribuer à l'alimentation du fonds. Dans cette enveloppe, s'inscrit également depuis 2014 le protocole sport, spécifique à la Nouvelle-Calédonie.

Source : Réponses du ministère des outre-mer au questionnaire des rapporteures

Dans le cadre du FEBECS, les actions prioritairement soutenues pour le sport sont :

- la participation aux compétitions nationales des sportifs ayant atteint les minimas requis pour y prétendre ;

- la participation aux compétitions inscrites aux calendriers des fédérations nationales ;

- la participation aux compétitions organisées dans les pays situés dans l'environnement régional ;

- les déplacements des sportifs inscrits dans les structures des parcours d'excellence sportive (PES) outre-mer pour des stages nationaux - organisés par les directeurs techniques nationaux - ou des compétitions, notamment celles qui contribuent à leur sélection.

b) Un outil aux moyens financiers continuellement réduits, notamment pour le sport

L'enveloppe créée par la loi de 2000 n'a cependant pas vu une croissance ni même une stabilité de ses crédits. Ainsi, les crédits dédiés au FEBECS ont connu une diminution importante entre 2003 et 2013 : de 2,3 millions d'euros en 2003, ils sont passés à 1,6 million d'euros en 2007, puis à 1 million d'euros en 2011 et 500 000 euros en 2013.

En 2013, le comité interministériel pour la jeunesse réuni par le Premier ministre le 21 février 2013 a acté un doublement des moyens dédiés à la mobilité des jeunes ultramarins, le budget du FEBECS passant de 500 000 à 1 million d'euros . Cet apport financier n'a cependant été rendu possible que par un redéploiement des contributions ultramarines du fonds d'expérimentation jeunesse (FEJ) à hauteur de 500 000 euros du ministère chargé de la jeunesse, abondement pérennisé depuis 2014. Ce sont ainsi plus de 50 % des crédits du FEBECS qui provenaient en 2017 du FEJ.

Parallèlement, la part dédiée au sport a régulièrement été réduite en valeur absolue et a également pris au fil du temps de moins en moins de place au sein de ce fonds. On observe ainsi que, alors que le sport représentait plus de 55 % des crédits du FEBECS en 2010, il n'en représentait que 35 % en 2017. On peut cependant noter que la variation peut être forte d'une année à l'autre, ce qui s'explique par la présence de compétitions d'ampleur certaines années ; 2016 semble à ce titre être un exemple.

Il convient ici de se demander si les politiques jeunesse - sports - culture doivent toujours être confondues dans un seul et même fonds et si chacune des enveloppes ne doit pas être mieux identifiée pour pouvoir, in fine , être mieux pilotée.

Répartition (en AE) du FEBECS, depuis 2015 par finalité
Ensemble des territoires

Montants en euros

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Sport

810 365

649 425

329 910

249 978

689 709

410 109

438 516

324 208

55,20 %

51,85 %

56,33 %

59,04 %

45,78 %

43,87 %

65,51 %

35,64 %

Jeunesse
Éducation

401 077

317 534

140 865

76 160

547 703

379 118

149 796

426 620

27,32 %

25,35 %

24,05 %

17,99 %

36,36 %

40,56 %

22,38 %

46,89 %

Culture

256 648

285 659

114 908

97 283

269 040

145 535

81 115

158 922

17,48 %

22,80 %

19,62 %

22,98 %

17,86 %

15,57 %

12,12 %

17,47 %

Total

1 468 092

1 252 618

585 683

423 422

1 506 452

934 763

669 428

909 751

Source : Réponses du ministère des sports au questionnaire des rapporteures

Au total, le FEBECS s'élevait en 2017 à 909 751 euros , dont 35,64 %, soit 324 208 euros ont été alloués au sport . La ministre des sports Laura Flessel a indiqué 78 ( * ) que son ministère contribuerait à ce fonds à hauteur de 330 000 euros en 2018, soit l'équivalent de la part dédiée au sport sur l'exercice 2017.

Lors de son audition 79 ( * ) devant la délégation en juin 2018, la ministre des outre-mer, Annick Girardin, a reconnu l'insuffisance de cette enveloppe FEBECS et annoncé l'augmentation sensible de ses crédits sur les futurs exercices, avec pour objectif d'atteindre 2 millions d'euros en 2018. Reconnaissant que « l'enveloppe du FEBECS n'a cessé de se réduire », la ministre disait avoir « préconisé un doublement de son montant pour 2018 ». Cependant, concédait-elle « tous les contributeurs ne sont pas au rendez-vous et, actuellement, l'objectif des 2 millions d'euros paraît compromis car nous sommes à 1,4 million ». Pour la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française, la ministre indiquait enfin avoir alloué une enveloppe de 50 000 euros.

La ministre des outre-mer mettait également en évidence la nécessité de réviser la circulaire relative au FEBECS, pour intégrer de nouveaux indicateurs au-delà du simple critère d'évolution démographique, tels que l'éloignement.

c) Dans les territoires du Pacifique, un équivalent FEBECS sur crédits budgétaires

Les ministères des outre-mer et des sports se sont engagés le 22 décembre 2003 à participer financièrement à la mobilité des sportifs de Nouvelle-Calédonie . Le « protocole sport », établi entre le territoire, le ministère des sports et celui des outre-mer pour pallier la non-éligibilité des jeunes au FEBECS, permet de financer le déplacement d'environ 200 sportifs, principalement pour les championnats de France.

Pour la Polynésie française , une dotation de crédits spécifiques poursuit le même objectif.

L'engagement des deux ministères a été initialement de 150 000 euros par an, les deux-tiers étant apportés par le ministère des outre-mer. Si la contribution du ministère des sports a été constante depuis 2003 , celle du ministère des outre-mer après avoir été stable de 2003 à 2006 a augmenté de 80 000 en 2007 à 100 000 euros en 2011, avant de connaître une forte baisse dès 2012 à près de 39 000 euros, cette participation atteignant 30 000 euros en 2017.

Le ministère des outre-mer indique s'être engagé à augmenter cette enveloppe de 20 000 euros à partir de l'exercice 2018. Il indique en outre que 50 000 euros ont été notifiés 80 ( * ) pour 2019 à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie.

Le soutien à la mobilité des sportifs ultramarins par le biais de l'enveloppe FEBECS est de plus en plus porté par le ministère des sports lui-même et non plus par le ministère des outre-mer. L'engagement financier sur ce point doit être fort et pérenne au sein de chacun des ministères concernés : il est nécessaire de mieux calibrer l'enveloppe FEBECS à l'enjeu des coûts substantiels auxquels les sportifs ultramarins sont confrontés durant leurs déplacements.

Recommandation n° 22 :  Face aux surcoûts caractérisant les déplacements des sportifs ultramarins pour les besoins de leur entraînement et des compétitions, calibrer une enveloppe « FEBECS et équivalents » dédiée au sport, à la hauteur des enjeux.

Dans le cadre de l'examen du budget 2019, le projet annuel de performances de la mission outre-mer indique pour le FEBECS et les dispositifs propres au Pacifique une enveloppe de 2,04 millions d'euros pour l'exercice à venir.

2. Des initiatives territoriales

Les collectivités ultramarines organisent également des aides à la mobilité pour les jeunes sportifs de leurs territoires.

À titre d'exemple, Wallis-et-Futuna inscrit dans son code du sport les aides aux sportifs, avec une prime de résultat pour les sportifs de haut niveau en pôles dans l'hexagone et une aide aux jeunes ayant des résultats aux Jeux du Pacifique .

Certaines aides à la mobilité sont également mises en place dans le cadre plus large de politiques de transports, comme c'est le cas à La Réunion où la région intervient de manière importante au titre de la « continuité territoriale ».

Enfin, si de nombreuses collectivités, notamment les communes, interviennent en soutien aux déplacements des clubs et sportifs de leurs territoires, les budgets contraints dont elles disposent du fait de leur situation financière est encore ici un frein important.

3. Une contribution fragile du secteur privé qu'il est nécessaire de renforcer au niveau territorial

Le tissu économique local participe au soutien financier à la mobilité des jeunes sportifs ultramarins. Le ministère des outre-mer soulignait 81 ( * ) la participation d'entreprises ultramarines au financement du FEBECS, via l'alimentation du fonds d'expérimentation pour la jeunesse (FEJ) par des entreprises en zone franche d'activité 82 ( * ) . Les mécanismes de déductibilité fiscale sont également une incitation aux efforts financiers du secteur privé.

Le rôle du pacte performance , dispositif d'accompagnement des sportifs de haut niveau par des entreprises, mis en place par le ministère des sports, a également été souligné. Ce dernier permet aujourd'hui de :

- proposer des contrats mieux adaptés aux emplois du temps très contraints des sportifs et aux besoins des entreprises ;

- valoriser l'action des entreprises qui, en accompagnant les sportifs de haut niveau , s'engagent pour le rayonnement de la France.

Le ministère des outre-mer souhaite ainsi participer activement à la promotion de ce dispositif auprès des entreprises ultramarines et entend organiser des réunions de présentation en collaboration avec le ministère des sports, considérant qu'« encore trop peu d'entreprises en outre-mer sont informées de ce dispositif d'accompagnement ».

Laura Flessel, ministre des sports, appelait à élargir cette coopération financière du secteur privé à d'autres acteurs, comme « le Groupe Intersport du MEDEF en Martinique ». C itant La Réunion comme exemple, la ministre expliquait vouloir « inciter le tissu économique à suivre étroitement le mouvement sportif et la haute performance , dans l'optique de créer une stratégie cohérente à l'horizon 2024 ».

Le secteur économique local doit être mieux mobilisé. Il convient de valoriser un soutien économique sur des projets de mobilité des sportifs et de conserver un lien territorial pour les entreprises participantes. Ce soutien doit pouvoir se faire sur des sportifs ou projets sportifs ciblés , mais aussi au travers d'un fonds pour la mobilité de l'ensemble des sportifs du territoire afin de ne pas soutenir que les sportifs déjà « repérés » mais bien, aussi, d'aider à faire émerger de nouveaux talents.

Recommandation n° 23 :  Promouvoir le sponsoring territorial auprès des chambres consulaires pour abonder un fonds de soutien à la mobilité et explorer les possibilités de financement participatif via le « parrainage des futurs champions ».


* 78 Audition de Madame Laura Flessel, ministre des sports, du mercredi 24 janvier 2018.

* 79 Audition de Madame Annick Girardin, ministre des outre-mer, du mardi 5 juin 2018.

* 80 Réponse du ministère des outre-mer au questionnaire des rapporteures.

* 81 Réponses au questionnaire des rapporteures.

* 82 Loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, dite « LODEOM »

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